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La lutte internationale contre le gaz de schiste

7 janvier 2015, 20:08

Des Texans se rebellent contre le gaz de schiste

Les habitants de Denton n’ont pas grand-chose à voir avec les démocrates « écolos » de New York et de Californie : ouverts aux affaires, ils votent aux deux tiers républicain et savent tout ce que le Texas doit à l’industrie du pétrole et du gaz. Ils ont pourtant pris une décision historique ce mois-ci, en interdisant l’exploitation de nouveaux puits de gaz de schiste.

C’est la première fois que les groupes énergétiques affrontent une telle rébellion au Texas. La décision a été prise par référendum, à une large majorité (59 %). Le vote est finalement assez conforme à l’état d’esprit qui règne aujourd’hui aux Etats-Unis : les Américains soutiennent le gaz de schiste, mais ils ne sont que 40 % à souhaiter un accroissement de la production, selon un sondage publié ce mois-ci par l’Institut Pew.

Située à une demi-heure au nord de Dallas, Denton n’est pas n’importe quelle ville : c’est ici, en 1998, qu’a été expérimentée pour la première fois la fracturation hydraulique – ce procédé permettant d’extraire du gaz en injectant eau, sable et produits chimiques dans la roche. « Nous sommes évidemment favorables au pétrole et au gaz. C’est l’histoire même de notre ville. Mais nous sommes opposés aux conditions d’exploitation actuelles », explique Adam Briggle, un professeur à l’université du North Texas. Les entreprises énergétiques, au premier rang desquelles Eagle Ridge, ont développé un réseau de puits parmi les plus denses du pays. La ville en compte près de 400, soit l’équivalent de 1 pour 50 habitants. Ceux-ci ne sont d’ailleurs pas remis en cause par le référendum.
« La faute de la ville ! »

« Avant, les exploitants creusaient des puits au milieu de nulle part, à la périphérie de la ville. Maintenant, ils font ça à quelques dizaines de mètres des maisons. Cela ne peut plus durer », explique le conseiller municipal Kevin Roden. « C’est la faute de la ville ! » rétorque Ed Ireland, le représentant des industries pétrolières et gazières de la région de Dallas. « Elle n’aurait pas dû autoriser les habitants à construire des maisons aussi proches des champs de gaz. Nous avions les permis d’exploiter bien avant que les particuliers investissent les lieux », défend-il. La ville a effectivement pêché par insouciance : au début des années 2000, elle a accordé des permis extrêmement généreux aux industries gazières, sans imaginer que la population puisse doubler en vingt ans. Les lotissements ont poussé comme des champignons depuis.

Quels que soient les responsables, les habitants du quartier de Vintage Boulevard font grise mine. Ils se sont acheté de coquettes maisons dans un lotissement baptisé les « Prairies du ruisseau Hillary ». Ils se retrouvent aujourd’hui pris en sandwich entre deux champs de gaz, l’un au nord et l’autre au sud de leur petit jardin. « Quel que soit le sens du vent, ils reçoivent les fumées et le bruit », résume Adam Briggle.

Le pire a eu lieu entre septembre 2013 et février 2014, quand ont été creusés les puits, puis que la roche a été fracturée. A cette époque, les lumières éclairaient le chantier 24 heures sur 24, et une douzaine de camions circulaient jour et nuit pour alimenter le puits en eau, en sable et en produits chimiques. « Le bruit surpasse celui d’une autoroute », explique Adam Briggle. Le calme est revenu depuis. Ou presque : un compresseur ronronne en permanence pour favoriser l’extraction du gaz. Les habitants se plaignent de petits maux, sans qu’il soit possible de prouver s’ils sont liés ou pas aux puits jouxtant leur maison. Ils disent souffrir de maux de tête et de saignements de nez.

L’interdiction de nouveaux puits va-t-elle porter préjudice à la ville ? Pour Kevin Roden, la réponse est non. « La population ne profite pratiquement pas de cette industrie », pense-t-il. Les ingénieurs et ouvriers qui exploitent les puits viennent de Dallas ou Fort Worth et ne restent que quelques semaines, le temps de creuser puis de fracturer les puits. Passée cette période, les puits fonctionnent de manière quasi autonome, et peuvent extraire du gaz pendant une trentaine d’années. L’industrie des mines n’emploie ainsi que 2,5 % de la population locale. Elle verse environ 560.000 dollars de taxes annuelles à la ville. Une somme qui n’est pas anodine, mais qu’elle continuera de payer, quoi qu’il en soit, au titre des puits déjà exploités.

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