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Discussions entre Einstein et Bohr

samedi 19 juin 2021, par Robert Paris

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Discussions entre Einstein et Bohr

Réponse d’Einstein à ses contradicteurs

En guise d’introduction, je dois remarquer qu’il ne m’a pas été facile de rendre justice à la tâche de m’exprimer concernant les essais contenus dans ce volume. La raison réside dans le fait que les essais se réfèrent à un trop grand nombre de sujets qui, dans l’état actuel de nos connaissances, ne sont que vaguement liés les uns aux autres. J’ai d’abord essayé de discuter des essais individuellement.

Cependant, j’ai abandonné cette procédure parce qu’il n’en résultait rien, même approximativement homogène, de sorte que sa lecture n’aurait guère pu être ni utile ni agréable. J’ai donc finalement décidé d’ordonner ces remarques, dans la mesure du possible, en fonction de considérations d’actualité.

De plus, après quelques vains efforts, j’ai découvert que la mentalité qui sous-tend certains essais diffère si radicalement de la mienne, que je suis incapable de dire quoi que ce soit d’utile à leur sujet. Cela ne doit pas être interprété que je considère ces essais - dans la mesure où leur contenu a un sens pour moi - moins hautement que ceux qui sont plus proches de mes propres façons de penser, auxquelles [ces derniers] je dédie les remarques suivantes.

Pour commencer, je me réfère aux essais de Wolfgang Pauli et Max Born. Ils décrivent le contenu de mes travaux concernant les quanta et les statistiques en général dans leur cohérence intérieure et dans leur participation à l’évolution de la physique au cours du dernier demi-siècle. Il est méritoire qu’ils aient fait ceci : car seuls ceux qui ont lutté avec succès avec les situations problématiques de leur âge peuvent avoir un aperçu profond de ces situations ; contrairement à l’historien postérieur, qui a du mal à faire des abstractions à partir de ces concepts et vues qui apparaissent à sa génération comme établis, voire comme évidents. Les deux auteurs déprécient le fait que je rejette l’idée de base de la théorie quantique statistique contemporaine, dans la mesure où je ne crois pas que ce concept fondamental fournira une base utile à l’ensemble de la physique. Plus de cela plus tard.

J’en viens maintenant à ce qui est probablement le sujet le plus intéressant qui doit absolument être discuté en relation avec les arguments détaillés de mes très estimés collègues Born, Pauli, Heitler, Bohr et Margenau. Ils sont tous fermement convaincus que l’énigme de la double nature de tous les corpuscules (caractère corpusculaire et ondulatoire) a essentiellement trouvé sa solution finale dans la théorie quantique statistique. Sur la base des succès de cette théorie, ils considèrent qu’il est prouvé qu’une description théoriquement complète d’un système ne peut, en substance, impliquer que des assertions statistiques concernant les quantités mesurables de ce système. Ils sont apparemment tous d’avis que la relation d’indétermination de Heisenberg (dont l’exactitude est, de mon propre point de vue,considérée à juste titre comme finalement démontrée) est essentiellement préjudiciable au caractère de toutes les théories physiques raisonnables pensables au sens mentionné. Dans ce qui suit, je souhaite présenter des raisons qui m’empêchent de me rallier à l’opinion de presque tous les physiciens théoriciens contemporains. Je suis, en fait, fermement convaincu que le caractère essentiellement statistique de la théorie quantique contemporaine doit uniquement être attribué au fait que cette [théorie] fonctionne avec une description incomplète des systèmes physiques.

Mais surtout, le lecteur doit être convaincu que je reconnais pleinement les progrès très importants que la théorie quantique statistique a apportés à la physique théorique. Dans le domaine des problèmes mécaniques - c’est-à-dire partout où il est possible d’envisager l’interaction des structures et de leurs parties avec une précision suffisante en postulant une énergie potentielle entre des points matériels - [cette théorie] présente encore aujourd’hui un système qui, dans son caractère fermé , décrit correctement les relations empiriques entre les phénomènes stables tels qu’ils étaient théoriquement attendus. Cette théorie est jusqu’à présent la seule qui unit de manière logiquement satisfaisante le double caractère corpusculaire et ondulatoire de la matière ; et les relations (testables) qui y sont contenues sont, dans les limites naturelles fixées par la relation d’indétermination, complètes.Les relations formelles qui sont données dans cette théorie - c’est-à-dire tout son formalisme mathématique - devront probablement être contenues, sous forme d’inférences logiques, dans toute théorie future utile.

Ce qui ne me satisfait pas dans cette théorie, du point de vue du principe, c’est son attitude à l’égard de ce qui me paraît être le but programmatique de toute physique : la description complète de toute situation réelle (individuelle) (telle qu’elle est supposée exister indépendamment de tout acte d’observation ou de justification). Chaque fois que le physicien moderne à tendance positiviste entend une telle formulation, sa réaction est celle d’un sourire de pitié. Il se dit : « voilà la formulation nue d’un préjugé métaphysique, vide de contenu, un préjugé, d’ailleurs, dont la conquête constitue la réalisation épistémologique majeure des physiciens au cours du dernier quart de siècle.Un homme a-t-il déjà perçu une « situation physique réelle » ? Comment est-il possible qu’une personne raisonnable puisse encore croire aujourd’hui qu’elle peut réfuter nos connaissances et notre compréhension essentielles en dessinant un fantôme aussi exsangue ? » La patience ! La caractérisation laconique ci-dessus ne visait à convaincre personne ; il s’agissait simplement d’indiquer le point de vue autour duquel se groupent librement les considérations élémentaires suivantes. Ce faisant, je procéderai de la manière suivante : je montrerai d’abord dans des cas particuliers simples ce qui me paraît essentiel, puis je ferai quelques remarques sur quelques idées plus générales qui sont en jeu.

Nous considérons comme un système physique, dans un premier temps, un atome radioactif de temps de décroissance moyen défini, qui est pratiquement exactement localisé en un point du système de coordonnées. Le processus radioactif consiste en l’émission d’une particule (relativement légère). Par souci de simplicité, nous négligeons le mouvement de l’atome résiduel après le processus de désintégration. Ensuite, il nous est possible, à la suite de Gamow, de remplacer le reste de l’atome par un espace d’ordre atomique, entouré d’une barrière d’énergie potentielle fermée qui, à un instant t = 0, renferme la particule à émettre. Le processus radioactif ainsi schématisé est alors, comme il est bien connu, à décrire - au sens de la mécanique quantique élémentaire - par une fonction Psi en trois dimensions, qui à l’instant t = 0 n’est différente de zéro qu’à l’intérieur de la barrière , mais lequel,pour les temps positifs, se développe dans l’espace extra-atmosphérique. Cette fonction Psi donne la probabilité que la particule, à un instant choisi, se trouve réellement dans une partie choisie de l’espace (c’est-à-dire qu’elle y est effectivement trouvée par une mesure de position). En revanche, la fonction Psi n’implique aucune assertion concernant l’instant temporel de la désintégration de l’atome radioactif.

Nous posons maintenant la question : cette description théorique peut-elle être considérée comme la description complète de la désintégration d’un seul atome individuel ? La réponse immédiatement plausible est : Non. Car on est, tout d’abord, enclin à supposer que l’atome individuel se désintègre à un moment déterminé ; cependant, une telle valeur de temps définie n’est pas impliquée dans la description par la fonction Psi. Si, par conséquent, l’atome individuel a un temps de désintégration défini, alors en ce qui concerne l’atome individuel, sa description au moyen de la fonction Psi doit être interprétée comme une description incomplète. Dans ce cas, la fonction Psi doit être considérée comme la description, non d’un système singulier, mais d’un ensemble idéal de systèmes. Dans ce cas, on est conduit à la conviction qu’une description complète d’un seul système devrait, après tout, être possible,mais pour une description aussi complète, il n’y a pas de place dans le monde conceptuel de la théorie statistique quantique.

A cela, le théoricien quantique répondra : Cette considération tient et tombe avec l’affirmation qu’il existe en fait un temps défini de désintégration de l’atome individuel (un instant de temps existant indépendamment de toute observation). Mais cette affirmation est, de mon point de vue, non seulement arbitraire mais en fait dénuée de sens. L’affirmation de l’existence d’un instant-temps défini pour la désintégration n’a de sens que si je peux en principe déterminer cet instant-temps empiriquement. Cependant, une telle assertion (qui, finalement, conduit à tenter de prouver l’existence de la particule en dehors de la barrière de force), implique une perturbation certaine du système qui nous intéresse, de sorte que le résultat de la détermination ne ne permet pas de conclure sur l’état du système non perturbé. La supposition,par conséquent, le fait qu’un atome radioactif ait un temps de désintégration défini n’est justifié par rien du tout ; il n’est donc pas démontré non plus que la fonction Psi ne puisse être conçue comme une description complète du système individuel. Toute la difficulté alléguée provient du fait que l’on postule quelque chose d’inobservable comme « réel ». (C’est la réponse du théoricien quantique.)

Ce que je n’aime pas dans ce genre d’argumentation, c’est l’attitude positiviste de base, qui de mon point de vue est intenable, et qui me semble en venir au même principe que le principe de Berkeley, esse est percipi. « Être » est toujours quelque chose que nous construisons mentalement, c’est-à-dire quelque chose que nous posons librement (au sens logique). La justification de telles constructions ne réside pas dans leur dérivation de ce qui est donné par les sens. Un tel type de dérivation (au sens de la déductibilité logique) est introuvable, pas même dans le domaine de la pensée préscientifique. La justification des constructions, qui représentent pour nous la « réalité », réside seule dans leur qualité de rendre intelligible ce qui est donné sensoriellement (le caractère vague de cette expression m’est ici imposé par ma recherche de brièveté).Appliqué à l’exemple spécifiquement choisi, cette considération nous indique ce qui suit :

On ne peut pas simplement se demander : "Existe-t-il un instant de temps défini pour la transformation d’un seul atome ?" mais plutôt : « Est-il, dans le cadre de notre construction totale théorique, raisonnable de postuler l’existence d’un point de temps défini pour la transformation d’un seul atome ? » On ne peut même pas se demander ce que signifie cette affirmation. On ne peut que se demander si une telle proposition, dans le cadre du système conceptuel choisi - en vue de sa capacité à appréhender théoriquement ce qui est donné empiriquement - est raisonnable ou non.

Dans la mesure où un théoricien quantique prend la position que la description au moyen d’une fonction Psi se réfère uniquement à une totalité systématique idéale mais en aucun cas au système individuel, il peut calmement assumer un moment défini pour la transformation. . Mais, s’il représente l’hypothèse que sa description au moyen de la fonction Psi doit être considérée comme la description complète du système individuel, alors il doit rejeter la postulation d’un temps de décroissance spécifique. Il peut à juste titre souligner le fait qu’une détermination de l’instant de désintégration n’est pas possible sur un système isolé, mais nécessiterait des perturbations d’un caractère tel qu’elles ne doivent pas être négligées dans l’examen critique de la situation. Ce serait, par exemple,il ne sera pas possible de conclure de l’énoncé empirique que la transformation a déjà eu lieu, que cela aurait été le cas si les perturbations du système n’avaient pas eu lieu.

Autant que je sache, c’est E. Schrödinger qui a le premier attiré l’attention sur une modification de cette considération, qui montre qu’une interprétation de ce type est impraticable. Plutôt que de considérer un système qui ne comprend qu’un atome radioactif (et son processus de transformation), on considère un système qui comprend également les moyens pour vérifier la transformation radioactive - par exemple, un compteur Geiger avec mécanisme d’enregistrement automatique. Que ce dernier comporte une bande de repérage, animée par un mouvement d’horlogerie, sur laquelle une marque est faite en déclenchant le compteur. Certes, du point de vue de la mécanique quantique, ce système global est très complexe et son espace de configuration est de très grande dimension. Mais il n’y a en principe aucune objection à traiter tout ce système du point de vue de la mécanique quantique.Ici aussi, la théorie détermine la probabilité de chaque configuration de toutes ses coordonnées pour chaque instant de temps. Si l’on considère toutes les configurations des coordonnées, pendant un temps important par rapport au temps de désintégration moyen de l’atome radioactif, il y aura (au plus) une telle marque de repérage sur la bande de papier. A chaque configuration de coordonnées correspond une position définie de la marque sur la bande de papier. Mais, dans la mesure où la théorie ne donne que la probabilité relative des configurations de coordonnées imaginables, elle n’offre également que des probabilités relatives pour les positions de la marque sur la bande de papier, mais pas d’emplacement précis pour cette marque.pendant un temps important par rapport au temps de désintégration moyen de l’atome radioactif, il y aura (au plus) une telle marque d’enregistrement sur la bande de papier. A chaque configuration de coordonnées correspond une position définie de la marque sur la bande de papier. Mais, dans la mesure où la théorie ne donne que la probabilité relative des configurations de coordonnées imaginables, elle n’offre également que des probabilités relatives pour les positions de la marque sur la bande de papier, mais pas d’emplacement précis pour cette marque.pendant un temps important par rapport au temps de désintégration moyen de l’atome radioactif, il y aura (au plus) une telle marque d’enregistrement sur la bande de papier. A chaque configuration de coordonnées correspond une position définie de la marque sur la bande de papier. Mais, dans la mesure où la théorie ne donne que la probabilité relative des configurations de coordonnées imaginables, elle n’offre également que des probabilités relatives pour les positions de la marque sur la bande de papier, mais pas d’emplacement précis pour cette marque.il n’offre également que des probabilités relatives pour les positions de la marque sur la bande de papier, mais aucun emplacement défini pour cette marque.il n’offre également que des probabilités relatives pour les positions de la marque sur la bande de papier, mais aucun emplacement défini pour cette marque.

Dans cette considération, l’emplacement de la marque sur la bande joue le rôle joué dans la considération d’origine au moment de la désintégration. La raison de l’introduction du système complété par le mécanisme d’enregistrement est la suivante. L’emplacement de la marque sur la bande d’enregistrement est un fait qui appartient entièrement à la sphère des concepts macroscopiques, par opposition à l’instant de désintégration d’un seul atome. Si nous essayons [de travailler avec] l’interprétation que la description quantique-théorique doit être comprise comme une description complète du système individuel, nous sommes obligés d’interpréter que l’emplacement de la marque sur la bande n’est rien qui appartient à la système en soi,mais que l’existence de cet emplacement dépend essentiellement de la réalisation d’une observation faite sur la bande d’immatriculation. Une telle interprétation n’est certainement en aucun cas absurde d’un point de vue purement logique, mais il est peu probable que quiconque soit enclin à la considérer sérieusement. Car, dans la sphère macroscopique, on considère simplement comme certain qu’il faut adhérer au programme d’une description réaliste dans l’espace et dans le temps ; tandis que dans le domaine des situations microscopiques, on est plus enclin à abandonner, ou du moins à modifier, ce programme.dans la sphère macroscopique, on considère simplement comme certain qu’il faut adhérer au programme d’une description réaliste dans l’espace et dans le temps ; tandis que dans le domaine des situations microscopiques, on est plus enclin à abandonner, ou du moins à modifier, ce programme.dans la sphère macroscopique, on considère simplement comme certain qu’il faut adhérer au programme d’une description réaliste dans l’espace et dans le temps ; tandis que dans le domaine des situations microscopiques, on est plus enclin à abandonner, ou du moins à modifier, ce programme.

Cette discussion n’avait pour but que de faire ressortir ce qui suit. On arrive à des conceptions théoriques très invraisemblables, si l’on tente de maintenir la thèse que la théorie quantique statistique est en principe capable de produire une description complète d’un système physique individuel. En revanche, ces difficultés d’interprétation théorique disparaissent, si l’on considère la description quantique-mécanique comme la description d’ensembles de systèmes.

Je suis arrivé à cette conclusion à la suite de types de considérations très différents. Je suis convaincu que quiconque prendra la peine de mener consciencieusement de telles réflexions se trouvera finalement conduit à cette interprétation de la description quantique-théorique (la fonction Psi doit être comprise comme la description non pas d’un système unique mais d’un ensemble des systèmes).

En gros, la conclusion est la suivante : dans le cadre de la théorie statistique quantique, il n’existe pas de description complète du système individuel. Plus prudemment, on pourrait dire ce qui suit : La tentative de concevoir la description quantique-théorique comme la description complète des systèmes individuels conduit à des interprétations théoriques contre nature, qui deviennent immédiatement inutiles si l’on accepte l’interprétation selon laquelle la description se réfère à des ensembles de systèmes et pas aux systèmes individuels. Dans ce cas, toute la « marche des œufs » effectuée pour éviter le « réel physiquement » devient superflue. Il existe, cependant, une raison psychologique simple au fait que cette interprétation la plus évidente soit évitée.Car si la théorie quantique statistique ne prétend pas décrire complètement le système individuel (et son évolution dans le temps), il paraît inévitable de chercher ailleurs une description complète du système individuel ; ce faisant, il serait clair dès le début que les éléments d’une telle description ne sont pas contenus dans le schéma conceptuel de la théorie statistique quantique. Avec celui-ci on admettrait que, en principe, ce schéma ne pouvait pas servir de base à la physique théorique. En supposant le succès des efforts pour accomplir une description physique complète, la théorie quantique statistique prendrait, dans le cadre de la physique future, une position à peu près analogue à la mécanique statistique dans le cadre de la mécanique classique.Je suis assez fermement convaincu que le développement de la physique théorique sera de ce type ; mais le chemin sera long et difficile.

J’imagine maintenant un théoricien quantique qui peut même admettre que la description quantique-théorique se réfère à des ensembles de systèmes et non à des systèmes individuels, mais qui, néanmoins, s’accroche à l’idée que le type de description de la théorie quantique statistique sera, dans sa caractéristiques essentielles, être conservées à l’avenir. Il peut argumenter comme suit : Certes, j’admets que la description quantique-théorique est une description incomplète du système individuel. J’admets même qu’une description théorique complète est, en principe, pensable. Mais je considère qu’il est prouvé que la recherche d’une description aussi complète serait sans but. Car la licéité de la nature est ainsi constituée que les lois peuvent être complètement et convenablement formulées dans le cadre de notre description incomplète.

A cela, je ne peux que répondre comme suit : Votre point de vue - considéré comme une possibilité théorique - est incontestable. Pour moi, cependant, l’espoir que la formulation adéquate des lois universelles implique l’utilisation de tous les éléments conceptuels nécessaires à une description complète est plus naturel. En outre, il n’est pas du tout surprenant qu’en utilisant une description incomplète, (dans l’ensemble) seuls des énoncés statistiques puissent être obtenus à partir d’une telle description. S’il devait être possible d’avancer vers une description complète, il est probable que les lois représenteraient des relations entre tous les éléments conceptuels de cette description qui, en soi, n’ont rien à voir avec les statistiques.

Encore quelques remarques d’ordre général sur les concepts et [aussi] sur l’insinuation qu’un concept - par exemple celui du réel - est quelque chose de métaphysique (et donc à rejeter). Une distinction conceptuelle fondamentale, qui est une condition préalable nécessaire de la pensée scientifique et préscientifique, est la distinction entre les « impressions sensorielles » (et le souvenir de celles-ci) d’une part et les simples idées d’autre part. Il n’existe pas de définition conceptuelle de cette distinction (à part les définitions circulaires, c’est-à-dire celles qui font un usage caché de l’objet à définir). On ne peut pas non plus soutenir qu’à la base de cette distinction se trouve un type de preuve, comme sous-tend, par exemple, la distinction entre le rouge et le bleu. Pourtant, il faut cette distinction pour pouvoir surmonter le solipsisme. Solution:nous utiliserons cette distinction sans nous soucier du reproche que, ce faisant, nous sommes coupables du « péché originel » métaphysique. Nous considérons la distinction comme une catégorie que nous utilisons pour mieux trouver notre chemin dans le monde des sensations immédiates. Le « sens » et la justification de cette distinction résident simplement dans cette réalisation. Mais ce n’est qu’un premier pas. Nous représentons les impressions sensorielles comme conditionnées par un facteur « objectif » et « subjectif ». Pour cette distinction conceptuelle, il n’y a pas non plus de justification logico-philosophique. Mais si nous la rejetons, nous ne pouvons pas échapper au solipsisme. C’est aussi la présupposition de toute sorte de pensée physique. Ici aussi, la seule justification réside dans son utilité. Il s’agit ici de « catégories » ou schémas de pensée dont le choix est, en principe,entièrement ouvert à nous et dont la qualification ne peut être jugée que par la mesure dans laquelle son utilisation contribue à rendre « intelligible » la totalité des contenus de la conscience. Le « facteur objectif » mentionné ci-dessus est la totalité des concepts et des relations conceptuelles considérés comme indépendants de l’expérience, c’est-à-dire des perceptions. Tant que nous nous déplaçons dans la sphère de pensée ainsi programmée, nous pensons physiquement. Dans la mesure où la pensée physique se justifie, au sens plus d’une fois indiqué, par sa capacité à saisir les expériences intellectuellement, nous la considérons comme une « connaissance du réel ». »Le« facteur objectif »mentionné ci-dessus est la totalité des concepts et des relations conceptuelles considérés comme indépendants de l’expérience, c’est-à-dire des perceptions.

Après ce qui a été dit, le « réel » en physique est à prendre comme un type de programme auquel nous ne sommes cependant pas obligés de nous accrocher a priori. Personne n’est susceptible de vouloir renoncer à ce programme dans le domaine du « macroscopique » (emplacement de la marque sur la bande de papier « réel »). Mais le « macroscopique » et le « microscopique » sont tellement interdépendants qu’il paraît impossible de renoncer à ce programme dans le seul « microscopique ». Je ne vois pas non plus aucune occasion dans les faits observables du champ quantique de le faire, à moins, en effet, que l’on s’accroche a priori à la thèse selon laquelle la description de la nature par le schéma statistique de la mécanique quantique est définitive.

L’attitude théorique préconisée ici ne se distingue de celle de Kant que par le fait que nous ne concevons pas les « catégories » comme inaltérables (conditionnées par la nature de l’entendement) mais comme (au sens logique) des conventions libres. Elles n’apparaissent a priori que dans la mesure où penser sans poser de catégories et de concepts en général serait aussi impossible que de respirer dans le vide.

De ces maigres remarques, on verra que cela doit me sembler une erreur de permettre à la description théorique de dépendre directement d’actes d’assertions empiriques, comme il me semble être voulu [par exemple] dans le principe de complémentarité de Bohr, la formulation tranchante dont, d’ailleurs, je n’ai pas été en mesure de réaliser malgré les efforts que j’y ai consacrés. De mon point de vue, [de telles] déclarations ou mesures ne peuvent se produire que comme des instances spéciales, c’est-à-dire des parties, de la description physique, auxquelles je ne peux attribuer aucune position exceptionnelle au-dessus des autres.

Les essais de Bohr et Pauli mentionnés ci-dessus contiennent une appréciation historique de mes efforts dans le domaine des statistiques physiques et des quanta et, en outre, une accusation qui est présentée de la manière la plus amicale. Dans sa formulation la plus brève, ce dernier s’exécute comme suit : « Adhésion rigide à la théorie classique ». Cette accusation exige soit une défense, soit un aveu de culpabilité. L’un ou l’autre est, cependant, rendu beaucoup plus difficile parce que ce que l’on entend par « théorie classique » n’est en aucun cas immédiatement clair. La théorie de Newton mérite le nom de théorie classique. Elle a néanmoins été abandonnée puisque Maxwell et Hertz ont montré que l’idée de forces à distance doit être abandonnée et qu’on ne peut pas se passer de l’idée de « champs continus ». »L’opinion selon laquelle les champs continus doivent être considérés comme les seuls concepts de base acceptables, qui doivent également être supposés sous-tendre la théorie des particules matérielles, l’emporta bientôt. Or cette conception est devenue, pour ainsi dire, « classique » ; mais une théorie propre, et en principe complète, n’en est pas sortie. La théorie de Maxwell du champ électrique est restée un torse, car elle était incapable d’établir des lois pour le comportement de la densité électrique, sans lesquelles, bien sûr, il ne peut y avoir de champ électromagnétique. De manière analogue, la théorie générale de la relativité fournissait alors une théorie des champs de la gravitation, mais aucune théorie des masses génératrices de champs. (Ces remarques présupposent qu’il va de soi qu’une théorie des champs ne peut contenir aucune singularité, c’est-à-dire des positions ou des parties de l’espace dans lesquelles les lois des champs ne sont pas valides.) Or cette conception est devenue, pour ainsi dire, « classique » ; mais une théorie propre, et en principe complète, n’en est pas sortie. La théorie de Maxwell du champ électrique est restée un torse, car elle était incapable d’établir des lois pour le comportement de la densité électrique, sans lesquelles, bien sûr, il ne peut y avoir de champ électromagnétique. De manière analogue, la théorie générale de la relativité fournissait alors une théorie des champs de la gravitation, mais aucune théorie des masses génératrices de champs.

Par conséquent, il n’y a pas, à proprement parler, aujourd’hui de théorie classique des champs ; on ne peut donc pas non plus y adhérer de manière rigide. Néanmoins, la théorie des champs existe en tant que programme : « Les fonctions continues dans le [continuum] à quatre dimensions en tant que concepts de base de la théorie. » Une adhésion rigide à ce programme peut légitimement être affirmée de ma part. Le fondement plus profond de cela réside dans ce qui suit : La théorie de la gravitation m’a montré que la non-linéarité de ces équations se traduit par le fait que cette théorie produit des interactions entre les structures (choses localisées). Mais la recherche théorique d’équations non linéaires est sans espoir (à cause d’une trop grande variété de possibilités), si l’on n’utilise pas le principe général de relativité (invariance sous transformations de coordonnées continues générales). En attendant, cependant,il ne semble pas possible de formuler ce principe, si l’on cherche à s’écarter du programme ci-dessus. C’est là une contrainte à laquelle je ne peux pas me soustraire. Ceci pour ma justification.

Néanmoins, je suis obligé d’affaiblir cette justification par une confession. Si l’on fait abstraction de la structure quantique, on peut justifier l’introduction du gik « opérationnellement » en indiquant que l’on peut difficilement douter de la réalité physique du cône de lumière élémentaire qui appartient à un point. Ce faisant, on utilise implicitement l’existence d’un signal optique arbitrairement net. Un tel signal, cependant, en ce qui concerne les faits quantiques, implique des fréquences et des énergies infiniment élevées, et donc une destruction complète du champ à déterminer. Ce genre de justification physique de l’introduction du gik tombe à l’écart, à moins que l’on ne se limite au « macroscopique ». L’application de la base formelle de la théorie générale de la relativité au « microscopique » peut donc,se baser uniquement sur le fait que ce tenseur est la structure covariante formellement la plus simple qui puisse être envisagée. Une telle argumentation, cependant, n’a aucun poids pour quiconque doute que nous devions adhérer au continuum. Tout honneur à son doute - mais où d’autre est une route praticable ?

J’en viens maintenant au thème de la relation de la théorie de la relativité à la philosophie. C’est ici l’œuvre de Reichenbach qui, par la précision des déductions et par l’acuité de ses affirmations, invite irrésistiblement à un bref commentaire. La discussion lucide de Robertson est également intéressante principalement du point de vue de l’épistémologie générale, bien qu’elle se limite au thème plus étroit de « la théorie de la relativité et de la géométrie ». A la question : Considérez-vous vrai ce que Reichenbach a affirmé ici, je ne peux répondre que par la fameuse question de Pilate : « Qu’est-ce que la vérité ? »

Examinons d’abord bien la question : une géométrie - considérée du point de vue physique - est-elle vérifiable (c’est-à-dire falsifiable) ou non ? Reichenbach, avec Helmholtz, dit : Oui, à condition que le corps solide empiriquement donné réalise le concept de « distance ». Poincaré dit non et est par conséquent condamné par Reichenbach. Maintenant, la courte conversation suivante a lieu :

Poincaré : Les corps donnés empiriquement ne sont pas rigides, et par conséquent ne peuvent pas être utilisés pour la réalisation d’intervalles géométriques. Par conséquent, les théorèmes de géométrie ne sont pas vérifiables.

Reichenbach : J’admets qu’il n’y a pas de corps qui puisse être immédiatement invoqué pour la « définition réelle » de l’intervalle. Néanmoins, cette définition réelle peut être obtenue en tenant compte de la dépendance thermique du volume, de l’élasticité, de l’électro et de la magnétostriction, etc. Que cela est vraiment [et] sans contradiction possible, la physique classique l’a sûrement démontré.

Poincaré : Pour obtenir la définition réelle améliorée par vous-même, vous avez utilisé des lois physiques dont la formulation présuppose (dans ce cas) la géométrie euclidienne. La vérification, dont vous avez parlé, se réfère donc non seulement à la géométrie, mais à tout le système de lois physiques qui en constitue le fondement. Un examen de la géométrie en soi n’est donc pas pensable. - Pourquoi ne serait-il donc pas entièrement à moi de choisir la géométrie selon ma propre convenance (c’est-à-dire euclidienne) et d’adapter les lois restantes (au sens habituel du terme « physique ») à ce choix de telle manière qu’il ne puisse survenir aucune contradiction du tout avec l’expérience ?

(La conversation ne peut pas se poursuivre de cette manière parce que le respect de l’écrivain [actuel] pour la supériorité de Poincaré en tant que penseur et auteur ne le permet pas ; dans ce qui suit donc, un non-positiviste anonyme se substitue à Poincaré. -)

Reichenbach : Il y a quelque chose d’assez séduisant dans cette conception. Mais, d’un autre côté, il est à noter que l’adhésion à la signification objective de la longueur et à l’interprétation des différences de coordonnées en tant que distances (en physique pré-relativiste) n’a pas conduit à des complications. Ne devrions-nous pas, sur la base de ce fait étonnant, être justifié d’opérer plus avant, au moins provisoirement, avec le concept de la longueur mesurable, comme s’il y avait des choses telles que des tiges de mesure rigides. En tout cas, il aurait été impossible pour Einstein de facto (même si ce n’est pas théoriquement) de mettre en place la théorie de la relativité générale, s’il n’avait pas adhéré au sens objectif de la longueur.

Contre la suggestion de Poincaré, il faut souligner que ce qui compte vraiment, ce n’est pas simplement la plus grande simplicité possible de la géométrie seule, mais plutôt la plus grande simplicité possible de toute la physique (y compris la géométrie). C’est ce qui est, en premier lieu, impliqué dans le fait qu’aujourd’hui il faut décliner comme inadaptée la suggestion d’adhérer à la géométrie euclidienne.

Non-positiviste : Si, dans les circonstances énoncées, vous tenez à distance pour être un concept légitime, qu’en est-il de votre principe de base (sens = vérifiabilité) ? N’avez-vous pas à atteindre le point où vous devez nier le sens des concepts et théorèmes géométriques et ne reconnaître le sens que dans la théorie de la relativité complètement développée (qui, cependant, n’existe pas encore du tout en tant que produit fini) ? N’avez-vous pas à admettre que, dans votre sens du mot, aucun « sens » ne peut être attribué aux concepts et assertions individuels d’une théorie physique, et à l’ensemble du système seulement dans la mesure où il fait ce qui est donné dans l’expérience "intelligible ?" Pourquoi les concepts individuels qui apparaissent dans une théorie nécessitent-ils de toute façon une justification spécifique,s’ils ne sont indispensables que dans le cadre de la structure logique de la théorie, et que la théorie ne se valide que dans son intégralité ?

Il me semble d’ailleurs que vous n’avez pas du tout rendu justice à la réalisation philosophique vraiment significative de Kant. De Hume Kant avait appris qu’il existe des concepts (comme, par exemple, celui de lien causal), qui jouent un rôle dominant dans notre pensée, et qui, néanmoins, ne peuvent être déduits au moyen d’un processus logique à partir du donné empiriquement ( fait que plusieurs empiristes reconnaissent, il est vrai, mais semblent toujours à nouveau oublier). Qu’est-ce qui justifie l’utilisation de tels concepts ? Supposons qu’il ait répondu en ce sens : la réflexion est nécessaire pour comprendre le donné empirique, et les concepts et les « catégories » sont nécessaires en tant qu’éléments indispensables de la pensée. S’il était resté satisfait de ce type de réponse, il aurait évité le scepticisme et vous n’auriez pas pu lui reprocher. Il, cependant,a été induit en erreur par l’opinion erronée, difficile à éviter en son temps - que la géométrie euclidienne est nécessaire à la pensée et offre une connaissance assurée (c’est-à-dire non dépendante de l’expérience sensorielle) concernant les objets de la perception « externe ». De cette erreur aisément compréhensible, il a conclu à l’existence de jugements synthétiques a priori, qui sont produits par la seule raison, et qui, par conséquent, peuvent prétendre à une validité absolue. Je pense que votre censure est dirigée moins contre Kant lui-même que contre ceux qui adhèrent encore aujourd’hui aux erreurs des « jugements synthétiques a priori ».

Je ne peux guère penser à quelque chose de plus stimulant comme base de discussion dans un séminaire épistémologique que ce bref essai de Reichenbach (mieux pris avec l’essai de Robertson).

Ce qui a été discuté jusqu’à présent est étroitement lié à l’essai de Bridgman, de sorte qu’il me sera possible de m’exprimer assez brièvement sans avoir à craindre trop d’être mal compris. Pour pouvoir considérer un système logique comme une théorie physique, il n’est pas nécessaire d’exiger que toutes ses assertions puissent être interprétées et « testées » de manière indépendante « opérationnellement » ; de facto, cela n’a encore jamais été réalisé par aucune théorie et ne peut pas du tout être atteint. Pour pouvoir considérer une théorie comme une théorie physique, il suffit qu’elle implique des assertions empiriquement testables en général.

Cette formulation est totalement imprécise dans la mesure où la « testabilité » est une qualité qui se réfère non seulement à l’assertion elle-même mais aussi à la coordination des concepts qu’elle contient avec l’expérience. Mais il ne m’est probablement guère nécessaire d’entrer dans une discussion sur ce problème chatouilleux, dans la mesure où il est peu probable qu’il existe à ce stade des divergences d’opinions essentielles. -

Margenau ; Cet essai contient plusieurs remarques spécifiques originales, que je dois considérer séparément :

À son Sec. I : « La position d’Einstein… contient des traits de rationalisme et d’empirisme extrême… » Cette remarque est tout à fait correcte. D’où vient cette fluctuation ? Un système conceptuel logique est la physique dans la mesure où ses concepts et assertions sont nécessairement mis en relation avec le monde des expériences. Quiconque souhaite mettre en place un tel système trouvera un obstacle dangereux dans le choix arbitraire (embarras de richesse). C’est pourquoi il cherche à connecter ses concepts aussi directement et nécessairement que possible avec le monde de l’expérience. Dans ce cas, son attitude est empirique. Cette voie est souvent féconde, mais elle est toujours sujette à caution, car le concept spécifique et l’affirmation individuelle ne peuvent, après tout, affirmer quelque chose face au donné empirique qu’en relation avec l’ensemble du système.Il reconnaît alors qu’il n’existe aucun chemin logique entre le donné empiriquement et ce monde conceptuel. Son attitude devient alors plus presque rationaliste, car il reconnaît l’indépendance logique du système. Le danger de cette attitude réside dans le fait que dans la recherche du système, on peut perdre tout contact avec le monde de l’expérience. Une oscillation entre ces extrêmes me paraît inévitable.

À son Sec. 2 : Je n’ai pas grandi dans la tradition kantienne, mais en suis venu à comprendre ce qui est vraiment précieux qui se trouve dans sa doctrine, à côté d’erreurs qui sont aujourd’hui assez évidentes, mais assez tardivement. Il est contenu dans la phrase : « Le réel ne nous est pas donné, mais mis à nous (aufgegeben) (au moyen d’une énigme). » Cela signifie évidemment : il existe une construction conceptuelle pour la saisie de l’interpersonnel, dont l’autorité réside uniquement dans sa validation. Cette construction conceptuelle se réfère précisément au « réel » (par définition), et toute autre question concernant la « nature du réel » paraît vide.

À son Sec. 4 : Cette discussion ne m’a pas du tout convaincu. Car il est clair en soi que toute grandeur et toute assertion d’une théorie prétendent à un « sens objectif » (dans le cadre de la théorie). Un problème ne se pose que lorsque nous attribuons des caractéristiques de groupe à une théorie, c’est-à-dire si nous supposons ou postulons que la même situation physique admet plusieurs manières de description, dont chacune doit être considérée comme également justifiée. Car dans ce cas, nous ne pouvons évidemment pas attribuer une signification objective complète (par exemple la composante x de la vitesse d’une particule ou ses coordonnées x) aux magnitudes individuelles (non éliminables). Dans ce cas, qui a toujours existé en physique, il faut se limiter à attribuer un sens objectif aux lois générales de la théorie, c’est-à-direnous devons exiger que ces lois soient valables pour toute description du système reconnue comme justifiée par le groupe. Il n’est donc pas vrai que « l’objectivité » présuppose une caractéristique de groupe, mais que la caractéristique de groupe force un raffinement du concept d’objectivité. La position des caractéristiques de groupe est si importante d’un point de vue heuristique pour la théorie, parce que cette caractéristique limite toujours considérablement la variété des lois mathématiquement significatives.

Maintenant, il s’ensuit une affirmation selon laquelle les caractéristiques du groupe déterminent que les lois doivent avoir la forme d’équations différentielles ; Je ne peux pas du tout voir cela. Puis Margenau insiste sur le fait que les lois exprimées au moyen des équations différentielles (en particulier les partielles) sont « les moins spécifiques ». Sur quoi fonde-t-il cette affirmation ? Si elles pouvaient être prouvées correctes, il est vrai que la tentative de fonder la physique sur des équations différentielles s’avérerait alors sans espoir. Nous sommes cependant loin de pouvoir juger si les lois différentielles du type à considérer ont des solutions qui soient partout exemptes de singularité ; et, dans l’affirmative, s’il existe trop de solutions de ce type.

Et maintenant, juste une remarque concernant les discussions sur le paradoxe Einstein-Podolski-Rosen. Je ne pense pas que la défense de Margenau de la position quantique « orthodoxe » (« orthodoxe » se réfère à la thèse selon laquelle la fonction t caractérise le système individuel de manière exhaustive) la position quantique touche les [aspects] essentiels. Parmi les théoriciens quantiques « orthodoxes » dont je connais la position, celle de Niels Bohr me semble être le plus proche de rendre justice au problème. Traduit dans ma propre façon de le dire, il fait valoir ce qui suit :

Si les systèmes partiels A et B forment un système total qui est décrit par sa fonction Psi Psi / (AB), il n’y a aucune raison pour laquelle une existence mutuellement indépendante (état de réalité) devrait être attribuée aux systèmes partiels A et B vus. séparément, même pas si les systèmes partiels sont spatialement séparés les uns des autres au moment particulier considéré. L’affirmation que, dans ce dernier cas, la situation réelle de B ne pourrait être (directement) influencée par aucune mesure prise sur A est donc, dans le cadre de la théorie quantique, infondée et (comme le montre le paradoxe) inacceptable.

Par cette façon de regarder la matière, il devient évident que le paradoxe nous oblige à renoncer à l’une des deux affirmations suivantes :

(1) la description au moyen de la fonction Psi est complète

(2) les états réels des objets spatialement séparés sont indépendants les uns des autres.

En revanche, il est possible d’adhérer à (2), si l’on considère la fonction Psi comme la description d’un ensemble (statistique) de systèmes (et donc abandonne (1)). Cependant, ce point de vue brise le cadre de la « théorie quantique orthodoxe ».

Encore une remarque à Margenau’s Sec. 7. Dans la caractérisation de la mécanique quantique, on trouvera une petite phrase brève : « au niveau classique, cela correspond à la dynamique ordinaire ». C’est tout à fait correct - cum grano salis ; et c’est précisément ce granum salis qui est significatif pour la question de l’interprétation.

Si nous nous intéressons aux masses macroscopiques (boules de billard ou étoiles), nous opérons avec des ondes de Broglie très courtes, qui sont déterminantes pour le comportement du centre de gravité de telles masses. C’est la raison pour laquelle il est possible d’arranger la description quantique-théorique pendant un temps raisonnable de telle manière que pour la manière macroscopique de voir les choses, elle devienne suffisamment précise en position ainsi qu’en impulsion. Il est vrai aussi que cette netteté persiste longtemps et que les quasi-points ainsi représentés se comportent comme les points de masse de la mécanique classique. Cependant, la théorie montre aussi qu’après un temps suffisamment long, le caractère ponctuel de la fonction Psi est complètement perdu au profit des coordonnées du centre de gravité, de sorte qu’on ne peut plus parler de quasi-localisation de les centres de gravité.L’image devient alors, par exemple dans le cas d’un seul point de macro-masse, assez similaire à celle impliquée dans un seul électron libre.

Si maintenant, conformément à la position orthodoxe, je considère la fonction Psi comme la description complète d’un fait réel pour le cas individuel, je ne peux que considérer le manque de netteté essentiellement illimité de la position du corps (macroscopique). comme réel. D’autre part, cependant, nous savons qu’en éclairant le corps au moyen d’une lanterne au repos contre le système de coordonnées, nous obtenons une détermination précise (jugée macroscopiquement) de la position. Pour comprendre cela, je dois supposer que cette position nettement définie est déterminée non seulement par la situation réelle du corps observé, mais aussi par l’acte d’illumination. C’est encore un paradoxe (similaire à la marque sur la bande de papier dans l’exemple mentionné ci-dessus). L’effroi ne disparaît que si l’on renonce au point de vue orthodoxe,selon laquelle la fonction Psi est acceptée comme une description complète du système unique.

Il peut sembler que toutes ces considérations étaient simplement superflues, ce qui n’a rien à voir avec la physique proprement dite. Cependant, cela dépend précisément de ces considérations dans quelle direction on croit devoir chercher la future base conceptuelle de la physique.

Je termine ces exposés, qui sont devenus assez longs, concernant l’interprétation de la théorie quantique par la reproduction d’une brève conversation que j’ai eue avec un physicien théoricien important. Lui : « J’ai tendance à croire à la télépathie. » I : "Cela a probablement plus à voir avec la physique qu’avec la psychologie." Lui : « Oui. »

Les essais de Lenzen et Northrop visent tous deux à traiter systématiquement mes déclarations occasionnelles de contenu épistémologique. À partir de ces énoncés, Lenzen construit une image synoptique totale, dans laquelle ce qui manque dans les énoncés est fourni avec soin et avec délicatesse de sentiment. Tout ce qui y est dit me paraît convaincant et correct. Northrop utilise ces énoncés comme point de départ pour une critique comparative des grands systèmes épistémologiques. Je vois dans cette critique un chef-d’œuvre de réflexion impartiale et de discussion concise, qui ne se permet nulle part de se détourner de l’essentiel.

La relation réciproque entre l’épistémologie et la science est d’une nature remarquable. Ils dépendent les uns des autres. L’épistémologie sans contact avec la science devient un schéma vide. La science sans épistémologie est - pour autant qu’elle soit pensable - primitive et confuse. Cependant, à peine l’épistémologue, qui cherche un système clair, s’est-il frayé un chemin vers un tel système, qu’il est enclin à interpréter le contenu de la pensée de la science dans le sens de son système et à rejeter tout ce qui ne rentre pas dans son système. Le scientifique, cependant, ne peut pas se permettre de pousser aussi loin son effort pour une systématique épistémologique. Il accepte avec gratitude l’analyse conceptuelle épistémologique ; mais les conditions extérieures, qui lui sont fixées par les faits de l’expérience,ne lui permettez pas de se laisser trop restreindre dans la construction de son monde conceptuel par l’adhésion à un système épistémologique. Il doit donc apparaître à l’épistémologue systématique comme un type d’opportuniste sans scrupules : il apparaît comme réaliste dans la mesure où il cherche à décrire un monde indépendant des actes de perception ; aussi idéaliste dans la mesure où il considère les concepts et les théories comme les inventions libres de l’esprit humain (non logiquement dérivables de ce qui est donné empiriquement) ; aussi positiviste dans la mesure où il considère que ses concepts et théories ne sont justifiés que dans la mesure où ils fournissent une représentation logique des relations entre les expériences sensorielles. Il peut même apparaître comme platonicien ou pythagoricien dans la mesure où il considère le point de vue de la simplicité logique comme un outil indispensable et efficace de sa recherche.

Tout cela est magnifiquement élucidé dans les essais de Lenzen et Northrop.

Et maintenant quelques remarques concernant les essais d’EA Milne, G. Lemaitre et L. Infeld concernant le problème cosmologique :

Concernant les réflexions ingénieuses de Milne, je peux seulement dire que je trouve leur base théorique trop étroite. De mon point de vue, on ne peut arriver, par voie de théorie, à des résultats au moins assez fiables dans le domaine de la cosmologie, si l’on n’utilise pas le principe de relativité générale.

En ce qui concerne les arguments de Lemaître en faveur de la soi-disant « constante cosmologique » dans les équations de gravitation, je dois admettre que ces arguments ne me paraissent pas suffisamment convaincants au vu de l’état actuel de nos connaissances.

L’introduction d’une telle constante implique un renoncement considérable à la simplicité logique de la théorie, renoncement qui ne me paraissait inévitable que tant qu’on n’avait aucune raison de douter de la nature essentiellement statique de l’espace. Après la découverte par Hubble de « l’expansion » du système stellaire, et depuis la découverte de Friedmann que les équations non complétées impliquent la possibilité de l’existence d’une densité moyenne (positive) de matière dans un univers en expansion, l’introduction d’une telle constante m’apparaît , du point de vue théorique, actuellement injustifié.

La situation se complique du fait que toute la durée de l’expansion de l’espace vers le présent, basée sur les équations dans leur forme la plus simple, s’avère plus petite que ce qui paraît crédible au vu de l’âge fiable et connu des minéraux terrestres. Mais l’introduction de la « constante cosmologique » n’offre absolument aucune échappatoire naturelle à la difficulté. Cette dernière difficulté est donnée par la valeur numérique de la constante d’expansion de Hubble et la mesure de l’âge des minéraux, totalement indépendante de toute théorie cosmologique, à condition que l’on interprète l’effet Hubble comme un effet Doppler.

Tout dépend finalement de la question : une raie spectrale peut-elle être considérée comme une mesure d’un « temps propre » (Eigen-Zeit) ds (ds2 = gikdxidxk), (si l’on prend en considération des régions de dimensions cosmiques) ? Existe-t-il un objet naturel qui incorpore le « bâton de mesure naturel » indépendamment de sa position dans l’espace à quatre dimensions ? L’affirmation de cette question a rendu psychologiquement possible l’invention de la théorie générale de la relativité ; cependant, cette supposition n’est logiquement pas nécessaire. Pour la construction de la théorie actuelle de la relativité, ce qui suit est essentiel :

(1) Les choses physiques sont décrites par des fonctions continues, des variables de champ de quatre coordonnées. Tant que la connexion topologique est préservée, ces dernières peuvent être librement choisies.

(2) Les variables de champ sont des composantes tensorielles ; parmi les tenseurs se trouve un tenseur symétrique gik pour la description du champ gravitationnel.

(3) Il existe des objets physiques, qui (dans le domaine macroscopique) mesurent l’invariant ds.

Si (1) et (2) sont acceptés, (3) est plausible, mais pas nécessaire. La construction de la théorie mathématique repose exclusivement sur (1) et (2).

Une théorie complète de la physique en tant que totalité, conformément à (1) et (2), n’existe pas encore. S’il existait, il n’y aurait pas de place pour la supposition (3). Car les objets utilisés comme outils de mesure ne mènent pas une existence indépendante à côté des objets impliqués par les équations de champ. - - Il n’est pas nécessaire que l’on permette de contenir ses considérations cosmologiques par une telle attitude sceptique ; mais on ne doit pas non plus fermer son esprit à leur égard dès le début.

Ces réflexions m’amènent à l’essai de Karl Menger. Car les faits quantiques suggèrent le soupçon que le doute peut également être soulevé quant à l’utilité ultime du programme caractérisé en (1) et (2). Il existe la possibilité de douter seulement (2) et, ce faisant, de s’interroger sur la possibilité de pouvoir formuler adéquatement les lois au moyen d’équations différentielles, sans tomber (1). L’effort plus radical d’abandonner (1) avec (2) me semble - et je crois aussi au Dr Menger - être plus proche. Tant que personne n’a de nouveaux concepts, qui semblent avoir un pouvoir constructif suffisant, le simple doute subsiste ; c’est malheureusement ma propre situation. Adhérer au continuum ne provient pas pour moi d’un préjugé, mais découle du fait que je n’ai pas pu imaginer quoi que ce soit d’organique pour prendre sa place.Comment conserver la quadridimensionnalité par essence (ou presque) et [en même temps] abandonner le continuum ?

L’essai de L. Infeld est une excellente introduction indépendamment compréhensible au soi-disant « problème cosmologique » de la théorie de la relativité, qui examine de manière critique tous les points essentiels.

Max von Laue : Une enquête historique sur le développement des postulats de conservation, qui, à mon avis, a une valeur durable. Je pense qu’il vaudrait la peine de rendre cet essai facilement accessible aux étudiants par le biais d’une publication indépendante.

Malgré de sérieux efforts, je n’ai pas réussi à bien comprendre l’essai de H. Dingle, pas même en ce qui concerne son but. L’idée de la théorie spéciale de la relativité doit-elle être développée dans le sens où de nouvelles caractéristiques de groupe, qui ne sont pas impliquées par l’invariance de Lorentz, doivent être postulées ? Ces postulats sont-ils fondés empiriquement ou uniquement à travers un procès « posé » ? Sur quoi repose la confiance en l’existence de telles caractéristiques de groupe ?

L’essai de Kurt Gödel constitue, à mon avis, une contribution importante à la théorie générale de la relativité, en particulier à l’analyse du concept de temps. Le problème ici impliqué m’a déjà perturbé au moment de la construction de la théorie générale de la relativité, sans que j’aie réussi à le clarifier. En dehors du rapport de la théorie de la relativité à la philosophie idéaliste ou à toute formulation philosophique des questions, le problème se présente comme suit : X-shape

Si P est un point du monde, un « cône de lumière » (ds2 = 0) lui appartient. Nous dessinons une ligne du monde « semblable au temps » à travers P et sur cette ligne observons les points du monde proches B et A, séparés par P. Est-il sensé de fournir la ligne du monde avec une flèche, et d’affirmer que B est avant P, A après P ?

Ce qui reste de la connexion temporelle entre les points du monde dans la théorie de la relativité est-il une relation asymétrique, ou serait-on tout aussi justifié, du point de vue physique, d’indiquer la flèche dans le sens opposé et d’affirmer que A est avant P, B après P ?

Dans un premier temps, l’alternative est décidée par la négative, si l’on a raison de dire : s’il est possible d’envoyer (au télégraphe) un signal (passant également à proximité immédiate de P) de B vers A, mais pas de A à B, alors le caractère unilatéral (asymétrique) du temps est assuré, c’est-à-dire qu’il n’existe pas de libre choix pour la direction de la flèche. Ce qui est essentiel en cela est le fait que l’envoi d’un signal est, au sens de la thermodynamique, un processus irréversible, un processus qui est lié à la croissance de l’entropie (alors que, selon nos connaissances actuelles, tous les processus élémentaires sont réversibles ).

Si, par conséquent, B et A sont deux points du monde suffisamment voisins, qui peuvent être reliés par une ligne semblable au temps, alors l’affirmation : « B est avant A », a un sens physique. Mais cette assertion a-t-elle encore un sens, si les points, qui sont connectables par la ligne temporelle, sont arbitrairement éloignés les uns des autres ? Certainement pas, s’il existe des séries de points connectables par des lignes temporelles de telle sorte que chaque point précède temporellement le précédent, et si la série est fermée en elle-même. Dans ce cas, la distinction « plus tôt-plus tard » est abandonnée pour les points du monde qui sont très éloignés dans un sens cosmologique, et ces paradoxes, concernant la direction de la connexion causale, surgissent, dont M. Gödel a parlé.

De telles solutions cosmologiques des équations de gravitation (sans constante A) ont été trouvées par M. Gödel. Il sera intéressant de déterminer si ceux-ci ne doivent pas être exclus pour des raisons physiques.

J’ai le sentiment angoissant de m’être exprimé, dans cette réponse, non seulement avec un vent assez long, mais aussi assez brusquement. Cette observation peut servir d’excuse : on ne peut vraiment se quereller qu’avec ses frères ou ses amis proches ; d’autres sont trop extraterrestres [pour cela].

PS Les remarques précédentes se réfèrent à des essais qui étaient entre mes mains à la fin de janvier 1949. Le volume devant paraître en mars, il était grand temps d’écrire ces réflexions.

Une fois qu’ils ont été conclus, j’ai appris que la publication du volume allait connaître un nouveau retard et que d’autres essais importants étaient arrivés. J’ai néanmoins décidé de ne pas étendre davantage mes remarques, qui étaient déjà devenues trop longues, et de renoncer de prendre position par rapport aux essais qui m’ont été remis après la conclusion de mes remarques.
Bohr - Discussions avec Einstein sur les problèmes épistémologiques en physique atomique

Source : D’après Albert Einstein : Philosophe-scientifique (1949), publ. Cambridge University Press, 1949. Rapport de Neils Bohr sur les conversations avec Einstein et la réponse d’Einstein.

QUAND invité par l’éditeur de la série, Living Philosophers, à écrire un article pour ce volume dans lequel des scientifiques contemporains honorent les contributions historiques d’Albert Einstein au progrès de la philosophie naturelle et reconnaissent la dette de toute notre génération pour le conseils que son génie nous a donnés, j’ai pensé à la meilleure façon d’expliquer tout ce que je lui dois pour l’inspiration. À cet égard, les nombreuses occasions au cours des années au cours desquelles j’ai eu le privilège de discuter avec Einstein des problèmes épistémologiques soulevés par le développement moderne de la physique atomique me sont revenues vivement à l’esprit et j’ai senti que je ne pouvais guère tenter rien de mieux que de rendez compte de ces discussions qui, même si aucune concorde complète n’a été obtenue jusqu’à présent, m’ont été d’une grande valeur et d’un plus grand stimulant.J’espère également que ce compte-rendu pourra donner à des cercles plus larges une impression de l’importance de l’échange d’idées ouvert d’esprit pour le progrès dans un domaine où de nouvelles expériences ont exigé à maintes reprises un réexamen de nos vues.

Dès le début, le principal point en débat a été l’attitude à adopter face au départ des principes coutumiers de la philosophie naturelle caractéristiques du nouveau développement de la physique qui a été initié dans la première année de ce siècle par la découverte par Planck du quantum universel d’action. . Cette découverte, qui a révélé une caractéristique d’atomicité dans les lois de la nature allant bien au-delà de l’ancienne doctrine de la divisibilité limitée de la matière, nous a en effet appris que les théories classiques de la physique sont des idéalisations qui ne peuvent s’appliquer sans ambiguïté qu’à la limite où tout les actions impliquées sont importantes par rapport au quantum.La question en litige était de savoir si le renoncement à un mode causal de description des processus atomiques impliqués dans les efforts visant à faire face à la situation devait être considéré comme une rupture temporaire par rapport aux idéaux à raviver ultimement ou si nous sommes confrontés à un pas irrévocable vers obtenir l’harmonie appropriée entre l’analyse et la synthèse des phénomènes physiques. Pour décrire l’arrière-plan de nos discussions et faire ressortir aussi clairement que possible les arguments en faveur des points de vue opposés, j’ai jugé nécessaire d’aller assez loin en rappelant quelques traits principaux du développement auquel Einstein lui-même a contribué de manière si décisive.

Comme on le sait, c’est la relation intime, élucidée principalement par Boltzmann, entre les lois de la thermodynamique et les régularités statistiques présentées par des systèmes mécaniques à plusieurs degrés de liberté, qui a guidé Planck dans son ingénieux traitement du problème du rayonnement thermique, conduisant lui à sa découverte fondamentale. Si, dans ses travaux, Planck s’intéressait principalement à des considérations de caractère essentiellement statistique et s’abstenait avec une grande prudence de conclusions définitives quant à la mesure dans laquelle l’existence du quantum impliquait un départ des fondements de la mécanique et de l’électrodynamique, la grande contribution originale d’Einstein. à la théorie quantique (1905) était juste la reconnaissance de la façon dont des phénomènes physiques comme le photo-effet peuvent dépendre directement des effets quantiques individuels. Dans ces mêmes années où,en développant sa théorie de la relativité, Einstein a jeté une nouvelle base pour la science physique, il a exploré avec un esprit des plus audacieux les nouvelles caractéristiques de l’atomicité qui pointaient au-delà de tout le cadre de la physique classique.

Avec une intuition sans faille, Einstein a donc été conduit pas à pas à la conclusion que tout processus de rayonnement implique l’émission ou l’absorption de quanta de lumière individuels ou "photons" avec énergie et impulsion.

E = hf et P = hs

(1)

respectivement, où h est la constante de Planck, tandis que f et s sont respectivement le nombre de vibrations par unité de temps et le nombre d’ondes par unité de longueur. Malgré sa fertilité, l’idée du photon impliquait un dilemme tout à fait imprévu, car toute simple image corpusculaire du rayonnement serait évidemment inconciliable avec les effets d’interférence, qui présentent un aspect si essentiel des phénomènes radiatifs, et qui ne peuvent être décrits qu’en termes d’un image de vague. L’acuité du dilemme est soulignée par le fait que les effets d’interférence offrent notre seul moyen de définir les concepts de fréquence et de longueur d’onde entrant dans les expressions mêmes de l’énergie et de la quantité de mouvement du photon.

Dans cette situation, il ne saurait être question de tenter une analyse causale des phénomènes radiatifs, mais seulement, par une utilisation combinée des images contrastées, d’estimer les probabilités d’occurrence des processus de rayonnement individuels. Cependant, il est très important de se rendre compte que le recours aux lois de probabilité dans de telles circonstances est essentiellement différent dans son objectif de l’application familière de considérations statistiques comme moyens pratiques de rendre compte des propriétés de systèmes mécaniques d’une grande complexité structurelle. En fait, en physique quantique, nous ne sommes pas confrontés à des subtilités de ce genre, mais à l’incapacité du cadre classique des concepts à comprendre la caractéristique particulière de l’indivisibilité, ou « individualité », qui caractérise les processus élémentaires.

L’échec des théories de la physique classique à rendre compte des phénomènes atomiques a été encore accentué par les progrès de nos connaissances sur la structure des atomes. Surtout, la découverte du noyau atomique par Rutherford (1911) révéla aussitôt l’insuffisance des concepts mécaniques et électromagnétiques classiques pour expliquer la stabilité inhérente de l’atome. Là encore, la théorie quantique a offert un indice pour l’élucidation de la situation et surtout il s’est avéré possible de rendre compte de la stabilité atomique, ainsi que des lois empiriques régissant les spectres des éléments, en supposant que toute réaction de l’atome résultant dans un changement de son énergie impliquait une transition complète entre deux états quantiques dits stationnaires et que, en particulier,les spectres ont été émis par un processus en étapes dans lequel chaque transition est accompagnée de l’émission d’un quantum de lumière monochromatique d’une énergie juste égale à celle d’un photon d’Einstein.

Ces idées, qui furent bientôt confirmées par les expériences de Franck et Hertz (1914) sur l’excitation des spectres par impact d’électrons sur les atomes, impliquaient un renoncement supplémentaire au mode causal de description, puisque évidemment l’interprétation des lois spectrales implique que un atome dans un état excité aura en général la possibilité de transitions avec émission de photons vers l’un ou l’autre de ses états d’énergie inférieure. En fait, l’idée même d’états stationnaires est incompatible avec toute directive pour le choix entre de telles transitions et ne laisse place qu’à la notion de probabilités relatives des processus de transition individuels.Le seul guide pour estimer de telles probabilités était le soi-disant principe de correspondance qui avait pour origine la recherche du lien le plus étroit possible entre le compte rendu statistique des processus atomiques et les conséquences à attendre de la théorie classique, qui devrait être valable dans la limite où le les actions impliquées dans toutes les étapes de l’analyse des phénomènes sont importantes par rapport au quantum universel.

À cette époque, aucune théorie quantique générale auto-cohérente n’était encore en vue, mais l’attitude dominante peut peut-être être illustrée par le passage suivant d’une conférence de l’écrivain de 1913 :

J’espère que je me suis exprimé suffisamment clairement pour que vous puissiez apprécier la mesure dans laquelle ces considérations entrent en conflit avec le schéma admirablement cohérent de conceptions qui a été à juste titre appelé la théorie classique de l’électrodynamique. D’un autre côté, j’ai essayé de vous donner l’impression qu’en insistant si fortement sur ce conflit, il peut aussi être possible avec le temps d’établir une certaine cohérence dans les idées nouvelles.

Des progrès importants dans le développement de la théorie quantique ont été réalisés par Einstein lui-même dans son célèbre article sur l’équilibre radiatif en 1917, où il a montré que la loi de Planck pour le rayonnement thermique pouvait être simplement déduite d’hypothèses conformes aux idées de base de la théorie quantique de la constitution atomique. . À cette fin, Einstein a formulé des règles statistiques générales concernant l’occurrence des transitions radiatives entre les états stationnaires, en supposant non seulement que, lorsque l’atome est exposé à un champ de rayonnement, l’absorption ainsi que les processus d’émission se produiront avec une probabilité par unité de temps proportionnelle à l’intensité de l’irradiation, mais que même en l’absence de perturbations externes, des processus d’émission spontanée auront lieu avec un taux correspondant à une certaine probabilité a priori. Concernant ce dernier point,Einstein a souligné le caractère fondamental de la description statistique de la manière la plus suggestive en attirant l’attention sur l’analogie entre les hypothèses concernant l’occurrence des transitions radiatives spontanées et les lois bien connues régissant les transformations des substances radioactives.

Dans le cadre d’un examen approfondi des exigences de la thermodynamique en ce qui concerne les problèmes de rayonnement, Einstein a souligné encore plus le dilemme en soulignant que l’argumentation impliquait que tout processus de rayonnement était "non dirigé" dans le sens où non seulement un moment correspond à un photon avec la direction de propagation transférée à un atome dans le processus d’absorption, mais que l’atome émetteur recevra également une impulsion équivalente dans la direction opposée, bien qu’il ne puisse être question sur l’image d’onde d’une préférence pour une seule direction dans une émission traiter. L’attitude d’Einstein à l’égard de telles conclusions surprenantes est exprimée dans un passage à la fin de l’article, qui peut être traduit comme suit :

Ces caractéristiques des processus élémentaires semblent rendre le développement d’un traitement quantique approprié des rayonnements presque inévitable. La faiblesse de la théorie réside dans le fait que, d’une part, aucune connexion plus étroite avec les concepts d’onde n’est possible et que, d’autre part, elle laisse au hasard (Zufall) le temps et la direction des processus élémentaires ; néanmoins, j’ai pleinement confiance dans la fiabilité de la voie engagée.

Lorsque j’ai eu la grande expérience de rencontrer Einstein pour la première fois lors d’une visite à Berlin en 1920, ces questions fondamentales ont constitué le thème de nos conversations. Les discussions, auxquelles je suis souvent revenu dans mes pensées, ajoutaient à toute mon admiration pour Einstein une profonde impression de son attitude détachée. Certes, son utilisation privilégiée de phrases aussi pittoresques que « ondes fantômes (Gespensterfelder) guidant les photons » n’impliquait aucune tendance au mysticisme, mais éclairait plutôt un humour profond derrière ses remarques perçantes. Pourtant, une certaine différence d’attitude et de perspective subsistait, puisque, avec sa maîtrise de coordonner des expériences apparemment contrastées sans abandonner la continuité et la causalité,Einstein était peut-être plus réticent à renoncer à de tels idéaux que quelqu’un pour qui le renoncement à cet égard semblait être le seul moyen de procéder à la tâche immédiate de coordonner les multiples preuves concernant les phénomènes atomiques, qui s’accumulaient de jour en jour dans l’exploration. de ce nouveau champ de connaissances.

Au cours des années suivantes, au cours desquelles les problèmes atomiques ont attiré l’attention de cercles de physiciens de plus en plus nombreux, les contradictions apparentes inhérentes à la théorie quantique se sont fait sentir de plus en plus vivement. Une illustration de cette situation est la discussion soulevée par la découverte de l’effet Stern-Gerlach en 1922. D’une part, cet effet a donné un appui frappant à l’idée d’états stationnaires et en particulier à la théorie quantique de l’effet Zeeman développée par Sommerfeld , d’autre part, comme exposé si clairement par Einstein et Ehrenfest, il présentait avec des difficultés insurmontables toute tentative de former une image du comportement des atomes dans un champ magnétique. Des paradoxes similaires ont été soulevés par la découverte par Compton (1924) du changement de longueur d’onde accompagnant la diffusion des rayons X par les électrons. Ce phénomène a permis,comme on le sait, une preuve la plus directe de l’adéquation de la vision d’Einstein concernant le transfert d’énergie et de quantité de mouvement dans les processus radiatifs ; en même temps, il était tout aussi clair qu’aucune simple image d’une collision corpusculaire ne pouvait offrir une description exhaustive du phénomène. Sous l’impact de telles difficultés, des doutes ont été pendant un certain temps entretenus même en ce qui concerne la conservation de l’énergie et de la quantité de mouvement dans les processus de rayonnement individuels ; une vision cependant qu’il a fallu très vite abandonner face à des expériences plus raffinées mettant en évidence la corrélation entre la déviation du photon et le recul d’électrons correspondant.il est également clair qu’aucune image simple d’une collision corpusculaire ne peut offrir une description exhaustive du phénomène. Sous l’impact de telles difficultés, des doutes ont été pendant un certain temps entretenus même en ce qui concerne la conservation de l’énergie et de la quantité de mouvement dans les processus de rayonnement individuels ; une vision cependant qu’il a fallu très vite abandonner face à des expériences plus raffinées mettant en évidence la corrélation entre la déviation du photon et le recul d’électrons correspondant.

La voie de la clarification de la situation était, en effet, d’abord ouverte par le développement d’une théorie quantique plus complète. Un premier pas vers cet objectif fut la reconnaissance par de Broglie en 1925 que la dualité onde-corpuscule ne se limitait pas aux propriétés du rayonnement, mais était également inévitable pour rendre compte du comportement des particules matérielles. Cette idée, qui fut bientôt confirmée de manière convaincante par des expériences sur les phénomènes d’interférence électronique, fut aussitôt saluée par Einstein, qui avait déjà envisagé l’analogie profonde entre les propriétés du rayonnement thermique et des gaz à l’état dit dégénéré. La nouvelle ligne a été poursuivie avec le plus grand succès par Schrödinger (1926) qui, en particulier,a montré comment les états stationnaires des systèmes atomiques pouvaient être représentés par les solutions appropriées d’une équation d’onde à l’établissement de laquelle il était conduit par l’analogie formelle, tracée à l’origine par Hamilton, entre les problèmes mécaniques et optiques. Pourtant, les aspects paradoxaux de la théorie quantique n’étaient nullement améliorés, mais même soulignés, par l’apparente contradiction entre les exigences du principe général de superposition de la description des ondes et la caractéristique d’individualité des processus atomiques élémentaires.par l’apparente contradiction entre les exigences du principe général de superposition de la description de l’onde et le trait d’individualité des processus atomiques élémentaires.par l’apparente contradiction entre les exigences du principe général de superposition de la description de l’onde et le trait d’individualité des processus atomiques élémentaires.

Dans le même temps, Heisenberg (1925) avait jeté les bases d’une mécanique quantique rationnelle, qui se développa rapidement grâce à d’importantes contributions de Born et Jordan ainsi que de Dirac. Dans cette théorie, un formalisme est introduit, dans lequel les variables cinématiques et dynamiques de la mécanique classique sont remplacées par des symboles soumis à une algèbre non commutative. Malgré le renoncement aux images orbitales, les équations canoniques de la mécanique de Hamilton restent inchangées et la constante de Planck n’entre que dans les règles de commutation h

qp - pq = - (h / 2p),

(2)

tenant pour tout ensemble de variables conjuguées q et p. A travers une représentation des symboles par des matrices avec des éléments faisant référence à des transitions entre états stationnaires, une formulation quantitative du principe de correspondance est devenue pour la première fois possible. On peut ici rappeler qu’une étape préliminaire importante vers cet objectif a été franchie par l’établissement, notamment par les contributions de Kramers, d’une théorie quantique de la dispersion faisant un usage basique des règles générales d’Einstein pour la probabilité d’occurrence des processus d’absorption et d’émission.

Ce formalisme de la mécanique quantique a été rapidement prouvé par Schrödinger pour donner des résultats identiques à ceux obtenus par les méthodes mathématiques souvent plus pratiques de la théorie des vagues, et dans les années suivantes, des méthodes générales ont été progressivement établies pour une description essentiellement statistique des processus atomiques combinant les caractéristiques de l’individualité et les exigences du principe de superposition, également caractéristiques de la théorie quantique. Parmi les nombreuses avancées de cette période, on peut notamment mentionner que le formalisme s’est avéré capable d’incorporer le principe d’exclusion qui régit les états des systèmes à plusieurs électrons, et qui déjà avant l’avènement de la mécanique quantique avait été dérivé par Pauli d’une analyse des spectres atomiques.La compréhension quantitative d’une grande quantité de preuves empiriques ne pouvait laisser aucun doute sur la fertilité et l’adéquation du formalisme quantique-mécanique, mais son caractère abstrait a donné lieu à un sentiment généralisé de malaise. Une élucidation de la situation devrait, en effet, exiger un examen approfondi du problème d’observation même de la physique atomique.

Cette phase du développement a été, comme on le sait, initiée en 1927 par Heisenberg, qui a souligné que la connaissance que l’on peut obtenir de l’état d’un système atomique impliquera toujours une « indétermination » particulière. Ainsi, toute mesure de la position d’un électron au moyen d’un appareil quelconque, comme un microscope, utilisant un rayonnement haute fréquence, sera, selon les relations fondamentales (1), liée à un échange d’impulsion entre l’électron et la mesure. agence, qui est d’autant plus grande qu’une mesure de position est tentée avec précision. En comparant ces considérations avec les exigences du formalisme quantique-mécanique, Heisenberg a attiré l’attention sur le fait que la règle de commutation (2) impose une limitation réciproque à la fixation de deux variables conjuguées, q et p, exprimées par la relation

Dq. DP environ = h,

(3)

où Dq et Dp sont des latitudes convenablement définies dans la détermination de ces variables. En soulignant le lien intime entre la description statistique en mécanique quantique et les possibilités réelles de mesure, cette relation dite d’indétermination est, comme l’a montré Heisenberg, la plus importante pour l’élucidation des paradoxes impliqués dans les tentatives d’analyse des effets quantiques avec référence. aux images physiques habituelles.

Les nouveaux progrès de la physique atomique ont été commentés de divers côtés au Congrès international de physique tenu en septembre 1927, à Côme en commémoration de la Volta. Dans une conférence à cette occasion, j’ai défendu un point de vue appelé commodément « complémentarité », apte à embrasser les traits caractéristiques de l’individualité des phénomènes quantiques, et en même temps à clarifier les aspects particuliers du problème d’observation dans ce champ d’expérience. . À cette fin, il est décisif de reconnaître que, aussi loin que les phénomènes dépassent le cadre de l’explication physique classique, le récit de toutes les preuves doit être exprimé en termes classiques. L’argument est simplement que par le mot « expérience » nous nous référons à une situation où nous pouvons dire aux autres ce que nous avons fait et ce que nous avons appris et que, par conséquent,le compte rendu du dispositif expérimental et des résultats des observations doit être exprimé dans un langage non ambigu avec une application appropriée de la terminologie de la physique classique.

Ce point crucial, qui devait devenir un thème principal des discussions rapportées dans la suite, implique l’impossibilité de toute séparation nette entre le comportement des objets atomiques et l’interaction avec les instruments de mesure qui servent à définir les conditions d’apparition des phénomènes. . En fait, l’individualité des effets quantiques typiques trouve sa juste expression dans la circonstance que toute tentative de subdiviser les phénomènes exigera un changement dans l’agencement expérimental introduisant de nouvelles possibilités d’interaction entre objets et instruments de mesure qui, en principe, ne peuvent pas être contrôlées. Par conséquent, les preuves obtenues dans des conditions expérimentales différentes ne peuvent pas être comprises dans une seule image,mais doit être considérée comme complémentaire en ce sens que seule la totalité des phénomènes épuise les informations possibles sur les objets.

Dans ces circonstances, un élément essentiel d’ambiguïté est impliqué dans l’attribution d’attributs physiques conventionnels aux objets atomiques, comme cela est à la fois évident dans le dilemme concernant les propriétés corpusculaires et ondulatoires des électrons et des photons, où nous avons à voir avec des images contrastées, chacune se référant à un aspect essentiel des preuves empiriques. Un exemple illustratif, de la façon dont les paradoxes apparents sont supprimés par un examen des conditions expérimentales dans lesquelles apparaissent les phénomènes complémentaires, est également donné par l’effet Compton, dont la description cohérente nous avait d’abord présenté des difficultés aussi aiguës. Ainsi,toute disposition adaptée pour étudier l’échange d’énergie et d’impulsion entre l’électron et le photon doit impliquer une latitude dans la description spatio-temporelle de l’interaction suffisante pour la définition du nombre d’onde et de la fréquence qui entrent dans la relation (1). A l’inverse, toute tentative de localisation plus précise de la collision entre le photon et l’électron, en raison de l’interaction inévitable avec les échelles fixes et les horloges définissant le référentiel spatio-temporel, exclurait toute prise en compte plus précise de l’équilibre entre impulsion et énergie. .exclure toute prise en compte plus approfondie en ce qui concerne l’équilibre entre la dynamique et l’énergie.exclure toute prise en compte plus approfondie en ce qui concerne l’équilibre entre la dynamique et l’énergie.

Comme souligné dans le cours, un outil adéquat pour une manière complémentaire de description est offert précisément par le formalisme quantique-mécanique qui représente un schéma purement symbolique ne permettant que des prédictions, sur les lignes du principe de correspondance, quant aux résultats pouvant être obtenus dans des conditions spécifiées par des moyens des concepts classiques. Il faut ici rappeler que même dans la relation d’indétermination (3), nous avons affaire à une implication du formalisme qui défie toute expression sans ambiguïté dans des mots propres à décrire des images physiques classiques. Ainsi, une phrase comme "nous ne pouvons pas connaître à la fois l’élan et la position d’un objet atomique" soulève à la fois des questions quant à la réalité physique de deux de ces attributs de l’objet, auxquelles on ne peut répondre qu’en se référant aux conditions du non-ambigu. utilisation de concepts spatio-temporels,d’une part, et les lois de conservation dynamiques, d’autre part. Alors que la combinaison de ces concepts en une seule image d’une chaîne causale d’événements est l’essence de la mécanique classique, la place pour des régularités au-delà de la portée d’une telle description est juste donnée par la circonstance que l’étude des phénomènes complémentaires exige des expériences expérimentales mutuellement exclusives. arrangements.

La nécessité, en physique atomique, d’un examen renouvelé des fondements de l’utilisation sans ambiguïté des idées physiques élémentaires rappelle en quelque sorte la situation qui a conduit Einstein à sa révision originale sur la base de toute application des concepts d’espace-temps qui, par sa l’accent mis sur l’importance primordiale du problème d’observation, a prêté une telle unité à notre image du monde. Nonobstant toute nouveauté d’approche, la description causale est confirmée dans la théorie de la relativité dans un cadre de référence donné, mais dans la théorie quantique l’interaction incontrôlable entre les objets et les instruments de mesure nous oblige à un renoncement, même à cet égard. Cette reconnaissance, cependant, n’indique en aucun cas une limitation de la portée de la description de la mécanique quantique,et la tendance de toute l’argumentation présentée dans la conférence de Côme était de montrer que le point de vue de la complémentarité peut être considéré comme une généralisation rationnelle de l’idéal même de causalité.

Lors de la discussion générale de Côme, nous avons tous manqué la présence d’Einstein, mais peu de temps après, en octobre 1927, j’ai eu l’occasion de le rencontrer à Bruxelles lors de la Cinquième Conférence Physique de l’Institut Solvay, consacrée au thème "Electrons et photons. " Lors des réunions de Solvay, Einstein avait depuis le début été une figure de premier plan, et plusieurs d’entre nous sont venus à la conférence avec de grandes anticipations pour connaître sa réaction à la dernière étape du développement qui, à notre avis, a largement contribué à clarifier les problèmes. qu’il avait lui-même suscité dès le départ avec tant d’ingéniosité. Au cours des discussions, où l’ensemble du sujet a été revu par des contributions de plusieurs côtés et où les arguments mentionnés dans les pages précédentes ont été à nouveau présentés, Einstein a cependant exprimé:une profonde préoccupation quant à la mesure dans laquelle le compte causal dans l’espace et le temps a été abandonné en mécanique quantique.

Pour illustrer son attitude, Einstein a évoqué lors d’une des séances le simple exemple d’une particule (électron ou photon) pénétrant à travers un trou ou une fente étroite dans un diaphragme placé à une certaine distance devant une plaque photographique.

En raison de la diffraction de l’onde liée au mouvement de la particule et indiquée sur la figure par les lignes fines, il est dans de telles conditions impossible de prédire avec certitude à quel point l’électron arrivera sur la plaque photographique, mais seulement pour calculer la probabilité que, dans une expérience, l’électron se trouve dans une région donnée de la plaque. La difficulté apparente, dans cette description, qu’Einstein ressentait si vivement, est le fait que, si dans l’expérience, l’électron est enregistré en un point A de la plaque, alors il est hors de question d’observer jamais un effet de cet électron. à un autre point (B), bien que les lois de la propagation des ondes ordinaires n’offrent aucune place pour une corrélation entre deux de ces événements.

L’attitude d’Einstein a donné lieu à d’ardentes discussions au sein d’un petit cercle, auxquelles Ehrenfest, qui au fil des ans avait été un ami proche de nous deux, a pris part de la manière la plus active et la plus utile. Certes, nous avons tous reconnu que, dans l’exemple ci-dessus, la situation ne présente aucun analogue à l’application des statistiques dans le traitement des systèmes mécaniques compliqués, mais a plutôt rappelé le contexte des premières conclusions d’Einstein sur l’unidirection des effets de rayonnement individuels qui contraste si fortement. avec une simple image de vague. Les discussions, cependant, ont porté sur la question de savoir si la description de la mécanique quantique a épuisé les possibilités de rendre compte des phénomènes observables ou, comme Einstein l’a soutenu, l’analyse pouvait être poussée plus loin et, en particulier,de savoir si une description plus complète des phénomènes pourrait être obtenue en tenant compte de l’équilibre détaillé de l’énergie et de la quantité de mouvement dans les processus individuels.

Pour expliquer la tendance des arguments d’Einstein, il peut être illustratif ici de considérer quelques caractéristiques simples de la quantité de mouvement et de l’équilibre énergétique en relation avec l’emplacement d’une particule dans l’espace et le temps. Pour cela, nous examinerons le cas simple d’une particule pénétrant par un trou dans un diaphragme sans ou avec un obturateur pour ouvrir et fermer le trou. Les lignes parallèles équidistantes à gauche sur les figures indiquent le train d’ondes planes correspondant à l’état de mouvement d’une particule qui, avant d’atteindre le diaphragme, a un moment P lié au nombre d’onde s par la seconde des équations (1 ). En fonction de la diffraction des ondes lors du passage dans le trou,l’état de mouvement de la particule à droite du diaphragme est représenté par un train d’ondes sphérique avec une ouverture angulaire convenablement définie u et également avec une extension radiale limitée. Par conséquent, la description de cet état implique une certaine latitude Dp dans la composante impulsion de la particule parallèle au diaphragme et, dans le cas d’un diaphragme à obturateur, une latitude supplémentaire DE de l’énergie cinétique.

Puisqu’une mesure de la latitude Dq à l’emplacement de la particule dans le plan du diaphragme est donnée par le rayon a du trou, et puisque u environ = (1 / sa), on obtient, en utilisant (1), juste Dp environ = uP approx = (h / Dq), conformément à la relation d’indétermination (3). Ce résultat pourrait, bien entendu, être également obtenu directement en remarquant qu’en raison de l’extension limitée du champ d’onde à l’endroit de la fente, la composante du nombre d’onde parallèle au plan du diaphragme impliquera une latitude Ds environ = (1 / a) environ = (1 / Dq). obturateur sur fente limitant le diagramme d’interférence

De même, l’étalement des fréquences des composantes harmoniques dans le train d’ondes limité est évidemment Df approx = (1 / Dt), où t est l’intervalle de temps pendant lequel l’obturateur laisse le trou ouvert et, par conséquent, représente la latitude en moment du passage de la particule à travers le diaphragme. A partir de (1), on obtient donc

DE. Dt environ = h, (4)

toujours selon la relation (3) pour les deux variables conjuguées E et t.

Du point de vue des lois de conservation, l’origine de telles latitudes entrant dans la description de l’état de la particule après avoir traversé le trou peut être attribuée aux possibilités d’échange d’impulsion et d’énergie avec le diaphragme ou l’obturateur. Dans le système de référence considéré, la vitesse du diaphragme peut être ignorée et seul un changement d’impulsion Dp entre la particule et le diaphragme doit être pris en compte. L’obturateur, qui laisse le trou ouvert pendant le temps t, se déplace avec une vitesse considérable v approx = (a / Dt), et un transfert d’impulsion Dp implique donc un échange d’énergie avec la particule, s’élevant à vDp approx = (1 / Dt). Dq. Dp environ = (h / Dt), étant juste du même ordre de grandeur que la latitude DE donnée par (4) et, par conséquent, tenant compte de la quantité de mouvement et de l’équilibre énergétique.

Le problème soulevé par Einstein était maintenant de savoir dans quelle mesure un contrôle de la quantité de mouvement et du transfert d’énergie, impliqué dans une localisation de la particule dans l’espace et le temps, peut être utilisé pour une spécification supplémentaire de l’état de la particule après avoir traversé le trou. Ici, il faut tenir compte du fait que la position et le mouvement du diaphragme et de l’obturateur ont jusqu’à présent été supposés être précisément coordonnés avec le cadre de référence spatio-temporel. Cette hypothèse implique, dans la description de l’état de ces corps, une latitude essentielle quant à leur impulsion et leur énergie qui ne doivent bien entendu pas affecter sensiblement les vitesses, si le diaphragme et l’obturateur sont suffisamment lourds. cependant,dès que nous voulons connaître la quantité de mouvement et l’énergie de ces parties du dispositif de mesure avec une précision suffisante pour contrôler la quantité de mouvement et l’échange d’énergie avec la particule à l’étude, nous perdrons, conformément aux relations générales d’indétermination, la possibilité de leur emplacement précis dans l’espace et le temps. Nous devons donc examiner dans quelle mesure cette circonstance affectera l’utilisation prévue de l’ensemble de l’arrangement et, comme nous le verrons, ce point crucial fait clairement ressortir le caractère complémentaire des phénomènes.

Revenant un instant au cas de l’agencement simple indiqué, on n’a pas encore précisé à quel usage il est destiné. En fait, ce n’est que dans l’hypothèse où le diaphragme et la plaque ont des positions bien définies dans l’espace qu’il est impossible, dans le cadre du formalisme quantique-mécanique, de faire des prédictions plus détaillées sur le point de la plaque photographique où la particule sera enregistrée. Si, cependant, nous admettons une latitude suffisamment grande dans la connaissance de la position du diaphragme, il devrait, en principe, être possible de contrôler le transfert de quantité de mouvement vers le diaphragme et, ainsi, de faire des prédictions plus détaillées quant à la direction de la chemin de l’électron du trou au point d’enregistrement. En ce qui concerne la description de la mécanique quantique, nous avons affaire ici à un système à deux corps constitué du diaphragme ainsi que de la particule, et c’est juste une application explicite des lois de conservation à un tel système que nous sommes concernés par l’effet Compton où, par exemple, l’observation du recul de l’électron au moyen d’une chambre à brouillard permet de prédire dans quelle direction le photon diffusé sera finalement observé.

L’importance des considérations de ce genre a été, au cours des discussions, éclairée de la manière la plus intéressante par l’examen d’un arrangement où entre le diaphragme avec la fente et la plaque photographique est inséré un autre diaphragme avec deux fentes parallèles. Si un faisceau parallèle d’électrons (ou de photons) tombe de la gauche sur le premier diaphragme, on observera, dans les conditions habituelles, sur la plaque un diagramme d’interférence indiqué par l’ombrage de la plaque photographique. Avec des faisceaux intenses, ce motif est construit par l’accumulation d’un grand nombre de processus individuels, chacun donnant lieu à une petite tache sur la plaque photographique, et la distribution de ces taches suit une loi simple dérivée de l’analyse des ondes.La même distribution devrait également être trouvée dans le compte rendu statistique de nombreuses expériences effectuées avec des faisceaux si faibles que lors d’une seule exposition, un seul électron (ou photon) arrivera sur la plaque photographique à un endroit indiqué sur la figure sous la forme d’une petite étoile. Puisque, maintenant, comme indiqué par les flèches brisées, la quantité de mouvement transférée au premier diaphragme devrait être différente si l’électron était supposé passer à travers la fente supérieure ou inférieure du deuxième diaphragme, Einstein a suggéré qu’un contrôle du transfert de quantité de mouvement permettrait une analyse plus approfondie du phénomène et, en particulier, de décider par laquelle des deux fentes l’électron était passé avant d’arriver à la plaque.

Un examen plus approfondi a cependant montré que la commande suggérée du transfert d’impulsion impliquerait une latitude dans la connaissance de la position du diaphragme qui exclurait l’apparition des phénomènes d’interférence en question. En fait, si w est le petit angle entre les trajectoires conjecturées d’une particule passant par la fente supérieure ou inférieure, la différence de transfert d’impulsion dans ces deux cas sera, selon (1), égale à hsw et tout contrôle de l’impulsion du diaphragme avec une précision suffisante pour mesurer cette différence impliquera, du fait de la relation d’indétermination, une latitude minimale de la position du diaphragme, comparable à 1 / sw. Si, comme sur la figure, le diaphragme avec les deux fentes est placé au milieu entre le premier diaphragme et la plaque photographique,on verra que le nombre de franges par unité de longueur sera juste égal à hsw et, comme une incertitude sur la position du premier diaphragme du montant de 1 / sw provoquera une incertitude égale dans les positions des franges, il s’ensuit qu’aucun effet d’interférence ne peut apparaître. Le même résultat est facilement montré pour tenir pour tout autre placement du deuxième diaphragme entre le premier diaphragme et la plaque, et serait également obtenu si, au lieu du premier diaphragme, un autre de ces trois corps était utilisé pour le contrôle, pour le but suggéré, du transfert d’élan.

Ce point est d’une grande conséquence logique, car ce n’est que dans la circonstance que l’on nous présente le choix soit de tracer le chemin d’une particule, soit d’observer les effets d’interférence, ce qui nous permet d’échapper à la nécessité paradoxale de conclure que le comportement d’un l’électron ou un photon doit dépendre de la présence d’une fente dans le diaphragme à travers laquelle il pourrait être prouvé qu’il ne passe pas. Nous avons ici à voir avec un exemple typique de la façon dont les phénomènes complémentaires apparaissent sous des arrangements expérimentaux mutuellement exclusifs et sont juste confrontés à l’impossibilité, dans l’analyse des effets quantiques, de tracer une séparation nette entre un comportement indépendant des objets atomiques et leur interaction avec les instruments de mesure qui servent à définir les conditions dans lesquelles les phénomènes se produisent.

Nos entretiens sur l’attitude à prendre face à une situation nouvelle en matière d’analyse et de synthèse d’expérience ont naturellement touché de nombreux aspects de la pensée philosophique, mais, malgré toutes les divergences d’approche et d’opinion, un esprit des plus humoristiques a animé les discussions. De son côté, Einstein nous a demandé avec moquerie si l’on pouvait vraiment croire que les autorités providentielles avaient recours au jeu de dés (".. Ob der liebe Gott würfelt"), auquel j’ai répondu en pointant la grande prudence, déjà appelée par d’anciens penseurs, en attribuant des attributs à la Providence dans le langage de tous les jours. Je me souviens aussi comment au sommet de la discussion Ehrenfest, dans sa manière affectueuse de taquiner ses amis, a fait allusion en plaisantant à l’apparente similitude entre l’attitude d’Einstein et celle des opposants à la théorie de la relativité ;mais aussitôt Ehrenfest a ajouté qu’il ne serait pas en mesure de trouver un soulagement dans son propre esprit avant que l’accord avec Einstein ne soit atteint.

L’inquiétude et la critique d’Einstein ont fourni une incitation très précieuse pour nous tous à réexaminer les divers aspects de la situation en ce qui concerne la description des phénomènes atomiques. C’était pour moi un stimulant bienvenu pour clarifier encore plus le rôle joué par les instruments de mesure et, afin de mettre en évidence le caractère mutuellement exclusif des conditions expérimentales dans lesquelles apparaissent les phénomènes complémentaires, j’ai essayé à l’époque d’esquisser diverses appareil dans un style pseudo-réaliste dont les figures suivantes sont des exemples. Ainsi, pour l’étude d’un phénomène d’interférence du type indiqué, il se propose d’utiliser un agencement expérimental, où les parties pleines de l’appareil, servant de diaphragmes et de porte-plaque, sont solidement boulonnées sur un support commun.

Dans une telle disposition, où la connaissance des positions relatives des diaphragmes et de la plaque photographique est assurée par une liaison rigide, il est évidemment impossible de contrôler la quantité de mouvement échangée entre la particule et les parties distinctes de l’appareil. La seule manière dont, dans un tel agencement, nous pourrions nous assurer que la particule a traversé l’une des fentes du deuxième diaphragme est de recouvrir l’autre fente par un couvercle ; mais si la fente est couverte, il n’est bien entendu question d’aucun phénomène d’interférence, et sur la plaque on observera simplement une distribution continue comme dans le cas du diaphragme fixe unique.

Dans l’étude des phénomènes dont nous traitons le bilan détaillé des impulsions, il faut naturellement donner à certaines parties de l’ensemble du dispositif la liberté de se déplacer indépendamment des autres. Un tel appareil dans lequel un diaphragme avec une fente est suspendu par des ressorts faibles à une culasse solide boulonnée au support sur lequel également d’autres parties immobiles de l’agencement doivent être fixées. L’échelle sur le diaphragme avec le pointeur sur les roulements de la culasse se réfèrent à une telle étude du mouvement du diaphragme, comme cela peut être nécessaire pour une estimation de la quantité de mouvement qui lui est transférée, permettant de tirer des conclusions quant à la déflexion subie par la particule en passant à travers la fente. Puisque, cependant, toute lecture de l’échelle, de quelque manière qu’elle soit effectuée, impliquera un changement incontrôlable de l’élan du diaphragme,il y aura toujours, conformément au principe d’indétermination, une relation réciproque entre notre connaissance de la position de la fente et la précision de la commande d’impulsion.

Dans le même style semi-sérieux, il représente une partie d’un agencement adapté à l’étude de phénomènes qui, contrairement à ceux qui viennent d’être évoqués, impliquent explicitement une coordination temporelle. Il consiste en un obturateur solidaire d’une horloge robuste reposant sur le support qui porte un diaphragme et sur lequel doivent également être fixées d’autres pièces de caractère similaire, réglées par la même horloge ou par d’autres horloges normalisées par rapport à elle. Le but particulier de la figure est de souligner qu’une horloge est une machine dont le fonctionnement peut être entièrement expliqué par la mécanique ordinaire et ne sera affecté ni par la lecture de la position de ses aiguilles ni par l’interaction entre ses accessoires. et une particule atomique. En assurant l’ouverture du trou à un moment précis, un appareil de ce type pourrait, par exemple,être utilisé pour une mesure précise du temps qu’un électron ou un photon prend pour venir du diaphragme à un autre endroit, mais évidemment, cela ne laisserait aucune possibilité de contrôler le transfert d’énergie vers l’obturateur dans le but de tirer des conclusions quant au l’énergie de la particule qui a traversé le diaphragme.

Si nous sommes intéressés par de telles conclusions, nous devons, bien sûr, utiliser un agencement où les dispositifs d’obturation ne peuvent plus servir d’horloges précises, mais où la connaissance du moment où le trou dans le diaphragme est ouvert implique une latitude liée à la précision. de la mesure d’énergie par la relation générale (4).

La contemplation de telles dispositions plus ou moins pratiques et leur utilisation plus ou moins fictive se sont révélées les plus instructives pour attirer l’attention sur les caractéristiques essentielles des problèmes. Le point principal ici est la distinction entre les objets étudiés et les instruments de mesure qui servent à définir, en termes classiques, les conditions d’apparition des phénomènes. Incidemment, nous pouvons remarquer que, pour illustrer les considérations précédentes, il n’est pas pertinent que des expériences impliquant un contrôle précis de la quantité de mouvement ou du transfert d’énergie des particules atomiques vers des corps lourds comme les diaphragmes et les obturateurs seraient très difficiles à réaliser, si possible. du tout. Il est seulement décisif que, contrairement aux instruments de mesure appropriés,ces corps ainsi que les particules constitueraient dans un tel cas le système auquel le formalisme quantique-mécanique doit être appliqué. En ce qui concerne la spécification des conditions de toute application bien définie du formalisme, il est par ailleurs essentiel que l’ensemble du dispositif expérimental soit pris en compte. En fait, l’introduction de tout appareil supplémentaire, comme un miroir, à la manière d’une particule pourrait impliquer de nouveaux effets d’interférence influençant essentiellement les prédictions quant aux résultats à enregistrer éventuellement.

La mesure dans laquelle le renoncement à la visualisation des phénomènes atomiques nous est imposé par l’impossibilité de leur subdivision est illustrée de façon frappante par l’exemple suivant sur lequel Einstein a très tôt attiré l’attention et est souvent revenu. Si un miroir semi-réfléchissant est placé sur le chemin d’un photon, laissant deux possibilités pour sa direction de propagation, le photon peut être enregistré sur une et une seule des deux plaques photographiques situées à de grandes distances dans les deux directions en question, ou bien on peut, en remplaçant les plaques par des miroirs, observer des effets présentant une interférence entre les deux trains d’ondes réfléchis. Dans toute tentative de représentation picturale du comportement du photon, on se heurterait donc à la difficulté : être obligé de dire, d’une part,que le photon choisit toujours l’une des deux voies et, d’autre part, qu’il se comporte comme s’il était passé dans les deux sens.

Ce ne sont que des arguments de ce genre qui rappellent l’impossibilité de subdiviser les phénomènes quantiques et révèlent l’ambiguïté dans l’attribution d’attributs physiques habituels aux objets atomiques. En particulier, il faut se rendre compte qu’outre dans le récit de la mise en place et de la synchronisation des instruments formant l’arrangement expérimental, toute utilisation sans ambiguïté des concepts d’espace-temps dans la description des phénomènes atomiques se limite à l’enregistrement d’observations qui renvoient à des marques sur une plaque photographique ou à des effets d’amplification pratiquement irréversibles similaires comme la construction d’une goutte d’eau autour d’un ion dans une chambre à brouillard. Bien que, bien entendu, l’existence du quantum d’action soit responsable en dernier ressort des propriétés des matériaux dont sont construits les instruments de mesure et dont dépend le fonctionnement des appareils d’enregistrement,cette circonstance n’est pas pertinente pour les problèmes d’adéquation et d’exhaustivité de la description de la mécanique quantique dans ses aspects discutés ici.

Ces problèmes ont été commentés de manière instructive de différents côtés lors de la réunion de Solvay, au cours de la même session où Einstein a soulevé ses objections générales. A cette occasion, une discussion intéressante a également surgi sur la manière de parler de l’apparition de phénomènes pour lesquels seules des prédictions de caractère statistique peuvent être faites. La question était de savoir si, quant à l’occurrence des effets individuels, nous devrions adopter une terminologie proposée par Dirac, que nous nous intéressions à un choix de la « nature » ou, comme le suggère Heisenberg, nous devrions dire que nous devons faire avec un choix de la part de « l’observateur » qui construit les instruments de mesure et lit leur enregistrement. Une telle terminologie paraîtrait cependant douteuse car, d’une part, il n’est guère raisonnable de doter la nature d’une volonté au sens ordinaire du terme,tandis que, d’autre part, il n’est certainement pas possible pour l’observateur d’influencer les événements qui peuvent apparaître dans les conditions qu’il a arrangées. Pour moi, il n’y a pas d’autre alternative que d’admettre que, dans ce champ d’expérience, nous avons affaire à des phénomènes individuels et que nos possibilités de maniement des instruments de mesure nous permettent uniquement de faire un choix entre les différents types de phénomènes complémentaires que nous veux étudier.

Les problèmes épistémologiques évoqués ici ont été traités plus explicitement dans ma contribution au numéro de Naturunssenschaften à l’occasion du 70e anniversaire de Planck en 1929. Dans cet article, une comparaison a également été faite entre la leçon tirée de la découverte du quantum d’action universel et le développement qui a suivi la découverte de la vitesse finie de la lumière et qui, par le travail de pionnier d’Einstein, a tellement clarifié les principes de base de la philosophie naturelle. Dans la théorie de la relativité, l’accent mis sur la dépendance de tous les phénomènes vis-à-vis du cadre de référence a ouvert des voies tout à fait nouvelles pour tracer des lois physiques générales d’une portée inégalée. Dans la théorie quantique, il a été soutenu,la compréhension logique de régularités fondamentales jusqu’ici insoupçonnées régissant les phénomènes atomiques a exigé la reconnaissance qu’aucune séparation nette ne peut être faite entre un comportement indépendant des objets et leur interaction avec les instruments de mesure qui définissent le référentiel.

À cet égard, la théorie quantique nous présente une situation nouvelle en science physique, mais l’attention a été appelée sur l’analogie très étroite avec la situation en matière d’analyse et de synthèse de l’expérience, que nous rencontrons dans de nombreux autres domaines de la connaissance et de l’intérêt humains. Comme on le sait, bon nombre des difficultés de la psychologie trouvent leur origine dans le placement différent des lignes de séparation entre l’objet et le sujet dans l’analyse de divers aspects de l’expérience psychique. En fait, des mots comme « pensées » et « sentiments », également indispensables pour illustrer la variété et la portée de la vie consciente, sont utilisés d’une manière complémentaire similaire à celle de la coordination espace-temps et des lois de conservation dynamique en physique atomique. Une formulation précise de telles analogies implique, bien sûr, des subtilités de terminologie,et la position de l’écrivain est peut-être mieux indiquée dans un passage de l’article, faisant allusion à la relation mutuellement exclusive qui existera toujours entre l’utilisation pratique d’un mot et les tentatives de sa définition stricte. Le but principal, cependant, de ces considérations, qui n’étaient pas des moindres inspirées par l’espoir d’influencer l’attitude d’Einstein, était d’indiquer les perspectives de mettre en lumière les problèmes épistémologiques généraux au moyen d’une leçon tirée de l’étude de nouvelles, mais fondamentalement simples. expérience physique qui ne sont pas des moindres inspirés par l’espoir d’influencer l’attitude d’Einstein, était d’indiquer les perspectives de mettre en lumière les problèmes épistémologiques généraux au moyen d’une leçon tirée de l’étude d’une expérience physique nouvelle, mais fondamentalement simple.

Lors de la réunion suivante avec Einstein à la conférence Solvay en 1930, nos discussions ont pris une tournure assez dramatique. En guise d’objection à l’idée qu’un contrôle de l’échange de quantité de mouvement et d’énergie entre les objets et les instruments de mesure était exclu si ces instruments devaient servir leur objectif de définir le cadre spatio-temporel des phénomènes, Einstein a avancé l’argument selon lequel un tel contrôle devrait être possible lorsque les exigences de la théorie de la relativité ont été prises en considération. En particulier, la relation générale entre l’énergie et la masse, exprimée dans la célèbre formule d’Einstein

E = mc2, (5)

devrait permettre, au moyen d’une simple pesée, de mesurer l’énergie totale de tout système et, ainsi, en principe de contrôler l’énergie qui lui est transférée lorsqu’il interagit avec un objet atomique.

En tant qu’agencement adapté à cet effet, Einstein a proposé un dispositif consistant en une boîte avec un trou sur le côté, qui pourrait être ouverte ou fermée par un volet déplacé au moyen d’une horloge à l’intérieur de la boîte.

Si, au début, la boîte contenait une certaine quantité de rayonnement et que l’horloge était réglée pour ouvrir l’obturateur pendant un intervalle très court à un moment choisi, il pourrait être réalisé qu’un seul photon a été libéré à travers le trou à un moment connu. avec une précision aussi grande que vous le souhaitez. De plus, il serait apparemment aussi possible, en pesant l’ensemble de la boîte avant et après cet événement, de mesurer l’énergie du photon avec la précision voulue, en contradiction définitive avec l’indétermination réciproque des grandeurs de temps et d’énergie en mécanique quantique.

Cet argument a constitué un défi sérieux et a donné lieu à un examen approfondi de l’ensemble du problème. À l’issue de la discussion, à laquelle Einstein lui-même a contribué efficacement, il est devenu clair, cependant, que cet argument ne pouvait pas être retenu. En fait, dans l’examen du problème, il a été jugé nécessaire de se pencher de plus près sur les conséquences de l’identification de la masse inertielle et gravitationnelle impliquée dans l’application de la relation (5). Surtout, il était essentiel de prendre en compte la relation entre la cadence d’une horloge et sa position dans un champ gravitationnel bien connu du décalage vers le rouge des raies dans le spectre du soleil suivant le principe d’Einstein d’équivalence entre les effets de gravité et les phénomènes. observées dans des référentiels accélérés.

Notre discussion s’est concentrée sur l’application possible d’un appareil incorporant le dispositif d’Einstein dans le même style pseudo-réaliste que certaines des figures précédentes. La boîte, dont une section est représentée pour montrer son intérieur, est suspendue dans un balancier-spiral et est munie d’un pointeur pour lire sa position sur une échelle fixée au support de balancier. La pesée de la caisse peut ainsi être effectuée avec une précision Dm donnée en réglant la balance à sa position zéro au moyen de charges appropriées. Le point essentiel est maintenant que toute détermination de cette position avec une précision Dq donnée impliquera une latitude minimale Dp dans le contrôle de la quantité de mouvement de la boîte reliée à Dq par la relation (3). Cette latitude doit évidemment être à nouveau inférieure à l’impulsion totale qui, pendant tout l’intervalle T de la procédure d’équilibrage,peut être donné par le champ gravitationnel à un corps de masse Dm, ou

Dp environ = h / Dq T. g . Dm, (6)

où g est la constante de gravité. Plus la précision de la lecture q de l’aiguille est grande, plus l’intervalle d’équilibrage T doit être long, si une précision Dm donnée de la pesée de la boîte avec son contenu doit être obtenue.

boîte avec source et fente obturée accrochée à ressort sous gracvity

Maintenant, selon la théorie de la relativité générale, une horloge, lorsqu’elle est déplacée dans la direction de la force gravitationnelle d’une quantité de Dq, changera sa vitesse de telle manière que sa lecture

au cours d’un intervalle de temps T différera d’un montant DT donné par la relation

DT / T = (1 / c2) gDq, (7)

En comparant (6) et (7) nous voyons donc qu’après la procédure de pesée il y aura dans notre connaissance du réglage de l’horloge une latitude

DT> h / (c2 Dm),

Avec la formule (5), cette relation conduit à nouveau à

DT. DE> h,

conformément au principe d’indétermination. Par conséquent, une utilisation de l’appareil comme moyen de mesurer avec précision l’énergie du photon nous empêchera de contrôler le moment de sa fuite.

La discussion, si illustrative de la puissance et de la cohérence des arguments relativistes, a ainsi souligné une fois de plus la nécessité de distinguer, dans l’étude des phénomènes atomiques, entre les instruments de mesure appropriés qui servent à définir le référentiel et les parties à considérer. en tant qu’objets à l’étude et dont les effets quantiques ne peuvent être ignorés. En dépit de la confirmation la plus suggestive de la justesse et de la large portée de la manière de description de la mécanique quantique, Einstein a néanmoins, dans une conversation suivante avec moi, exprimé un sentiment d’inquiétude quant à l’absence apparente de principes fermement établis pour l’explication de la nature. , dans lequel tous pourraient être d’accord. De mon point de vue, cependant, je ne pouvais que répondre à cela,en traitant la tâche de mettre de l’ordre dans un champ d’expérience entièrement nouveau, nous ne pourrions guère nous fier à des principes habituels, aussi larges soient-ils, mis à part l’exigence d’éviter les incohérences logiques et, à cet égard, le formalisme mathématique de la mécanique quantique devrait sûrement répondre à toutes les exigences.

La réunion de Solvay en 1930 a été la dernière occasion où, dans des discussions communes avec Einstein, nous pouvions bénéficier de l’influence stimulante et médiatrice d’Ehrenfest, mais peu de temps avant sa mort profondément déplorée en 1933, il m’a dit qu’Einstein était loin d’être satisfait et de son l’acuité habituelle avait discerné de nouveaux aspects de la situation qui renforçaient son attitude critique. En effet, en examinant plus avant les possibilités d’application d’un arrangement d’équilibre, Einstein avait perçu des procédures alternatives qui, même si elles ne permettaient pas l’usage qu’il avait initialement prévu, pourraient sembler accroître les paradoxes au-delà des possibilités de solution logique. Ainsi, Einstein avait fait remarquer qu’après une pesée préliminaire de la boîte avec l’horloge et la fuite ultérieure du photon,il restait encore le choix de répéter la pesée ou d’ouvrir la boîte et de comparer la lecture de l’horloge avec l’échelle de temps standard. Par conséquent, nous sommes à ce stade encore libres de choisir si nous voulons tirer des conclusions soit sur l’énergie du photon, soit sur le moment où il a quitté la boîte. Sans interférer en aucune façon avec le photon entre son échappement et son interaction ultérieure avec d’autres instruments de mesure appropriés, nous sommes ainsi en mesure de faire des prédictions précises concernant soit le moment de son arrivée, soit la quantité d’énergie libérée par son absorption. Puisque, cependant, selon le formalisme de la mécanique quantique, la spécification de l’état d’une particule isolée ne peut impliquer à la fois une connexion bien définie avec l’échelle de temps et une fixation précise de l’énergie,il peut donc apparaître comme si ce formalisme n’offrait pas les moyens d’une description adéquate.

Une fois de plus, l’esprit de recherche d’Einstein avait suscité un aspect particulier de la situation de la théorie quantique, qui illustrait d’une manière très frappante à quel point nous avons transcendé ici l’explication coutumière des phénomènes naturels. Pourtant, je ne pouvais pas être d’accord avec la tendance de ses remarques telle que rapportée par Ehrenfest. À mon avis, il ne pouvait y avoir d’autre moyen de juger un formalisme mathématique logiquement cohérent comme inadéquat qu’en démontrant le départ de ses conséquences de l’expérience ou en prouvant que ses prédictions n’épuisaient pas les possibilités d’observation, et l’argumentation d’Einstein pourrait être orientée vers aucune de ces fins. En fait, nous devons nous rendre compte que dans le problème en question, nous n’avons pas affaire à un seul arrangement expérimental spécifié, mais nous nous référons à deux arrangements différents, mutuellement exclusifs. Dans l’un,la balance avec un autre appareil comme un spectromètre est utilisée pour l’étude du transfert d’énergie par un photon ; dans l’autre, un obturateur régulé par une horloge normalisée avec un autre appareil du même genre, précisément chronométré par rapport à l’horloge, est utilisé pour l’étude du temps de propagation d’un photon sur une distance donnée. Dans ces deux cas, comme l’a également supposé Einstein, les effets observables devraient être en totale conformité avec les prédictions de la théorie.

Le problème souligne à nouveau la nécessité de considérer l’ensemble du dispositif expérimental, dont la spécification est impérative pour toute application bien définie du formalisme quantique-mécanique. Incidemment, on peut ajouter que des paradoxes du type envisagé par Einstein se rencontrent également dans des arrangements aussi simples. En effet, après une mesure préalable de l’impulsion du diaphragme, on nous propose en principe le choix, lorsqu’un électron ou un photon est passé à travers la fente, soit de répéter la mesure d’impulsion, soit de contrôler la position du diaphragme et, ainsi , pour faire des prédictions concernant d’autres observations ultérieures. On peut également ajouter qu’elle ne peut évidemment faire aucune différence en ce qui concerne les effets observables pouvant être obtenus par un dispositif expérimental défini,si nos plans de construction ou de manipulation des instruments sont fixés à l’avance ou si nous préférons reporter l’achèvement de notre planification à un moment ultérieur lorsque la particule est déjà en route d’un instrument à un autre.

Dans la description de la mécanique quantique, notre liberté de construire et de manipuler l’arrangement expérimental trouve sa propre expression dans la possibilité de choisir les paramètres définis classiquement entrant dans toute application appropriée du formalisme. En effet, à tous égards, la mécanique quantique présente une correspondance avec l’état des choses familier de la physique classique, qui est aussi proche que possible lorsque l’on considère l’individualité inhérente aux phénomènes quantiques. Juste en aidant à faire ressortir ce point si clairement, l’inquiétude d’Einstein avait donc de nouveau été une incitation très bienvenue à explorer les aspects essentiels de la situation.

La prochaine réunion de Solvay en 1933 était consacrée aux problèmes de la structure et des propriétés des noyaux atomiques, domaine dans lequel de si grands progrès ont été réalisés juste à cette période en raison des découvertes expérimentales ainsi que de nouvelles applications fructueuses de la mécanique quantique. Il n’est guère besoin à cet égard de rappeler que seules les preuves obtenues par l’étude des transformations nucléaires artificielles ont donné un test le plus direct de la loi fondamentale d’Einstein concernant l’équivalence de la masse et de l’énergie, qui devait s’avérer un guide de plus en plus important pour les recherches en physique nucléaire. .On peut également mentionner comment la reconnaissance intuitive par Einstein de la relation intime entre la loi des transformations radioactives et les règles de probabilité régissant les effets individuels des rayonnements a été confirmée par l’explication quantique-mécanique des désintégrations nucléaires spontanées. En fait, nous avons affaire ici à un exemple typique du mode statistique de description, et la relation complémentaire entre la conservation de l’énergie-impulsion et la coordination espace-temps est la plus frappante mise en évidence dans le paradoxe bien connu de la pénétration des particules à travers les barrières potentielles.

Einstein lui-même n’a pas assisté à cette réunion, qui a eu lieu à un moment obscurci par les développements tragiques du monde politique qui allaient influencer si profondément son destin et alourdir si fortement ses fardeaux au service de l’humanité. Quelques mois plus tôt, lors d’une visite à Princeton où Einstein était alors l’invité du tout nouveau Institute for Advanced Study auquel il s’est rapidement attaché de façon permanente, j’ai cependant eu l’occasion de parler à nouveau avec lui des aspects épistémologiques de la physique atomique. , mais la différence entre nos modes d’approche et d’expression présentait encore des obstacles à la compréhension mutuelle. Si, jusqu’à présent, relativement peu de personnes ont pris part aux discussions mentionnées dans cet article,L’attitude critique d’Einstein à l’égard des points de vue sur la théorie quantique auxquels adhèrent de nombreux physiciens a été peu après portée à l’attention du public par le biais d’un article intitulé La description mécanique quantique de la réalité physique peut-elle être considérée comme complète ?, Publié en 1935 par Einstein, Podolsky et Rosen.

L’argumentation de cet article est basée sur un critère que les auteurs expriment dans la phrase suivante : « Si, sans perturber en aucune façon un système, on peut prédire avec certitude (c’est-à-dire avec une probabilité égale à l’unité) la valeur d’une grandeur physique , alors il existe un élément de réalité physique correspondant à cette quantité physique. " Par un élégant exposé des conséquences du formalisme quantique-mécanique en ce qui concerne la représentation d’un état d’un système, constitué de deux parties qui ont été en interaction pendant un intervalle de temps limité, on montre ensuite que des quantités différentes, la fixation de qui ne peuvent être combinés dans la représentation de l’un des systèmes partiels, peuvent néanmoins être prédits par des mesures portant sur l’autre système partiel. Selon leur critère,les auteurs concluent donc que la mécanique quantique ne « fournit pas une description complète de la réalité physique », et ils expriment leur conviction qu’il devrait être possible de développer un compte rendu plus adéquat des phénomènes.

En raison de la lucidité et du caractère apparemment incontestable de l’argumentation, l’article d’Einstein, Podolsky et Rosen a fait sensation parmi les physiciens et a joué un rôle important dans la discussion philosophique générale. Certes, le problème est d’un caractère très subtil et adapté pour souligner à quel point, en théorie quantique, nous sommes au-delà de la portée de la visualisation picturale. On verra cependant que nous sommes ici confrontés à des problèmes du même ordre que ceux soulevés par Einstein dans les discussions précédentes, et, dans un article paru quelques mois plus tard, j’ai essayé de montrer que du point de vue de complémentarité, les incohérences apparentes ont été complètement supprimées. La tendance de l’argumentation était en substance la même que celle exposée dans les pages précédentes,mais le but de rappeler la manière dont la situation a été discutée à ce moment-là peut être une excuse pour avoir cité certains passages de mon article.

Ainsi, après avoir évoqué les conclusions tirées par Einstein, Podolsky et Rosen sur la base de leur critère, j’ai écrit :

Une telle argumentation, cependant, ne paraîtrait guère apte à affecter la justesse de la description de la mécanique quantique, qui repose sur un formalisme mathématique cohérent couvrant automatiquement toute procédure de mesure comme celle indiquée. L’apparente contradiction ne révèle en fait qu’une insuffisance essentielle du point de vue coutumier de la philosophie naturelle pour un compte rendu rationnel des phénomènes physiques du type qui nous intéresse en mécanique quantique. En effet l’interaction finie entre l’objet et les organes de mesure conditionnée par l’existence même du quantum d’action entraîne - en raison de l’impossibilité de contrôler la réaction de l’objet sur les instruments de mesure,si ceux-ci doivent servir leur but - la nécessité d’un renoncement définitif à l’idéal classique de causalité et d’une révision radicale de notre attitude face au problème de la réalité physique. En effet, comme nous le verrons, un critère de réalité comme celui proposé par les auteurs cités contient - aussi prudente que puisse paraître sa formulation - une ambiguïté essentielle lorsqu’il est appliqué aux problèmes réels dont il s’agit ici.

En ce qui concerne le problème particulier traité par Einstein, Podolsky et Rosen, il a ensuite été montré que les conséquences du formalisme en ce qui concerne la représentation de l’état d’un système constitué de deux objets atomiques en interaction correspondent aux simples arguments évoqués dans ce qui précède à propos avec la discussion des dispositifs expérimentaux adaptés à l’étude de phénomènes complémentaires. En fait, bien que toute paire q et p, de variables d’espace conjugué et de quantité de mouvement obéisse à la règle de multiplication non commutative exprimée par (2), et ne puisse donc être fixée qu’aux latitudes réciproques données par (3), la différence q1 - q2 entre deux coordonnées spatiales se référant aux constituants du système commute avec la somme p1 + p2 des composantes d’impulsion correspondantes,comme suit directement de la commutabilité de q1 avec p2 et q2 avec p1. Les deux q1 - q2 et p1 + p2 peuvent, par conséquent, être fixés avec précision dans un état du système complexe et, par conséquent, nous pouvons prédire les valeurs de q1 ou p1 si q2 ou p2 respectivement, sont déterminées par des mesures directes. Si, pour les deux parties du système, on prend une particule et un diaphragme, on voit que les possibilités de spécifier l’état de la particule par des mesures sur le diaphragme correspondent juste à la situation décrite ci-dessus, où il a été mentionné qu’après la particule a traversé le diaphragme, nous avons en principe le choix de mesurer soit la position du diaphragme, soit son élan et, dans chaque cas, de faire des prédictions quant aux observations ultérieures relatives à la particule. Comme souligné à plusieurs reprises,le point principal est ici que de telles mesures exigent des arrangements expérimentaux mutuellement exclusifs.

L’argumentation de l’article a été résumée. dans le passage suivant :

De notre point de vue nouveau, nous voyons maintenant que la formulation du critère de réalité physique susmentionné proposé par Einstein, Podolsky et Rosen contient une ambiguïté quant au sens de l’expression « sans en aucune manière perturber un système ». Bien entendu, il n’y a dans un cas comme celui que nous venons de considérer qu’il n’est pas question d’une perturbation mécanique du système étudié au cours de la dernière étape critique de la procédure de mesure. Mais même à ce stade, se pose essentiellement la question d’une influence sur les conditions mêmes qui définissent les types de prédictions possibles concernant le comportement futur du système. Étant donné que ces conditions constituent un élément inhérent à la description de tout phénomène auquel le terme « réalité physique » peut être correctement attaché,nous voyons que l’argumentation des auteurs mentionnés ne justifie pas leur conclusion selon laquelle la description de la mécanique quantique est essentiellement incomplète. Au contraire, cette description, comme il ressort de la discussion précédente, peut être caractérisée comme une utilisation rationnelle de toutes les possibilités d’interprétation non ambiguë des mesures, compatible avec l’interaction finie et incontrôlable entre les objets et les instruments de mesure dans le domaine de la théorie quantique . En fait, ce n’est que l’exclusion mutuelle de deux procédures expérimentales quelconques, permettant la définition sans ambiguïté de quantités physiques complémentaires, qui laisse place à de nouvelles lois physiques, dont la coexistence pourrait à première vue sembler inconciliable avec les principes de base de la science.C’est justement cette situation entièrement nouvelle en ce qui concerne la description des phénomènes physiques que la notion de complémentarité vise à caractériser.

En relisant ces passages, je suis profondément conscient de l’inefficacité de l’expression qui a dû rendre très difficile l’appréciation de la tendance de l’argumentation visant à faire ressortir l’ambiguïté essentielle qu’implique une référence aux attributs physiques des objets lorsqu’il s’agit de phénomènes où une distinction peut être faite entre le comportement des objets eux-mêmes et leur interaction avec les instruments de mesure. J’espère cependant que le compte rendu actuel des discussions avec Einstein au cours des années précédentes, qui a tant contribué à nous familiariser avec la situation de la physique quantique, pourra donner une impression plus claire de la nécessité d’une révision radicale des principes de base pour explication physique afin de restaurer l’ordre logique dans ce champ d’expérience.

Les opinions d’Einstein à l’époque sont présentées dans un article Physics and Reality, publié en 1936 dans le Journal of the Franklin Institute. Partant d’un exposé des plus éclairants du développement progressif des principes fondamentaux dans les théories de la physique classique et de leur relation avec le problème de la réalité physique, Einstein soutient ici que la description de la mécanique quantique doit être considérée simplement comme un moyen de rendre compte de le comportement moyen d’un grand nombre de systèmes atomiques et son attitude face à la croyance qu’il devrait offrir une description exhaustive des phénomènes individuels s’exprime dans les mots suivants : « Croire que c’est logiquement possible sans contradiction ; mais c’est tellement contraire à mon instinct scientifique que je ne peux pas renoncer à la recherche d’une conception plus complète. "

Même si une telle attitude peut paraître équilibrée en elle-même, elle implique néanmoins un rejet de toute l’argumentation exposée dans ce qui précède, visant à montrer que, en mécanique quantique, il ne s’agit pas d’un renoncement arbitraire à une analyse plus détaillée du phénomènes atomiques, mais en reconnaissant qu’une telle analyse est en principe exclue. L’individualité particulière des effets quantiques nous présente, en ce qui concerne la compréhension de preuves bien définies, une situation nouvelle imprévue en physique classique et inconciliable avec des idées conventionnelles adaptées à notre orientation et à notre adaptation à l’expérience ordinaire. C’est à cet égard que la théorie quantique a appelé à une révision renouvelée des fondements pour l’utilisation sans ambiguïté des concepts élémentaires, comme une étape supplémentaire dans le développement qui,depuis l’avènement de la théorie de la relativité, a été si caractéristique de la science moderne.

Dans les années suivantes, les aspects plus philosophiques de la situation en physique atomique ont suscité l’intérêt de cercles encore plus larges et ont été, en particulier, discutés au deuxième Congrès international pour l’unité des sciences à Copenhague en juillet 1936. Dans une conférence sur ce sujet occasion, j’ai surtout essayé de souligner l’analogie épistémologique entre la limitation imposée à la description causale en physique atomique et les situations rencontrées dans d’autres domaines de la connaissance. L’un des principaux objectifs de ces parallèles était d’attirer l’attention sur la nécessité dans de nombreux domaines d’intérêt général de l’homme de faire face à des problèmes du même genre que ceux qui avaient surgi dans la théorie quantique et de donner ainsi un contexte plus familier à la manière apparemment extravagante d’expression. que les physiciens ont mis au point pour faire face à leurs difficultés aiguës.

Outre les caractéristiques complémentaires visibles en psychologie et déjà évoquées, des exemples de telles relations peuvent également être tracés en biologie, notamment en ce qui concerne la comparaison entre les points de vue mécaniste et vitaliste. Juste en ce qui concerne le problème d’observation, cette dernière question avait déjà fait l’objet d’une allocution au Congrès international de luminothérapie tenu à Copenhague en 1932, où il était d’ailleurs signalé que même le parallélisme psychophysique envisagé par Leibniz et Spinoza a obtenu une portée plus large grâce au développement de la physique atomique, ce qui nous oblige à une attitude envers le problème de l’explication rappelant la sagesse ancienne, que lors de la recherche de l’harmonie dans la vie, il ne faut jamais oublier que dans le drame de l’existence, nous sommes nous-mêmes les deux acteurs. et les spectateurs.

Des propos de ce genre évoqueraient naturellement dans de nombreux esprits l’impression d’un mysticisme sous-jacent étranger à l’esprit de la science au Congrès susmentionné de 1936.J’ai donc essayé de dissiper ces malentendus et d’expliquer que la seule question était un effort pour clarifier le conditions, dans chaque domaine de connaissance, pour l’analyse et la synthèse de l’expérience. Pourtant, je crains de n’avoir eu à cet égard que peu de succès à convaincre mes auditeurs, pour qui la dissidence des physiciens eux-mêmes était naturellement une cause de scepticisme quant à la nécessité d’aller aussi loin en renonçant aux exigences coutumières quant à l’explication de phénomène naturel. Notamment à travers une nouvelle discussion avec Einstein à Princeton en 1937,là où nous ne sommes pas allés au-delà d’une compétition humoristique sur le côté qu’aurait pris Spinoza s’il avait vécu pour voir le développement de nos jours, on m’a fortement rappelé l’importance de la plus grande prudence dans toutes les questions de terminologie et de dialectique.

Ces aspects de la situation ont été particulièrement discutés lors d’une réunion à Varsovie en 1938, organisée par l’Institut international de coopération intellectuelle de la Société des Nations. Les années précédentes avaient vu de grands progrès en physique quantique en raison d’un certain nombre de découvertes fondamentales concernant la constitution et les propriétés des noyaux atomiques ainsi que des développements importants du formalisme mathématique prenant en compte les exigences de la théorie de la relativité. En dernier lieu, l’ingénieuse théorie quantique de l’électron de Dirac offrait une illustration très frappante de la puissance et de la fertilité de la manière générale de description de la mécanique quantique. Dans les phénomènes de création et d’annihilation des paires d’électrons, nous avons en fait à voir avec de nouvelles caractéristiques fondamentales de l’atomicité,qui sont intimement liés aux aspects non classiques de la statistique quantique exprimés dans le principe d’exclusion, et qui ont exigé un renoncement encore plus profond à l’explication en termes de représentation picturale.

Pendant ce temps, la discussion des problèmes épistémologiques en physique atomique a attiré autant d’attention que jamais et, en commentant les vues d’Einstein quant à l’incomplétude du mode de description de la mécanique quantique, j’ai abordé plus directement les questions de terminologie. A cet égard, j’ai mis en garde en particulier contre des expressions, souvent trouvées dans la littérature physique, telles que « perturber des phénomènes par l’observation » ou « créer des attributs physiques à des objets atomiques par des mesures ». De telles phrases, qui peuvent servir à rappeler les paradoxes apparents de la théorie quantique, sont en même temps susceptibles de prêter à confusion, car des mots comme « phénomènes » et « observations », tout comme « attributs » et « mesures », sont utilisés dans une manière difficilement compatible avec le langage courant et la définition pratique.

Comme moyen d’expression plus approprié, j’ai préconisé l’application du mot phénomène exclusivement pour désigner les observations obtenues dans des circonstances déterminées, y compris un compte rendu de l’ensemble du dispositif expérimental. Dans une telle terminologie, le problème d’observation est exempt de toute complexité particulière puisque, dans les expériences réelles, toutes les observations sont exprimées par des déclarations sans ambiguïté se référant, par exemple, à l’enregistrement du point auquel un électron arrive sur une plaque photographique. De plus, parler de cette manière convient juste pour souligner que l’interprétation physique appropriée du formalisme symbolique quantique-mécanique ne se résume qu’à des prédictions, de caractère déterminé ou statistique, relatives à des phénomènes individuels apparaissant dans des conditions définies par des concepts physiques classiques.

Nonobstant toutes les différences entre les problèmes physiques qui ont donné lieu au développement de la théorie de la relativité et de la théorie quantique, respectivement, une comparaison des aspects purement logiques de l’argumentation relativiste et complémentaire révèle des similitudes frappantes en ce qui concerne le renoncement à la signification absolue des attributs physiques conventionnels de objets. Aussi, la négligence de la constitution atomique des instruments de mesure eux-mêmes, dans le compte de l’expérience réelle, est également caractéristique des applications de la relativité et de la théorie quantique. Ainsi, la petitesse du quantum d’action par rapport aux actions impliquées dans l’expérience habituelle, y compris l’agencement et la manipulation d’appareils physiques,est aussi essentiel en physique atomique que le nombre énorme d’atomes composant le monde dans la théorie générale de la relativité qui, comme souvent souligné, exige que les dimensions de l’appareil de mesure des angles puissent être réduites par rapport au rayon de courbure de l’espace.

Dans la conférence de Varsovie, j’ai commenté l’utilisation du symbolisme non directement visualisable dans la relativité et la théorie quantique de la manière suivante :

Même les formalismes, qui dans les deux théories dans leur champ d’application offrent des moyens adéquats de comprendre toute expérience concevable, présentent des analogies profondes. En fait, l’étonnante simplicité de la généralisation des théories physiques classiques, qui sont obtenues par l’utilisation de la géométrie multidimensionnelle et de l’algèbre non commutative, respectivement, repose dans les deux cas essentiellement sur l’introduction du symbole conventionnel sqrt (-1). Le caractère abstrait des formalismes concernés est en effet, à y regarder de plus près, aussi typique de la théorie de la relativité que de la mécanique quantique, et c’est à cet égard purement une question de tradition si la première théorie est considérée comme un complément de la physique classique. plutôt que comme une première étape fondamentale dans la révision en profondeur de nos moyens conceptuels de comparaison des observations,que le développement moderne de la physique nous a imposé.

Il est bien entendu vrai qu’en physique atomique nous sommes confrontés à un certain nombre de problèmes fondamentaux non résolus, notamment en ce qui concerne la relation intime entre l’unité élémentaire de charge électrique et le quantum universel d’action ; mais ces problèmes ne sont pas plus liés aux points épistémologiques discutés ici que ne l’est l’adéquation de l’argumentation relativiste avec la question des problèmes de cosmologie jusqu’ici non résolus. Tant en relativité qu’en théorie quantique, nous nous intéressons aux nouveaux aspects de l’analyse et de la synthèse scientifiques et, à cet égard, il est intéressant de noter que, même à la grande époque de la philosophie critique du siècle précédent, il était seulement question de savoir la mesure dans laquelle des arguments a priori pourraient être donnés en faveur de l’adéquation de la coordination espace-temps et du lien causal de l’expérience,mais jamais question de généralisations rationnelles ou de limitations inhérentes à de telles catégories de la pensée humaine.

Bien que ces dernières années, j’aie eu plusieurs occasions de rencontrer Einstein, les discussions continues, dont j’ai toujours reçu de nouvelles impulsions, n’ont jusqu’à présent pas abouti à une vision commune des problèmes épistémologiques de la physique atomique, et nos points de vue opposés sont peut-être le plus clairement indiqué dans un numéro récent de Dialectica apportant une discussion générale de ces problèmes. Conscient, cependant, des nombreux obstacles à la compréhension mutuelle en ce qui concerne une question où l’approche et le contexte doivent influencer l’attitude de chacun, j’ai accueilli cette opportunité d’un exposé plus large du développement par lequel, à mon avis, une véritable crise de la science physique a été surmonter. La leçon que nous avons reçue par la présente semble nous avoir fait franchir une étape décisive dans la lutte sans fin pour l’harmonie entre le contenu et la forme,et nous a appris une fois de plus qu’aucun contenu ne peut être saisi sans cadre formel et que toute forme, aussi utile qu’elle ait été jusqu’à présent prouvée, peut être jugée trop étroite pour comprendre une nouvelle expérience.

Certes, dans une situation comme celle-ci, où il a été difficile de parvenir à une compréhension mutuelle non seulement entre philosophes et physiciens mais même entre physiciens d’écoles différentes, les difficultés trouvent leur origine non rarement dans la préférence pour un certain usage du langage se suggérant de les différentes lignes d’approche. À l’Institut de Copenhague, où au cours de ces années, un certain nombre de jeunes physiciens de divers pays se sont réunis pour discuter, nous nous sommes souvent servis, en cas de problème, pour nous réconforter avec des blagues, parmi lesquelles le vieil adage des deux sortes de vérité. À l’un d’entre eux appartiennent des déclarations si simples et claires que l’affirmation opposée ne peut évidemment pas être défendue. L’autre type, les soi-disant « vérités profondes », sont des déclarations dans lesquelles le contraire contient également une vérité profonde. À présent,le développement dans un nouveau domaine passera généralement par des étapes au cours desquelles le chaos est progressivement remplacé par l’ordre ; mais ce n’est pas des moindres au stade intermédiaire où prévaut la vérité profonde que l’œuvre est vraiment passionnante et inspire l’imagination à rechercher une prise plus ferme. Pour de tels efforts de recherche du juste équilibre entre le sérieux et l’humour, la personnalité d’Einstein est un excellent exemple et, en exprimant ma conviction que grâce à une coopération singulièrement fructueuse de toute une génération de physiciens, nous approchons du but où l’ordre logique dans une large mesure nous permet d’éviter la vérité profonde, j’espère qu’elle sera prise dans son esprit et pourra servir d’excuse pour plusieurs déclarations dans les pages précédentes.mais ce n’est pas des moindres au stade intermédiaire où prévaut la vérité profonde que l’œuvre est vraiment passionnante et inspire l’imagination à rechercher une prise plus ferme.

La personnalité d’Einstein est un excellent exemple et, en exprimant ma conviction que grâce à une coopération singulièrement fructueuse de toute une génération de physiciens, nous approchons du but où l’ordre logique nous permet dans une large mesure d’éviter la vérité profonde, j’espère que il sera pris dans son esprit et pourra servir d’excuses pour plusieurs déclarations dans les pages précédentes.La personnalité d’Einstein est un excellent exemple et, en exprimant ma conviction que grâce à une coopération singulièrement fructueuse de toute une génération de physiciens, nous approchons du but où l’ordre logique nous permet dans une large mesure d’éviter la vérité profonde, j’espère que il sera pris dans son esprit et pourra servir d’excuses pour plusieurs déclarations dans les pages précédentes.

Les discussions avec Einstein qui ont constitué le thème de cet article se sont étendues sur de nombreuses années qui ont vu de grands progrès dans le domaine de la physique atomique. Que nos réunions réelles aient été de courte ou de longue durée, elles ont toujours laissé une impression profonde et durable dans mon esprit, et lors de la rédaction de ce rapport, j’ai, pour ainsi dire, discuté avec Einstein tout le temps, même en entrant sur sujets apparemment très éloignés des problèmes particuliers débattus lors de nos réunions. En ce qui concerne le récit des conversations, je suis bien sûr conscient que je ne compte que sur ma propre mémoire, tout comme je suis préparé à la possibilité que de nombreuses caractéristiques du développement de la théorie quantique, dans laquelle Einstein a joué un si grand partie, peut apparaître à lui-même sous un jour différent. Je fais confiance, cependant,que je n’ai pas manqué de donner une bonne impression de tout ce que cela a signifié pour moi de pouvoir bénéficier de l’inspiration que nous tirons tous de chaque contact avec Einstein.

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Messages

  • Merci à Mr Pouliquen pour ses remarques judicieuses sur cet article ! Je tâche de corriger...

  • Phrases retenues de Monsieur Einstein :

    "L’introduction d’une telle constante implique un renoncement considérable à la simplicité logique de la théorie, renoncement qui ne me paraissait inévitable que tant qu’on n’avait aucune raison de douter de la nature essentiellement statique de l’espace." ▬JFP : Et bien nous, nous doutons d’un espace statique comme le dit Einstein, car nous considérons que l’espace est totalement dynamique, mais indétectable. Le vide quantique est sans rapport avec cet espace, car c’est justement cet espace, ce vide de l’espace qui active les particules réelles comme les particules virtuelles. C’est ce que on appelons l’éther d’un ancien temps, et qui est pour Einstein en fait l’espace-temps, ou pour nous le vide cosmologique. Le vide quantique est rattaché à la matière et ses constitutions, mais ce vide quantique n’épouse pas l’univers... ▬"Pour illustrer son attitude, Einstein a évoqué lors d’une des séances le simple exemple d’une particule (électron ou photon) pénétrant à travers un trou ou une fente étroite dans un diaphragme placé à une certaine distance devant une plaque photographique." ▬JFP : Tout ce qui suit à cette phrase est en réalité l’expérience des fentes de Young... ▬"Maintenant, selon la théorie de la relativité générale, une horloge, lorsqu’elle est déplacée dans la direction de la force gravitationnelle d’une quantité de Dq, changera sa vitesse de telle manière que sa lecture au cours d’un intervalle de temps T différera d’un montant DT donné par la relation" ▬JFP : Il y a sûrement confusion entre les deux relativités de Einstein, car dans cette phrase, on nous parle de sens de gravité par rapport à une masse et aussi de mouvement et donc de vitesse lié à la relativité restreinte.
    Amicalement.

    JFP Jean-François Pouliquen jfp.pouliquen@hotmail.fr

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