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Génération de la révolution sociale : prends garde à droite, prends garde à gauche !

lundi 25 novembre 2019, par Robert Paris

édito

Génération de la révolution sociale : prends garde à droite, prends garde à gauche !

La révolution sociale, qui était il y a peu réduite au triste état de slogan de groupuscules notamment suite aux apparentes victoires du capitalisme face aux « pays de l’Est » et au stalinisme asiatique ou cubain, est devenue une évidence à l’échelle mondiale, une nécessité historique devant la fin du capitalisme et le soulèvement du peuple travailleur du monde. La génération actuelle va donc se retrouver devant une tâche de grande ampleur pour l’humanité, un grand pas en avant historique mais aussi le risque d’un grand pas en arrière car la contre-révolution monte aussi vite que la révolution, et il ne reste que peu de temps au peuple travailleur et à la jeunesse pour se préparer à de tels événements complètement différents de ceux auxquels ils sont accoutumés.

Quels sont les enjeux ? Quelles sont les alternatives ? Quelles perspectives possibles ? Quels pièges et quelles réponses ? Telle sont les questions à se poser.

Tout d’abord, il faut souligner pourquoi la situation mondiale est mure pour une révolution sociale. D’une part, les classes possédantes sont dans l’impasse. D’autre part, les peuples sont dans l’impasse. Enfin, la misère a atteint un sommet, autant que la richesse, sans pouvoir ni l’un ni l’autre reculer progressivement, et les deux ne peuvent plus que se confronter violemment. Le système qui a longtemps dominé le monde, incapable de se sortir de la crise de 2007-2008, n’a pu empêcher une chute générale qu’en pérennisant une intervention financière mondiale des institutions financières qui remplace le fonctionnement normal d’investissements productifs privés. Il en résulte que les milliardaires vivent aux dépens des finances publiques au lieu de s’enrichir en développant l’économie, la production de richesses et les emplois. En même temps, le secteur public voit ses emplois cassés eux aussi par la faillite des finances d’Etat. Le système capitaliste n’a plus que des souffrances supplémentaires à offrir au peuple travailleur du monde qui ne les supporte plus, pas plus qu’il ne supporte les gouvernants chargés de le saigner. L’antagonisme fondamental, entre exploiteurs et exploités, est clairement au centre de la lutte. Les gouvernants ne savent plus que radicaliser les situations, attiser tous les feux et provoquer les incendies. Et les pompiers n’ont plus d’eau ! Les peuples en ont assez d’être réformés ! Les politiciens vendeurs de solutions mensongères sont les plus honnis.

Aux quatre coins du monde, le rideau se déchire, les classes dirigeantes sont publiquement et violemment mises en cause, leurs tromperies sont démasquées et la mobilisation du peuple travailleur devient permanente, de l’Irak à Haïti, de la Bolivie à la Tchéquie, de la France au Chili…

Pas besoin d’être devin pour comprendre que nous allons vivre, dans la période qui vient, la révolution sociale mondiale, alors que nous n’avons aucune préparation pour cela et que toute la vie sociale précédente nous préparait au contraire, à considérer le capitalisme comme un horizon indépassable. Les prolétaires, préparés à tout subir, vie économique comme vie sociale et vie politique, vont devoir diriger toute la société et, bien entendu, rien ne les y prépare, sinon leur situation objective, être ceux qui n’ont que leurs chaînes à perdre et un monde à gagner, être la seule force sociale mondiale face au capitalisme décadent ! Et, de plus en plus déjà, ils revendiquent la totalité du pouvoir, rejettent tous les compromis avec le pouvoir, refusent toutes les « solutions » qu’on leur soumet. Bien sûr, les classes possédantes disposent encore du pouvoir et sont capables de bien des tromperies politiques et des pièges sanglants. Nulle part, les prolétaires ne sont encore proches de prendre le pouvoir et pourtant dans bien des pays, les prolétaires veulent déjà se gouverner eux-mêmes. Cela signifie que le peuple travailleur murit à grande vitesse en participant à des événements étonnants qui balaient en quelques jours des années d’arriération, de tradition, de conservation, de réaction…

Quel sera le point essentiel dans les événements à venir ? Les pièges viendront non seulement des ennemis déclarés mais des faux amis et les forces organisées en sont plein. Rien n’est simpliste : il ne faudra pas se garder seulement des capitalistes, des fascistes et des réformistes, mais aussi des fausses gauches, des faux radicaux, de tous les faux amis, en somme se garder de tous les côtés ! Les faiseurs de recettes seront tout aussi dangereux que les donneurs de leçons et les bonimenteurs de fausses solutions. Ne rien croire, ne rien suivre, s’informer et se former par soi-même, ne faire confiance que dans ses propres forces, se méfier de quiconque propose autre chose que l’auto-organisation de la lutte ! Et aussi de quiconque propose des compromis avec les classes dirigeantes, des négociations avec le pouvoir, des accords au sommet, des ententes avec des faux amis, des renoncements à la souveraineté du peuple travailleur. La souveraineté du peuple travailleur est un point non négociable ! Les objectifs que ce dernier se donne lui-même ne peut être remis en cause par des appareils politiques, syndicaux, associatifs ni étatiques ou institutionnels.

Le premier point à avoir en tête, c’est que la révolution, pas plus que l’être humain, ne peut pas marcher seulement avec ses pieds mais avec sa tête. Cela signifie que pour avancer, il ne suffit pas de dire : soyons nombreux à y aller et tout ira bien. Il oser poser la question : où voulons-nous aller ? Et la discuter collectivement, le plus loin possible, en poussant au maximum nos réponses et nos alternatives. Nous ne devons pas seulement accompagner la lutte de discussions en assemblées mais rendre celles-ci complètement souveraines, ce qui suppose qu’elles élisent des exécutifs, qu’elles contrôlent réellement tous les écrits, qu’elles vérifient que les décisions prises sont réellement défendues, diffusées et exécutées et démettre tous les élus et responsables qui ne se soumettent pas aux assemblées souveraines.

On ne marche pas en regardant ses pieds mais en regardant au loin pour chercher la direction… C’est la perspective qui dirige et pas les petits calculs. C’est la stratégie qui commande à la tactique. C’est le but qui guide et pas les petits pas. Et le premier des pas est de discuter non seulement de revendications mais de choix d’avenir, de choix économiques, sociaux et aussi politiques. Le peuple n’est pas seulement porteur de ses souffrances mais aussi de ses projets pour toute la société.

Mettre en avant une nouvelle société fondée sur le bien collectif et plus le bien individuel d’une infime minorité de profiteurs, voilà qui doit devenir l’objectif collectif clairement défendu et diffusé, s’adressant à toutes les couches sociales et groupes sociaux qui sont opprimés ou qui ne se solidarisent pas avec les milliardaires au pouvoir.

Bien sûr, le peuple travailleur du monde, qui a involontairement hérité de la défaite tragique de la révolution russe menant au stalinisme contre-révolutionnaire, n’est pas d’avance consciemment porteur d’une politique et d’une organisation révolutionnaire le menant au socialisme et d’abord à la conscience de son rôle révolutionnaire historique qui est la suppression de la propriété privée des entreprises et des capitaux. Ce n’est que le cours de la révolution qui peut le préparer à ses tâches historiques. En faisant lui-même ses propres expériences. Encore faut-il qu’il ne soit pas détourné de son chemin par les professionnels du mensonge politique et social et de l’encadrement des masses.

Et, pour cela, il est indispensable que certains de ses membres, fussent-ils seulement quelques militants, aient tiré des leçons politiques de l’histoire des révolutions et de sa théorie.

Quelques uns de ces leçons peuvent être résumées ainsi :

Premièrement, il n’y a pas de compromis possible entre le peuple travailleur et la classe possédante ainsi que ses représentants au pouvoir : c’est une lutte jusqu’au bout, une lutte sur le fond même de l’existence des possédants, et chaque prétendue proposition de compromis cache un couteau, chaque prétendu dirigeant bourgeois qui fait mine de se mettre de notre côté est non seulement un menteur mais aussi un assassin en puissance car il nous envoie désarmé devant les mitrailleuses. C’est le capitalisme lui-même qui est en cause, dans ses fondements, et pas tel ou tel de ses pantins politicien ou dictateur qu’il s’agirait seulement de renverser. Il ne suffit même pas de renverser tous les politiciens car c’est le système économique et social qui a fait son temps et ne peut plus apporter que des fruits empoisonnés. Les fausses « solutions » sont nombreuses : gouvernement de technocrates, gouvernement civil mais qui conserve le pouvoir militaire et la hiérarchie militaire, prétendu équilibre entre riches et pauvres, réformes constitutionnelles bidons, démagogies de militaires soi-disant proches du peuple et bien d’autres…

Deuxièmement, les faiseurs d’unanimisme, du « ne discutons pas trop pour ne pas nous diviser », du « soyons nombreux, peu importe sur quelle base et dans quel but », du « pas de théorie, que de la pratique », du « pas besoin de nous organiser, ne perdons pas de temps, agissons », du « nous sommes tous », de « pas besoin de programme », du « pas besoin de choisir nous-mêmes nos dirigeants », cachent systématiquement les manipulateurs, les opportunistes qui ne mènent les mouvements que dans tous les murs. Tous ceux qui nous proposent de « converger » avec des appareils qui ne reconnaissent absolument pas la souveraineté du peuple travailleur auto-organisé, nous trahissent.

Troisièmement, s’organiser par nous-mêmes, pour nous-mêmes en ne nous soumettant qu’à nous-mêmes ne suffit pas car il faut établir des buts sociaux et politiques pour lesquels nous luttons, mais c’est un préalable indispensable et cela suppose une organisation soumise aux masses en lutte, élue, révocable, discutable, souple et vivante, celle des assemblées qui décident pas des assemblées qui se contentent d’écouter et d’applaudir, celle des assemblées qui élisent des conseils, des comités, des exécutifs car il faut que le peuple travailleur discute, confronte, apprenne mais il faut aussi qu’il exécute ses propres décisions, qu’il s’apprenne à diriger ses luttes pour s’apprendre à diriger toute la société. Pas d’assemblée sans résolutions votées, sans délégués élus ou réélus, sans parole à la salle, sans droit total de la critique. Pas de droit particulier de parole et de décision aux représentants des groupes, partis, associations et syndicats. Ils peuvent certes nous soumettre leurs propositions mais ne disposent nullement d’un pouvoir supérieur sur l’assemblée ou dans l’assemblée souveraine du peuple travailleur. La pression, les menaces, les agressions de nos ennemis ne doivent donner du poids sur nous à nos faux amis. L’avenir n’est pas aux anciennes organisations réformistes, de gauche, radicales et autres, mais à l’auto-organisation du peuple travailleur.

Le danger au sein du mouvement vient aussi bien des fascistes et autres réactionnaires que des politiciens des partis prétendus démocratiques, des réformistes, des modérés, des opportunistes que des faux radicaux, des hostiles ài toute forme d’organisation de la lutte, hostiles en fait avant tout à ce qui représente notre avenir, nos perspectives : la prise de pouvoir par les travailleurs révolutionnaires.

Car, quatrièmement, aucune lutte révolutionnaire n’a triomphé si elle n’a pas mené à la prise du pouvoir du peuple travailleur organisé dans ses assemblées et comités, fédérés, décidant et exécutant, type la Commune de Paris de 1871.

Cinquièmement, la première force de la révolution, c’est de bien connaître ses amis, ses faux amis et ses ennemis et de ne pas se laisser manipuler ni surprendre. Les partisans de « on s’aime tous, il n’y a pas de problème, les seuls ennemis sont dans le camp d’en face » cachent toujours quelque chose. La fausse unité ne mène pas à la vraie qui, elle, affirme : « défendons nos intérêts de classe et ne craignons de débattre des perspectives de classe, de tels débats ne gênent que nos adversaires ».

Sixièmement, aucune confiance aveugle dans aucune direction autoproclamée de la lutte. Aucun état-major secret, aucune clandestinité dans les orientations et les perspectives. Tout le monde a des comptes à rendre au mouvement sur les décisions prises et leur exécution. Et surtout aucune confiance à quiconque prétend effacer la souveraineté du peuple travailleur, et d’abord sa capacité à tout décider lui-même.

Septièmement, la parano n’est pas de mise mais pas non plus la naïveté. Les adversaires avancent masqués. L’ennemi n’est pas seulement celui qui le dit clairement. La bonne stratégie ne crève pas les yeux. Ce n’est ni « toujours avancer », ni toujours « reculer pour être plus être plus nombreux ». Les provocations existent ainsi que les provocateurs. On les démasque en ayant des propositions politiques sociales claires et en appelant chacun à juger sur les réactions des faux leaders à ces orientations.

Huitièmement, il importe non seulement de savoir que l’enjeu de la révolution sociale sera la prise de pouvoir par le peuple travailleur, mais aussi que la perspective historique sera nécessairement la fin de l’Etat capitaliste et de la propriété privée des moyens de production et des capitaux. Certains diront que c’est un discours idéologique plaqué voulant imposer le chemin qui a mené au stalinisme mais c’est l’inverse : c’est le refus de ce chemin dans la révolution européenne qui a isolé la révolution russe, la seule qui avait pris cette voie, et l’a livrée à la contre-révolution stalinienne.

Neuvièmement, nous devons connaître les armes de la contre-révolution : bien sûr armée, police, forces spéciales, guerres, mais aussi racisme, sexisme, ethnisme, haine religieuse, machisme et toutes les divisions des peuples travailleurs.

Dixièmement, la révolution sociale sera mondiale ou ne vaincra pas. Il n’y a pas de solution nationale à l’effondrement du capitalisme. Il n’y a pas de particularité nationale qui prime la question sociale aujourd’hui mondiale, c’est-à-dire ôter le pouvoir politique et social au un pourcent de capitalistes et que le prennent ceux qui n’exploitent personne afin de changer l’ordre social et de le mettre au service de l’humanité. Le but final n’est pas la prise de pouvoir par les plus exploités (ce n’est que la première étape indispensable) mais d’en finir avec l’exploitation et la division de la société humaine en classes sociales, en exploiteurs et exploités.

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