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Quelques thèses sur la question syndicale en vue d’un large débat

10 novembre 2009, 15:38, par Yves Coleman

Une analyse catastrophiste n’est pas une analyse qui prédit une catastrophe à partir d’indices solides. Une analyse catastrophiste est une "analyse " qui en prédit tout le temps depuis un siècle.
Quand je dis que les marxistes n’ont rien compris ni aux questions écologiques ni au rôle décisif des femmes dans la société, ce n’est pas un propos en l’air. Aucun programme révolutionnaire avant la naissance de l’écologie ne mettait en avant des revendications de type écologique. Idem pour les femmes. Ces questions étaient reléguées au cinquantième plan. C’est seulement APRES que les mouvements écologistes et féministes soient apparus et aient conquis une audience de masse dans les années 60 et suivantes que les différents groupes marxistes ont commencé à s’intéresser à ces questions. Il suffit de consulter leur presse pour cela.
Cela ne veut pas dire qu’il faut être "écologiste", si par là on entend soutenir les politiciens professionnels type Voynet, Mamère ou Cohn-Bendit. Ou si être écologiste c’est dire aux prolétaires : serrez-vous la ceinture pour promouvoir un développement capitaliste moral et durable ! Ni être "féministe" si par là on entend les féministes bourgeoises ou celles qui nient la lutte des classes.
Simplement, que sur deux questions fondamentales pour la société capitaliste mondiale, les marxistes des années 20 à 60 n’ont rien vu venir.
Par contre, ils ont prédit une vague révolutionnaire à la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe, l’avènement d’une barbarie mondiale s’il n’y avait pas de révolution socialiste, puis pour certains une 3e guerre mondiale, puis au début des années 1970 la répétition d’une crise de 1929, etc.
Une "science" qui ne permet pas de comprendre les grandes tendances de l’évolution de la société (pas le déroulement précis semaine après semaine, bien sûr !) doit faire preuve d’un peu de modestie et surtout se livrer à des études concrètes.
Il y a trente ans, dans une organisation que tu connais bien, puisque tu en as été membre comme moi, à savoir LO, le SEUL livre que l’on faisait lire sur la question des femmes était La femme et le socialisme de Bebel, un livre qui datait de la fin du XIXe siècle ou des débuts du XXe siècle. On ne parlait même pas des féministes socialistes britanniques de l’époque comme Sheila Rowbotham, par exemple, dont pourtant l’un des livres était traduit en poche Payot. Quant aux autres tendances trotskystes comme la LCR elles ont été incapables de lier "féminisme" et luttes des classe.
Je n’ai pas lu vos textes sur les question économiques. Dire qu’il y a une suraccumulation du capital ne me semble pas d’une nouveauté renversante. Quant à en conclure que l’on débouchera automatiquement soit sur une troisième guerre mondiale soit sur une révolution, je ne vois pas l’intérêt de ce genre de pronostic.
Encore une fois c’est ce que certains trotkystes et ultragauches disaient déjà au début de la guerre froide.
De même qu’ils disaient que l’URSS ne pourrait s’effondrer que sous les coups d’une révolution prolétarienne.
Je ne crois pas que la "révolution" soit une science.
On peut dire qu’il existe une "science" militaire et que certains éléments de cette science militaire ont pu être utiles aux révolutions passées. Je doute que les affrontements armés de demain - s’ils ont eu lieu - prendront la même forme que dans le passé. Il ne suffira pas de monter sur un tabouret ou sur un cheval pour faire échec au quadrillage informatique de la population, aux moyens techniques de surveillance et d’extermination de la guerre moderne, etc.
Quant à lier misère et révolution, hum, l’immense majorité de la population mondiale vit dans la misère, je ne vois pas de révolution sociale poindre tous les ans ni même tous les dix ans.
Face à cette objection, les trotskystes et d’autres ont une réponse toute prête : il manquait un parti révolutionnaire !
Pour ma part, je n’ai pas de réponse.
C’est peut-être cela qu’il t’est difficile d’admettre : il n’y a pas de réponse immédiate à toutes les questions. On peut et on doit en chercher le maximum, en fonction de nos capacités, et surtout de nos activités militantes, puisque nous prétendons être "révolutionnaires", mais il faut déjà commencer par admettre que nos prédécesseurs en révolutions réelles (et non fantasmées, car que je sache ni toi ni moi n’avons jamais participé à la moindre révolution sociale) se sont souvent trompés. Cela suppose de chercher les racines de leurs erreurs et de ne pas s’enfermer dans une fidélité à tel ou tel grand penseur d’il y a un siècle ou même 50 ans. A admettre que le savoir s’est considérablement complexifié depuis un siècle et demi. Il faut reprendre toutes les questions politiques et théoriques, sans tabous et sans vouloir s’enfermer dans une tradition qui aurait eu raison sur tout, qu’il s’agisse des anarchismes ou des marxismes . Bien sûr, sans ignorer les contributions du passé, sinon on perdra un temps immense à réinventer l’eau chaude ou une forme ou une autre de réformsime, mais sans calquer des schémas périmés sur le présent.

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