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Un groupe politique soi-disant Trotskiste derrière son impérialisme : la Fraction l’Etincelle du NPA (1)

jeudi 21 juillet 2022, par Alex

Le NPA semble programmer l’exclusion de sa Fraction l’Etincelle, d’après ce qu’écrit cette dernière dans son texte Congrès du NPA : garder le cap révolutionnaire

La Fraction se pose en tendance révolutionnaire du NPA mais surtout, et c’est ce qui nous concerne, justifie toute sa politique en annonçant sur son site internet : « La Fraction L’Étincelle est un groupe trotskyste ».

Or depuis son entrée au NPA, la Fraction a rompu avec le programme Trotskyste, c’est ce qu’illustre à notre avis une fois de plus des textes récents de cette organisation, dont celui cité plus haut. Des militants qui comme nous se réclament du Trotskisme se doivent de commenter ces textes, afin que le marxisme révolutionnaire ne soit pas déconsidéré par ses pseudo-partisans. Bien sûr, ces commentaires pourront à leur tour provoquer des commentaires qui seront les bienvenus.

Le titre de l’article de la Fraction cité plus haut est tragi-comique. Car Le seul cap que garde le NPA depuis des années est contre la révolution prolétarienne, que le NPA garde le cap ne peut signifier que sa transformation encore plus achevée en parti réformiste.

En 2009 la LCR (Ligue Communiste Révolutionnaire) a changé de nom pour devenir NPA, Nouveau Parti Anticapitaliste. Le cap que mentionne la Fraction est donc clair : pas de communisme ni de révolution ! La LCR a mis le cap à droite, le NPA a gardé le cap à droite.

Pourquoi nier ce choix des militants du NPA, et présenter celui-ci comme un parti qui a choisi d’être révolutionnaire, alors que ses principes fondateurs, à travers le nom choisi pour le parti, ont affirmé le contraire ? Pourquoi faire croire à des milliers de militants : ce que vous voulez, c’est être révolutionnaire, mais vous ne le savez pas.

Premièrement la Fraction a une vision stalino-élitiste du parti : si la quelques dizaine de militants qui dirigent effectivement le NPA change de cap, le reste suivra.
La Fraction emploie par exemple des formules du type

Nous ne partageons pas l’appréciation de la direction du parti, très favorable à l’égard de la Nupes, (...) Nous ne partageons pas non plus la conclusion de la direction du NPA (...) Pour notre part, pour ce congrès à venir, nous combattrons évidemment toute menace d’exclusion ou volonté de rupture émanant de la direction

Et l’ensemble des militants du NPA ? Une divergence entre cette base et « la direction » n’est pas évoquée, pas même son importance. La Fraction essaie de convaincre « la direction ». La valetaille militante suivra. Nous verrons plus loin que l’électorat du NPA est également considéré comme un tout, non coupé entre ceux qui sont attirés par le côté « révolutionnaire » du NPA, et pourraient voir leur ralliement a la Nupes aux législative comme une « trahison ». La Fraction a l’air d’être la seule à voir dans le NPA un parti révolutionnaire, car la trajectoire de celui-ci vers la droite est claire.

En général dans un parti révolutionnaire ou centriste, la base ouvrière est plus radicale que les dirigeants, et la Fraction se vante d’être parmi les bastions ouvriers du NPA, en le menaçant de déclin si la Fraction en est exclue :

reconstruire un NPA révolutionnaire et implanté dans le monde du travail sans les fractions qui s’attellent à cette tâche, c’est franchement une illusion ! S’en débarrasser serait le chemin le plus court vers un destin à la « Ensemble » – qui, même s’il réussissait, serait de bien peu d’utilité pour la construction d’un parti révolutionnaire.

La Fraction a l’air de rechanter au NPA la fameuse chanson "Destinée" concernant leur intérêt à rester ensemble. Passons à nouveau sur le fait que la Fraction veut faire du NPA un parti révolutionnaires sans voir que la majorité des militants apparemment ne le veut pas. Le NPA, en se rapprochant de LFI et du PC, peut au contraire renforcer ses liens avec la classe ouvrière. Car pour des réformistes comme le PC, le PS ou LFI, et le nouveau NPA qui se prépare, qu’est-ce qu’avoir une implantation ouvrière ? C’est avoir des liens avec les bureaucraties syndicales. Un secrétaire d’UD-CGT qui est au PC est le genre de relai que cherchent ces partis. Pour le NPA ou LO, un petit poste de secrétaire d’UL est le rêve. La Fraction ne mentionne pas une base ouvrière du NPA qui contesterait la marche à droite de la direction. La base ouvrière que la Fraction se vante d’avoir s’est-elle adressée aux ouvriers du NPA ?

La Fraction ne mentionne même pas dans son texte l’existence de la bureaucratie syndicale, problème essentiel et universel depuis 1914, mais pudiquement :

des appareils de la gauche syndicale et politique.

« Appareil » sonne anti-bureaucrate (c’est le type de mot ambigu qui est au coeur du style centriste de la Fraction). Mais ça ne l’est pas. Un parti bolchevique est un appareil politique pro-ouvrier, que nous voulons construire. Encore plus une Armée Rouge . Les congrès de l’IC parlaient de syndicalistes « jaunes » à propos de la CGT française. La Fraction devrait utiliser la formule plus juste « des appareils de la gauche syndicale et politique anti-ouvriers, bourgeois, jaunes » ... si elle restait sur le terrain du Marxisme. Evoquer le destin du NPA sans mentionner son lien vis-à-vis des bureaucraties syndicales, tout travailleur même semi-révolutionnaire, mais combattif, sourira.

Nous avons parlé de révolution prolétarienne, on remarquera que la Fraction n’emploie pas ce terme, ni dans son titre, ni dans le corps du texte son l’article. Le terme employé est celui de « révolution » tout court, cela permet peut-être à la Fraction de faire croire que le NPA est révolutionnaire, ou peut le devenir. Car nous avons en effet exagéré, le programme fondateur du NPA fait bien référence à une révolution : la révolution française bourgeoise (le NPA n’emploie bien sûr pas ce terme, un gros mot) de 1789, et uniquement celle-là. Même pas celle de 1792 qui mit fin à la royauté ! Les révolution prolétariennes, communistes, ne sont plus des exemples à suivre, ils ne sont même pas évoqués dans les principes fondateurs du NPA. 1789, comme la Résistance est un point de repère partagé par tous les partis bourgeois, voici ce qu’en dit le NPA dans ses « principes » :

Une domination de classe ne peut pas être éliminé par voie de réformes. Les luttes peuvent permettre de la contenir, de lui arracher des mesures progressistes pour les classes populaires, pas la supprimer. En 1789, la domination de la classe privilégiée de l’Ancien Régime n’a pas été abolie par des réformes. Il a fallu une révolution pour l’éliminer. Il faudra une révolution sociale pour abattre le capitalisme.

Principes fondateurs du NPA

Au contraire, le programme de la LCR faisait référence à des révolutions prolétariennes (1871, 1917).
Première capitulation de la Fraction au niveau du vocabulaire : elle se rallie donc à ce vocabulaire "révolutionnaire" sans référence au prolétariat, à la bourgeoisie, au féodalisme, mais à une "révolution", une "révolution sociale", termes centristes. Macron a intitulé son livre de campagne en 2017 : Révolution. L’impérialisme français ou américain organise régulièrement des révolutions politiques dans les pays dominés. Ce terme ne fait pas peur aux bourgeois, qui organisent régulièrement des révolutions afin de garder le pouvoir.

Les termes de bourgeoisie, prolétariat et communisme n’apparaissent pas dans le texte de la Fraction sur les enjeux du congrès du NPA, qui est censé mettre en jeu des principes fondamentaux du programme.

Citons l’ancien programme de la LCR (Manifeste du Comité Central des 29 et 30 janvier 1972). Outre les références à la Commune de Paris (1871) et la révolution d’Octobre 1917, présenté comme les exemples à suivre, on lit :

Dans la lutte, le prolétariat armé s’érige en classe dominante, dotée d’une organisation centralisée de la violence. L’Etat ouvrier n’est rien d’autre que l’organisation nationale des conseils et des milices ouvrières. Cet Etat est insurrectionnel, dictatorial, la dictature du prolétariat naît d’un état de fait.

Programme de la LCR 1972

A l’époque, les militants de LO, dont certains sont aujourd’hui à la Fraction, étaient "à gauche" du programme de la LCR, car en reprenant ce que nous avons cité à propos de la dictature du prolétariat (l’ABC du bolchévisme, que la Fraction ne défend plus), ils dénonçaient à juste titre le suivisme de la LCR vis-à-vis des dictateurs bourgeois comme Tito ou Ho Chi Minh. On lisait en effet dans ce programme de la LCR de 1972 l’apologie de ces dictateurs bourgeois. Mais aujourd’hui la Fraction est largement à droite de cet ancien programme de la LCR.

Premièrement la Fraction a abandonné les références aux soviets, à la dictature du prolétariat que préconisait la LCR en 1972.

Deuxièmement, la Fraction, comme nous allons le voir plus loin à propos de l’Ukraine, ne dénonce plus ouvertement et entièrement le suivisme du NPA vis-à-vis de certains courants bourgeois internationaux, mais se contente de montrer à la majorité du NPA : ne vous inquiétez pas, nous ferons semblant de n’avoir plus ces divergences ; nous, les anciens de LO, pensions qu’elle rendaient incompatibles en 1972 notre appartenance à un même parti, mais c’est fini. Pitié, ne nous excluez pas ! Oui nous méprisions la LCR à l’époque, nous vous avons fait la leçon tellement de fois, mais soyez chrétiens, pardonnez-nous, comme nous avons pardonné vos offenses passées. Regardez notre dernier article sur l’Algérie : nous ne rappelons pas que vous avez soutenu politiquement le FLN, et l’impérialisme français n’est pas mentionné, ni la trahison que fut le Front populaire, la figure de Mitterrand qu’admire Mélenchon, le colonialisme du PC qui vota les plein-pouvoirs.

Nous illustrerons encore cette attitude par rapport à la question plus d’actualité de l’Ukraine, mais pour finir, citons Trotsky qui soulignait déjà (à propos d’une certaine résolution de militants se disant trotskistes) la tromperie de type "centriste" consistant à remplacer par exemple "communisme" par "révolutionnaire". Ce commentaire de Trotsky nous parait s’appliquer au texte de la Fraction :

La résolution donne une impression tout à fait décevante. Tout le texte repose sur des demi-vérités, des expressions qui ont l’air radicales et qui reculent devant les conséquences. Les documents de Martov à Zimmerwald et Kienthal étaient beaucoup plus radicaux. En un mot, le document est totalement centriste.

Dès le titre nous lisons « Conférence des organisations de jeunesse révolutionnaires-socialistes » Pourquoi n’a-t-on pas mis dans le titre notre véritable nom :organisations de jeunesse socialistes et communistes »

Trotsky, Oeuvres, Tome 3 p. 285

Lorsque la Fraction demande, comme on le verra, une Ukraine "Démocratique et socialiste", prétend que le défaitisme révolutionnaire ne s’applique pas à la guerre en Ukraine, on verra que certaines « valeurs » centristes ne se perdent pas.

Messages

  • La Fraction incarne très bien le centrisme, en appelant d’une part le NPA à "auto-organiser" les travailleurs : dans la revue 137 du NPA intitulée “Débats pour une gauche de combat” :

    https://nouveaupartianticapitaliste.org/opinions/politique/revue-ndeg137-debats-pour-une-gauche-de-combat-pdf

    On y lit en effet dans la contribution de la Fraction :

    Nous devons avoir la perspective de luttes qui deviennent un fait politique, par
    leur contagion et extension nationale, mais aussi et surtout par la capacité des travailleurs de diriger eux-mêmes leurs luttes. Les organes de direction des luttes, comités de grèves, coordinations de ceux-ci ou autres formes issues des luttes elles-mêmes, devenant des organes de double-pouvoir contestant celui de la bourgeoisie. C’est cette politique offensive qui pourrait rallier, dans un contexte de montée et de politisation des luttes, tous les déçus du réformisme
    politique et syndical.

    Les syndicats sont des organismes de temps de paix sociale, où palabres et négociations prétendent marchander le salaire et les conditions de travail

    la Fraction l’Étincelle du NPA : Pour une extrême gauche de combat !, page 20

    Passons sur le fait que c’est oublier que la CGT, en participant à l’Union sacrée en 1914, a montré qu’elle était une organisation de temps de "guerre impérialiste".

    On constate aussi que la "palabre" est au art maitrisé par la Fraction qui veut garder la "paix sociale" avec le NPA, en ne nommant pas explicitement : CGT, SUD, LFI avec qui le NPA est en "palabre" et "marchandage" en permanence.

    Mais en contradiction flagrante avec ces discours de congrès, dans ses Editoriaux (ou tous les compte-rendus, par ailleurs intéressants de grèves), comme dans le dernier, on voit que l’ "auto-organisation" des travailleurs, la dénonciations des confédérations syndicales ne fait jamais partie des "mesures d’urgence" :

    Il faut faire entendre et imposer nos mesures d’urgence :

    - augmentation uniforme de tous les salaires, des minima sociaux et des pensions d’au moins 300 euros, comme l’ont mis en avant les grévistes de Roissy ;
    - pas de revenus inférieurs à 1 800 euros ;
    - des embauches dans tous les secteurs à la hauteur des besoins ;
    augmentation des salaires, allocations et pensions au même rythme que l’inflation.

    https://www.convergencesrevolutionnaires.org/Derriere-le-cirque-parlementaire-la-necessite-de-lutter-pour-nos-salaires?navthem=1

    Editorial des bulletins, 1er aout

    Le titre de cet éditorial du 1et aout était pourtant sur la bonne voie : Derrière le cirque parlementaire, la nécessité de lutter pour nos salaires
    . On pourrait ajouter : Derrière le cirque des Congrès du NPA , la nécessité de lutter pour nos salaires, pour l’abolition du salariat, pour notre auto-organisation dans des soviets
    .

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