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Vent de révolte au Cameroun...

mercredi 23 février 2011

Cameroun : des opposants brutalisés lors de manifestations

Plusieurs leaders de l’opposition camerounaise ont affirmé à l’AFP avoir été victimes de violences policières mercredi à Douala (sud) lors des manifestations interdites contre le président Paul Biya, au pouvoir depuis 1982.

"Les gendarmes se sont acharnés sur moi avec une violence inouie", a affirmé Jean Michel Nintcheu, député et responsable à Douala du Social Democratic Front (SDF), principal parti d’opposition, qui avait appelé avec d’autres partis à un meeting à Akwa, au centre la capitale économique.

M. Nintcheu, qui portait son écharpe de député, avait le pantalon déchiré et des griffures sur la main. Il a été frappé alors qu’il arrivait sur les lieux à l’heure prévue (11h00 locale, 10h00 GMT) du rassemblement qui n’a guère attiré de manifestants, selon des témoins.

Membre du SDF, Célestin Djamen, qui a porté plainte en France contre Paul Biya pour "recel de détournement de biens publics" a été lui blessé à la tête, a constaté un journaliste de l’AFP.

"Ce n’est que le début nous allons continuer à mettre la pression pour mettre Biya dehors", a poursuivi M. Nintcheu.

Auparavant, 11 personnes, dirigeants et sympathisants du Mouvement africain pour la nouvelle indépendance et la démocratie (Manidem) avaient été "arrêtés, transportés et libérés en périphérie de Douala", selon Anicet Ekané, ancien président du Manidem.

Le président du Manidem Abanda Kpama ainsi que l’opposant Mboua Massock faisaient partie de ces 11 personnes, selon M. Ekané.

Le correspondant de l’Agence France Presse (AFP) au Cameroun Reinnier Kazé a été interpellé mercredi matin à 9h30 locale (8h30 GMT) alors qu’il couvrait une manifestation d’opposition dans un autre quartier de Douala. et était toujours en garde à vue à 19h45 locale (18h45 GMT), a appris l’AFP auprès de son avocat.

Depuis février 2008 qui a vu une vague de manifestations dites de la faim embraser le pays, le pouvoir en place à Yaoundé aborde cette période commémorative avec beaucoup de fébrilité. Cette année plus que les deux dernières, les autorités camerounaises qui n’écartent pas la possibilité de subir l’effet domino des révolutions en cours dans le monde arabe, jouent la carte de l’anticipation avec un fort déploiement des forces de maintien de l’ordre en uniforme et civil dans les principales villes du pays. Ce d’autant que l’opposition qui a fait de ce moment un rendez-vous, projette de célébrer les martyrs dès demain mercredi et pour une semaine à Douala notamment.

Yaoundé
Des forces pour parer à toute éventualité
Des policiers quadrillent la capitale depuis quelques jours pour étouffer un éventuel mouvement populaire.

Le rond-point du lieu-dit Poste centrale grouillait de policiers en tenue de combat dite de maintien de l’ordre hier matin. Hormis deux commissaires qui régulaient la circulation, des policiers étaient attroupés à l’angle de ce site, tandis qu’une unité était positionnée dans un pick-up stationné sur le passage présidentiel, les portières ouvertes. Cette présence policière fort remarquée aussi bien par les automobilistes que par les piétons s’est disloquée avant la fin de la matinée. Les gradés en faction ont quitté la chaussée. Les autres agents chargé de réguler la circulation routière, habituellement postés à cet endroit ont, quant à eux, gardé leur position préférée : celle qui consiste à se placer dans un coin de la à partir d’où ils gardent un œil sur les automobilistes et interviennent dès que survient un problème. Le pick-up et ses passagers ont passé la journée surplace.

C’est d’ailleurs le cas depuis quelques jours. « Depuis la semaine dernière », précise un vendeur ambulant qui a ses habitudes à la Poste centrale. Depuis cette période en effet, on remarque une présence de jour comme de nuit et inhabituelle des policiers sur certains axes de la capitale.
Un riverain confie que hier matin, des cars Hiace bondés de policiers en tenue maintien de l’ordre ont déversé leurs occupants à Nsimeyong et à Efoulan. Ailleurs, on parle de la présence discrète de policiers (en civil) identifiables par leurs talkies-walkies. La question est sur la plupart des lèvres des Yaoundéens : Qu’est-ce qui peut susciter une telle mobilisation ? « Il y a des tracts qui circulent et dans lesquels on parle de faire tomber le régime. C’est donc pour prévenir tout mouvement qu’il y a un déploiement spécial des forces de sécurité dans la ville. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le délégué général à la sureté nationale [Dgsn] à réinstauré, il y a quelques jours, les postes de contrôle fixe aux entrées et sorties de la ville car on pense que des gens veulent entrer à Yaoundé pour semer le désordre », confie un officier principal de la police sous anonymat.

Soulèvement
En début du mois courant, des tracts ont en effet circulé dans certaines villes du Cameroun appelant à un soulèvement populaire le 09 février dernier. Question de faire tomber le régime en place. Appel qui n’a pas eu d’effet sur le terrain. D’autres tracts ont refait surface il y a quelques jours pour appeler à une insurrection le 23 février prochain (ce mercredi).
Sur la même lancée, des affiches à l’entrée sud de Yaoundé appellent au départ du président Biya Cependant qu’en face, des messages réitèrent leur soutien au chef de l’Etat. D’aucuns estiment que l’agitation observée ailleurs pourrait expliquer la frilosité actuelle du régime en place et des forces de maintien de l’ordre. Et qui se traduit par le déploiement actuel de ces derniers.

Maghreb
Le sujet serait régulièrement évoqué depuis quelques jours par les responsables des services de renseignements. Cela a d’ailleurs été le cas lors de la réunion de coordination d’hier, lundi 21 février, à la délégation régionale de la police judiciaire du Centre, indique une source. Qui précise que « des équipes vont se relayer sur le terrain. Le nombre pouvant varier d’une unité à une autre. […] Le sujet préoccupe nos patrons, au regard de ce qui se passe ailleurs [allusion faite au vent de libertés qui souffle au Maghreb et dans une partie du Proche Orient ; et qui a été à l’origine des départs des présidents Ben Ali de Tunisie et Hosni Moubarak d’Egypte, chassés du pouvoir par la rue après respectivement 23 ans et 30 ans de règne ininterrompu et sans partage, Ndlr] ». Et comme pour en rajouter à la panique des responsables des services de sécurité, d’autres messages allant dans le même sens que ces tracts circulent ici et là. Sur le pont de l’échangeur de Ahala, à l’entrée de la ville de Yaoundé, on peut lire, écrit en caractères gras : « Paul Biya, démissionne. Va-t-en ! ».

Face à tout ceci, des contremarches ou alors des marches pour soutenir le régime en place et le président de la République, en particulier, sont organisées. Il y a eu celle des membres du Conseil national de la jeunesse le 10 février dernier, puis la marche dite spontanée de vœux de joyeux anniversaire au chef de l’Etat le 13 février. Deux jours plus tard, le 15, des étudiants des deux universités d’Etat de Yaoundé accompagnés de leurs homologues de 12 instituts supérieurs de la capitale « organisaient » la leur.
Dimanche sur les antennes d’une chaine de proximité de la capitale, le secrétaire général adjoint du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc), Grégoire Owona, a déclaré qu’en cas de manifestation demain contre le chef de l’Etat, le parti au pouvoir va également mobiliser des jeunes pro-Biya pour une contremarche. Qu’importe les conséquences.

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