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L’effondrement de la civilisation Mochica (dite aussi Moche), en deux révolutions sociales, en 600 et en 850 de notre ère

mardi 5 mars 2019, par Robert Paris

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La classe dirigeante seigneuriale mochica, celle qui a été renversée quand le peuple travailleur a cessé de supporter ses exactions et son oppression

Grand prêtre mochica, celui auquel le peuple travailleur a cessé de croire du moment que le système n’était plus capable de nourrir la population...

Déesse Mochica

Où se situe la civilisation mochica dans l’histoire des civilisations indiennes...

L’effondrement de la civilisation Mochica (dite aussi Moche), en deux révolutions sociales, en 600 et en 850 de notre ère : produit de catastrophes naturelles ou de la guerre sociale ?

C’est la civilisation, d’abord guerrière puis agraire, qui s’est développée autour des villes de Moche (région de La Libertad) et Sipàn (région de Lambayeque) qui s’est considérablement développée et complexifiée, avec de très nombreux centres urbains, avant de chuter brutalement en deux épisodes dont on est certains qu’ils ne proviennent pas d’une guerre avec d’autres peuples mais d’une cause purement interne et violente. Mais quelle est cette cause : changement climatique (pluies diluviennes suivies de sécheresses catastrophiques liées ou pas au phénomène climatique El Niño) ou renversement social révolutionnaire (avec notamment perte de confiance dans la caste des prêtres, discrédit des classes dirigeantes et lutte pour la terre) ?

En tout cas, en 850 de notre ère, le peuple Mochica s’est brutalement dispersé, abandonnant les cultures, laissant les centres urbains, se dispersant dans le désert, sans qu’aucun centre ne maintienne un pouvoir Mochica. Cette culture qui a dominé la région n’a été redécouverte que très récemment par l’archéologie.

Agriculteurs passés maîtres dans les techniques d’irrigation et d’aménagement des terres, les Mochica étaient aussi des bâtisseurs, comme en témoignent les routes, les ouvrages fortifiés et les grands complexes cérémoniels édifiés à l’embouchure des vallées. La plupart de ces « temples » consistent en un ensemble de pyramides à degrés construites en adobe (brique crue) et souvent décorées de peintures murales polychromes. Alentour se dispersait l’habitat rural, édifié en matériaux périssables (torchis et joncs) et dont peu de vestiges subsistent. Cette société rurale était sans doute dirigée par une caste puissante de prêtres-guerriers.

La culture Moche ou Mochica apparaît et se développe aux Ier et VIIème siècles. Elle a pour théâtre la longue et étroite bande désertique de la côte nord du Pérou où se trouvent les vestiges de ses temples pyramidaux, ses palais, ses fortifications, ses ouvrages d’irrigation et ses cimetières. témoignent de son développement artistique, technologique et complexe complexe.

C’est la culture la plus connue et admirée du Pérou. L’un des plus représentatifs de l’ancien Pérou du point de vue de son expression artistique.

Leur fertile agriculture se composait de maïs, d’haricots, d’avocats, de piments et même des cacahouètes. Cette diète se diversifiait avec des produits de la mer (crabes, mollusques, crevettes, poissons) et de la viande (lamas, canards, cochons d’inde, etc.).

Cette civilisation maîtrisait la métallurgie, l’orfèvrerie et la céramique. En l’absence d’écriture, les vases portraits témoignent de la vie quotidienne mais surtout des cérémonies religieuses. En trois dimensions, ils donnent à voir de manière très réaliste les guerriers au combat, les prêtres officiant, les esclaves au travail, jusqu’à la torture de prisonniers ou à une sexualité débridée. Et les artisans les produisaient "à la chaîne" en recourant à des moules.

Les joyaux et les objets funéraires en métal précieux et pierreries témoignent d’une brillante maîtrise. Les Moche ont mis au point une technique électrochimique de plaquage de l’or sur différents métaux. Cette innovation, utilisant des minéraux corrosifs en solution, offre le même résultat que le système par électrolyse qui ne sera inventé, en Europe, qu’au 18e siècle.

La religion a joué un rôle central dans le pouvoir des classes dirigeantes, marqué par deux centres religions dominants Huaca de la Luna et Huaca del Sol, avec de grandes pyramides édifiées à mains d’hommes et nécessitant un travail considérable et un supplément énorme de main d’œuvre, c’est-à-dire une agriculture florissante dégageant un grand suproduit social.

Entre les années 400 et 600, ces deux huacas (édifice religieux ou sacré) formaient la capitale de la civilisation Moche. La Huaca del Sol constitue à elle seule le plus grand édifice préhispanique d’Amérique du Sud avec ses 40 mètres de haut sur 340 mètres de long. Et malgré une destruction partielle, elle dévoile encore sa massive structure d’adobe réalisée avec 100 millions de briques de terre séchées au soleil.

L’édification de pareils temples nécessitait une société hautement hiérarchisée ayant atteint un grand degré d’organisation. Comme en témoignent par ailleurs leurs célèbres céramiques, les Moche avaient atteint un grand développement architectural, artistique et technologique, n’ayant rien à envier aux Romains qui, au même moment, voyaient leur l’Empire s’effondrer en Europe.

La civilisation Mochica a développé une société hiérarchisée avec des dirigeants, des guerriers, des spécialistes du rituel, des artisans, des agriculteurs et des pêcheurs.

La société Mochica était établie avec des hiérarchies sociales très marquées qui, faute d’avoir développé un certain type d’écriture, se reflétaient dans une production très abondante de céramiques ou "huacos". La pyramide de cette société théocratique était dirigée par les seigneurs, dotés de pouvoirs terrestres et religieux. Les prêtres ont formé une deuxième couche qui pourrait être intégrée par les femmes prêtresses, comme la Chimus. La troisième couche était celle des personnes qui effectuaient des travaux sur le terrain et des métiers. Cette division de la société en castes, gouvernées par des caciques ou des prêtres des différentes vallées, ne fut réunie sous un seul commandement que plus tard.

Les Moche étaient évidemment des guerriers, comme le montrent les scènes de combats, les décorations des vases et les représentations sculpturales individuelles. Les guerriers jouissaient d’un statut spécial et formaient de petites armées professionnelles. Pour les Mochica, amoureux de la vie, la mort n’était pas la fin. Les hommes ont continué à vivre dans une autre sphère du monde avec leurs propres obligations ou privilèges, raison qui les a conduits à les enterrer avec des provisions et des biens. Les inhumations reflétaient ainsi la fonction et la place de chaque homme dans sa société. La décoration des tombes de Mochica est bien plus riche que celle des époques précédentes et les morts sont toujours sur le dos. Les grands personnages ont été enterrés à côté de dizaines de vases, bouteilles, cruches, plateaux et récipients avec des décorations en relief représentant des fruits, des animaux, des hommes et des dieux. Les cadavres portent de précieuses boucles d’oreilles, des mosaïques de turquoises incrustées d’or, des colliers de perles d’or creuses et des médaillons à visage humain.

La fin des mochicas : El Niño ou la révolution sociale et politique ?

Les Mochicas de la côte nord du Pérou semblent s’être effondrés non pas une fois, mais deux fois. La première fois, dont ils semblent avoir récupéré avec des changements importants dans leurs formes d’organisation, s’est produite vers 600 après J.-C. et la seconde, et définitive, vers 850 après J.-C. Les deux dates pourraient coïncider avec des événements climatiques, tels que les phénomènes El Niño, bien qu’il soit difficile d’établir une corrélation directe par la fréquence de ces phénomènes.

Cependant, une des hypothèses les plus répandues, à la mode parmi les scientifiques depuis les dégâts causés par les pluies de 1983 et 1998, est que les pluies et les débordements des rivières auraient été la cause de l’effondrement de Mochica. Mais, est ce que c’est bien sûr ?

Le premier effondrement de la civilisation Mochica a coïncidé avec l’abandon de la Huaca de la Luna, un changement radical dans les schémas d’occupation du complexe de Mocha huacas et le début de la construction de la Huaca del Sol. Les fouilles de Santiago Uceda et de Ricardo Morales indiquent que ce n’était pas seulement un changement géographique, de Huaca de la Luna à Huaca del Sol (et les noms ne viennent pas des Mochicas et n’ont rien à voir avec les étoiles), mais plutôt un affaiblissement des systèmes politiques et sociaux, c’est-à-dire de l’état de la civilisation Mochica. Les Mochicas semblent avoir récupéré de cette catastrophe en modifiant radicalement leurs formes d’organisation sociale et économique et de gestion économique, une sorte de modernisation administrative qui impliquait des formes de leadership plus laïques. La caste religieuse semblait avoir perdu son crédit politique et social au cours de la première révolution.

Deux cent cinquante ans plus tard, en 850 après J.-C., le deuxième et définitif effondrement des sociétés Mochicas a eu lieu. À l’époque, une douzaine d’entités politiques, petits États et royaumes différents de Mochica, dotés chacun de leur propre organisation, mais partageant un système culturel et religieux, coexistaient sur la côte nord. La preuve de son existence, ce sont les tombeaux royaux trouvés à Sipan, Ucupe, San José de Moro, El Brujo, Huaca de la Luna, etc. Certains semblent même avoir été gouvernés par des prêtresses. Chaque état Mochica a connu entre 750 et 850 de notre ère un processus d’effondrement qui n’a pas pu être arrêté.

Bien que le phénomène El Niño, ou d’autres calamités telles que des séismes ou des sécheresses prolongées, puissent être les catalyseurs de ces effondrements, c’est en réalité l’incapacité de leurs systèmes administratifs, des responsables de l’État et des classes possédantes, de réagir à ces événements, qui fait disparaître cette civilisation.

Qu’est-ce qui prouve que ce ne serait pas simplement une catastrophe naturelle, cotnrairement à ce que dit la mode actuelle environnementaliste, qui voit dans toutes les chutes civilisationnelles des problèmes de climat et de gestion productiviste de l’agriculture ? Eh bien, on n’a nullement constaté les effets sur les populations qu’aurait représentés une destruction massive et durable des cultures agricoles.

L’effondrement de Mochica n’impliquait pas la mort en masse des populations, ni l’abandon des champs de culture. Les squelettes des personnes qui vivaient à cette époque ne révèlent pas plus de stress alimentaire que lors des périodes précédentes ou ultérieures et, en tout état de cause, les effets des précipitations sont moins importants à la campagne que dans les villes et la reprise est plus rapide. Ni leurs langues ni une grande partie de leurs traits culturels n’ont disparu. Ce qui s’est effondré, c’est son système de gouvernement et les traditions liées à cette classe dirigeante, telles que la religion Mochica et de nombreux espaces, temples, centres cérémoniels, cimetières qui s’étaient développés autour de ces pratiques.

L’effondrement de Mochica, plus qu’un effet de catastrophe naturelle, semble donc avoir été un rejet des formes d’organisation par un peuple qui se sentait trompé par ses dirigeants. Les rituels qu’ils avaient créés pour légitimer leur pouvoir, les artefacts et les styles artistiques qui leur étaient associés disparurent pour laisser la place à des sociétés différentes, Lambayeque et Chimú, mais ils restèrent dans la tradition des sociétés Mochica.

Pour certains auteurs, la chute des Mochicas, il y a 1200 ans, devrait nous laisser avec des leçons de mœurs, une morale environnementaliste. En premier lieu, nous devrions apprendre des erreurs et ne pas les répéter, cesser de surproduire en détruisant l’environnement naturel sous peine de détruire la civilisation, car nous n’avons qu’une seule chance. On ne peut pas faire plusieurs fois les mêmes erreurs dramatiques contre la nature. Deuxième leçon morale : la nature n’est pas à blâmer quand les choses tournent mal. La nature est ce qu’elle est, le problème, c’est nous qui n’apprenons pas à y faire face, même si nous pensons la maîtriser. Et troisièmement, les sociétés qui s’effondrent sont généralement celles qui s’habituent à faire quelque chose sans pouvoir s’adapter aux changements naturels, qui sont figées. C’est la morale environnementaliste et climatique qui nous est diffusée massivement et elle ne tire pas seulement ses leçons de l’Amérique précolombienne, mais aussi de nombreuses civilisations disparues, brutalement effondrées.

Il y a de nombreux arguments, en réalité, qui vont à l’encontre de l’idée environnementaliste pour interpréter la chute de Mochicas. Notamment, il faut remarquer, y compris après la première chute du régime que les représentations des années suivantes n’indiquent aucune catastrophe climatique, ni inondations, ni pluies diluviennes, pas de mythe du déluge dans cette civilisation moche !

On sait qu’à cette époque, le Pérou a subi des précipitations exceptionnelles mais rien dans les recerches archéologiques n’a pu étayer le lien entre ces catastrophes naturelles et la chute, deux fois de suite, du régime social et politique.

D’autres auteurs y voient une simple perte de religion par les peuples du fait des catastrophes naturelles. Les dieux étaient chargés de permettre aux peuples d’assurer leur production de nourriture et, lorsque ce n’était pas le cas, les sorciers et chefs religieux devenaient impopulaires et pouvaient même chuter, ayant démontré qu’ils n’étaient pas les bons intercesseurs avec les dieux.

Mais la force des croyances ne peut être seule prise en considération. Le spécialiste en archéologie des Mochica, Walter Alva, pour sa part, souligne que le mode de production économique et social, pour efficace qu’il était, était fondamentalement instable. Si les Moche avaient développé un sysème agraire extrêmement efficace, celui-ci était bien plus défendant de l’existence de conditions météorologiques (ce qui est différent de conditions climatologiques puisque ce sont des accidents brutaux et massifs, mais pas nécessairement durables) que d’autres modes de production.

Quelle était la particularité de ce mode de production agraire des Mochicas ?

Il s’agissait de l’irrigation artificielle géante d’un désert, celui de toute la côte pacifique, une longue bande aride du nord du Pérou ! Ils ont converti ce désert en vaste zone de cultures très productives. Pour cela, les Mochicas avaient développé des techniques très efficaces.

Avec des briques de boue, ils ont détourné l’eau des rivières et créé un réseau d’aqueducs, dont beaucoup sont encore utilisés de nos jours. Ils ont ainsi produit plus de trente variétés de cultures, ce qui leur a permis d’avoir de gros excédents agricoles, de nourrir les populations mais aussi d’en tirer un important surproduit économique, base de la fondation de la division du travail et des classes possédantes.

Ce vaste édifice de systèmes sophistiqués d’irrigation a pu être détruit par trente ans de pluies diluviennes mais est-ce que cela suffit à expliquer le renversement de la religion puis celui des classes possédantes et la destruction du mode de production ?

Mais l’archéologue Alva, pourtant défenseur de l’idée que El Niño, producteur de pluies diluviennes suivies de sécheresses, serait le grand destructeur des civilisations du Pérou, comme Moche ou Lambayeque, ne se contente pas d’interprétation environnementaliste. Il explique :

« L’effondrement n’est pas seulement basé sur le système productif, mais sur toute la structure sociale. Déjà, la classe dirigeante n’a plus la capacité de contrôler ou d’exiger de la population des excédents de production. »

« Nous avons trouvé des signes d’événements catastrophiques qu’il serait encore impensable de gérer, même aujourd’hui. Un exemple d’une société qui a dû quitter son lieu de résidence pour s’installer dans une autre a été donné ici à Lambayeque, c’est le complexe Purulén, en 1200 av. J.-C. »

« À Purulén, un grand complexe semi-urbain s’est effondré. Nous parlons d’un ensemble avec 16 temples et des zones d’habitation, qui dépendaient de l’agriculture et de la pêche. Il fut un temps où la rivière Zaña changeait de cours et laissait les champs inutilisés. Les gens devaient partir car ils ne pouvaient pas planter. Mais la pêche a probablement aussi été touchée. Certains signes indiquent que les monuments, les temples et les villages environnants ont été abandonnés violemment, très rapidement. Et après l’avoir abandonnées, ils se sont dispersés dans des villages de la vallée », explique-t-il.

Cette situation climatique a provoqué un bouleversement considérable de la vie économique et sociale de Mochica, au point que ses dirigeants ont souvent dû abandonner leurs centres politiques, religieux et administratifs en raison des destructions causées par ces changements climatiques drastiques. Les archéologues, par exemple, ont découvert que les précipitations tombées dans la région de Sipán ont obligé leurs hiérarchies à s’installer dans la colonie voisine de Pampa Grande pour continuer à contrôler la vallée de la Lambayeque.

Les seigneurs de Cerro Blanco ont également dû quitter les lieux pour s’installer dans la colonie de Galindo, située dans la gorge stratégique de la rivière Moche. Depuis Galindo, qui est devenu le centre principal de la région, les caudillos Mochica pouvaient contrôler les systèmes d’irrigation et l’accès aux terres fertiles de la vallée de la rivière Moche. Les gens se sont installés à côté de leurs maîtres pour avoir le plus près possible les sources d’eau et éviter les dunes qui menaçaient les cultures et les villages en aval.

Cette série catastrophique de facteurs climatiques a sérieusement affaibli les institutions de la civilisation Mochica. La noblesse, retirée du quotidien de leurs sujets, vivait occupée par ses disputes dynastiques et ses cérémonies rituelles. Mais le peuple cultivateur a blâmé violemment ses dirigeants pour la situation chaotique et pour avoir perdu la faveur des dieux. En conséquence, les hiérarchies ont augmenté les sacrifices humains pour obtenir la faveur divine, sans succès.

Cependant, le riche trousseau funéraire retrouvé dans la tombe d’une prêtresse de San José de Moro, datée de 720 environ, montre que l’élite mochica a résisté à l’abandon de ses privilèges ancestraux, bien que ce type de sépulture lui ait coûté très cher pour une société attaquée par une météo très dure et affaiblie par la rareté de la nourriture et des ressources. À la Huaca de la Luna, des archéologues ont mis au jour les restes d’environ soixante-dix hommes sacrifiés et démembrés au cours d’au moins cinq cérémonies rituelles. Ils ont été victimes d’un rituel destiné à calmer les puissantes forces de la nature.

À la fin du VIIe siècle, les pluies provoquées par El Niño extrêmement intense ont dévasté de nombreux systèmes d’irrigation près de Pampa Grande et de Galindo. En conséquence, les deux centres ont été abandonnés vers l’an 750 et la population a été regroupée indépendamment, ce qui a entraîné l’effondrement du système politique de Mochica.

Une guerre civile a alors éclaté : l’archéologie montre que les Mochicas, après avoir abandonné leurs anciennes colonies, en ont créé de nouvelles, où les énormes huacas de jadis ont été remplacés par des forteresses pour se protéger des cultivateurs révoltés.

Ayant perdu l’autorité et le contrôle sur leur peuple, les dirigeants de la société Mochica se sont affrontés dans une lutte acharnée pour le contrôle des maigres ressources laissées dans la région. Les dernières colonies Mochica, gouvernées par une classe dirigeante usée, n’ont pas pu s’empêcher de tomber entre les mains du nouvel État Huari (ou Wari), une machine militaire écrasante qui a conquis la plupart des manoirs côtiers et montagneux de la zone centrale du Pacifique péruvien. Au cours des trois siècles suivants, les Huari concentrèrent leur pouvoir immense, construisirent d’immenses centres urbains et construisirent un empire authentique, un fait sans précédent dans l’histoire des cultures andines.

En fait, l’hypothèse El Niño a surtout trompé les archéologues, leur faisant trouver des dates erronées de la chute de la civilisation moche.

En 1980 un climatologue Lornie Thompson, va faire une découverte. En allant dans les Andes pour étudier les glaces, glaces qui sont la mémoire du climat. Il découvre que si le temps en montagne est sec, il est très pluvieux sur la cote avec une humidité très importante (el Nino) .Il remonte jusqu’à la période des Mochicas 560 avant J.C. et s’aperçois que la météo était devenue complètement folle (date de la disparition des Mochicas). Un régime pluvieux très important de 565 à 650 après J.C., inondations dévastatrices suivi d’une sécheresse de 30 ans sans une goutte de pluie. Pourtant, toutes les pyramides ont des marques de traces d’eau.

Steve Bourget va faire une autre découverte sur le site de Huancaco, les murs ont été coupés par des rivières de boue. En utilisant le carbone 14, il pourra prouver que cela date bien de la période des Mochicas. D’autres fouilles prouvent que 600 après J.C. il y eu bien 30 ans de sécheresses grâce au sable qui recouvrait les sites.

Quand on sait que cette civilisation se basait sur la culture du climat (sacrifices humains pour faire venir la pluie) tout s’effondre et les hommes doutent, les bases de cette société s’effondrent.

A la fin de 1990 Tom Dillehay fait voler en éclat la thèse de Steve Bourget en allant sur un site non exploré avec John Warner qui date le site par un procédé photographique et le date de 650 à 700 après J.C. Alors tout est remis en cause. Les Mochicas ont survécus. Ils disparaîtront définitivement au 8eme siècle. Alors que l’on ne connaissait aucune activité belliqueuse chez eux .IL semble que les Mochicas ont connu des guerres mais contre qui ? Une hypothèse le peuple affaibli a été envahie par des voisins ? Mais aucune preuve de guerre extérieure n’a été trouvée. Alors pourquoi se défendre en construisant des cités avec des murailles ? Dillehay a supposé alors qu’il s’agissait d’une guerre civile pour les terres. Après avoir survécu aux inondations et à la sécheresse les Mochicas se seraient donc entretués dans une guerre sociale.

Beaucoup d’historiens situaient en effet la fin des Moches aux alentours de l’an 600. Mais actuellement, grâce à des fouilles plus précises, on situe la fin des Moches aux alentours de l’an 700.

Cette première date, qui s’avéra ensuite fausse, est due au fait qu’on a d’abord supposé que la situation s’était peu à peu dégradée dans le royaume, celui-ci devant faire face à des crues catastrophiques des principaux fleuves et notamment du río Moche à cause du phénomène El Niño. Cependant, cette hypothèse fut réfutée par l’archéologue Santiago Uceda Castillo. Ce phénomène eut bien lieu, la preuve étant de grandes fissures sur la Huaca del sol. Mais, dans ses recherches, Uceda Castillo découvrit que ce n’était pas El Niño qui avait provoqué la fin des Mochicas, car des fouilles archéologiques ont permis de prouver qu’après celui-ci, datées de 600 après J-C, la vie a continué chez les Mochicas. On constata en effet qu’au-dessus de la couche de terre correspondant à l’époque de cette catastrophe naturelle, s’élevaient bien d’autres constructions encore, bâties de la main des Moches.

Les pluies diluviennes ou les sécheresses ne sont pas les seules à avoir encouragé le peuple moche à se révolter. Il y a eu aussi des tremblements de terre à répétition durant le VIIe siècle.

Finalement, le point essentiel est que les conditions nécessaires d’une révolution sociale (et même de deux !) ont été réunies…

La situation révolutionnaire est celle où le système n’est pas seulement contesté par les opprimés mais ne fonctionne plus, y compris pour les oppresseurs. Eux-mêmes se sentent menacés. Et toutes les classes sociales sont bouleversées, pas seulement les exploités du bas de l’échelle.

« Pour un marxiste, il est certain que nulle révolution n’est possible à défaut d’une situation révolutionnaire. Toute situation révolutionnaire, du reste, n’aboutit pas à une révolution. Quels sont en général les indices d’une situation révolutionnaire ? Nous ne nous tromperons pas en indiquant les trois indices suivants : 1°) L’impossibilité pour les classes dirigeantes de maintenir intégralement leur domination ; une crise des milieux dirigeants, crise politique de la classe exerçant le pouvoir, produisant une faille dans laquelle pénètrent les mécontentements et l’indignation des classes opprimées. Pour qu’une révolution ait lieu, il est en général insuffisant que l’on n’accepte plus en bas ; il faut aussi que l’on ne puisse plus, en haut, vivre comme par le passé. 2°) L’aggravation anormale des privations et des souffrances des classes opprimées. 3°) L’augmentation sensible, en raison de ce qui précède, de l’activité des masses qui, en temps de paix, se laissent paisiblement voler, mais, en temps d’orage, sont incitées par toute la crise et aussi par les dirigeants à prendre l’initiative d’une action historique. A défaut de ces modifications objectives, indépendantes de la volonté des groupes isolés et des partis, comme des classes, une révolution est – en règle générale – impossible. L’ensemble de ces modifications objectives constitue précisément la situation révolutionnaire… » écrit Lénine dans « Le krach de la deuxième internationale », en août 1915.

Cultura Mochica

Comment est morte l’ancienne civilisation ancêtre des Chimùs, dite muchique ou mochica, du Pérou, en 500-600 de notre ère ?

La civilisation muchique a été caractérisée par un culte lunaire et maritime, des sacrifices humains... d’enfants, des constructions de pyramides, des céramiques noires et des poteries. C’est une civilisation qui débute dans la nuit des temps, même si elle va brutalement disparaitre...

Bien des auteurs ne datent la civilisation Chimù que de sa phase glorieuse, à partir de 900 ap. J.-C. alors qu’il est certain qu’une première phase s’est achevée en 500-600 ap. J.-C., civilisation qui avait débuté certainement avant notre ère, même si on ne sait encore pas bien déterminer quand. Il y a infiniment plus d’études et d’articles sur l’empire Chimù que sur la civilisation de départ qui est pourtant de même origine.

Une très ancienne civilisation, ancêtre des Chimù et des Mochicas

Née probablement dans la vallée de Chicama, à Huaca Prieta, elle s’est développée aussi dans celles de Virù et de Moche, suivant les époques.

Une civilisation qui peut dater de plus de 8000 à 15000 ans

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La plus ancienne civilisation de la côte nord du Pérou est l’ancienne civilisation Chimú ou Michù, également appelée civilisation muchique. La civilisation muchique commença à une époque indéterminée av. J.-C. et s’acheva vers l’an 500-600 apr. J.-C. Elle s’organisait autour des vallées Chicama, Moche et Viru. « De nombreuses grandes pyramides sont attribuées à l’ancienne civilisation chimú ». Ces pyramides sont construites en adobes rectangulaires moulées. « On trouve aussi des cimetières qui ne sont pas associés à des pyramides. Les morts étaient enterrés allongés dans des tombes aménagées. Les tombes sont rectangulaires et tapissées d’adobes sur les murs et le plafond. Des niches dans les murs contenaient des bols de poterie. » La poterie ancienne se caractérise par des formes figuratives réalistes et des scènes peintes.

Une autre civilisation, qui a été également appelée Chimu car elle s’appuyait sur le même peuple, s’est développée en 900 de notre ère dans la vallée de Moche, autour du site de Chan Chan, suite à la chute de la civilisation Mochica, mais elle n’est pas en continuité avec la précédente civilisation Chimù. Entre les deux, il y a eu une rupture brutale et quatre cent ans d’interruption !! Les anciens Chimù n’habitaient pas Chan Chan qui n’a été construite qu’en 850 après J.-C.

Nous ne parlerons donc ici que de l’ancien Chimu, avant 500-600, et pas de ses successeurs lointains, les Chimù d’après 900 qui ont été battus par l’empereur inca Tupac Inca Yupanqui qui conquit le territoire des Chimú vers l’an 1470, dans une guerre sanglante et y parvint en détruisant le réseau d’irrigation de la vallée de Moche, 50 ans avant l’arrivée des conquistadores dans la région. Comme on l’a fait remarquer, la plupart des commentaires que l’on peut lire ne concernent que les Chimù de 900 à 1470 et tout particulièrement ses sacrifices humains, notamment les 140 enfants à la poitrine ouverte et au cœur arraché.

Notons cependant que le nouveau Chimù est né grâce deux révolutions ! Les États de Tiahuanaco et Huari s’effondrent brusquement au XIIe siècle et c’est de là que va apparaître la société Chimù, dans sa deuxième version.

Quatre cents ans d’interruption pendant lesquelles ont ne voit aucune société qui fasse la transition, cela signifie que la première société Chimù a été balayée durablement et déracinée, éradiquée par un événement violent qui ne s’avère pourtant pas être le fait d’une armée étrangère…

Il est certain que tous les feux de la rampe étant fixés sur Chan Chan, la vieille civilisation muchique n’a pas trouvé un grand intérêt auprès du public. Elle est bien moins développée, n’a pas connu un tel essor, n’a pas fondé un empire, etc.

Par qui la civilisation muchique, ou Michù ancienne, aurait-elle pu être balayée en 500-600 a p. J.-C. ? Pas par les Huaris qui ne commencent qu’en 650 ! Pas par la civilisation Lambayeque (ou Sipan) qui commence au VIIIe siècle ! Restent les Nazca (de -200 à 700) mais ils ne semblent pas avoir atteint la zone des Chimù, dont ils étaient d’ailleurs séparés par les peuples Mochica qui enserraient les régions des Chimù…

Les Nazca ne sont pas du tout proche de Chimù, entre eux on trouve les zones des civilisations Norte Chico, Chavin, Huari et Paracas. En 500-600, l’occupation Nazca ne pouvait atteindre la zone Chimù et abattre cette société.

Restent encore les Mochicas, qui ont existé entre 100 et 700 ap. J.-C. et qui pourrait avoir battu les premier Michù. Mais, là encore, nous ne trouvons aucun signe que les Mochicas aient laissé d’une occupation de la zone des Michù (ni arme, ni objet, ni construction mochica en zone chimù). Ils ne semblent jamais l’avoir occupée ni même atteinte.

Restent aussi la civilisation Lambayeque, mais celle-ci n’est apparue qu’en 700 de notre ère, bien trop tardivement pour être cause d’une chute de civilisation en 500-600 !

Les Paracas, pour leur part, sont disparus bien avant, vers 300 de notre ère…

On pourrait se dire que s’ils n’ont pas été attaqués par des peuples de la côte, ils ont pu l’être par ceux de l’intérieur, c’est-à-dire les Incas, mais ceux-ci ne développent une grande civilisation qu’au XVe siècle, beaucoup trop récemment pour avoir pu battre la première civilisation Chimù en 500-600 de notre ère !

Les cités relevant de la culture Recuay – qui fleurit des débuts de notre ère aux alentours de 600, dans la région du Callejon de Huaylas et dans les hautes vallées des Andes – sont perchées sur des sommets pour des raisons défensives, les versants proches étant aménagés en terrasses permettant une activité agricole. Mais, autant qu’on le sache, jamais les Recuay ne descendent sur la côte…

Reste la civilisation Wari (ou Huari) qui est bien dans la même zone mais n’est apparue qu’au VIe siècle de notre ère, là encore beaucoup trop tard pour avoir provoqué la chute des premiers Chimù. Cette fois, on a bel et bien fait le tour des attaques extérieures possibles et il ne nous reste plus qu’un effondrement pour des causes internes, hypothèse que bien des auteurs rejettent par avance, à tort.

Bien entendu, la plus connue des civilisations de cette région, celle de Chavin était morte depuis longtemps : en 200 avant notre ère et n’est donc nullement candidate comme cause de la chute des premiers Chimù.

Les anciennes sociétés des Andes étaient aussi complexes que les anciennes sociétés d’Egypte, de Mésopotamie ou d’ailleurs. Elles étaient aussi politiques. Elles étaient fondées sur des classes sociales, sur l’exploitation de l’homme et ont suscité les mêmes révolutions sociales. Rappelons seulement que l’Egypte des Pharaons a chuté durablement du fait d’une révolution sociale qui est bien documentée celle-là, et qui a supprimé ce régime pendant très longtemps, même si bien des auteurs font comme si les Pharaons avaient gouverné en continu sur ce territoire.

Certains auteurs ont remarqué que la chute du premier Chimù ou civilisation muchique date de la même époque que la chute de la cilivisation Olmèque de La Venta. Ils essaient ainsi d’indiquer que les causes peuvent être plus générales : climatiques.

Mais on ne peut pas effacer les révolutions sociales de l’interprétation de la chute des civilisations des Amériques. Toutes sont loin d’avoir chuté dans la même période !!!

En effet, les chutes de civilisations sont datées de 800 de notre ère pour les Mayas, 1168 de notre ère pour les Toltèques, les Zapotèques et Téotihuacan en 700 de notre ère, ou encore 1500 avant notre ère pour Caral, El Tjin en 1100 de notre ère, Lambayeque en 1300 de note ère, Huari en 1100 de notre ère, Nazca en 700 de notre ère, ou 600 et 850 de notre ère pour les Mochicas.

On voit bien que ces diverses chutes ne pourraient pas dépendre d’un phénomène climatique global.

Quel événement climatique pourrait s’être produit en Amérique du sud vers 500-600 de notre ère ? On ne voit pas. Au point de vue du globe, en tout cas, 500-600 de notre ère n’est pas une date remarquable. Et pas plus en Amérique du sud ni spécifiquement au Pérou.

D’ailleurs la civilisation Olmèque qui a chuté en même temps n’est par morte du seul fait de changements climatiques : lire ici

Dans le monde, non plus, 500-600 de notre ère n’est nullement une date d’importantes chutes de civilisations ni de phénomènes climatiques remarquables…

Reste que les éléments dont on dispose ne nous donnent que peu d’indications sur cette vieille société et que les recherches dans cette région sont centrées sur l’empire Chimù et le mystère risque donc de perdurer…

LIRE AUSSI :

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Démocratie indienne

La Fédération des Sept Feux

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L’élimination des Indiens de la forêt amazonienne

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La chute de la civilisation Cuicuilco en 100 après J.-C.

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La civilisation des Indiens du Mississippi, disparue à l’issue d’une guerre civile, avant le début de la colonisation européenne

Pourquoi la civilisation de Caral (Pérou) a brutalement et totalement disparu en 1500 avant notre ère ?

Les trois chutes (et la disparition finale), en 750, en 1100, en 1300 de notre ère, de la civilisation péruvienne Lambayèque (ou Sicàn)

La chute des Zapotèques à Monte Albán en 750 après J.-C.

La chute de la ville d’El Tajin, capitale des Totonaques, en 1200 et son abandon en 1230

Oppositions de classes sociales chez les Mixtèques

La caída de las antiguas civilizaciones de los Indios de las Americas y su relación con la revolución social

Quelques idées fausses sur les Indiens des Amériques

Luttes de classes dans les sociétés amérindiennes précolombiennes

La disparition des civilisations précolombiennes est-elle un mystère ?

Bibliographie Amérique précolombienne

Messages

  • Les seigneurs des sables : splendeur et déclin des Mochica Carmen Bernand :

    « Huaca del Sol est construite avec des briques d’adobe. On estime qu’il en a fallu cent quarante-trois millions pour ériger cette dernière, alors que l’ensemble consacré à la lune n’en compte que... cinquante millions. Faut-il rappeler que la préparation de l’adobe requiert une très grande quantité d’eau ? Dans un milieu semi-aride, ce gaspillage est encore un signe de la puissance des élites. »

    Et son renversement est un signe que la soumission des exploités est durable mais pas éternelle. Bien sûr, telle n’est pas la conclusion de l’auteur qui, comme bien d’autres, estime que ce n’est pas le peuple mochica qui aurait renversé ses exploiteurs mais que c’est le phénomène climatique El Niño !!!

    Source

    Le climat qui renverse ce que l’auteur elle-même appelle « une société guerrière, marquée par un pouvoir centralisé, fortement stratifiée » !!!

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