Accueil > ... > Forum 24183

Chronologie de la révolte des Indiens d’Amérique

16 mars 2014, 14:17

Après un passage par l’ONU de Genève (Suisse), les 11 et 12 mars, Sônia Guajajara viendra porter haut à Paris les couleurs du mouvement indigène brésilien. Elle rencontrera des personnalités politiques, des entreprises qu’elle tentera de dissuader et prendra, le 14 mars dès 11h00, la tête d’une manifestation à la Défense devant les immeubles de GDF-Suez, Alstom et EDF, à l’occasion de la Journée d’action internationale pour les rivières et contre les barrages.

Née en 1974, Sônia Guajajara est, par sa fonction de coordinatrice exécutive de l’A.P.I.B. (Articulaçao dos Povos Indigenas do Brasil / Articulation des Peuples Indigènes du Brésil), la porte-parole effective d’un mouvement indigène brésilien qui ne cesse de monter en puissance. Il faut dire que depuis l’entrée en fonction de la présidente Dilma Rousseff, en janvier 2011, jamais les différents peuples indigènes de cet immense pays, qui accueille sur son sol la majeure partie de la forêt amazonienne, n’ont ressenti avec autant de force la nécessité de s’unifier. Sous sa mandature, qui s’achèvera - sauf réélection - à la fin de l’année, auront été développés, proposés ou mis en place une batterie de dispositions législatives (ordonnances, décrets, révision du Code forestier...) et de projets industriels ou énergétiques, portant atteinte à leurs droits élémentaires, acquis de haute lutte et gravés dans la Constitution de 1988 et dans les textes de Conventions internationales ratifiées par le Brésil (Convention 169 de l’OIT, Cour interaméricaine des droits de l’Homme). Sous sa mandature, la déforestation de l’Amazonie est repartie de plus belle.

En conséquence, Sônia Guajajara a orchestré ces dernières années plusieurs temps forts de la résistance indigène : le Campement Terre Libre du Sommet de Rio+20 ; les grandes manifestations de l’édition 2013 d’Avril Indigène, dont le coup d’éclat reste l’irruption spectaculaire de 300 indigènes dans la salle plénière du Congrès, en plein débat et en direct à la télévision ; la mobilisation indigène d’octobre 2013... Ces actions ont permis d’ouvrir des débats à l’échelle nationale, de bloquer des projets de loi portés par le puissant groupe parlementaire des ruralistes - évidemment liberticides envers les indigènes - et d’imposer la création de commissions devant améliorer le processus de concertation. Ne disposant d’aucun soutien de poids à l’échelle internationale, le mouvement indigène brésilien, guidé par Sônia Guajajara, est parvenu à se faire entendre par la présidente Dilma Rousseff, qui a accepté une première réunion avec des leaders indigènes en juillet 2013, pendant une période de grande tension nationale. Si la présidente a accepté de signer un document présenté par la coalition indigène faisant état de leurs revendications, les projets qui portent atteinte aux droits et à l’environnement des peuples indigènes n’ont pas été interrompus pour autant.

Il y a bien sûr le barrage de Belo Monte, dont le chantier a commencé en juin 2011, alors que les conditions environnementales fixées par l’IBAMA (Institut brésilien de l’environnement) n’étaient pas réunies et que n’avaient pas eu lieu les consultations libres et éclairées des peuples indigènes affectés par le projet. Paralysé à de nombreuses occasions par des indigènes ou des riverains, le site est désormais inaccessible et protégé par l’armée. Une nouvelle loi permet de jeter les militants qui l’approchent de trop près en prison et les journalistes qui refusent le circuit traditionnel proposé par Norte Energia (consortium en charge des travaux) sont expulsés. Plusieurs procès ont confirmé l’invalidité du projet et exigé l’arrêt immédiat du chantier, mais les jugements ont été à chaque fois balayés par des mesures (ex : la Suspensão de Segurança, reliquat de la dictature militaire) ou tribunaux d’exception. Le chantier approche de sa troisième année, et malgré une contestation nationale et internationale qui ne faiblit pas, Belo Monte provoque déjà un désastre écologique, social et humanitaire dans une région à la biodiversité exceptionnelle.

Si le Plan d’Accélération de Croissance (PAC), soutenu par le gouvernement, est suivi à la lettre, ces véritables chevaux de Troie d’une déforestation à grande échelle que sont les barrages hydroélectriques vont se multiplier dans les années à venir. Avec l’aide de la technologie et des compétences françaises et européennes ! Des entreprises telles que GDF-SUEZ et Alstom sont en effet associées à certains projets parmi les plus décriés (Jirau, Santo Antonio, Belo Monte). Quant à EDF, 84% de parts de l’Etat, la compagnie à l’intention de participer aux enchères d’un prochain complexe hydroélectrique qui soulève déjà l’indignation des peuples installés sur les berges du fleuve Tapajos. Alors que le peuple Munduruku mène depuis quelques mois des actions spectaculaires pour défendre leur territoire, qui serait fortement impacté, le gouvernement y a envoyé l’armée afin d’effectuer les études préliminaires.

Les peuples indigènes du Brésil vivent ces tirs croisés dans leur direction comme une guerre déclarée, qu’ils ont l’espoir de pouvoir remporter de manière pacifique s’ils parviennent à gagner l’opinion à leur cause.

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.