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Une journée contre les violences envers les femmes et toute l’année d’exploitation par les classes dirigeantes de la division hommes/femmes !

26 novembre 2010, 14:56, par documents

Kollontaï :

La guerre de 14-18 fut jusque-là la guerre la plus sanglante dans l’histoire de l’humanité. Les plus grands États d’Europe et d’Amérique y participèrent. La société bourgeoise capitaliste fut ébranlée dans ses fondements, et la production capitaliste entièrement déséquilibrée. Des millions de travailleurs furent arrachés à leurs lieux de travail et jetés sur les champs de bataille. Toutefois, une limitation de la production ne devait intervenir d’aucune façon. Bien au contraire. Le caractère de la production se modifia considérablement. A la place des biens de consommation courante, l’industrie produisait alors des machines de guerre et de mort. Chaque pays avait besoin, pour remporter la victoire, d’une industrie d’armement en expansion, garantissant la fabrication d’explosifs, ) de canons, etc. Il ne pouvait y avoir d’issue favorable à la guerre que si l’on disposait entre le front et l’arrière-pays d’une liaison organique continue. Car le destin des armées ne se décidait pas seulement sur le champ de bataille. La course aux armements engagée entre les différents pays fut au moins aussi importante. L’élargissement de la production supposait un potentiel suffisamment important en forces de travail. Comme l’industrie de guerre fut une branche de production de la grande industrie capitaliste, elle employa aussi de la main-d’œuvre non qualifiée. C’est ainsi que, après la mobilisation générale, les femmes, les filles, les sœurs et les mères des soldats occupèrent les places restées vacantes dans les ateliers. Abandonnées par leurs « soutiens de famille », les femmes s’empressèrent d’assurer leur propre entretien. Les industriels accueillirent cette main-d’œuvre bon marché à bras ouverts, d’une part parce que les femmes remplaçaient parfaitement les hommes alors au fond des tranchées, d’autre part parce qu’elles augmentaient les profits. Nous enregistrons dans cette période entre la déclaration de la guerre jusqu’à la démobilisation un accroissement constant du travail féminin. Cela vaut également pour les pays neutres, pour lesquels la Première Guerre mondiale représentait une excellente affaire. C’est pourquoi ils incorporèrent naturellement toutes les forces de travail disponibles, hommes et femmes dans la production.

La situation de la femme dans la société se modifia alors prodigieusement. La société bourgeoise, qui avait tenu jusque là à ce que la femme occupât sa juste place au foyer, exalta dès lors le « patriotisme » des femmes prêtes à devenir « soldats derrière le front » et à exécuter un travail dans l’intérêt de l’économie et de l’État. Et des intellectuels, des politiciens et d’habiles journalistes firent chorus avec les membres de la classe dominante pour appeler la femme à « accomplir ses devoirs civiques » et lui recommander de ne pas trop s’attarder « à la cuisine » ni « auprès de ses enfants », qu’il valait mieux pour elle servir la patrie, ce qui signifiait en clair qu’il valait mieux qu’elle vende au rabais sa force de travail aux trusts d’armement. Le travail des femmes s’imposa dans toutes les branches de l’industrie. Il fut surtout le plus répandu dans l’industrie métallurgique, dans la fabrication d’explosifs, d’uniformes et de conserves qui produisaient directement pour le front. Mais d’autres branches furent également envahies par les femmes, même les secteurs qui leur étaient restés totalement interdits jusque-là. II suffit de nous rappeler comment, pendant la guerre, apparurent des contrôleurs de tramways et de trains, ainsi que des conducteurs de taxis, des portiers, des gardiens, des dockers et des porteurs féminins. De nombreuses femmes travaillaient dans les mines ou sur les chantiers de construction et exécutaient des travaux pénibles et nuisibles à l’organisme féminin. Le nombre des employées dans les services publics, telle la poste, se multiplia à l’infini. Les femmes remplissaient leurs tâches avec toute la conscience et le sérieux des néophytes, c’est-à-dire le mieux possible. Dans la période de 1914 à 1918, le travail des femmes augmenta dans les diverses branches entre 70 et 400 %. Dans l’industrie métallurgique allemande, ce pourcentage atteignit même 408 %. En France, le nombre des femmes doublèrent dans ces branches. En Russie, fréquemment, les femmes composaient la majorité des effectifs de nombreuses professions. Même dans les compagnies de chemins de fer russes, où les femmes n’étaient tolérées avant la guerre que comme femmes de ménage ou comme gardes-barrière, le nombre des femmes atteignit jusqu’à 35 % du personnel. En France également, des millions de femmes durent travailler dans la production. En Angleterre, le nombre des ouvrières augmenta d’un million et demi et en Allemagne de deux millions. Dans l’ensemble, le nombre des femmes travailleuses en Europe et en Amérique augmenta de près de dix millions.

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