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Que veut dire Haïti occupée par des forces armées étrangères ?

5 mai 2010, 14:38, par Ramiro

Article sur l’impérialisme américain en Haiti , article volontairement incomplet car ne dénonçant pas les autres impérialisme et ne voyant que partiellement la lutte de classe ce que pourtant les impérialistes et leurs sous traitants aux ordres redoutent par dessus tout.

Les marines étasuniens s’entraînent pour l’Afghanistan en Haïti
02-04-2010
La nouvelle est apparue dans Stars and Stripes, une revue destinée aux militaires, à leurs familles et au personnel civil du Pentagone, qui est publiée depuis 1942 : les marines que des Etats-Unis ont envoyé en Haïti pour prêter une aide humanitaire s’entraînent pour lutter en Afghanistan (www.stripes.com , 29-3-10).

L’explication est candide : comme cela fait des semaines que les tâches humanitaires ont diminué - explique le journal-, les effectifs ont peu à faire et alors s’entraîne en simulant des combats et en pratiquant des tactiques ad hoc. Le droit international établit que cet acte est une violation de souveraineté nationale, mais Washington est très habitué à cela, spécialement en Haïti.

Il est notoire que la première occupation des marines Nord-Américains s’est étendue de 1915 à 1934 pour empêcher que les guerilleros haïtiens ne prennent le gouvernement. Ils les appelaient "cacos" et répondaient à différents groupes politiques dont certains voulaient les envahisseurs dehors. Pendant ces vingt années la loi martial a régné, les forces de Etats-Unis ont pris le contrôle du trésor et des douanes de Haïti et, de plus, du Parlement, pour que celui-ci élise le président que la Maison Blanche avait choisi. Tout cela très démocratique. Trois mille Haïtiens sont morts, mais seulement 16 des habiles marines. En 1994, ils ont intervenu à nouveau pour mettre Jean-Bertrand Aristide à la présidence, et dix ans après ils sont revenus pour l’en sortir. Washington dedit, Washington abstulit.

Le lieutenant colonel Gary Keim, chef d’un bataillon de logistique, a rappelé ou enseigné cette histoire aux effectifs que les Etats-Unis ont envoyé après le tremblement de terre. "Ils nous ont demandé de la relire, a-t-il dit. Nous sommes déjà venus ici. Nous y avons déjà eu du succès" (www.usatoday.com , 25-1-10). Les interventions étasuniennes en Haïti auront-elles quelque chose à voir avec une opération d’aide humanitaire ? Ou le lieutenant colonel savait-il que l’humaniste n’enlèverait pas le militaire, comme on le voit bien ? On ignore quand les occupants laisseront la presque moitié de l’île La Española. Selon Keim, ils leur ont dit qu’ils resteraient pour "un temps indéfini".

Il faut se demander comment a été obtenu "le succès passé". Les marines ont inauguré des tactiques qu’ils ont appliquées et continuent d’appliquer ensuite : le bombardement aérien en appui de l’infanterie, la pratique de la torture et des exécutions sommaires, la création d’une force répressive locale dirigée par des employés étasuniens. L’opposition civile a accompagné la guerrillera. Les travailleurs urbains se sont joints à une grève étudiante et, en décembre 1929, des milliers de paysans ont affrontés les mitrailleuses de l’occupant avec des pierres, des gourdins et des machettes. Résultat : 24 haïtiens morts, 51 blessés et un marine blessé. Le commandant de la troupe a été décoré de la Croix Navale pour le mérite indubitable de diriger le massacre.

Le major de l’époque, Smedley Butlerde, a été un des premiers à débarquer en Haïti, où il a reçu sa deuxième Médaille d’Honneur pour sa valeur au combat. Il s’est retiré avec le degré de major général en 1931 et en août de cette année il s’est confié dans une convention de la Légion Américaine (Jules Archer, The Plot to Seize the White House, Hawthorn Books, Nueva York, 1973). Cela vaut la peine de citer ses mots in extenso : ils révèlent la vraie nature des interventions militaires étasuniennes dans des pays étrangers.

Butler a dit : "J’ai passé 33 ans en étant un muscle de grande classe pour les Grandes Affaires, pour Wall Street et les banquiers. En synthèse, j’ai été un déprédateur du capitalisme... J’ai aidé à purifier le Nicaragua pour la banque internationale Brown Brothers en 1909-1912. J’ai aidé à faire du Mexique, spécialement de Tampico, un lieu sûr pour les intérêts pétroliers étasuniens en 1916. J’ai préparé le terrain en République dominicaine pour les intérêts sucriers étasuniens en 1916. J’ai aidé à transformer Haïti et Cuba en lieu décent pour que les gars de (la banque) National City puissent obtenir des profits. J’ai aidé à piller une demi-douzaine de républiques d’Amérique centrale pour le bénéfice de Wall Street... En Chine, en 1927, j’ai aidé à ce que la Standard Oil puisse faire son travail sans ennuis ... elle avait une bande distinguée. Ils m’ont récompensé avec des honneurs, des médailles, des promotions... Je pourrais faire des clins d’oeil à Al Capone. Le maximun que j’ai pu faire a été d’agir dans trois villes. Les marines ont agi dans trois continents". Archer assure que l’audience était abasourdie. Et que peu de journaux ont osé publier ne fut-ce qu’un fragment innocent du discours.

Un fait confirme que les troupes des Etats-Unis resteront en Haïti par un certain temps, comme l’a avancé le lieutenant colonel Keim : la Maison Blanche a chargé la DynCorp International, entreprise semi-officielle du Pentagone et de la CIA, de l’agrandissement de la base militaire des occupants. Pour cela ils exproprieront et démoliront les logements de centaines d’haïtiens à Café Soleil, le quartier de Port-au-Prince qui exhibe le plus de trous de balles étrangères.

Juan Gelman, Pagina/12, 01 avril 2010.

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