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1922-1923 : quand Lénine et Trotsky étaient unis contre Staline et la bureaucratie russe, dictatoriale, nationaliste, corrompue et réactionnaire, commençant à usurper le pouvoir à la place du prolétariat épuisé, frappé par une guerre civile sanglante, battu dans toute l’Europe, isolé internationalement et démoralisé

3 mai 2011, 19:37, par R Paris

Trotsky écrit dans "Ma Vie" :

"Il est indispensable de se rendre compte d’un certain nombre de processus objectifs qui eurent lieu dans le pays, dans la classe ouvrière et dans le parti lui-même. Thème tout particulier et très vaste. Kroupskaïa disait un jour, en 1927, que si Lénine vivait encore, il serait probablement déjà dans une des prisons de Staline. Je pense qu’elle avait raison. Car il ne s’agit pas de Staline lui-même, mais des forces que Staline exprime sans les comprendre. Cependant, en 1922-1923, il était encore tout à fait possible de s’emparer de la principale position stratégique en menant une offensive ouverte contre la fraction qui se formait rapidement des fonctionnaires nationalo-socialistes, des usurpateurs de l’appareil, des captateurs de l’héritage d’Octobre, des épigones du bolchevisme. Le principal obstacle dans cette voie était, cependant, l’état de santé de Lénine. On s’attendait à le voir se relever comme après la première crise et participer au XIIe congrès comme il avait participé au XIe. Lui-même y comptait bien. Les médecins parlaient d’un ton encourageant, quoique de moins en moins ferme. L’idée du « bloc Lénine et Trotsky » contre les gens de l’appareil et les bureaucrates n’était, à ce moment-là, entièrement connue que de Lénine et de moi ; les autres membres du bureau politique la devinaient vaguement. Les lettres de Lénine sur la question nationale, de même que son testament, n’étaient connues de personne. Mon action pouvait être comprise ou, plus exactement, représentée, comme une lutte personnelle pour prendre la place de Lénine dans le parti et dans l’Etat. Je ne pouvais songer à cela sans frémir. J’estimais que cela pourrait causer dans nos rangs une démoralisation qu’il aurait fallu ensuite payer cher, même en cas de victoire. Dans tous les plans et les calculs, il y avait un élément décisif : l’incertitude ou j’étais à l’égard de Lénine à cause de son état de santé. Pourrait-il se prononcer ? En aurait-il le temps ? Le parti comprendra-t-il qu’il y avait lutte de Lénine et de Trotsky pour l’avenir de la révolution, et non pas lutte de Trotsky pour prendre la place de Lénine malade ? En raison de la situation particulière que Lénine occupait dans le parti, l’incertitude où l’on était sur son état devint de la perplexité sur la condition même de tout le parti. Le provisoire s’éternisait, et c’était tout à l’avantage des épigones, dans la mesure où Staline, en tant que secrétaire général, devenait naturellement le majordome de l’appareil pour toute la durée de l’« interrègne »."

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