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La crise mondiale analysée par Léon Trotsky

2 octobre 2009, 22:53, par Robert Paris

La crise de 1929 éclata, aux Etats-Unis, un an après que Sombart eut proclamé l’entière indifférence de sa "science" à l’égard du problème même des crises. Du sommet d’une prospérité sans précédent, l’économie des Etats-Unis a été précipitée dans l’abîme d’un marasme effrayant. Personne, du temps de Marx, n’aurait pu concevoir des convulsions d’une telle ampleur. Le revenu national des États-Unis, qui s’était élevé en 1920 pour la première fois à 69 milliards de dollars, tomba l’année suivante à 50 milliards de dollars, soit une baisse de 27 %. Par la suite, au cours des années de "prospérité" le revenu national reprit son ascension, et atteignit en 1929 son plus haut point, 81 milliards de dollars, pour tomber en 1932 à 40 milliards de dollars, c’est-à-dire moins de la moitié ! Pendant les neuf années 1930-1938, furent perdus environ 43 millions d’années de travail et 133 milliards de dollars de revenu national, en prenant pour norme le travail et le revenu national de 1929. Si tout cela n’est pas de l’anarchie, quelle peut bien être la signification de ce mot ?
E. – La théorie de la catastrophe

L’esprit et le cœur des intellectuels de la classe moyenne et des bureaucrates syndicaux furent presque complètement hypnotisés par les réalisations du capitalisme entre l’époque de la mort de Marx et l’explosion de la guerre mondiale. L’idée d’un progrès graduel continu semblait établie pour toujours, cependant que l’idée de révolution était considérée comme un pur vestige de la barbarie. Aux pronostics de Marx, on opposait les pronostics contraires d’une distribution mieux équilibrée du revenu national, de l’atténuation des contradictions de classes et d’une réforme graduelle de la société capitaliste. Jean Jaurès, le plus doué des sociaux-démocrates de l’époque classique, espérait remplir graduellement la démocratie politique d’un contenu social. C’est en cela que consiste l’essence du réformisme. Tels étaient les pronostics opposés à ceux de Marx. Qu’en reste-t-il ?

La vie du capitalisme de monopole de notre époque n’est qu’une succession de crises. Chaque crise est une catastrophe. La nécessité d’échapper à ces catastrophes partielles au moyen de barrières doua­nières, de l’inflation, de l’accroissement des dépenses gouvernementales et des dettes, etc..., prépare le terrain pour de nouvelles crises, plus pro­fondes et plus étendues. La lutte pour les marchés, pour les matières premières, pour les colonies, rend les catastrophes militaires inévitables. Celles-ci préparent inéluctablement des catastrophes révolutionnaires. Vraiment, il n’est pas facile d’admettre avec Sombart que le capitalisme devient, avec le temps, de plus en plus « calme, posé, raisonnable » ! Il serait plus juste de dire qu’il est en train de perdre ses derniers vestiges de raison. En tout cas, il n’y a pas de doute que la "théorie de l’effon­drement" a triomphé de la théorie du développement pacifique.

Léon Trotsky

dans "Le marxisme et notre époque"

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