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Y a-t-il une continuité des organisations révolutionnaires de Marx à Lénine et Trotsky, de la première à la deuxième et à la troisième internationale, ou même de la Ligue des communistes à la quatrième internationale de Trotsky et au trotskysme d’aujourd’hui ? Non !

8 août 2017, 07:59

« La doctrine sociale de la Ligue, toute imprécise qu’elle fût, contenait une très grave lacune, due aux conditions mêmes de l’époque. Ses adhérents, ceux du moins qui étaient des travailleurs, étaient presque exclusivement des artisans proprement dits. Même dans les très grandes villes de l’époque, le patron qui les exploitait n’était la plupart du temps qu’un petit maître-artisan. C’est à peine que naissait à Londres l’exploitation de la couture en grand, ce que l’on appelle la confection, avec la transformation du métier en industrie à domicile pour le compte d’un grand capitaliste. Bref, d’une part, l’exploiteur de ces artisans était un petit patron, d’autre part, chacun pouvait espérer se transformer lui-même un jour en petit patron. C’est pourquoi les artisans allemands de ce temps-là étaient encore infestés d’une foule d’idées héritées des anciennes corporations. Ce qui fait leur plus grand honneur, c’est que, eux, qui n’étaient pas encore des prolétaires dans toute l’acception du terme, mais un prolongement de la petite bourgeoisie en train d’évoluer vers le prolétariat moderne sans être encore en opposition directe avec la bourgeoisie, c’est-à-dire le grand capital, c’est que ces artisans aient été capables d’anticiper instinctivement leur développement futur et de se constituer en parti du prolétariat, bien que ce ne fût pas encore avec une pleine conscience. Il était donc inévitable que leurs vieux préjugés d’artisans vinssent à tout moment leur faire quelque croche-pied, notamment lorsqu’il s’agissait de critiquer les divers aspects de la société existante, c’est-à-dire de saisir les faits économiques. Je ne crois pas qu’à cette date la Ligue ait compté un seul membre ayant jamais lu un traité d’économie politique. Mais cela ne provoqua pas de désastre : pour l’heure, l’ « égalité », la « fraternité » et la « justice » étaient d’un bon secours pour franchir les obstacles sur le plan théorique. Dans l’intervalle, il s’était développé, à côté du communisme de la Ligue et de Weitling, un autre communisme, tout à fait différent. À Manchester, je me trouvais nez à nez avec les réalités économiques auxquelles les historiens n’ont jusqu’ici attribué qu’un rôle tout à fait mineur, quand ils leur en attribuaient un. De fait, elles constituent, du moins dans le monde moderne, une puissance historique décisive, puisqu’elles représentent le fondement sur lequel s’élèvent les actuels antagonismes de classe qui, dans les pays où la grande industrie en a suscité le plein épanouissement, comme en Angleterre notamment, représentent à leur tour la base de formation des partis politiques, des luttes de parti et, en conséquence, de toute la vie politique... »

Engels

Contribution à l’histoire de la Ligue des communistes

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