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En 1936, comment Staline assassine les militants révolutionnaires

25 mai 2014, 11:35

"Mais était-il nécessaire que la révolution bolchevique fit périr tous les bolcheviks ?" se demande, dans son livre, le général Walter G. Krivitsky qui était, dans les années 1930, le chef militaire du contre-espionnage soviétique en Europe occidentale. Bien qu’il dise ne pas avoir de réponse à cette question, il en fournit une très claire dans les pages 35 et 36 de son livre J’étais un agent de Staline (Editions Champ libre, Paris, 1979). La poursuite des procès de Moscou et la liquidation des derniers bolcheviks étaient bien le prix à payer pour la marche à la guerre : "Le but secret de Staline restait le même (l’entente avec l’Allemagne). En mars 1938, Staline monta le grand procès de dix jours, du groupe Rykov-Boukharine-Kretinski, qui avaient été les associés les plus intimes de Lénine et les pères de la révolution soviétique. Ces leaders bolcheviques - détestés de Hitler - furent exécutés le 3 mars sur l’ordre de Staline. Le 12 mars Hitler annexait l’Autriche. (...) C’est le 12 janvier 1939 qu’eut lieu devant tout le corps diplomatique de Berlin, la cordiale et démocratique conversation de Hitler avec le nouvel ambassadeur soviétique." Et c’est ainsi que l’on en est arrivé au pacte germano-soviétique Hitler-Staline du 23 août 1939.

Toutefois, la liquidation des derniers bolcheviks, si elle répondait en premier aux besoins de la politique de Staline, était également une réponse aux besoins de celle de toute la bourgeoisie mondiale. C’est pourquoi le sort de Trotsky lui-même était désormais scellé. Pour la classe capitaliste du monde entier, Trotsky, le symbole de la révolution d’Octobre, devait disparaître !

Robert Coulondre, ambassadeur de France auprès du IIIe Reich fournit un témoignage éloquent dans une description qu’il fait de sa dernière rencontre avec Hitler, juste avant le déclenchement de la seconde guerre mondiale. Hitler s’y était en effet vanté du pacte qu’il venait de conclure avec Staline. Il traçait un panorama grandiose de son futur triomphe militaire. En réponse, l’ambassadeur français faisant appel à sa raison, lui parla du tumulte social et des risques de révolutions qui pourraient faire suite à une guerre longue et meurtrière et qui pourraient détruire tous les gouvernements belligérants. "Vous pensez à vous-mêmes comme si vous étiez le vainqueur..., dit l’ambassadeur, mais avez-vous songé à une autre possibilité ? Que le vainqueur pourrait être Trotsky". Hitler fit un bond, comme s’il avait été frappé au creux de l’estomac, et hurla que cette possia que cette possibilité, la menace d’une victoire de Trotsky, était une raison de plus, pour la France et la Grande-Bretagne, de ne pas déclencher la guerre contre le IIIe Reich. Isaac Deutscher a tout à fait raison de souligner la remarque faite par Trotsky, lorsqu’il a pris connaissance de ce dialogue, selon laquelle les représentants de la bourgeoisie internationale "sont hantés par le spectre de la révolution, et ils lui donnent un nom d’homme."

Trotsky devait mourir et, lui-même, se rendait compte que ses jours étaient comptés. Son élimination avait une plus grande signification que celle des autres vieux bolcheviks et des membres de la gauche communiste russe. L’assassinat des vieux bolcheviks avait servi à renforcer le pouvoir absolu de Staline. Celui de Trotsky manifestait en plus la nécessité pour la bourgeoisie mondiale, y compris pour la bourgeoisie russe, d’aller à la guerre mondiale librement. Cette voie fut nettement dégagée après la disparition de la dernière grande figure de la révolution d’Octobre, du plus célèbre des internationalistes. C’est toute l’efficacité de l’appareil de la GPU que Staline a utilisée pour le liquider. Il y a eu d’ailleurs plusieurs tentatives ; elles ne pouvaient que se multiplier et effectivement elles se rapprochaient dans le temps. Rien ne semblait pouvoir arrêter la machine stalinienne. Quelques temps avant son assassinat, Trotsky dut subir une attaque de nuit de la part d’un commando le 24 mai 1939. Les sbires de Staline avaient réussi à poster des mitrailleuses en face des fenêtres de sa chambre. Ils avaient pu tirer près de 200 à 300 coups de feu et jeter des bombes incendiaires. Fort heureusement les fenêtres étaient hautes au-dessus du sol et Trotsky, sa femme Natalia ainsi que son petit-fils Siéva ont miraculeusement pu en réchapper en se jetant sous le lit. Mais la tentative suivante allait être la bonne. C’est ce que réalisa Ramon Mercader à coups de piolet.

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