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Le sionisme, cet antisémitisme

6 août 2013, 13:26, par Tony Cliff

Les sionistes de la base sont trom­pés par leurs dirigeants qui leur font croire qu’ils ne sont pas de simples marionnettes maniées par l’impérialisme pour son profit et leur malheur. Ces faits ont de nombreux précédents dans l’histoire de la sanglante domi­nation de l’impérialisme sur l’Orient. L’exemple le plus caractéristique, en miniature mais éclatant, de la techni­que de l’impérialisme, est l’utilisation que la Grande-Bretagne fit des Assyriens. Étant donné que cet exemple est riche, il est nécessaire d’entrer dans les détails.

Les Assyriens sont une tribu sémite qui parle un dialecte aramaïque. Avant la première guerre mondiale ils étaient environ 40 000 et habitaient les monta­gnes Hakkari, en Turquie, au nord-est de la frontière actuelle de l’Irak. Dès l’éclatement de la première guerre mondiale, les montagnes Hakkari revê­tirent une grande importance straté­gique, étant à la frontière de la Rus­sie, de la Turquie et de la Perse. Des officiers russes vinrent inciter les Assyriens à combattre la Turquie en leur promettant un Etat indépendant. Cette promesse fut confirmée par un officier britannique, le Capitaine Cracey, de l’Intelligence Service, qui se rendit spécialement dans cette inten­tion dans les montagnes Hakkari et d’autre offres libéraless furent faites aux Assyriens par des émissaires anglais et russes.

Les Assyriens furent gagnés à l’idée d’une possibilité de renaissance de leur ancien empire. Leurs rêves s’amplifièrent de plus en plus jusqu’à ce qu’ils furent imbus de l’espoir d’établir un royaume indépendant s’étendant de leurs montagnes jusqu’à Kifrî, qui est au sud de la région de Kirkûk — région habitée prinipalement par un autre peuple, les Kurdes. Le 10 mai 1915, les Assyriens déclaraient la guerre à la Turquie.

A ce sujet la Société des Nations déclare :

Il n’y a aucun doute à ce que ce peuple ait engagé une révolte armée contre son gouvernement légal à l’instigation d’étrangers et sans aucune provocation de la part des autorités turques. Il est aussi établi que les conditions de vie dont jouissaient les Assyriens au sein de l’Empire Ottoman étaient bien meilleures que celles des autres chrétiens, étant donné qu’on avait concédé des formes larges d’autonomie patriarcale. »

(Rapport de la Société des Nations, page 3, d’après Toynbee, Le monde musulman depuis la Conférence de la Paix, 1927, pp. 483-484.)

Malek, un Assyrien qui écrivit un livre condamnant les Anglais, intitulé La trahison des Assyriens (1935), écrit :

Ils (les Assyriens) furent accueillis en Turquie durant les deux derniers millénaires et eurent la possibilité de préserver leur église et leur peuple en tant qu’entité nationale, jusqu’à ce qu’ils soient utilisés par les autorités britanniques comme une force militaire.

(page 61)

A partir de ce moment commence le chapitre de leurs pérégrinations et de leurs misères. Pendant des années, les Assyriens menèrent un combat inégal contre l’armée turque, furent rejetés de leur pays au cours de la lutte, mais continuèrent à combattre côte à côte avec l’armée anglaise. Lors de la conquête de l’Irak, les Britanniques recrutèrent des régiments parmi les Assyriens, étant donné qu’ils ne réussissaient pas à en faire autant parmi les Arabes. A la fin de la guerre il y eut des révoltes de tribus en Irak et la Grande-Bretagne eut besoin d’énormément d’argent et d’hommes pour les écraser. (Cela coûta aux contribuables britanniques environ 80 millions de livres pour écraser les révoltes de1919-20). Dans cette entreprise, les Britanniques utilisèrent au mieux les services des Assyriens.

Les Assyriens continuèrent à être un jouet dans les mains des Britanniques dans les combats qui suivirent avec les Turcs, les Kurdes (qui habitent la région de Mossoul si riche en pétrole), et les Arabes habitant l’Irak qui voulaient libérer leur pays de l’impérialisme. Comme le Dr W. A. Wigram, qui connait de première main la situation des Assyriens, le déclare :

Comme le Haut Commissaire du moment l’a admis, ce furent les forces assyriennes qui nous évitèrent d’être balayés pendant les révoltes arabes de 1920 (Sir A. Wilson, Mésopotamie, p. 291) et ce sont aussi elles qui repoussèrent l’invasion turque en Irak en 1922-23... Mais ce fait même entraîna pour eux la haine des Iraniens.
RCAS Vol. II (Janvier 1934, pp. 38-41).

Ainsi l’impérialisme britannique s’arrangea pour que les Assyriens fussent expulsés de Turquie, remplissent une tâche importante en exterminant cruellement les Kurdes et les Arabes en Irak, et qu’ainsi ils soient entourés de toutes parts d’une animosité aiguë. De cette manière ils deveinrent de plus en plus attachés et de plus en plues dépendants de l’impérialisme britannique. B. S. Safford dans The tragedy of the Assyrians put déclarer à juste titre que la question des Assyriens n’était pas une question religieuse, mais une question politique pure et simple.

Les Arabes et les Kurdes d’Irak crurent que la Grande-Bretagne avait l’intention d’installer une enclave armée dans le nord du pays. Des articles et des discours furent publiés au Parlement d’Irak disant que c’était la Grande-Bretagne qui avait incité les frictions en Irak. Les discours sur la défense des Assyriens avaient jeté l’Irak dans les pires complications en fonction de ses seuls intérêts et elle souhaitait alors créer un Etat Assyrien autonome dans le nord de l’Irak, c’est-à-dire qu’elle entendait créer en Irak un second problème sioniste.

En 1930, le mandat sur l’Irak prit fin. Cela donna à l’Irak une indépendance qui était évidemment purement formelle, le contrôle de la Grande-Bretagne sur les terrains pétrolifères, trois aérodromes, etc. restant intact. Cela rendit néanmoins la conscription des Assyriens pour les besoins anglais superflue puisqu’à présent la Grande-Bretagne s’appuyait principalement sur l’aviation et non sur une forte armée de terre. Mais les Assyriens avaient encore une utilité pour la Grande-Bretagne — être massacrés comme boucs émissaires.

Avec la déclaration d’abolition du mandant, les Assyriens se tournèrent vers la Grande-Bretagne en lui demandant avec insistance d’être démobilisés pour empêcher les Irakiens de craindre qu’ils soient utilisés pour attenter à l’intégrité territoriale et à l’indépendance de l’Irak. Mais Sir Francis Humphreys, le Haut Commissaire britannique, tenta de repousser cette demande par tous les moyens possibles, disant que la Société des nations avait son mot à dire là-dedans, et cætera. Il fit une déclaration menaçant les Assyriens de n’être plus jamais utilisés dans n’importe quelle branche de l’administration gouvernementale s’ils étaient démobilisés. Sir Francis réussit dans son opération. Lorsque des articles anti-britanniques commencèrent à apparaître dans la presse irakienne, l’ambassade britannique intervient, et quelques journaux furent interdits. Mais lorsque la propagande commença à développer l’idée que la principale tâche des Irakiens était de combattre les Assyriens et que la Grande-Bretagne était l’ennemie de l’Irak parce qu’elle défendait ces derniers, l’ambassade britannique resta alors silencieuse. Cela servit à encourager tous les éléments réactionnaires, le clergé et la réaction féodale, à hâter la préparation d’une croisade contre les Assyriens, victimes aveugles de l’impérialisme.

Le résultat de dix-sept années de politique anglaise produisit alors ses fruits. Il y eut des révoltes terribles contre les Assyriens sous le commandement des autorités irakiennes et avec la participation de l’armée. L’aviation britannique vola au-dessus de la région des massacres, prit des photographies, mais n’apporta aucune aide aux victimes.

Après ces massacres, la Grande-Bretagne se rappela à nouveau ses promesses au sujet de l’établissement d’un grand Etat Assyrien indépendant, et décida qu’il était temps de permettre aux Assyriens de s’établir dans une portion continue de territoire, bien que réduite. Les uns après les autres les plans surgirent pour l’installation des Assyriens (au Brésil, en Guyane, etc.), mais ils furent tous rejetés sauf un d’entre eux qui projetait de les installer en Syrie, dans la région de Lattaquié. On décidait un programme d’établissement pour 30 000 personnes, qui devait coûter 1 440 000 livres sterling. D’après l’accord, l’Angleterre devait payer 250 000 livres sur cette somme, l’Irak 250 000, la France 380 000 et la Société des Nations 80 000. Comme on ne trouva pas de source pour les 180 000 livres restantes, le projet tomba à l’eau.

Le 11 février 1936, l’archevêque de Canterbury interpella le gouvernement à la Chambre des Lords en lui demandant comment en définitive il avait l’intention de régler cette question qui, selon lui, restait un lourd fardeau sur la conscience des pays qui étaient parties contractantes dans l’accord et de l’Angleterre en particulier. Il proposa même de prendre part à la récupération de la somme manquante en en appelant au peuple britannique. Lord Stanhope répondit au nom du gouvernement : « Le gouvernement comptait sur d’autres contribution volontaires après avoir lui-même pris part pour 250 000 livres, et il a influencé l’Irak pour qu’il double sa première offre en la portant à 250 000 livres. Le gouvernement ne peut rien ajouter à cette contribution et il ne soutiendrait pas un appel de l’Archevêque. » Après tout, qu’est-ce que les Assyriens pouvaient attendre de ce pauvre impérialisme britannique, qui ramassait des millions chaque année dans les terrains de pétrole qui lui avaient été conservés par les Assyriens ?

Et le résultat final de tous ces vastes projets fut que neuf mille Assyriens réussirent à s’établir en Syrie sur la frontière Syrie-Irak, dans la région de la Djézireh !

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