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Quel avenir après la nouvelle crise du capitalisme ?

mercredi 28 octobre 2009, par Robert Paris

Des milliers de milliards, ce sont les sommes que les Etats de la planète injectent dans l’économie pour pallier à l’incapacité de la classe capitaliste à faire du profit par l’investissement privé. Et ces sommes ne sont jamais suffisantes ce qui signifie que la crise de l’endettement qui a gagné toute l’économie est en train de mettre en faillite les Etats. Et pourtant, cela ne peut pas être une manière de relancer l’économie capitaliste qui est fondée sur l’investissement privé de capital. On peut donc bel et bien dire que le capitalisme est en panne bien plus qu’en 1929 et que les conséquences ne seront pas seulement un recul social sans précédent avec des licenciements massifs et une misère d’ampleur exceptionnelle. Les classes dirigeantes ont choisi de retarder cet effondrement afin de préparer une réponse. Celle-ci comprendra certainement une répression accrue des travailleurs, la remise en cause des libertés et la marche à la guerre ... mondiale. Sans être devin, cet avenir est assuré si... les travailleurs et les peuples n’y mettent pas le hola ! Ils en ont la force. Ils sont la plus grande puissance à l’échelle mondiale. Il leur manque la conscience de cette force et de cette perspective.

La nouvelle crise systémique de 2008

Quelle issue face à la crise ?

Dans le journal économique Világgazdaság, le Prix Nobel d’économie Joseph E. Stiglitz réfléchit à la crise économique mondiale. "Le monde sombre actuellement dans une crise financière qui sera selon les prévisions la pire depuis un quart de siècle, et peut être même depuis la crise économique mondiale de 1929. Cette crise est à bien des égards ’Made in America’. … Les pays qui avaient déjà avant la crise un gros déficit de la balance commerciale et un endettement élevé, souffriront plus que les autres. Ceux qui n’ont pas encore complètement libéralisé leurs marchés financiers et leurs marchés de capitaux, comme la Chine, pourront s’estimer heureux de ne pas avoir cédé à la pression du ministère des Finances américain. … Les vieilles institutions ont reconnu la nécessité de réforme, mais elles ont avancé à un rythme de tortue. Elles n’ont rien entrepris pour empêcher la crise actuelle. Se pose en outre la question de l’efficacité des réactions de ces institutions. … Après la crise économique mondiale, le monde a eu besoin de 15 ans et d’une guerre mondiale(...)"

Un capitalisme privé, qui ne survit que grâce à des injections massives et répétées d’argent public, n’a pas d’avenir

Crise de 2008 : le mur de l’argent qui tombe, et … après

La crise économique mondiale de 2008 n’est pas un épisode un peu douloureux mais qui sera passé assez vite avec quelques difficultés au passage. C’est un tournant historique pour l’humanité. Nous ne faisons que de commencer à en mesurer l’importance et les conséquences. C’est la chute du mur de Wall Street qui marque le début du 21ème siècle comme la « chute du mur de Berlin » a marqué la fin du 20ème siècle. L’effondrement de la finance, de la bourse, de la banque et de l’économie est rapide, massif et impressionnant. Il signe la fin d’un règne même si ce qui va suivre est loin d’être établi ni même dessiné. Si la fin du stalinisme, qui avait toujours été un allié fidèle de l’impérialisme contre les peuples et les classes ouvrières, a été présenté comme une grande victoire du capitalisme sur le communisme, il n’en est nullement résulté un monde plus juste, plus libre ni moins guerrier. Et maintenant, c’est le capitalisme lui-même qui déclenche son propre effondrement sans être victime d’un quelconque ennemi : ni du terrorisme, ni du nationalisme, ni même du communisme. Ce ne sont pas les luttes des travailleurs qui sont en train d’abattre les murailles de Chine du capitalisme, c’est son propre fonctionnement qui le mène irrémédiablement à sa perte ! Le grand capital est amené à avoir un comportement qui est un poison mortel pour le système capitaliste lui-même. Il ne s’agit pas seulement de dérives des financiers. Tous les possesseurs de capitaux, en recherchant seulement leur profit individuel comme ils l’ont toujours fait, sont amenés à détruire le système à son cœur lui-même : l’investissement. Même si les Etats prétendent aujourd’hui investir des sommes colossales pour pallier aux investissements des capitalistes, ils ne peuvent pas relancer la machine. Les possesseurs de capitaux ne sont pas des philanthropes, ce n’est pas leur rôle. Si un investissement est rentable, ils se jettent dessus. S’il ne l’est pas ou s’il risque de ne plus l’être, impossible de convaincre les possesseurs de capitaux de s’y lancer. Or, aujourd’hui, les capitalistes de tous les pays sont unanimes et condamnent à mort la société capitaliste : pas assez rentable. C’est cela qui les a amené à retirer progressivement leurs capitaux des investissements productifs pour les concentrer sur la sphère financière qui permet des profits fabuleux et rapides. Ils s’en moquent, eux, que les profits financiers ne puissent pas produire de marchandises, qu’ils ne permettent pas de créer réellement de plus valus. Ils s’en moquent parce que les profits qui rentrent dans leurs caisses, eux, ne sont pas fictifs ! Toutes les banques, toutes les assurances, tous les trusts, et même toutes les collectivités locales ont été aspirés par cette possibilité de gagner de sommes considérables au jeu de loto des titres pourris, comme les subprimes. Peu importe que la base de ces titres n’était plus des sociétés florissantes mais des dettes, seulement des dettes. Peu leur importait que cet amoncellement de dettes ne faisait que grandir. Peu leur importe que leur crise ait englouti des milliers de milliards, des sommes des centaines de fois supérieures à ce qu’il faudrait pour en finir avec la faim, le manque d’eau, l’absence de santé et la misère dans le monde entier. Peu leur importe que cet amoncellement de dettes gagne maintenant les Etats qui comptent aller jusqu’au bout : au-delà de vider la caisse des Etats et des banques centrales, jusqu’à hypothéquer le sort des générations futures. Peu leur importe de fermer massivement les entreprises, de licencier massivement les travailleurs. Comme peu leur a importé de jeter à la rue massivement les propriétaires de maisons endettés aux USA. Le discours des gouvernants est clair : il faut sauver le système capitaliste, rien que cela ! Voilà donc un système qui ne serait pas si éternel que cela … Peu leur importe des hommes politiques qui dissertent sur la réforme du système. Ils ne peuvent ni ne veulent rien réformer à leur appétit de profits. C’est la base même du système qui est en cause et cela, personne ne peut le réformer. Le capitalisme, il faut l’accepter, avec ses conséquences les pires comme les guerres d’Irak et d’Afghanistan, avec les massacres comme celui de la France au Rwanda, ou il faut le renverser. Les travailleurs n’ont pas, pour le moment, décidé de passer à l’offensive, mais toute l’Histoire prouve que, lorsque la crise sociale est là, la classe ouvrière est capable de prendre en mains les rênes de la société. Ils n’ont jamais encore été jusqu’au bout de cette révolution sociale, mais une fois encore le problème est posé à cause de la crise provoquée par la classe dirigeante.
On nous a menti : la chute du mur de Berlin et la mondialisation qui a suivi, accompagnée à une financiarisation de la société et à une mise en coupe réglée accrue de la planète, n’était peut-être pas tant que cela dû à une victoire du capitalisme mais à une fuite en avant du même type que la mondialisation qui avait suivi la crise systémique de 1873 puis mené à la guerre mondiale de 1914-1918, cette horrible boucherie qui a ensanglanté l’Europe et que l’on vient de commémorer sans être capable de nous expliquer ce qui l’a causé. La crise a également entraîné des révolutions sociales comme celle de 1917 en Russie, ou des contre-révolutions fascistes comme celle de Mussolini en Italie en 1922. Puis la crise systémique de 1929 a mené à de nouvelles horreurs : fascismes en Allemagne et en Espagne et, à nouveau, guerre mondiale, pour finir par une entente entre stalinisme et bureaucratie qui a relativement stabilisé la planète sur la base d’une exploitation éhontée des peuples. C’est cette stabilité qui a été ébranlée au milieu des années 1980 par les travailleurs : ceux de Pologne, de Yougoslavie, de Chine, du côté du bloc dit de « l’Est », et ceux de Corée du sud, d’Afrique du sud, de Turquie, du Brésil, d’Argentine, du côté du bloc de l’Ouest. C’est l’une des raisons de la fin de la politique des blocs, politique usée jusqu’à la corde. Russie, Chine ou pays de l’Est ont rejoint le monde capitaliste, mais ce monde vient de montrer que l’ouverture des marchés n’a pas suffi à relancer la machine. Elle est décidément arrivée à ses limites. Elle ne peut plus compter sur de nouvelles avancées. Dans le cadre de ce système, il n’y a plus à attendre que des horreurs, et bien pires que ce que nous avons connu auparavant. Non, les travailleurs et les peuples n’ont pas à attendre que le ciel leur tombe sur la tête. Si le capitalisme n’a plus d’avenir, cela ne veut pas dire que l’humanité est foutue. Elle est tout à fait capable de bâtir une autre société, fondée sur les besoins de ses membres et non plus sur le profit de quelques sociétés. 2008 sera certainement la date d’un tournant historique, mais c’est à nous, c’est aux peuples aujourd’hui opprimés et exploités, d’en donner la signification historique : un grand pas en avant ou un grand pas en arrière pour le genre humain !

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Ce ne sont pas les révolutionnaires qui sont les plus pessimistes sur l’avenir du système : ce sont les grands capitalistes, chefs des trusts, des banques, des bourses, etc...

Ils anticipent un effondrement global des bourses qu’il va falloir fermer. Ils anticipent un arrêt massif de la production américaine. Ils anticipent une cessation de paiement de nombreux Etats dont l’Etat américain. Ils anticipent l’effondrement des marchés émergents ce qui signifiera une crise sociale de grande ampleur dans des pays comme Inde, Chine ou Brésil. Enfin, ils anticipent une crise inflationniste de grande ampleur liée aux masses d’argent que les Etats et les banques centrales ont injecté et produit massivement. La Royal Bank of Scotland, Barclays et Fortis ont ainsi envoyé à leurs clients un avis d’alerte systémique.

Les capitalistes estiment que le système n’est pas seulement en crise mais ne fonctionne déjà plus et que cela va bientôt devenir évident aux yeux de tous, provoquant une panique de grande ampleur !

Par le plan Paulson et autres interventions massives des Etats et des banques centrales du monde, les capitalistes ont acheté un peu de temps pour mettre au point leur politique. celle-ci ne peut éviter l’effondrement final mais elle vise à la faire payer aux travailleurs et aux peuples.

Les crises des années 1873 à 1902, crises financières ilées à une suraccumulation du capital, ont mené à la politique de mondialisation, de concentration, de financiarisation, à l’impérialisme et finalement à la première guerre mondiale. La crise de 1929, crise financière liée à une suraccumulation du capital, a mené au fascisme et à la deuxième guerre mondiale. La crise actuelle a les mêmes causes et engendrera les mêmes effets si nous ne mettons pas fin à cet ordre social en renversant les Etats capitalistes. Nous devons être prévenus : l’objectif des luttes actuelles n’est pas la seule défense du niveau de vie des classes laborieuses mais le renversement révolutionnaire du capital par le travail.

Sur la crise actuelle

Chute des échanges

Chute de l’immobilier aux USA et expulsion des propriétaires endettés

Crise des subprimes

Chute du dollar

Chute du Dow Jones

En perspective, deux nouvelles crises après celle des subprimes : les monolines et les LBO

"Vous avez aimé la crise des subprimes, vous adorerez la crise des LBO (LBO = titrisation des dettes des sociétés d’achats par endettement avec effet de levier)"

Le "Canard Enchaîné" le 22 septembre 2008

« Un cycle de croissance de dix ans s’achève. Au-delà du retournement cyclique, il est clair que l’on touche aujourd’hui aux limites d’un modèle de développement »

L’économiste Jean-Hervé Lorenzi
Cité par « Le Figaro » du 7 juillet 2008

Précisons que ce qui est menacé dans la crise actuelle, c’est tout simplement le capitalisme !Voilà ce que ne voudrons certainement pas entendre tous ceux pour qui l’existence éternelle de l’empire actuel ne doit même pas être mise en question.

En effet, ce qui est mis en cause, c’est tout simplement le niveau trop élevé de la capitalisation mondiale par rapport aux capacités d’absorption des marchés. Or, c’est le mécanisme fondamental qui est ainsi atteint : l’augmentation du capital.


OU L’ON VOIT QUE LES CHOCS PÉTROLIERS, LES ATTENTATS ET LES GUERRES NE SONT PAS LES CAUSES MAIS LES RÉPONSES A LA CRISE

Effondrement des bourses

Effondrement de la confiance


Thèses du site "Matière et révolution", ce que nous écrivions en 2007 :

2007 : vers une nouvelle crise systémique du capitalisme, type 1929 ?

La crise de la spéculation financière liée à l’immobilier américain de 2007 doit être envisagée non comme un incident grave individuel mais connecté à l’histoire de la crise aux USA et de la crise mondiale, comme une de ses étapes et dans sa perspective : une crise générale à grande échelle.
L’économie US n’est sortie de la crise débutée en 1968-70 qu’en 1979-80 à la faveur du tournant mondial imposé par l’impérialisme américain appelé communément « la mondialisation » et qui correspondait à la financiarisation, à la reprise d’un rôle important des bourses, à la déréglementation des marchés, à la titrisation de la dette, à l’accroissement de l’exploitation des salariés, au développement des investissements productifs dans certains pays du tiers monde. Pendant vingt ans, le capitalisme n’a plus connu de grave crise mais seulement des crises localisées, la plus grave étant celle du Japon en 1990, alors que les USA caracolaient en tête, crise due entre autres à la politique américaine qui a permis aux USA de reprendre le dessus sur le Japon et l’Europe. La suivante en importance a été la crise dite asiatique de 1997. C’est seulement en 2000, soit vingt ans plus tard, que les USA ont de nouveau connu la crise. La crise a surtout frappé les valeurs dites technologiques mais elle n’a aucune origine technique. C’est une crise spéculative de la finance. Comme d’ordinaire, ce type de crise se produit lorsqu’il a suraccumulation de capital, c’est-à-dire que les succès capitalistes ayant mené à de beaux profits atteignent des limites de l’investissement productif. Depuis 2000, les USA se sont débattus par tous les moyens possibles pour se sortir de la crise. Ces moyens ont été jusqu’à l’aide massive aux armements justifiée par le 11 septembre. L’exploitation de cet événement a permis également de contourner une grave crise boursière annoncée. Mais tout cela n’a été que reculer pour mieux sauter. La spéculation est passée du Nasdaq à l’immobilier ou encore aux titres de la dette américaine et à bien d’autres fonds comme les fonds pour les OPA géantes. Le répit obtenu depuis 2000, ces sept années, se son payées d’un accroissement de l’instabilité économique américaine et mondiale. La crise prend un tour général : crise des fonds spéculatifs, crise des fonds des OPA, crise de confiance dans les banques, les assurances, dans les fonds d’investissement, dans la crédibilité des Etats à commencer par les USA, crise de la balance commerciale des USA et on en passe … La reprise industrielle des USA s’est payée également très cher, à coups de subventions d’état sur les armements, de guerres comme l’Afghanistan, le Timor, l’Irak. La reprise des profits et de la productivité du capital américain s’était faite en augmentant les investissements dans certains pays du tiers monde, en particulier en Asie. Les profits réalisés en Asie deviennent eux-mêmes une nouvelle source d’instabilité car ils se promènent leurs liquidités aux quatre coins du monde, se rajoutant aux pétrodollars, et accroissant l’instabilité financière due aux surprofits du capital américain non investis dans la production. C’est le succès qui mène au danger mortel pour le système comme en 1929. Il ne s’agit plus seulement d’une crise cyclique mais d’une crise systémique. Certes, il est impossible de fixer une échéance précise pour un effondrement général possible, mais il est sûr que plus l’impérialisme US parviendra à retarder l’échéance et plus la catastrophe sera spectaculaire et irrépressible. A terme, la seule perspective sera à nouveau socialisme ou barbarie.


Thèses du site "Matière et révolution" en 2008 sur la crise actuelle :

Le système capitaliste a hypothéqué son avenir

Le nôtre ne doit pas rester accroché à ce Titanic

1- Il n’y a aucune origine accidentelle à la crise actuelle. Pour les capitalistes, loin d’être une surprise, elle est une catastrophe annoncée. C’est seulement pour le grand public, et particulièrement pour les travailleurs, qu’elle est tout ce qu’il y a de plus étonnant : le système qui domine le monde, sans une puissance capable de le renverser, sans une classe sociale qui semble lui contester ce pouvoir, est en train de s’effondrer et de se détruire lui-même.

2- Ce n’est pas une crise conjoncturelle. Ce n’est pas une crise américaine. Ce n’est pas une crise immobilière. Ce n’est pas une crise financière. Ce n’est pas une crise bancaire. Ce n’est pas une crise pétrolière. Ce n’est pas une crise de confiance. Ce n’est pas une crise inflationniste. Ce n’est pas une crise de l’endettement. Ce n’est pas une crise due à une simple récession. Bien sûr, il y a tout cela à la fois mais cela n’explique pas le fondement de la crise. C’est le système capitaliste tout entier qui est en crise. Le terme « systémique » pour caractériser la crise signifie que c’est le fondement, le principe même, du capitalisme qui est mort.

3- C’est l’accumulation du capital qui ne peut plus fonctionner. Et ce pour une raison simple. Le mécanisme d’accumulation du capital a atteint sa limite.

4- Cela signifie que le capitalisme n’a pas subi une maladie, ni un défaut, ni un comportement défaillant de tels ou tels de ses acteurs. Non, le capitalisme meurt parce qu’il a été au bout de ses possibilités. C’est son succès lui-même qui provoque sa fin. Il n’y a pas moyen d’inventer suffisamment d’investissement vu la quantité de capitaux existant dans le monde. Tous les cadeaux des Etats et des banques centrales au capital ne peuvent qu’être des palliatifs d’une durée de plus en plus limitée.

5- Le capital n’est pas simplement de l’argent. De l’argent, il y en a aujourd’hui et il n’y en a même jamais eu autant sur la planète. Mais c’est de l’argent qui participe à un cycle au cours duquel encore plus de travail va être transformé en argent. L’accumulation du capital est le but même de la société capitaliste. Produire et vendre des marchandises, exploiter les travailleurs, tout cela n’est qu’un moyen. Faire de l’argent, s’enrichir n’est aussi qu’un moyen. Le but même est de transformer cet argent en capital, c’est-à-dire trouver les moyens de l’investir et de lui faire rendre du profit, lequel profit doit lui-même encore être investi.

6- C’est ce mécanisme qui ne fonctionne plus. Il n’est pas grippé. Il n’est pas menacé. Il est mort. Il a été maintenu en survie pendant un temps déjà très long par des mécanismes financiers et eux-mêmes viennent d’atteindre leurs limites. On ne peut pas maintenir le mourant tellement longtemps même en inventant de nouvelles techniques de survie artificielle. Bien entendu, aujourd’hui tout le monde accuse le système financier et ses « folies », mais c’est oublier que ce sont ces prétendues folies, des politiques pratiquées parfaitement consciemment, qui ont permis au système de perdurer au-delà de ses limites.

7- Les guerres locales comme celles d’Irak, celle d’Afghanistan, mais aussi de Yougoslavie et du Timor ont été aussi des moyens de faire durer le système. Mais, là aussi, les limites sont atteintes.

8- Quel moyen aurait le système de se redresser vraiment ? Celui de détruire une très grande partie des richesses et des marchandises accumulées. Il ne lui suffit pas de détruire les richesses fictives de la finance. Il lui faut, pour repartir, détruire une partie de la planète comme il l’a déjà fait, dans des circonstances semblables, lors de deux guerres mondiales.

9- De là découle l’alternative pour les classes ouvrières et les peuples. Entre le Capital et le Travail, il y a maintenant une question de vie ou de mort. Même si la classe ouvrière ne souhaite pas consciemment se préparer au renversement définitif du système et à la fondation d’une société reposant sur la satisfaction des besoins collectifs des peuples de la planète, c’est le capitalisme lui-même qui va la contraindre à choisir. Et il ne suffira pas, bien entendu, d’attendre la chute du capitalisme actuel car ce qui viendra ensuite peut tout à fait être bien pire : une nouvelle barbarie, qu’elle soit capitaliste ou pas. Si la société humaine doit bâtir un nouvel avenir, elle devra le faire consciemment. Cet effondrement économique, qui sera suivi d’un effondrement social et politique, moral même, ne signifie pas, bien entendu, que la classe dirigeante et ses Etats vont céder la place d’eux-mêmes à une société au service des intérêts collectifs de la population. Les prétendues "réformes du système" et autres "régulations" ne sont que de la poudre aux yeux. Aucune mesure ne peut ni sauver le système ni sauver les populations. Plus tôt les travailleurs, les jeunes, les peuples se convaincront qu’il va falloir en finir radicalement avec les Etats qui ne défendent que le système, moins ils en paieront les conséquences.

10- Les mécanismes politiques et sociaux de domination sont désormais dépassés. On va voir du nouveau, en pire. Les « démocraties » occidentales vont montrer toute leur barbarie aux populations qui y sont le moins préparées : celles de leurs propres pays. Les dictatures, les fascismes vont revenir au goût du jour.

11- Il est urgent de préparer l’avant-garde aux situations à venir. Il n’y a rien de plus urgent que de comprendre la crise actuelle et ses conséquences et de les faire comprendre autour de nous. Ce qui est à l’ordre du jour n’est pas seulement de se défendre contre des attaques. C’est de se défendre contre une attaque idéologique de grande ampleur. Les gouvernants vont tâcher de donner leur propre interprétation des événements pour nous convaincre qu’eux seuls peuvent faire revenir l’époque passée. Ils mentent. Elle ne peut pas revenir. Ils vont chercher ainsi à nous empêcher de nous organiser entre nous pour comprendre, discuter et répondre aux situations. La crise de confiance des peuples dans le système est dangereuse si les opprimés, si les peuples se mettent à s’organiser, et déjà à se réunir pour confronter les points de vue, pour donner leurs avis sur la signification de ce qui se passe et sur les moyens d’y faire face.

12- Ce que souhaite la classe dirigeante, c’est que chacun se retrouve face à ses peurs, face aux problèmes matériels touchant sa vie, celle de sa famille, et se demande seulement quel dirigeant bourgeois va pouvoir le sauver. Des sauveurs suprêmes, des Hitler ou des chefs civils ou militaires dictatoriaux prétendant tenir la solution, on va en voir défiler. La première des tromperies qui va se présenter à nous sera celle des réformistes de tous poils qui auront quantité de prétendues solutions pour sauver à la fois le système et la population. Le seul effet de leurs discours sera de démobiliser les opprimés et d’éviter tout risque révolutionnaire aux exploiteurs afin de leur permettre de préparer leurs vraies solutions violentes : dictatures et guerres. D’avance il faut se préparer à n’avoir confiance qu’en nous-mêmes.

13- Au lieu de se protéger, ce qui ne sera pas possible, il faut saisir l’occasion. Le capitalisme est atteint dans ses fondements. Profitons-en pour en finir avec ce système d’exploitation. Nous sommes des millions de fois plus nombreux que les exploiteurs et bien plus forts que le système si nous en sommes conscients. La fin du capitalisme ne sera une catastrophe et un recul massif que si nous nous contentons de nous défendre, catégorie par catégorie, pays par pays, groupe social par groupe social. Cela peut être le prélude d’une avancée historique de l’humanité si nous décidons d’en finir avec l’esclavage salarié.

La crise : ordre ou désordre ?

C’est la crise.

Tout le monde le sait. Tout le monde le voit. Mais on a du mal à la comprendre.

Des crises, il y en a eu de nombreuses. Il y a presque toujours une crise, à un niveau ou à un autre dans cette société. De quel type de crise s’agit-il ?

Mais qu’est-ce que la crise ?

Pour tout le monde, la crise, c’est le désordre.

En fait, la crise, c’est un trop grand ordre !

Quand le système fonctionne, c’est le désordre des marchés qui changent sans cesse, dans un sens puis dans l’autre, sans être prévisibles à long terme, qui donne sa structure au système. En période de crise, tous les capitalistes jouent à la baisse en même temps sur tous les marchés. Il y a des petites phases de hausse où tout monte, puis tout redescend encore plus bas. Les rythmes qui continuent à exister ne sont plus du même type. Ce sont des rythmes trop ordonnés. Ce type de rythmes montre que le système est atteint.

De telles crises systémiques peuvent avoir lieu dans un système social aussi bien que dans un système biologique. Quand les rythmes du cœur sont trop réguliers, quand le message du cerveau est trop ordonné, c’est la maladie grave.

Que veulent les capitalistes ?

Le système est menacé. On le sait puisqu’on n’arrête pas de nous dire qu’il faut toujours prendre des mesures plus radicales et des mesures impressionnantes pour sauver le système. Mais par qui le système est-il menacé ? Par les marchés, nous dit-on. C’est-à-dire par les possesseurs de capitaux !

Qu’est-ce qui leur prend, à ces capitalistes, d’agir de façon à détruire le système qui était le leur ?

Ils ne font rien de spécial. Ils ne font que fonctionner comme d’habitude. Investir et retirer leurs capitaux en fonction d’anticipations des résultats à venir. Mais toutes leurs anticipations leur disent que cela va s’effondrement. Et ils ne peuvent qu’y répondre en accroissant la chute …

Ils sont en train de détruire le système en fonctionnant comme ils le faisaient avant et pourtant, maintenant, cela a comme résultat de démolir tout l’édifice.

Chaque jour, leurs désinvestissements signifient : cette société va s’effondrer.

D’où leur vient cet affolement ? Il vient du fait que les investissements rentables ont tous été épuisés et qu’ils ne peuvent plus trouver des achats dont ils estiment qu’ils vont rapporter du profit.
Ce sont les grands capitalistes qui sont les artisans de la crise de leur propre système.

Est-ce quelque chose de si étonnant ? Pas du tout. Dans les crises systémiques, c’est toujours le cas.

Quand un système atteint ses limites ?

La société féodale s’est écroulée à partir de 1789 du fait d’une crise provoquée en 1788 par la noblesse. La société pharaonique égyptienne s’est écroulée en 2350 avant J.-C du fait d’une crise au sein de la classe dirigeante qui a relancé le féodalisme au détriment du pouvoir central. Les révolutions qui ont suivi ces crises au sein de la classe dirigeante n’effacent pas le fait qu’il a fallu les conditions objective (les classes dirigeantes ne peuvent plus gouverner comme avant) pour que les classes opprimées se posent le problème d’intervenir et fassent la révolution (ou, parfois, que la classe dirigeante fasse une contre-révolution ou une guerre préventive). Les guerres mondiales, les crises mondiales n’ont pas été provoquées par les opprimées. Les révolutions sociales n’ont été que le produit des crises de la domination de classe, et non le contraire.

C’est le capitalisme qui sonne la fin de son système. Bien entendu, cela n’enlève nullement aux opprimés, aux travailleurs, leur propre rôle pour bâtir une autre société.

La fin d’un système, qu’est-ce que cela signifie ?

Ce terme, qui est utilisé dans nos thèses, a fait réagir de nombreux lecteurs.

Pourquoi parler de mort du système alors que ce sont les travailleurs qui peuvent, et eux seuls, en finir définitivement avec la société de classe, son exploitation et son oppression ?

Il y a une différence entre une crise conjoncturelle, espèce de respiration un peu violente du système à de multiples échelles (crise d’une entreprise, d’un secteur, d’un pays, d’une région) et une crise systémique.

Quand le fonctionnement n’est maintenu que par des intubations artificielles (à coups de centaines de milliards de dollars ou d’euros) qui permettent tout juste d’éviter la mort immédiate, c’est que le patient (Sharon par exemple) est très gravement malade. S’il s’agit de lui envoyer des doses phénoménales de sérum, de le nourrir et de le faire respirer artificiellement, on peut imaginer qu’il sortira à un moment du coma. Mais à condition que tous les hommes autour de lui ne soient pas dans le même cas. L’économie du Japon peut passer par un trou. Ou celle de l’Asie. Quand c’est l’économie mondiale c’est comme si tous les médecins autour de Sharon étaient eux aussi dans le coma ! Là, c’est fini.

Cela change considérablement la perspective. La nécessité de la révolution sociale ne provient plus seulement de la révolte contre le système mais du fait que le bateau coule. Qu’on le veuille ou pas, il va falloir construire autre chose.

Il ne va pas s’enfoncer en une fois. Par contre, quand il commencera à sombrer, cela ira vite. Il faut s’y préparer.

Et ceux qui défendront qu’on peut encore prendre des mesures pour vivre sous son égide seront des gens dangereux.

Qu’est-ce qu’une crise capitaliste ?

Des dizaines, puis des centaines de milliards de dollars engouffrés dans les trous des banques, des assurances et des bourses, et le début d’une forte récession, la crise actuelle entraîne de nombreuses inquiétudes et d’encore plus nombreuses questions, le plus souvent sans réponse. Et pour cause ! Le sytème capitaliste, nous le connaissons bien et même nous ne connaissons que lui. Et pourtant, nous ne le connaissons pas ! C’est la crise elle-même qui révèle à la plupart d’entre nous des fonctionnements totalement ignorés.

Le plus souvent, nous réfléchissons au système capitaliste comme s’il s’agissait d’un mode rationnel de fonctionnement. Ou, au moins, d’un mécanisme qui devrait être rationnel. Nous le pensons comme un système dirigé par des êtres humains en vue de buts humains. Ce n’est pourtant pas le cas. Nous y voyons "une société de consommation" ou encore "un marché". Là encore, il s’agit d’un contre-sens. La société marchande est depuis longtemps morte et le capitalisme n’est pas essentiellement achat et vente.

La situation actuelle de crise est l’objet des mêmes contre-sens. Certains y voient une nouvelle crise de l’immobilier. D’autres une crise des ressources énergétiques. D’autres encore, une crise du système de régulation des marchés financiers. Toutes ces interprétations visent à cacher le véritable problème qui touche les fondements mêmes du système, et du système capitaliste et pas seulement du "système financier". En fait, il n’existe pas un système financier qui serait séparé du système capitaliste.

Le capitalisme n’est pas en crise parce qu’il manquerait d’argent, qu’il manquerait de richesses à pomper, qu’il manquerait de travailleurs à exploiter, ni parce que les exploités en ont assez mais, simplement, parce qu’il manque de perspectives pour ses investissements. Les besoins à satisfaire existent toujours (les besoins matériels insatisafaits croissent considérablement) , mais les satisfaire ne serait plus assez rentable. La course au profit se heurte donc à un mur, à une limite. Les processus multiples pour contourner cette limite (financiers notamment) n’ont fait qu’aggraver le niveau de la crise puisqu’ils ont accru dans des proportions phénoménales le capital total sans accroitre dans la même proportion les investissements possibles. Ces méthodes financières, monétaires, bancaires, etc... ne peuvent être que des palliatifs momentanés et ne peuvent pas résoudre le problème. le système est de plus en plus bloqué. Sa maladie : trop d’argent pour en faire du capital participant à des cycles économiques.

Il convient de distinguer les multiples crises de fonctionnement, indispensables au capitalisme ou crises de conjoncture des crises systémiques qui menacent de mort le système lui-même.

Il serait erroné de voir dans la crise actuelle une simple crise conjoncturelle. Les éléments dont on dispose à l’heure actuelle poussent plutôt à y voir une crise systémique, c’est-à-dire une véritable limite du système qui le remet fondamentalement en question.

Bien sûr, il y a diverses crises au sein de la situation actuelle :
 une crise immobilière doublée d’une crise spéculative
 une crise boursière
 une crise bancaire
 une récession économique
 une crise américaine liée aux divers déficits de l’impérialisme US
 une crise générale de la domination impérialiste
etc...

Mais tout cela ne s’additionne pas. Il n’y a en fait qu’une seule crise qui a longtemps été retardée par l’impérialisme US essentiellement grâce à ce que l’on a appelé la "mondialisation".

Il y a peu de chance que les USA parviennent encore à retarder l’explosion. les trémoussements des chefs d’Etat et des dirigeants financiers de la planète ne font que souligner leur grande inquiétude.

L’une des dernières mesures après quelques faillites retentissantes aux USA, en Grande Bretagne ou en Espagne, avait été la décision de Bush d’annoncer une limitation du droit de spéculer sur les sociétés dont les noms suivent. Sous-entendu, ces sociétés sont pleines de trous, vont bientôt faire faillite et le système financier va les attaquer. Ce sont :
BNP Paribas, Bank of America, Barclays Citigroup, Crédit Suisse, Daiwa Securities, Deutsche Bank, Allianz, Goldman Sachs, Royal Bank, HSBC Holding, JP Morgan Chase, Lehman Brothers, Merril Lynch, Mizuko Financial Group, Morgan Stanley, UBS, Freddie Mac et Fannie Mae. On a vu que cela n’a rien empêché et nombre de ces établissements sont soit en faillite, soit rachetés à bas prix, soit nationalisés. Les autres le seront bientôt ! La raison : officiellement quarante mille milliards de dollars de trous !!!

Mais, là encore, ce n’est que la partie immergée de l’iceberg de la crise. Sur le fond, le capitalisme lui-même répond : "no future" (pas d’avenir)
Ce ne sont pas les peuples, c’est le système qui n’y croit plus et ne voit plus d’échappatoire.

Laisser exploser le tout va de plus en plus lui paraître la meilleure solution pour parvenir au même résultat : faire payer aux peuples les frais de la crise, assainir en détruisant, pour - beaucoup plus tard et après quelles guerres ? - repartir sur des bases plus saines si tout n’est pas détruit d’ici là !

Pour les travailleurs et les peuples, la situation est neuve : il faut préparer un autre avenir débarrassé du capitalisme.


La crise économique du capitalisme vient de repartir de plus belle en janvier 2008. Dans la foulée de la crise des subprimes qui avait enflammé l’immobilier et la finance aux USA, en Angleterre et en Espagne. Elle se double maintenant d’une crise des liquidités, d’une chute des bourses et d’une crise des banques. La crise américaine y rajoute la menace d’une récession mondiale de grande ampleur. Des banques américaines et européennes sont menacées. Les banques françaises commencent à reconnaître l’existence de fonds douteux. La BNP avait commencé dès le début de la crise. La Société Générale reconnaît indirectement la même chose avec un perte de plusieurs milliards d’euros. Et ce n’est qu’un début ....

La finance, se détournant des bourses et du dollar, joue sur les monnaies, sur le prix du pétrole, sur les prix des produits alimentaires. Il en découle un effondrement du niveau de vie dans les pays les plus pauvres et jusque dans les pays riches. L’inflation se rajoute à la récession, rendant quasi impossible toute politique pour retarder ou éviter l’aggravation de la crise.

Comment comprendre le sens de cette crise économique ? Il s’agit bel et bien d’une crise systémique, c’est-à-dire d’une catastrophe générale qui prend sa source dans les mécanismes fondamentaux du système à l’échelle mondiale et les menace tous. Le capitalisme s’autodétruit, même s’il ne mène pas lui-même à une solution. Sans chercher à expliquer leurs crises. les classes dirigeantes prétendent éviter la crise. En fait, elles recherchent d’abord à éviter que leur système d’exploitation et de mise en coupe réglée du monde en soit affecté et, en second, que leurs propres capitaux accumulés, n’en subissent des conséquences. les peuples, comme les deux guerres mondiales l’ont montré, ne seront pas nécessairement épargnés, tant que les travailleurs épargneront le système capitaliste.

Pour le moment, s’il faut insister sur un point, c’est de ne faire aucune confiance aux déclarations des gouvernants, des banquiers et des industriels. Tous prétendront vouloir nous sauver et mettre sur pied plan sur plan dans ce but. Ils ne feront que nous enfoncer dans la misère et le chômage soi-disant pour nous sauver... Aucune confiance dans les banques pour y laisser nos économies. Aucune confiance aux industriels pour "sauver nos emplois". Aucune confiance aux gouvernants pour "protéger le pays de la crise" comme ils disent. Travailleurs, n’ayons confiance qu’en nous-mêmes, qu’en notre force, qu’en notre mobilisation, qu’en notre organisation ! Unissons-nous par delà les frontières. Ne croyons à aucun discours nationaliste présentant un autre peuple, un autre pays, un seul chef d’Etat, comme le seul responsable. Ils le sont tous ! La crise économique, eux tous les transformerons en occasion de nouvelles rapines, de nouvelles fortunes faciles. Transformons-la en une occasion de nous libérer définitivement de leur système d’exploitation ! Les travailleurs ont une société bien plus humaine, plus constructive, bien plus utile à l’ensemble des hommes à offrir. La nouvelle crise du capitalisme doit sonner l’avènement du socialisme !

Il ne s’agit pas là d’un simple vœu mais d’une nécessité. la crise pose en effet une question au monde, comme les crises mondiales systémiques précédentes.

En effet, les précédentes crises systémiques ont produit guerres mondiales, dictatures, fascismes mais aussi révolutions prolétariennes. Il y a une alternative : socialisme ou barbarie qui se pose à terme au monde.

En tout cas, la crise sonne le glas des conceptions réformistes. Celles-ci n’ont été capables que de négocier comment se faire exploiter. Aujourd’hui même ces sacrifices sont insuffisants pour le capitalisme qui est menacé par sa propre crise.

Dors et déjà les peuples les plus pauvres sont plongés dans la misère : l’Egypte redécouvre la famine et l’Afrique connaît de nouvelles émeutes. Ce n’est qu’un début. Le pire effondrent sera celui de la petite et de la moyenne bourgeoisie des pays riches : quand on est un peu au dessus, on tombe de plus haut ! Et cela signifie la fin de la démocratie capitaliste car sa propre base disparait. Pour ceux qui veulent réfléchir pour préparer l’avenir, la révolution mondiale n’est plus une lointaine perspective mais à une perspective à préparer dès maintenant.

Mais, d’abord, il convient de comprendre comment cette crise exprime des limites du système capitaliste incapable de proposer des investissements à une part croissante des capitaux. Là est la source de la part croissante de capitaux dédiés à la spéculation. Là est également la source de la crise actuelle. Cela signifie que l’on ne peut pas dire que la spéculation a causé la crise. C’est le capitalisme lui-même qui est en crise et pas seulement le système financier.

Il ne peut pas y avoir d’amélioration, de "régulation" du système. la crise touche aux fondement même de la société du profit capitaliste, société qui ne peut pas être réformée mais seulement renversée.

Le capitalisme en crise ne peut entraîner le monde que dans des catastrophes de grande ampleur. C’est le seul moyen pour lui de se relancer. Il doit (presque) tout détruire pour repartir sur de nouvelles bases. Par conséquent, loin d’être sorti rapidement de sa crise actuelle, le système mondial de domination va entraîner tous les peuples du monde dans le cauchemar : récession, effondrement des banques, misère, dictaures, guerres et guerre mondiale...

La seule réponse n’est pas régulation ni intervention de l’Etat mais intervention de la classe ouvrière et des peuples : REVOLUTION et la seule alternative : LE POUVOIR AUX TRAVAILLEURS visant à la suppression du mode d’exploitation capitaliste.


ENTRETIEN AVEC IMMANUEL WALLERSTEIN

"Je pense que nous sommes entrés depuis trente ans dans la phase terminale du système capitaliste. Ce qui différencie fondamentalement cette phase de la succession ininterrompue des cycles conjoncturels antérieurs, c’est que le capitalisme ne parvient plus à "faire système", au sens où l’entend le physicien et chimiste Ilya Prigogine (1917-2003) : quand un système, biologique, chimique ou social, dévie trop et trop souvent de sa situation de stabilité, il ne parvient plus à retrouver l’équilibre, et l’on assiste alors à une bifurcation.

La situation devient chaotique, incontrôlable pour les forces qui la dominaient jusqu’alors, et l’on voit émerger une lutte, non plus entre les tenants et les adversaires du système, mais entre tous les acteurs pour déterminer ce qui va le remplacer. Je réserve l’usage du mot "crise" à ce type de période. Eh bien, nous sommes en crise. Le capitalisme touche à sa fin.

Pourquoi ne s’agirait-il pas plutôt d’une nouvelle mutation du capitalisme, qui a déjà connu, après tout, le passage du capitalisme marchand au capitalisme industriel, puis du capitalisme industriel au capitalisme financier ?

Le capitalisme est omnivore, il capte le profit là où il est le plus important à un moment donné ; il ne se contente pas de petits profits marginaux ; au contraire, il les maximise en constituant des monopoles - il a encore essayé de le faire dernièrement dans les biotechnologies et les technologies de l’information. Mais je pense que les possibilités d’accumulation réelle du système ont atteint leurs limites. Le capitalisme, depuis sa naissance dans la seconde moitié du XVIe siècle, se nourrit du différentiel de richesse entre un centre, où convergent les profits, et des périphéries (pas forcément géographiques) de plus en plus appauvries.

A cet égard, le rattrapage économique de l’Asie de l’Est, de l’Inde, de l’Amérique latine, constitue un défi insurmontable pour "l’économie-monde" créée par l’Occident, qui ne parvient plus à contrôler les coûts de l’accumulation. Les trois courbes mondiales des prix de la main-d’oeuvre, des matières premières et des impôts sont partout en forte hausse depuis des décennies. La courte période néolibérale qui est en train de s’achever n’a inversé que provisoirement la tendance : à la fin des années 1990, ces coûts étaient certes moins élevés qu’en 1970, mais ils étaient bien plus importants qu’en 1945. En fait, la dernière période d’accumulation réelle - les "trente glorieuses" - n’a été possible que parce que les Etats keynésiens ont mis leurs forces au service du capital. Mais, là encore, la limite a été atteinte !

Y a-t-il des précédents à la phase actuelle, telle que vous la décrivez ?
Il y en a eu beaucoup dans l’histoire de l’humanité, contrairement à ce que renvoie la représentation, forgée au milieu du XIXe siècle, d’un progrès continu et inévitable, y compris dans sa version marxiste. Je préfère me cantonner à la thèse de la possibilité du progrès, et non à son inéluctabilité. Certes, le capitalisme est le système qui a su produire, de façon extraordinaire et remarquable, le plus de biens et de richesses. Mais il faut aussi regarder la somme des pertes - pour l’environnement, pour les sociétés - qu’il a engendrées. Le seul bien, c’est celui qui permet d’obtenir pour le plus grand nombre une vie rationnelle et intelligente.

Cela dit, la crise la plus récente similaire à celle d’aujourd’hui est l’effondrement du système féodal en Europe, entre les milieux du XVe et du XVIe siècle, et son remplacement par le système capitaliste. Cette période, qui culmine avec les guerres de religion, voit s’effondrer l’emprise des autorités royales, seigneuriales et religieuses sur les plus riches communautés paysannes et sur les villes. C’est là que se construisent, par tâtonnements successifs et de façon inconsciente, des solutions inattendues dont le succès finira par "faire système" en s’étendant peu à peu, sous la forme du capitalisme."

La crise économique signe la faillite historique des rapports de production capitalistes
par RevueInternationale le 28 mars, 2005

Cela fait maintenant plus de deux ans et demi que la bourgeoisie annonce la reprise et qu’elle est obligée à chaque trimestre d’en reporter l’échéance. Cela fait aussi plus de deux ans et demi que les performances économiques sont systématiquement en deçà des prévisions forçant la classe dominante à les revoir constamment à la baisse. Commencée au second semestre 2000, la récession actuelle est d’ores et déjà l’une des plus longues depuis la fin des années 60 et, si des signes de reprise se font jour outre-atlantique, c’est encore loin d’être le cas pour l’Europe et le Japon. Encore faut-il rappeler que, si les États-Unis remontent la pente, c’est essentiellement le produit d’un interventionnisme étatique parmi les plus vigoureux de ces 40 dernières années et d’une fuite en avant dans un endettement sans précédent qui fait craindre l’éclatement d’une nouvelle bulle spéculative, immobilière cette fois. Concernant l’interventionnisme étatique visant à soutenir l’activité économique, il faut noter que le gouvernement américain a laissé filer sans retenue le déficit budgétaire. De positif qu’il était en 2001, à hauteur de 130 milliards de dollars, le solde budgétaire en est arrivé à un déficit estimé à 300 milliards en 2003 (3,6% du PNB). Aujourd’hui, l’ampleur de ce déficit ainsi que ses prévisions en augmentation, compte tenu du conflit irakien et de la diminution des recettes fiscales consécutives à la baisse des impôts, inquiètent de plus en plus la classe politique et les milieux d’affaire des États-Unis. Concernant l’endettement, la baisse drastique des taux d’intérêt par la Réserve Fédérale a non seulement eu pour objectif de soutenir l’activité mais a surtout visé au maintien de la demande des ménages grâce à la renégociation de leurs prêts hypothécaires. L’allégement du poids des remboursements des emprunts immobiliers a ainsi permis un surcroît d’endettement octroyé par les banques. La dette hypothécaire des ménages américains s’est ainsi accrue de 700 milliards de dollars (plus de deux fois le déficit public !). L’accroissement de la triple dette américaine, de l’État, des ménages et extérieure explique que les États-Unis ont pu rebondir plus rapidement que les autres pays. Cependant, le rebond de ce pays ne pourra se maintenir que si son activité économique reste soutenue à moyen terme sous peine de se retrouver comme le Japon, il y a plus d’une dizaine d’années, face à l’éclatement d’une bulle spéculative immobilière et d’être en cessation de paiements face à toutes une série de créances non recouvrables. L’Europe ne peut guère se payer un tel luxe puisque ses déficits étaient déjà imposants au moment de l’éclatement de la récession et que les conséquences de cette dernière n’ont fait que les creuser un peu plus. Ainsi, l’Allemagne et la France qui représentent le c�ur économique de l’Europe sont aujourd’hui désignées comme les plus mauvaises élèves de la classe avec des déficits publics s’élevant à 3,8% pour la première et 4% pour la seconde. Ces niveaux sont déjà bien au-delà du plafond fixé par le traité de Maastricht (3%) et menacent ainsi ces pays de subir les foudres de la Commission européenne et les amendes prévues à l’égard des contrevenants. Ceci restreint d’autant les capacités de l’Europe à mener une politique conséquente de relance à la mesure des enjeux. De plus, en organisant la baisse du Dollar face à l’Euro pour réduire leur déficit commercial, les États-Unis vont peser sur la relance dans une Europe qui a de plus en plus de peine à dégager des excédents à l’exportation. Il n’est pas étonnant dès lors que les pays de l’axe centre européen comme l’Allemagne, la France, la Hollande et l’Italie soient en récession et que les autres n’en soient pas loin.
Ceux qui, lors de la chute du mur de Berlin, ont cru aux discours de la bourgeoisie sur l’avènement d’une nouvelle ère de prospérité et l’ouverture du ’marché des pays de l’Est’ en sont pour leurs frais. Ainsi la réunification de l’Allemagne, loin de représenter un tremplin pour la ’domination allemande’, constitua et constitue toujours un lourd fardeau pour ce pays. L’Allemagne, qui était la locomotive de l’Europe, est devenue depuis la réunification le wagon de queue qui peine à suivre le rythme du train. L’inflation est basse et frise la déflation, les taux d’intérêts réels élevés dépriment encore plus l’activité et l’existence de l’Euro interdit désormais de mener des politiques de dévaluation compétitive de la monnaie nationale. Le chômage, la modération salariale et la récession ont pour effet une stagnation du marché intérieur encore jamais observée lors des précédents replis de la conjoncture dans ce pays. De même, la future intégration des pays de l’Est au sein de l’Europe pèsera encore plus sur la conjoncture économique. Tout ceci a pour conséquence inéluctable un accroissement drastique des attaques contre les conditions de travail et le niveau de vie de la classe ouvrière. Mesures d’austérité, licenciements massifs et aggravation sans précédent de l’exploitation au travail sont sur tous les agendas de la bourgeoisie partout dans le monde. Selon les statistiques officielles largement sous-estimées, le chômage est en route pour atteindre les 5 millions en Allemagne, 6,1% aux États-Unis et les 10% en France à la fin de cette année. En Europe, l’axe franco-allemand, avec le plan Raffarin et l’Agenda 2010 de Schröder, donne le ton de la politique qui est menée un peu partout : creusement du déficit budgétaire, réduction des impôts pour les hauts revenus, assouplissement du droit de licenciement, réduction des indemnités de chômage et allocations diverses, diminution du remboursement des soins de santé et recul de l’âge de la retraite. Les pensionnés font aujourd’hui particulièrement les frais de l’austérité laquelle détruit définitivement l’idée de la possible existence d’un ’repos bien mérité’ après une vie de dur labeur. Ainsi, aux États-Unis, avec la faillite ou les pertes de nombreux fonds de pension suite au krach boursier, l’on assiste à une entrée massive de retraités sur le marché de l’emploi, contraints qu’ils sont de se remettre au travail pour survivre. La classe ouvrière doit faire face à une vaste offensive d’austérité à tout crin qui n’aura d’ailleurs d’autre conséquence sur le plan économique que de prolonger encore plus la récession et d’engendrer de nouvelles attaques.
La crise, une expression de l’obsolescence des rapports de production capitalistes
Le déclin ininterrompu du taux de croissance depuis la fin des années 60 (Cf. Notre article "Les oripeaux de la ’prospérité économique’ arrachés par la crise" dans la Revue internationale n°114 ainsi que le graphique ci-dessous) démasque bien l’immense bluff savamment entretenu par la bourgeoisie tout au long des années 90 sur la prétendue prospérité économique retrouvée du capitalisme grâce à la ’nouvelle’ économie, la mondialisation et les recettes néo-libérales. Et pour cause, la crise n’est en rien une affaire de politique économique : si les recettes keynésiennes des années 50-60 puis néo-keynésiennes des années 70 sont arrivées à épuisement et si les recettes néo-libérales des années 80 et 90 n’ont rien pu résoudre c’est bien parce que la crise mondiale ne résulte pas fondamentalement d’une "mauvaise gestion de l’économie" mais qu’elle relève des contradictions de fond qui traversent la mécanique du capitalisme. Si la crise n’est pas une affaire de politique économique, c’est encore moins une affaire d’équipe gouvernementale. Qu’ils soient de gauche ou de droite, les gouvernements ont utilisé tour à tour toutes les recettes disponibles. Ainsi, les gouvernements américain et anglais actuels, identifiés comme les plus néo-libéraux et pro-mondialisation sur le plan économique, sont de couleurs politiques différentes et utilisent aujourd’hui les recettes les plus vigoureusement néo-keynésiennes qui soient en laissant filer leurs déficits publics. De même, à regarder de plus près les programmes d’austérité du gouvernement Schröder (social-démocrate - écologiste) et Raffarin (droite libérale), force est de constater qu’ils se ressemblent comme deux gouttes d’eau et mettent en application les mêmes mesures.
Face à cette spirale de crise et d’austérité ininterrompue depuis plus de 35 ans, l’une des responsabilités majeures des révolutionnaires est de démontrer qu’elle trouve ses racines dans l’impasse historique du capitalisme, dans l’obsolescence de ce qui est au c�ur de son rapport de production fondamental, le salariat (1). En effet, le salariat concentre en lui à la fois toutes les limites sociales, économiques et politiques à la production du profit capitaliste et, de par son mécanisme même, pose également les obstacles à la réalisation pleine et entière de ce dernier (2). La généralisation du salariat fut à la base de l’expansion du capitalisme au 19e siècle et, à partir de la première guerre mondiale, de l’insuffisance relative des marchés solvables eu égard aux besoins de l’accumulation. Contre toutes les fausses explications mystificatrices de la crise, il y va de la responsabilité des révolutionnaires de souligner cette impasse, de montrer en quoi le capitalisme, s’il a été un mode de production nécessaire et progressif, est aujourd’hui historiquement dépassé et mène l’humanité à sa perte. Comme pour toutes les phases de décadence des modes antérieurs de production (féodal, antique, etc.) cette impasse réside dans le fait que le rapport social de production fondamental est devenu trop étroit et ne permet plus d’impulser comme auparavant le développement des forces productives (3). Pour la société d’aujourd’hui, le salariat constitue désormais ce frein au plein développement des besoins de l’humanité. Seules l’abolition de ce rapport social et l’instauration du communisme permettront à l’humanité de se libérer des contradictions qui l’assaillent.
Or, depuis la chute du mur de Berlin, la bourgeoisie n’a eu de cesse de mener des campagnes sur ’l’inanité du communisme’, ’l’utopie de la révolution’ et la ’dilution de la classe ouvrière’ en une masse de citoyens dont la seule forme d’action légitime serait la réforme ’démocratique’ d’un capitalisme présenté désormais comme le seul horizon indépassable de l’humanité. Dans cette vaste escroquerie idéologique, c’est aux altermondialistes qu’est dévolu le monopole de la contestation. La bourgeoisie ne ménage pas sa peine pour leur donner un rôle de premier plan comme interlocuteurs privilégiés de sa propre critique : une large place est laissée dans les médias aux analyses et actions de ce courant, des invitations occasionnelles sont faites lors de sommets et autres rencontres officielles à leur plus éminents représentants, etc. Et pour cause, le fond de commerce des altermondialistes est le complément parfait à la campagne idéologique de la bourgeoisie sur ’l’utopie du communisme’ puisqu’ils partent des mêmes postulats : le capitalisme serait le seul système possible et sa réforme la seule alternative. Pour ce mouvement, avec l’organisation ATTAC en tête et son conseil ’d’experts en économie’, le capitalisme pourrait être humanisé pour autant que le ’bon capitalisme régulé’ chasse le ’mauvais capitalisme financier’. La crise serait la conséquence de la dérégulation néo-libérale et de la mainmise du capitalisme financier imposant sa dictature des 15% comme rendement obligé au capitalisme industriel... le tout ayant été décidé dans une obscure réunion tenue en 1979 appelé ’le consensus de Washington’. L’austérité, l’instabilité financière, les récessions, etc. ne seraient que les conséquences de ce nouveau rapport de forces qui se serait établi au sein de la bourgeoisie au profit du capital usuraire. D’où les idées de ’réguler la finance’, la ’faire reculer’ et de ’réorienter les investissements vers la sphère productive’, etc.
Dans cette ambiance de confusion générale sur les origines et les causes de la crise, il s’agit pour les révolutionnaires de rétablir une compréhension claire des bases de celle-ci et, surtout, de montrer qu’elle est le produit de la faillite historique du capitalisme. En d’autres termes, il s’agit pour eux de réaffirmer la validité du marxisme dans ce domaine. Malheureusement, à regarder les analyses de la crise proposées par les groupes du milieu politique prolétarien comme le PCInt - Programme Communiste ou le BIPR, force est de constater qu’ils sont loin d’une telle réaffirmation et notamment d’être capables de se démarquer de l’idéologie ambiante véhiculée par l’altermondialisme. Certes, ces deux groupes appartiennent incontestablement au camp prolétarien et se distinguent fondamentalement de la mouvance altermondialiste par leurs dénonciations des illusions réformistes et par la défense de la perspective de la révolution communiste. Cependant, leur propre analyse de la crise est largement empruntée au gauchisme défroqué de cette mouvance. Morceaux choisis : "Les gains issus de la spéculation sont si importants qu’ils ne sont pas seulement attractifs pour les entreprises ’classiques’ mais aussi pour bien d’autres, citons entre autres, les compagnies d’assurance ou les fonds de pension dont Enron est un excellent exemple (...) La spéculation représente le moyen complémentaire, pour ne pas dire principal, pour la bourgeoisie, de s’approprier la plus-value (...) Une règle s’est imposée, fixant à 15% l’objectif minimum de rendement pour les capitaux investis dans les entreprises. Pour atteindre ou dépasser ce taux de croissance des actions, la bourgeoisie a dû accroître les conditions d’exploitation de la classe ouvrière : les rythmes de travail ont été intensifiés, les salaires réels baissés. Les licenciements collectifs ont touché des centaines de milliers de travailleurs." (BIPR in Bilan et Perspectives n°4, p. 6). On peut déjà relever que c’est une curieuse façon de poser le problème pour un groupe qui se proclame "matérialiste" et qui considère même que le CCI est "idéaliste". "Une règle s’est imposée" nous dit le BIPR. S’est-elle imposée toute seule ? Nous ne ferons pas l’injure au BIPR de lui attribuer une telle idée. C’est une classe, un gouvernement ou une organisation humaine donnée qui a imposé cette nouvelle règle ; mais pourquoi ? Parce que certains puissants de ce monde sont brusquement devenus plus rapaces et méchants que d’habitude ? Parce que les "méchants" l’on emporté sur les "bons" (ou les "moins méchants"). Ou tout simplement, comme le considère le marxisme, parce les conditions objectives de l’économie mondiale ont obligé la classe dominante à intensifier l’exploitation des prolétaires. Ce n’est malheureusement pas ainsi que ce passage pose le problème. De plus, et c’est encore plus grave, c’est un discours que l’on pourrait lire dans n’importe quel opuscule altermondialiste : c’est la spéculation financière qui est devenue la principale source du profit capitaliste (!), c’est la spéculation financière qui impose sa règle des 15% aux entreprises, c’est la spéculation financière qui est responsable de l’aggravation de l’exploitation, des licenciements massifs et de la baisse des salaires et c’est même la spéculation financière qui est à la source d’un processus de désindustrialisation et de la misère sur l’ensemble de la planète "L’accumulation des profits financiers et spéculatifs alimente un processus de désindustrialisation entraînant chômage et misère sur l’ensemble de la planète" (idem p. 7). Quant au PCInt - Programme Communiste, ce n’est guère mieux même si c’est dit en termes plus généraux et qu’il se couvre de l’autorité de Lénine : "Le capital financier, les banques deviennent en vertu du développement capitaliste les véritables acteurs de la centralisation du capital, accroissant la puissance de gigantesques monopoles. Au stade impérialiste du capitalisme, c’est le capital financier qui domine les marchés, les entreprises, toute la société, et cette domination conduit elle-même à la concentration financière jusqu’au point où "le capital financier, concentré en quelques mains et exerçant un monopole de fait, prélève des bénéfices énormes toujours croissants sur la constitution de firmes, les émissions de valeurs, les emprunts d’État, etc., affermissant la domination des oligarchies financières et frappant la société tout entière d’un tribut au profit des monopolistes" (Lénine, in L’impérialisme stade suprême du capitalisme). Le capitalisme qui naquit du minuscule capital usuraire, termine son évolution sous la forme d’un gigantesque capital usuraire" (Programme Communiste n°98, p.1). Voici à nouveau une dénonciation sans appel du capital financier parasitaire qui pourrait plaire au plus radical des altermondialistes (4). On chercherait en vain dans ces quelques extraits une quelconque démonstration que c’est bien le capitalisme comme mode de production qui a fait son temps, que c’est le capitalisme comme un tout qui est responsable des crises, des guerres et de la misère du monde. On chercherait en vain la dénonciation de l’idée centrale des altermondialistes selon laquelle ce serait le capital financier qui serait la cause des crises alors que c’est le capitalisme comme système qui est au c�ur du problème. En reprenant des pans entiers de l’argumentation altermondialiste, ces deux groupes de la Gauche Communiste laissent la porte grande ouverte à l’opportunisme théorique envers les analyses gauchistes. Celles-ci présentent la crise comme la conséquence de l’instauration d’un nouveau rapport de forces qui se serait instauré au sein de la bourgeoisie entre l’oligarchie financière et le capital industriel. Les oligopoles financiers auraient pris le dessus sur le capital des entreprises au moment de la décision prise à Washington de brusquement relever les taux d’intérêt.
En réalité, il n’y a guère eu de ’triomphe des banquiers sur les industriels’, c’est la bourgeoisie comme un tout qui est passée à la vitesse supérieure dans son offensive contre la classe ouvrière.
Les ’profits financiers’ comme bases d’un capitalisme usuraire ?
La dénonciation de la financiarisation est aujourd’hui un thème commun à tous les économistes dit ’critiques’. L’explication en vogue à l’heure actuelle parmi ces ’critiques du capitalisme’ est de prétendre que le taux de profit a effectivement augmenté mais qu’il a été confisqué par l’oligarchie financière de sorte que le taux de profit industriel ne s’est pas rétabli significativement, expliquant par là l’absence de redémarrage de la croissance (cf. graphique ci-dessous).
Il est exact que depuis le début des années 80, suite à la décision prise en 1979 de faire remonter les taux d’intérêt, une part importante de la plus-value extraite n’est plus accumulée via l’autofinancement des entreprises mais est distribuée sous forme de revenus financiers. La réponse dominante à ce constat est de présenter cette croissance de la financiarisation comme une ponction sur le profit global qui l’empêcherait ainsi de s’investir productivement. La faiblesse de la croissance économique s’expliquerait donc par le parasitisme de la sphère financière, par l’hypertrophie du ’capital usuraire’. De là les ’explications’ pseudo marxistes s’appuyant sur les maladresses de Lénine "le capital financier, concentré en quelques mains et exerçant un monopole de fait, prélève des bénéfices énormes toujours croissants sur la constitution de firmes, les émissions de valeurs, les emprunts d’État, etc. affermissant la domination des oligarchies financières et frappant la société tout entière d’un tribut au profit des monopolistes" selon lesquelles les profits financiers exerceraient une véritable ’ponction’ sur les entreprises (le fameux return de 15%). Cette analyse est un retour à l’économie vulgaire où le capital pourrait choisir entre l’investissement productif et les placements financiers en fonction de la hauteur relative du taux de profit d’entreprise et du taux d’intérêt. Sur un plan plus théorique, ces approches de la finance comme élément parasitaire renvoient à deux théories de la valeur et du profit. L’une, marxiste, dit que la valeur existe préalablement à sa répartition et est exclusivement produite dans le procès de production à travers l’exploitation de la force de travail. Dans le Livre III du Capital, Marx précise que le taux d’intérêt est "...une partie du profit que le capitaliste actif doit payer au propriétaire du capital, au lieu de la mettre dans sa poche". En cela Marx se distingue radicalement de l’économie bourgeoise qui présente le profit comme l’addition des revenus des facteurs (revenus du facteur travail, revenus du facteur capital, revenus du facteur foncier, etc.). L’exploitation disparaît puisque chacun des facteurs est rémunéré selon sa propre contribution à la production : "pour les économistes vulgaires qui essaient de présenter le capital comme source indépendante de la valeur et de la création de valeur, cette forme est évidemment une aubaine, puisqu’elle rend méconnaissable l’origine du profit" (Marx). Le fétichisme de la finance consiste dans l’illusion que la détention d’une part de capital (une action, un Bon du Trésor, une obligation, etc.) vont, au sens propre du terme, ’produire’ des intérêts. Détenir un titre c’est s’acheter un droit à recevoir une fraction de la valeur créée mais cela ne crée en soi aucune valeur. C’est le travail et exclusivement lui qui confère de la valeur à ce qui est produit. Le capital, la propriété, une action, un livret d’épargne, un stock de machines ne produisent quoi que ce soit par eux-mêmes. Ce sont les hommes qui produisent (5). Le capital ’rapporte’, au sens où un chien de chasse rapporte le gibier. Il ne crée rien, mais il donne à son propriétaire le droit à une part de ce qu’à créé celui qui s’en est servi. En ce sens le capital désigne moins un objet qu’un rapport social : une partie du fruit du labeur de certains aboutit entre les mains de qui possède le capital. L’idéologie altermondialiste inverse l’ordre des choses en confondant l’extraction de la plus-value d’avec sa répartition. Le profit capitaliste tire exclusivement sa source de l’exploitation du travail, il n’existe pas de profits spéculatifs pour l’ensemble de la bourgeoisie (même si tel ou tel secteur particulier peut gagner à la spéculation) ; la Bourse ne crée pas de valeur. L’autre théorie, flirtant avec l’économie vulgaire, conçoit le profit global comme la somme d’un profit industriel d’un côté et d’un profit financier de l’autre. Le taux d’accumulation serait faible parce que le profit financier serait supérieur au profit industriel. C’est une vision héritée en droite ligne des défunts partis staliniens qui ont répandu une critique ’populaire’ du capitalisme vu comme la confiscation d’un profit ’légitime’ par une oligarchie parasitaire (les 200 familles, etc.). L’idée est ici la même ; elle repose sur un véritable fétichisme de la finance selon laquelle la Bourse serait un moyen de créer de la valeur au même titre que l’exploitation du travail. C’est en cela que réside toute la mystification sur la taxe Tobin, la régulation et l’humanisation du capitalisme répandue par les altermondialistes. Tout ce qui transforme une contradiction subséquente (la financiarisation) en contradiction principale porte en soi le danger d’un glissement typiquement gauchiste consistant à séparer le bon grain de l’ivraie : d’un côté le capitalisme qui investit, de l’autre celui qui spécule. Cela mène à voir la financiarisation comme une espèce de parasite sur un corps capitaliste sain. La crise ne disparaîtra pas, même après l’abolition du ’gigantesque capital usuraire’ si cher à Programme Communiste. D’une certaine manière, insister sur la financiarisation du capitalisme conduit à sous-estimer la profondeur de la crise en laissant entendre qu’elle proviendrait du rôle parasite de la finance qui exigerait des taux de profit trop élevés aux entreprises les empêchant ainsi de réaliser leurs investissements productifs. Si telle était bien la racine de la crise, alors une "euthanasie des rentiers" (Keynes) suffirait à la résoudre.
Ces glissements gauchistes au niveau de l’analyse mènent à présenter un certain nombre de données économiques qui cherchent à démontrer, en citant des chiffres qui donnent le vertige, cette domination absolue de la finance, et l’énormité des ponctions qu’elle opère : "... les grandes entreprises virent leurs investissements s’orienter vers les marchés financiers, supposés plus ’porteurs’ (...) Ce marché phénoménal se développe à une vitesse bien supérieure à celui de la production (...) En ce qui concerne la spéculation monétaire sur les 1300 milliards de dollars qui se déplaçaient en 1996, chaque jour entre les différentes monnaies, 5 à 8% au maximum correspondaient au paiement de marchandises ou de services vendus d’un pays à l’autre (il convient d’y ajouter les opérations de change non spéculatives). 85% de ces 1300 milliards correspondaient donc à des opérations quotidiennes purement spéculatives ! Les chiffres sont à réactualiser, gageons que les 85% sont aujourd’hui dépassés" (BIPR, Bilan et Perspectives n°4, p.6). Oui ils ont été dépassés et les montants ont atteints les 1500 milliards de dollars, soit presque la totalité de la dette du Tiers-Monde... mais ces chiffres ne font peur qu’aux ignorants car ils n’ont aucun sens ! En réalité cet argent ne fait que tourner et les sommes annoncées sont d’autant plus importantes que le carrousel va vite. Il suffit de s’imaginer une personne convertissant 100 chaque demi-heure pour spéculer entre les monnaies ; au bout de 24 heures les transactions totales se seront élevées à 4800, et si elle spéculait chaque quart d’heure les transactions totales auront doublé... mais cette somme est purement virtuelle car la personne ne possède toujours que 100 plus 5 ou moins 10 suivant son talent dans l’art de la spéculation. Malheureusement cette présentation médiatique des faits, reprise par le BIPR, crédibilise les interprétations de la crise comme un produit de l’action parasitaire de la finance. En réalité, c’est l’augmentation de la sphère financière qui s’explique par celle de la plus-value non-accumulée. C’est la crise de surproduction et donc la raréfaction des lieux d’accumulation rentables qui engendrent la rétribution de plus-value sous forme de revenus financiers, et non la finance qui s’oppose ou se substitue à l’investissement productif. La financiarisation correspond à l’augmentation d’une fraction de la plus-value qui ne trouve plus à être réinvestie avec profit (6). La distribution de revenus financiers n’est pas automatiquement incompatible avec l’accumulation basée sur l’autofinancement des entreprises. Lorsque les profits tirés de l’activité économique sont attractifs, les revenus financiers sont réinvestis et participent de manière externe à l’accumulation des entreprises. Ce qu’il faut expliquer, ce n’est pas que les profits sortent par la porte sous forme de distribution de revenus financiers, mais que ces derniers ne reviennent pas par la fenêtre pour se réinvestir productivement dans le circuit économique. Si une partie significative de ces sommes était réinvestie, cela devrait se traduire par une élévation du taux d’accumulation. Si cela ne se produit pas c’est parce qu’il y a crise de surproduction et donc raréfaction des lieux d’accumulation rentables. Le parasitisme financier est un symptôme, une conséquence des difficultés du capitalisme et non la cause à la racine de ces difficultés. La sphère financière est la vitrine de la crise parce que c’est là que surgissent les bulles boursières, les effondrements monétaires et les turbulences bancaires. Mais ces bouleversements sont la conséquence de contradictions qui ont leur origine dans la sphère productive.
Le salariat au coeur de la crise de surproduction
Que s’est-il passé depuis une vingtaine d’années ? L’austérité et la baisse des salaires (7) ont permis de rétablir le taux de profit des entreprises mais ces profits accrus n’ont pas conduit à un relèvement du taux d’accumulation (l’investissement) et donc de la productivité du travail. La croissance est ainsi restée dépressive (Cf. graphique ci-dessous).
En bref, le freinage du coût salarial a restreint les marchés, nourri les revenus financiers et non le réinvestissement des profits. Mais pourquoi aujourd’hui y a-t-il un si faible réinvestissement alors que les profits des entreprises ont été rétablis ? Pourquoi l’accumulation ne redémarre-t-elle pas suite à la remontée du taux de profit depuis plus de vingt ans ? Marx, et Rosa Luxemburg à sa suite, nous ont enseigné que les conditions de la production (l’extraction de la plus-value) sont une chose et que les conditions de réalisation de ce surtravail cristallisé dans les marchandises produites en sont une autre. Le surtravail cristallisé dans la production ne devient de la plus-value sonnante et trébuchante, de la plus-value accumulable, que si les marchandises produites ont été vendues sur le marché. C’est cette différence fondamentale entre les conditions de la production et celles de la réalisation qui nous permet de comprendre pourquoi il n’y a pas de lien d’automatique entre le taux de profit et la croissance.
Le graphique ci-dessus résume bien l’évolution du capitalisme depuis la Seconde Guerre mondiale. L’exceptionnelle phase de prospérité après la reconstruction voit toutes les variables fondamentales du profit, de l’accumulation, de la croissance et de la productivité du travail augmenter ou fluctuer à des niveaux élevés jusqu’à la réapparition de la crise ouverte au tournant des années 1960-70. L’épuisement des gains de productivité qui commence dès les années 60 entraîne les autres variables dans une chute de concert jusqu’au début des années 80. Depuis, le capitalisme est dans une situation tout à fait inédite sur le plan économique marquée par une configuration qui associe un taux de profit élevé avec une productivité du travail, un taux d’accumulation et donc un taux de croissance médiocres. Cette divergence entre l’évolution du taux de profit et les autres variables depuis plus de 20 ans ne peut se comprendre que dans le cadre de la décadence du capitalisme. Il n’en va pas ainsi pour le BIPR qui estime aujourd’hui que le concept de décadence est à reléguer aux poubelles de l’histoire : "Quel rôle joue donc le concept de décadence sur le terrain de la critique de l’économie politique militante, c’est-à-dire de l’analyse approfondie des phénomènes et des dynamiques du capitalisme dans la période que nous vivons ? Aucun. (...) Ce n’est pas avec le concept de décadence que l’on peut expliquer les mécanismes de la crise, ni dénoncer le rapport entre la crise et la financiarisation, le rapport entre celle-ci et les politiques des super-puissances pour le contrôle de la rente financière et de ses sources" (BIPR, "Éléments de réflexion sur les crises du CCI"). Ainsi, le BIPR préfère abandonner le concept clef de décadence qui fondait ses propres positions (8) pour lui substituer les concepts en vogue dans le milieu altermondialiste de ’financiarisation’ et de ’rente financière’ pour ’comprendre la crise et les politiques des super-puissances’. Il en arrive même à affirmer que "...ces concepts [notamment de décadence] sont étrangers à la méthode et à l’arsenal de la critique de l’économie politique" (idem). Pourquoi le cadre de la décadence est-il indispensable pour comprendre la crise aujourd’hui ? Parce que le déclin ininterrompu des taux de croissance depuis la fin des années 60 au sein des pays de l’OCDE, avec respectivement 5,2%, 3,5%, 2,8%, 2,6% et 2,2% pour les décennies 60, 70, 80, 90 et 2000-02, confirme le retour progressif du capitalisme à sa tendance historique ouverte par la Première Guerre mondiale. La parenthèse de l’exceptionnelle phase de croissance (1950-75) est définitivement close (9). Tel un ressort cassé qui, après un ultime sursaut, retrouve sa position d’origine, le capitalisme en revient inexorablement aux rythmes de croissance qui prévalaient en 1914-50. Contrairement à ce que crient sur tous les toits nos censeurs, la théorie de la décadence du capitalisme n’est en rien un produit spécifique de la stagnation des années trente (10). Elle constitue l’essence même du matérialisme historique, le secret enfin trouvé de la succession des modes de production dans l’histoire et, à ce titre, elle donne le cadre de compréhension pour analyser l’évolution du capitalisme et, en particulier, de la période qui s’est ouverte au moment de la Première Guerre mondiale. Elle a une portée générale ; elle est valable pour toute une ère historique et ne dépend aucunement d’une période particulière ou d’une conjoncture économique momentanée. D’ailleurs, même en intégrant l’exceptionnelle phase de croissance entre 1950 et 1975, deux guerres mondiales, la dépression des années 30 et plus de trente-cinq années de crise et d’austérité présentent un bilan sans appel de la décadence du capitalisme : à peine 30 à 35 années (en comptant large) de ’prospérité’ pour 55 à 60 années de guerre et/ou de crise économique (et le pire est encore à venir !). La tendance historique au frein de la croissance des forces productives par des rapports capitalistes de production devenus obsolètes constitue la règle, le cadre qui permet de comprendre l’évolution du capitalisme, y compris l’exception de la phase de prospérité d’après la seconde guerre mondiale (nous y reviendrons dans de prochains articles). Par contre, à l’image du courant réformiste qui s’est laissé berner par les performances du capitalisme de la Belle Époque, c’est l’abandon de la théorie de la décadence qui est un pur produit des années de prospérité. Par ailleurs le graphique ci-dessus nous montre clairement que le mécanisme qui est à la base de la remontée du taux de profit n’est ni un regain de la productivité du travail, ni un allégement en capital. Ceci nous permet aussi de tordre définitivement le cou aux bavardages sur la prétendue ’nouvelle révolution technologique’. Certains universitaires, émerveillés qu’ils sont par l’informatique et tombant dans le panneau des campagnes de la bourgeoisie sur la ’nouvelle économie’... confondent la fréquence de leur ordinateur avec la productivité du travail : ce n’est pas parce que le Pentium 4 tourne deux cent fois plus rapidement que la première génération de ce processeur que l’employé de bureau tapera deux cent fois plus vite à sa machine et pourra accroître sa productivité d’autant. Le graphique ci-dessus montre clairement que la productivité du travail continue sa décroissance depuis les années 60. Et pour cause, malgré des profits restaurés, le taux d’accumulation (les investissements à la base de possibles gains de productivité) n’a pas repris. La ’révolution technologique’ n’existe que dans les discours des campagnes bourgeoises et dans l’imagination de ceux qui les gobent. Plus sérieusement, ce constat empirique du ralentissement de la productivité (du progrès technique et de l’organisation du travail), ininterrompu depuis les années 60, contredit l’image médiatique, bien ancrée dans les esprits, d’un changement technologique croissant, d’une nouvelle révolution industrielle qui serait aujourd’hui portée par l’informatique, les télécommunications, Internet et le multimédia. Comment expliquer la force de cette mystification qui inverse la réalité dans la tête de chacun d’entre nous ? Tout d’abord, il faut rappeler que les progrès de productivité au lendemain de la Seconde Guerre mondiale étaient bien plus spectaculaires que ce qui nous est présenté à l’heure actuelle comme ’nouvelle économie’. La diffusion de l’organisation du travail en trois équipes de 8 heures, la généralisation de la chaîne mobile dans l’industrie, les rapides progrès dans le développement et la généralisation des transports de tous types (camion, train, avion, voiture, bateau), la substitution du charbon par un pétrole meilleur marché, l’invention des matières plastiques et le remplacement de matériaux coûteux par ces dernières, l’industrialisation de l’agriculture, la généralisation du raccordement à l’électricité, au gaz naturel, à l’eau courante, à la radio et au téléphone, la mécanisation de la vie domestique via le développement de l’électroménager, etc. sont bien plus spectaculaires en termes de progrès de productivité que tout ce qu’apportent les développements dans l’informatique et les télécommunications. Dès lors, les progrès de productivité du travail n’ont fait que décroître depuis les Golden Sixties. Ensuite, parce qu’une confusion est entretenue en permanence entre l’apparition de nouveaux biens de consommation et les progrès de productivité. Le flux d’innovations, la multiplication de nouveautés aussi extraordinaires soient-elles (DVD, GSM, Internet, etc.) au niveau des biens de consommation ne recouvre pas le phénomène du progrès de la productivité. Ce dernier signifie la capacité à économiser sur les ressources requises pour la production d’un bien ou d’un service. L’expression progrès technique doit toujours être entendue dans le sens de progrès des techniques de production et/ou d’organisation, du strict point de vue de la capacité à économiser sur les ressources utilisées dans la fabrication d’un bien ou la prestation d’un service. Aussi formidables soient-ils, les progrès du numérique ne se traduisent pas dans des progrès significatifs de productivité au sein du processus de production. Là est tout le bluff de la ’nouvelle économie’. Enfin, contrairement aux affirmations de nos censeurs qui nient la réalité de la décadence et la validité des apports théoriques de Rosa Luxemburg - et qui font de la baisse tendancielle du taux de profit l’alpha et l’oméga de l’évolution du capitalisme -, le cours de l’économie depuis le début des années 80 nous montre clairement que ce n’est pas parce que ce taux remonte que la croissance repart. Il y a certes un lien fort entre le taux de profit et le taux d’accumulation mais il n’est ni mécanique, ni univoque : ce sont deux variables partiellement indépendantes. Ceci contredit formellement les affirmations de ceux qui font obligatoirement dépendre la crise de surproduction de la chute du taux de profit et le retour de la croissance de sa remontée : "Cette contradiction, la production de la plus-value et sa réalisation, apparaît comme une surproduction de marchandises et donc comme cause de la saturation du marché, qui à son tour s’oppose au processus d’accumulation, ce qui met le système dans son ensemble dans l’impossibilité de contrebalancer la chute du taux de profit. En réalité, le processus est inverse. (...) C’est le cycle économique et le processus de valorisation qui rendent ’solvable’ ou ’insolvable’ le marché. C’est partant des lois contradictoires qui règlent le processus d’accumulation que l’on peut arriver à expliquer la ’crise’ du marché" (Texte de présentation de Battaglia Comunista à la première conférence des groupes de la Gauche communiste, mai 1977). Aujourd’hui nous pouvons clairement constater que le taux de profit remonte depuis près d’une vingtaine d’années alors que la croissance reste déprimée et que la bourgeoisie n’a jamais autant parlé de déflation qu’à l’heure actuelle. Ce n’est pas parce que le capitalisme parvient à produire avec suffisamment de profit qu’il crée automatiquement, par ce mécanisme même, le marché solvable où il sera capable de transformer le surtravail cristallisé dans ses produits en plus-value sonnante et trébuchante lui permettant de réinvestir ses profits. L’importance du marché ne dépend pas automatiquement de l’évolution du taux de profit ; tout comme les autres paramètres conditionnant l’évolution du capitalisme, c’est une variable partiellement indépendante. C’est la compréhension de cette différence fondamentale entre les conditions de la production et celles de la réalisation, déjà bien mise en évidence par Marx et magistralement approfondie par Rosa Luxemburg, qui nous permet de comprendre pourquoi il n’y a pas d’automatisme entre le taux de profit et la croissance.
Décadence et orientations pour les luttes de résistance
Rejetant la décadence comme cadre de compréhension de la période actuelle et de la crise, pointant la spéculation financière comme la cause de tous les malheurs du monde, sous-estimant le développement du capitalisme d’État sur tous les plans, les deux plus importants groupes de la Gauche communiste en dehors du CCI - Programme Communiste et le BIPR - ne peuvent offrir une orientation claire et cohérente aux luttes de résistance de la classe ouvrière. Il suffit de lire les analyses qu’ils font de la politique de la bourgeoisie en matière d’austérité et les conclusions qu’ils tirent de leur analyse de la crise pour s’en rendre compte : "Courant des années 50 les économies capitalistes se remirent en route et la bourgeoisie vit enfin refleurir de manière durable ses profits. Cette expansion, qui s’est poursuivie la décennie suivante, s’est donc appuyée sur un essor du crédit et s’est faite avec l’appui des États. Elle s’est traduite indéniablement par une amélioration des conditions de vie des travailleurs (sécurité sociale, conventions collectives, relèvement des salaires...). Ces concessions faites, par la bourgeoisie, sous la pression de la classe ouvrière, se traduisirent par une baisse du taux de profit, phénomène en lui-même inéluctable, lié à la dynamique interne du capital. (...) Si au début du stade de l’impérialisme, les profits engrangés grâce à l’exploitation des colonies et de leurs peuples avaient permis aux bourgeoisies dominantes de garantir une certaine paix sociale en faisant bénéficier la classe ouvrière d’une fraction de l’extorsion de la plus-value, il n’en est plus de même aujourd’hui, la logique spéculative impliquant une remise en cause de tous les acquis sociaux arrachés lors des décennies précédentes par les travailleurs des ’pays centraux’ à leur bourgeoisie" (BIPR, in Bilan et perspectives n°4, p. 5 à 7). Ici aussi, nous pouvons constater que l’abandon du cadre de la décadence ouvre toutes grandes les portes aux concessions envers les analyses gauchistes. Le BIPR préfère recopier les fables gauchistes sur les ’acquis sociaux (sécurité sociale, conventions collectives, relèvement des salaires,...)’ qui auraient été des ’concessions faites par la bourgeoisie sous la pression de la classe ouvrière’ et que ’la logique spéculative’ actuelle remet en cause, plutôt que de s’appuyer sur les contributions théoriques léguées par les groupes de la Gauche communiste internationale (Bilan, Communisme, etc.), qui analysaient ces mesures comme des moyens mis en place par la bourgeoisie pour faire dépendre et rattacher la classe ouvrière à l’État ! En effet, dans la phase ascendante du capitalisme, le développement des forces productives et du prolétariat était insuffisant pour menacer la domination bourgeoise et permettre une révolution victorieuse à l’échelle internationale. C’est pourquoi, même si la bourgeoisie a tout fait pour saboter l’organisation du prolétariat, ce dernier a pu, au fur et à mesure de ses combats acharnés, se constituer en tant que ’classe pour soi’ au sein du capitalisme au travers de ses propres organes qu’étaient les partis ouvriers et les syndicats. L’unification du prolétariat s’est réalisée au travers des luttes pour arracher au capitalisme des réformes se traduisant par des améliorations des conditions d’existence de la classe : réformes sur le terrain économique et réformes dans le domaine politique. Le prolétariat a acquis, en tant que classe, le droit de cité dans la vie politique de la société, ou, pour reprendre les termes de Marx dans la Misère de la philosophie : la classe ouvrière a conquis le droit d’exister et de s’affirmer de façon permanente dans la vie sociale en tant que ’classe pour soi’, c’est-à-dire en tant que classe organisée avec ses propres lieux de rencontre quotidiens, ses idées et son programme social, ses traditions et même ses chants. Lors de l’entrée du capitalisme dans sa phase de décadence en 1914, la classe ouvrière a démontré sa capacité à renverser la domination de la bourgeoisie en forçant celle-ci à arrêter la guerre et en développant une vague internationale de luttes révolutionnaires. Depuis ce moment, le prolétariat constitue un danger potentiel permanent pour la bourgeoisie. C’est pourquoi elle ne peut plus tolérer que sa classe ennemie puisse s’organiser de façon permanente sur son propre terrain, puisse vivre et croître au sein de ses propres organisations. L’État étend sa domination totalitaire sur tous les aspects de la vie de la société. Tout est enserré par ses tentacules omniprésents. Tout ce qui vit dans la société doit se soumettre inconditionnellement à l’État ou affronter ce dernier dans un combat à mort. Le temps où le capital pouvait tolérer l’existence d’organes prolétariens permanents est révolu. L’État chasse de la vie sociale le prolétariat organisé comme force permanente. De même, "Depuis la Première Guerre mondiale, parallèlement au développement du rôle de l’État dans l’économie, les lois régissant les rapports entre capital et travail se sont multipliées, créant un cadre strict de ’légalité’ au sein duquel la lutte prolétarienne est circonscrite et réduite à l’impuissance." (extrait de notre brochure Les syndicats contre la classe ouvrière). Ce capitalisme d’État sur le plan social signifie la transformation de toute vie de la classe en ersatz sur le terrain bourgeois. L’État s’est saisi, par le biais des syndicats dans certains pays, directement dans d’autres, des différentes caisses de grèves ou d’organisations de secours et mutuelles en cas de maladie ou de licenciement qui avaient été mis en place par la classe ouvrière tout au long de la seconde moitié du 19e siècle. La bourgeoisie a retiré la solidarité politique des mains du prolétariat pour la transférer en solidarité économique aux mains de l’État. En subdivisant le salaire en une rétribution directe par le patron et une rétribution indirecte par l’État, la bourgeoisie a puissamment consolidé la mystification consistant à présenter l’État comme un organe au dessus des classes, garant de l’intérêt commun et garant de la sécurité sociale de la classe ouvrière. La bourgeoisie est parvenue à lier matériellement et idéologiquement la classe ouvrière à l’État. Tel était l’analyse de la Gauche italienne et de la Fraction belge de la Gauche communiste internationale à propos des premières caisses d’assurances chômage et de secours mutuel mis en place par l’État pendant les années 30 (11). Que dit le BIPR à la classe ouvrière ? Tout d’abord que la ’logique spéculative’ serait responsable de la "remise en cause de tous les acquis sociaux" ... et revoilà le mal absolu de la ’financiarisation’ ! Le BIPR oublie au passage que la crise et les attaques contre la classe ouvrière n’ont pas attendu l’apparition de ’la logique spéculative’ pour pleuvoir sur le prolétariat. Le BIPR croit-il réellement, comme sa prose le sous-tend, que les lendemains chanteront pour la classe ouvrière une fois la ’logique spéculative’ éradiquée ? Au contraire, cette mystification gauchiste qui prétend que la lutte contre l’austérité dépendrait de la lutte contre la logique spéculative est à combattre le plus vigoureusement possible ! Mais il y a plus grave ! C’est une grossière mystification que de faire croire au prolétariat que la sécurité sociale, les conventions collectives et même le mécanisme de relèvement des salaires via l’indexation ou l’échelle mobile seraient des ’acquis sociaux arrachés de haute lutte’. Oui, la réduction horaire de la journée de travail, l’interdiction de l’exploitation des enfants, l’interdiction du travail de nuit pour les femmes, etc. ont constitué de véritables concessions arrachées de haute lutte par la classe ouvrière en phase ascendante du capitalisme. Par contre, les prétendus ’acquis sociaux’ comme la sécurité sociale ou les conventions collectives consignées dans les Pactes Sociaux pour la Reconstruction n’ont rien à voir avec la lutte de la classe ouvrière. Classe défaite, épuisée par la guerre, enivrée et mystifiée par le nationalisme, saoulée d’euphorie à la Libération, ce n’est pas elle qui, par ses luttes, aurait arraché ces ’acquis’. C’est à l’initiative même de la bourgeoisie au sein des gouvernements en exil que des Pactes Sociaux pour la Reconstruction ont été élaborés mettant en place tous ces mécanismes de capitalisme d’État. C’est la bourgeoisie qui a pris l’initiative, entre 1943 et 1945, en pleine guerre (!), de réunir toutes ’les forces vives de la nation’, tous les ’partenaires sociaux’, au travers de réunions tripartites composées de représentants du patronat, du gouvernement et des différents partis et syndicats, c’est-à-dire dans la plus parfaite des concordes nationales du mouvement de la Résistance, pour planifier la reconstruction des économies détruites et négocier socialement la difficile phase de reconstruction. Il n’y a pas eu de ’concessions faites par la bourgeoisie sous la pression de la classe ouvrière’ dans le sens d’une bourgeoisie contrainte d’accepter un compromis face à une classe ouvrière mobilisée sur son terrain et développant une stratégie en rupture avec le capitalisme, mais des moyens mis en place de concert par toutes les composantes de la bourgeoisie (patronat, syndicat, gouvernement) pour contrôler socialement la classe ouvrière afin de réussir la reconstruction nationale (12). Faut-il rappeler que c’est aussi la bourgeoisie qui, dans l’immédiat après-guerre, a carrément créé de toutes pièces des syndicats comme la CFTC en France ou la CSC en Belgique ? Il est évident que les révolutionnaires dénoncent tout empiétement tant sur le salaire direct que sur le salaire indirect, il est évident que les révolutionnaires dénoncent les atteintes au niveau de vie lorsque la bourgeoisie réduit la sécurité sociale à une peau de chagrin, mais jamais les révolutionnaires ne peuvent défendre le principe même du mécanisme mis en place par la bourgeoisie pour relier la classe ouvrière à l’État (13) ! Les révolutionnaires doivent au contraire dénoncer les logiques idéologiques et matérielles qui sous-tendent ces mécanismes comme la prétendue ’neutralité de l’État’, la ’solidarité sociale organisée par l’État’, etc. Face aux enjeux posés par l’aggravation générale des contradictions du mode de production capitaliste et face aux difficultés que rencontre la classe ouvrière pour faire face à ces enjeux, il appartient aux révolutionnaires de développer l’approfondissement nécessaire pour répondre aux nouvelles questions posées par l’histoire. Mais cet approfondissement ne saurait se baser sur les analyses frelatées colportées par les secteurs d’extrême gauche de l’appareil politique de la bourgeoisie. C’est uniquement en s’appuyant sur le marxisme et sur les acquis de la Gauche communiste, notamment sur l’analyse de la décadence du capitalisme, que les révolutionnaires seront à la hauteur de leur responsabilité.
C. Mcl
(1) Puisque, comme l’écrit Marx, "Le capital suppose donc le travail salarié, le travail salarié suppose le capital. Ils sont la condition l’un de l’autre ; ils se créent mutuellement." (Travail salarié et capital)
(2) Nous ne pouvons, dans le cadre de cet article, revenir sur ce que Marx et les théoriciens marxistes ont écrit sur les contradictions qu’engendre la généralisation du travail salarié, c’est-à-dire de la transformation de la force de travail en marchandise. Pour plus de précisions sur ces travaux des marxistes, nous renvoyons le lecteur notamment à notre brochure "La décadence du capitalisme" ainsi qu’à nos articles de la Revue internationale.
(3) "À un certain stade de leur développement, les forces productives matérielles de la société entrent en contradiction avec les rapports de production existants, ou, ce qui n’en est que l’expression juridique, avec les rapports de propriété au sein desquels elles s’étaient mues jusqu’alors. De formes de développement des forces productives qu’ils étaient ces rapports en deviennent des entraves." (Karl Marx, Préface de "Introduction à la critique de l’économie politique")
(4) Malheureusement, Lénine n’est pas ici d’un grand secours car son étude sur l’impérialisme, pour décisive qu’elle soit sur certains aspects de l’évolution du capitalisme et des enjeux inter-impérialistes au tournant du 19e au 20e siècle, accorde une importance démesurée au rôle du capital financier et passe à côté de processus bien plus fondamentaux à l’époque comme le développement du capitalisme d’État (cf. Revue internationale n°19 "Sur l’impérialisme" et Révolution Internationale n°3 et 4 "Capitalisme d’État et loi de la valeur"). Capitalisme d’État qui, contrairement à l’analyse de Hilferding-Lénine, restreindra drastiquement le pouvoir de la finance à partir de l’expérience de la crise de 29 pour ensuite lui réouvrir progressivement les portes d’une certaine liberté à partir des années 80. Ce qui est décisif ici, c’est que ce sont les États nations qui ont commandé le mouvement et non l’internationale fantôme de l’oligarchie financière qui aurait imposé son diktat un soir de 1979 à Washington.
(5) Il suffit, pour bien s’en convaincre, d’imaginer deux situations limites : dans l’une toutes les machines ont été détruites et seuls les hommes subsistent et dans l’autre toute l’humanité est décimée et seules les machines restent !
(6) D’ailleurs, le fait que les taux d’autofinancement des entreprises sont supérieures à 100% depuis un bon moment réduit cette thèse à néant puisque cela veut dire que les entreprises n’ont pas besoin de la finance pour financer leurs investissements.
(7) La part des salaires dans la valeur ajoutée en Europe est passée de 76% à 68% entre 1980 et 1998 et, comme les inégalités salariales se sont notablement accrues au cours de la même période, cela signifie que la diminution du salaire moyen des travailleurs est bien plus conséquente que ne le laisse entrevoir cette statistique.
(8) Citons, entre autre, le texte du BIPR présenté à la première conférence des groupes de la Gauche communiste ; extrait du paragraphe intitulé "Crise et décadence" : "Quand ceci a commencé à se manifester le système capitaliste a cessé d’être un système progressif, c’est-à-dire nécessaire au développement des forces productives, pour entrer dans une phase de décadence caractérisée par des essais de résoudre ses propres contradictions insolubles, se donnant de nouvelles formes organisatives d’un point de vie productif (...) En effet, l’intervention progressive de l’État dans l’économie doit être considérée comme le signe de l’impossibilité de résoudre les contradictions qui s’accumulent à l’intérieur des rapports de production et est donc le signe de sa décadence".
(9) Nous renvoyons le lecteur à la publication du rapport de notre 15e congrès international sur la crise économique dans le numéro précédent de cette revue qui, sans que cela n’enlève rien au caractère exceptionnel de la période 1950-75, démystifie tout d’abord les taux de croissance calculés dans la période de décadence et ensuite démystifie ceux concernant en particulier la période d’après la Seconde Guerre mondiale qui sont très nettement surestimés.
(10) * "... la théorie de la décadence, telle qu’elle découle des conceptions de Trotski, de Bilan, de la GCF et du CCI, n’est plus adaptée aujourd’hui à la compréhension du développement réel du capitalisme tout au long du 20e siècle, et notamment à compter de 1945 (...) En ce qui concerne les communistes de la première moitié du siècle, cela peut s’expliquer assez facilement : les événements qui se succèdent sur trois décennies, entre 1914 et 1945, sont tels (...) qu’ils paraissent donner du crédit à la thèse du déclin historique du capitalisme et confirmer les prévisions faites ; il était logique de ne voir dans le capitalisme qu’un système en putréfaction, à bout de souffle et décadent" (Cercle de Paris, in "Que ne pas faire ?", p.31). * "Le concept de décadence du capitalisme a surgi dans la 3e Internationale, où il a été développé en particulier par Trotsky (...) Trotsky précisa sa conception en assimilant la décadence du capitalisme à un arrêt pur et simple de la croissance des forces productives de la société (...) Cette vision semblait assez bien correspondre à la réalité de la première moitié de ce siècle (...) La vision de Trotsky fut reprise pour l’essentiel par la Gauche italienne regroupée dans Bilan avant la 2ème guerre mondiale, puis par la Gauche Communiste de France (GCF) après celle-ci." (Perspective Internationaliste, "Vers une nouvelle théorie de la décadence du capitalisme"). * "L’hypothèse d’un ’frein irréversible’ des forces productives n’est que la déduction, sur le plan théorique, d’une impression générale léguée par la période qui marque l’entre deux guerres où l’accumulation capitaliste a, de manière conjoncturelle, du mal à redémarrer." (Communisme ou Civilisation, ’Dialectique des forces productives et des rapports de production dans la théorie communiste’). * "Après la Deuxième Guerre mondiale, tant les trotskistes que les communistes de gauche ré-émergèrent avec la conviction raffermie que le capitalisme était décadent et au bord de l’effondrement. Considérant la période qui venait tout juste de s’écouler, la théorie ne paraissait pas si irréaliste, le krach de 1929 avait été suivi par la dépression durant la majeure partie des années 30 et ensuite par une autre guerre catastrophique (...) Maintenant, de même que nous pouvons dire que les communistes de gauche ont défendu les vérités importantes de l’expérience de 1917-21 contre la version léniniste des trotskistes, leur objectivisme économique et la théorie mécanique des crises et de l’effondrement, qu’ils partagent avec les léninistes, les rendirent incapables de répondre à la nouvelle situation caractérisée par un ’boom’ de longue durée (...) Après la Deuxième Guerre mondiale, le capitalisme entra dans une de ses périodes d’expansion les plus soutenues, avec des taux de croissance non seulement plus hauts que ceux de l’entre-deux-guerres mais même plus hauts que ceux du grand ’boom’ du capitalisme classique..." (Aufheben, "Sur la décadence, théorie du déclin ou déclin de la théorie").
(11) Lire "Une autre victoire du capitalisme : l’assurance chômage obligatoire" dans Communisme n°15, juin 1938 ; ainsi que "Les syndicats ouvriers et l’État" dans le n°5 de la même revue.
(12) Des luttes sociales il y en eut pendant la guerre, mais aussi et surtout dans l’immédiat après-guerre, compte tenu des conditions de vie catastrophiques. Mais en général, à quelques exceptions notables près comme dans le Nord de l’Italie ou dans la vallée de la Ruhr, elles ne présentaient aucune menace réelle pour le capitalisme. Ces luttes étaient toutes bien encadrées, contrôlées et souvent brisées par les partis de gauche et les syndicats au nom de la nécessaire concorde nationale en vue de la reconstruction.
(13) Ce qui est proprement incroyable c’est que le BIPR range également dans la catégorie des ’acquis sociaux’ les ’conventions collectives’ qui sont, on ne peut plus clairement, la codification et l’imposition de la paix sociale par la bourgeoisie dans les entreprises !

Messages

  • pour quoi l’économie mondiale s enfonce dans le chômage et les bourses elles ont nettement on hausse celle de paris de 33%celle de news York de 35/celle de londrès de 59% une des grandes banques d affaires américaine goldman sachs vient même de publier le meilleure résultat de son histoire avec un bénéfice en hausse de 68% ?

    • Non seulement l’économie s’enfonce dans le chômage mais les investissements productifs privés s’effondrent.

      Ce qui redresse artidficiellement les bourses, c’est l’intervention massive des Etats.

      Comme les années précédentes l’ont montré, on peut soutenir artificiellement les actions. il suffit que les boursicoteurs soient confiants dans la possibvilité de vendre plus cher, ce que l’intervention des Etats leur garantit... jusqu’à effondrement des monnaies...

  • Nous devons être prévenus : l’objectif des luttes actuelles n’est pas la seule défense du niveau de vie des classes laborieuses mais le renversement révolutionnaire du capital par le travail.

  • Le monde capitaliste n’a pas d’issue, à moins de considérer comme telle une agonie prolongée. Il faut se préparer pour des longues années, sinon des décennies, de guerres, de soulèvements, de brefs intermèdes de trêve, de nouvelles guerres et de nouveaux soulèvements. C’est là‑dessus que doit se fonder un jeune parti révolutionnaire. L’histoire lui donnera suffisamment d’occasions et de possibilités de s’éprouver lui-même, d’accumuler de l’expérience et de mûrir. Plus vite les rangs de l’avant-garde fusionneront, plus l’époque des convulsions sanglantes sera raccourcie, moins notre planète aura à supporter de destructions. Mais le grand problème historique ne sera en aucun cas résolu jusqu’à ce qu’un parti révolutionnaire prenne la tête du prolétariat. La question des rythmes et des intervalles est d’une énorme importance, mais elle n’altère ni la perspective historique générale ni la direction de notre politique. La conclusion est simple : il faut faire le travail d’éduquer et d’organiser l’avant‑garde prolétarienne avec une énergie décu­plée. C’est précisément en cela que réside la tâche de la IV° Internationale.

    Léon Trotsky

    dans "Manifeste d’alarme" (1940)

  • Les plus fantastiques face à la crise du capitalisme restent les sociaux-démocrates qui se disent socialistes :

    Le directeur général du Fonds monétaire international Dominique Strauss-Kahn s’est dit vendredi 30 octobre dans un communiqué "inquiet" après la promulgation par le président ukrainien, Viktor Iouchtchenko, d’une loi augmentant le salaire minimum."Une mission récente du Fonds en Ukraine a conclu que les politiques dans certains domaines, dont la nouvelle loi sur le salaire minimum, menaçaient [la] stabilité" du pays, a indiqué M. Strauss-Kahn. "Donc, nous sommes inquiets de la promulgation de la loi", a-t-il ajouté, une critique rare de la part du plus haut dirigeant du FMI envers un pays auquel le Fonds prête de l’argent.
    Cette loi prévoit d’augmenter le salaire minimum de 11 % au 1er novembre. Le minimum vital doit quant à lui augmenter de 12 % au 1er novembre, puis encore de 18 % au 1er janvier. Le FMI a déjà fortement critiqué cette idée, laissant entendre qu’elle serait de nature à remettre en cause son aide au pays.
    L’Ukraine, l’un des pays les plus durement atteints par la crise économique mondiale, a reçu en novembre 2008 un prêt du FMI de 16,4 milliards de dollars, dont elle a reçu jusqu’à présent un total de 10,6 milliards de dollars. Le déblocage d’une quatrième tranche, d’un montant de 3,8 milliards de dollars, est normalement prévu en novembre.

    En résumé : le grand risque, ce n’est pas les capitalistes eux-mêmes mais les travailleurs trop gourmands !!!!

  • Debout prolétaires ! Au combat ! Il s’agit de conquérir tout un monde et de se battre contre tout un monde. Dans cette ultime lutte de classes de l’histoire mondiale où il y va des objectifs les plus nobles de l’humanité, nous lançons à nos ennemis ces mots : sur leur face, nos poings, notre genou sur leur poitrine !

    R. Luxembourg

  • L’économie américaine a contre toute attente supprimé 85.000 emplois en décembre, ce qui refroidit l’optimisme des économistes sur la reprise du marché du travail et maintient la pression sur le président Barack Obama.

    Le département du Travail a en revanche fortement révisé à la hausse le chiffre du mois de novembre. L’économie américaine a finalement créé 4.000 emplois ce mois-là, alors que 11.000 suppressions avaient été initialement estimés.

    Mais il a révisé à la baisse le chiffre d’octobre (127.000 suppressions au lieu de 111.000) et, au final, l’économie américaine a détruit 1.000 emplois de plus qu’annoncé auparavant sur la période octobre-novembre.

    Le taux de chômage est resté stable à 10,0% en décembre, alors que les analystes interrogés par Reuters prévoyaient un taux de 10,1%. Mais il reflète le nombre étonnamment élevé de personnes n’ayant plus d’emploi.

    De fait, sur l’ensemble de l’année 2009, l’économie américaine a détruit 4,2 millions d’emplois, a précisé le département du Travail.

    Par ailleurs, la moyenne du nombre d’heures travaillées par semaine est resté stable à 33,2 heures, tandis que le salaire horaire est passé de 18,77 dollars en novembre à 18,80 dollars le mois dernier.

    "L’économie américaine ne va pas à l’évidence se montrer d’un seul coup en pleine croissance (...) mais elle fera mieux que la majorité de ses grandes concurrentes en Europe et au Japon", juge Joseph Trevisani, analyste chez FX Solutions.

    "Au fond, l’économie continue de faire trois pas en avant, deux pas en arrière. Je n’interpréterais pas cela au-delà du fait que la reprise de l’emploi sera lente", commente pour sa part David Katz, chez Matrix Asset Advisors.

    RETOURNEMENT DES MARCHÉS

    Les indices boursiers européens sont brièvement passés en territoire négatif après la publication des chiffres de l’emploi américain et Wall Street a ouvert en baisse.

    De même, le dollar a perdu du terrain face à l’euro et le yen.

    Les investisseurs attendent la déclaration du président des Etats-Unis sur l’économie, à 19h40 GMT.

    La lutte contre le chômage est l’un des défis majeurs de Barack Obama sur le plan intérieur, alors que sa cote de popularité est tombée à près de 50%.

    L’enquête du département du Travail montre en outre que 661.000 personnes ont quitté le marché du travail le mois dernier, un niveau d’une ampleur inhabituelle.

  • Le déclin du capitalisme promet d’être encore plus tumultueux, dramatique et sanglant que son ascension.

    Léon Trotsky (1932)

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