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Lutte des classes aux Etats-Unis d’Amérique

22 juin 2017, 13:39

Le 3 août 1981, les 13 000 membres de l’organisation des contrôleurs aériens professionnels (PATCO) entreprenaient une grève contre l’agence fédérale de l’aviation (FAA) pour demander une réduction des heures de travail, le recrutement de nouveaux employés et des augmentations de salaire. Le même jour, le président Ronald Reagan passait à la télévision nationale, s’adressant à la nation depuis le Rose Garden de la Maison-Blanche, pour dénoncer les grévistes et lancer un ultimatum : où bien ils retournaient au travail dans les 48 heures, où alors ils allaient être sommairement licenciés et interdits de façon permanente de tout emploi fédéral.

Deux jours plus tard, sur la base d’une obscure loi de 1955 n’ayant jamais été appliquée et qui interdisait les grèves aux syndicats gouvernementaux, Reagan congédiait les 11 359 contrôleurs qui avaient défié l’ordre de retour au travail. C’est ainsi que commença la massive opération de cassage de syndicat du gouvernement qui se termina par la création d’une liste noire et le licenciement permanent des travailleurs, la saisie des finances de la PATCO et la révocation de l’accréditation syndicale du syndicat.

Le spectacle des dirigeants de la PATCO emmenés en prison avec les fers aux pieds, alors que les agents du FBI et les commissaires fédéraux convergeaient vers les lignes de piquetage a suivi. Quatre membres de la PATCO ont été emprisonnés par le gouvernement fédéral au printemps et à l’été 1983 pour avoir participé à la grève. Ron May, Gary Greene et Lee Grant étaient les dirigeants de la PATCO de la région de Dallas-Ft. Worth. Avec Dick Hoover à Houston, ils ont été ciblés par l’administration Reagan pour leur militantisme lors de la grève, accusés de délit majeur de grève contre le gouvernement, emprisonnés, frappés d’amende et privés de façon permanente de leurs droits civiques.

La vendetta du gouvernement contre la PATCO n’a jamais pris fin. Jusqu’à ce jour, l’interdiction de réembauche des grévistes de la PATCO, imposée par Reagan et le congrès alors contrôlé par les démocrates, reste essentiellement intacte. Le président Clinton a certes officiellement levé cette interdiction en 1993, mais ce geste n’était que pour la forme. Jusqu’à maintenant, seulement 846 contrôleurs de la PATCO des plus de 11 000 congédiés par Reagan ont été autorisés à retourner à leur profession.

Maintenant comme à l’époque, la froide persécution des travailleurs de la PATCO a démontré la réalité de la guerre des classes et le rôle de l’Etat capitaliste en tant que bras répressif de l’élite dirigeante dans la supposée Amérique démocratique. Après deux guerres mondiales, l’impérialisme américain n’a jamais démontré autant d’esprit de vengeance envers ses rivaux impérialistes qu’il ne l’a fait envers les grévistes de la PATCO et la classe ouvrière américaine dans son ensemble.

L’écrasement de la PATCO a marqué un point tournant dans les relations de classe tant aux Etats-Unis que mondialement. Cet assaut signalait la fin définitive des politiques du réformisme libéral et des compromis de classe relatifs qui ont prédominé dans la période de l’après-guerre et le déclenchement d’une offensive capitaliste brutale contre la classe ouvrière qui se poursuit toujours aujourd’hui.

Cet assaut a également précédé l’effondrement des syndicats américains et de toutes les vielles organisations et vieux partis ouvriers bureaucratisés mondialement dont la philosophie était basée sur le nationalisme et les compromis de classe. Les attaques de Reagan contre les grévistes de la PATCO — sans précédents dans l’histoire moderne des Etats-Unis — ont provoqué une opposition massive des travailleurs tant aux Etats-Unis qu’ailleurs dans le monde. Un mois après que Reagan eut congédié les grévistes de la PATCO, plus de 500 000 travailleurs ont convergé sur Washington, DC, lors d’une « journée de solidarité » — la plus grande manifestation jamais organisée aux Etats-Unis — pour exprimer leur outrage et leur opposition à l’administration Reagan.

Mais les centrales syndicales — l’AFL-CIO, les Travailleurs unis de l’automobile, les Teamsters, etc.— ont travaillé systématiquement pour isoler les grévistes de la PATCO et assurer leur défaite. La réponse de l’AFL-CIO à l’ultimatum de Reagan adressé aux grévistes de la PATCO a été d’ordonner aux pilotes, machinistes et aux agents de bord syndiqués de franchir les piquets de grève pour se rapporter au travail.

Pour l’élite dirigeante américaine en crise, la poursuite victorieuse de cette attaque contre la classe ouvrière était impensable sans la plus ferme assurance de soutien et de collaboration de la part des responsables syndicaux. Une collaboration que les bureaucrates syndicaux avaient déjà garantie.

Cette conspiration de la classe dirigeante et de la direction syndicale contre la classe ouvrière avait été préparée bien avant la grève de la PATCO. Déjà, lors de la crise de la ville de New York en 1975, le renflouement de Chrysler sous l’administration démocrate de Carter en 1979-1980 et la défaite de la grève des travailleurs des transports en commun de la ville de New York contre l’administration municipale démocrate en 1980, la bureaucratie syndicale avait accepté que la classe ouvrière paie pour la crise du capitalisme américain.

Les bureaucrates syndicaux ont soutenu les fermetures d’usine et les licenciements massifs dans l’industrie de l’auto et autres ; ils ont utilisé la menace du chômage pour imposer des compressions salariales et autres concessions malgré la résistance de la classe ouvrière. Parallèlement, ils ont tacitement accepté la destruction des programmes sociaux qui a débuté sous Carter pour ensuite s’intensifier sous Reagan.

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