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Totem et tabou

Idéologie et vie sociale des premières sociétés

jeudi 15 mai 2008, par Robert Paris

Nous connaissons le chemin parcouru par l’homme de la préhistoire, dans son développement, grâce aux monuments et aux ustensiles qu’il nous a laissés, grâce aux restes de son art, de sa religion et de sa conception de la vie qui nous sont parvenus soit directement, soit transmis par la tradition dans des légendes, des mythes et des contes, grâce enfin à la survivance de sa mentalité que nous pouvons retrouver dans nos propres mœurs et coutumes. En outre, cet homme de la préhistoire est encore, jusqu’à un certain point, notre contemporain ; il existe encore des hommes quo nous considérons comme étant beaucoup plus proches des primitifs que nous ne le sommes et dans lesquels nous voyons les descendants et successeurs directs de ces hommes de jadis. C’est ainsi que nous jugeons les peuples dits sauvages et demi-sauvages, dont la vie psychique acquiert pour nous un intérêt particulier, si nous pouvons prouver qu’elle constitue une phase antérieure, bien conservée, de notre propre développe­ment.

Admettons que cette preuve soit faite ; en établissant alors une comparaison entre la « psychologie des Peuples primitifs, » telle que nous la révèle l’ethnographie, et la psychologie du névrosé, telle qu’elle ressort des recherches psychanalytiques, nous devrons trouver entre l’une et l’autre de nombreux traits communs et être à même de voir sous un jour nouveau, dans l’une et dans l’autre, des faits déjà connus.

Pour des raisons aussi bien extérieures qu’intérieures, je choisis, en vue de cette comparaison, les tribus que les ethnographes nous ont décrites comme étant les plus sauvages, les plus arriérées et les plus misérables : les habitants primitifs du plus jeune des continents, de l’Australie, qui a conservé jusque dans sa faune tant de traits ar­chaïques, introuvables ailleurs.

Les habitants primitifs de l’Australie sont considéré comme une race à part, sans aucune parenté physique ni linguistique avec ses voisins les plus proches, les peuples mélanésiens, polynésiens, malais. Ces habitants ne bâtissent ni maisons, ni cabanes solides, ne cultivent pas le sol, ne possèdent aucun animal domestique, pas même le chien, ignorent jusqu’à l’art de la poterie. Ils se nourrissent exclusivement de la chair de tous les animaux, quels qu’ils soient, qu’ils abattent et des racines qu’ils arrachent à la terré. Ils n’ont ni rois ni chefs, l’assemblée des hommes mûrs décidant des affaires communes. Il n’est pas certain qu’on trouve chez eux des traces d’une religion, sous la forme d’un culte rendu à des Êtres supérieurs. Les tribus de l’intérieur du continent qui, par suite du manque d’eau ont à lutter contre des conditions excessivement dures apparaissent sous tous les rapports plus primitives que les tribus voisines de la côte.

Nous ne pouvons, certes, pas nous attendre a ce que ces misérables cannibales nus observent une morale sexuelle se rapprochant de la nôtre ou imposent à leurs instincts sexuels des restrictions trop sévères. Et, cependant, nous savons qu’ils s’imposent l’interdiction la plus rigoureuse des rapports sexuels incestueux. Il semble même que toute leur organisation sociale soit subordonnée à cette intention ou soit en rapport avec sa réalisation.

A la place de toutes les institutions religieuses et sociales qui leur manquent, on trouve chez les Australiens le système du totémisme. Les tribus australiennes se divi­sent en groupes plus petits, clans, dont chacun porte le nom de son totem. Qu’est-ce qu’un totem ? D’une façon générale, c’est un animal, comestible, inoffensif ou dan­ge­reux et redouté, plus rarement une plante ou une force naturelle (pluie, eau), qui se trouve dans un rapport particulier avec l’ensemble du groupe. Le totem est, en premier lieu, l’ancêtre du groupe ; en deuxième lieu, son esprit protecteur et son bienfaiteur qui envoie des oracles et, alors même qu’il est dangereux pour d’autres, connaît et épargne ses enfants. Ceux qui ont le même totem sont donc soumis à l’obligation sacrée, dont la violation entraîne un châtiment automatique, de ne pas tuer (ou détruire) leur totem, de s’abstenir de manger de sa chair ou d’en jouir autrement. Le caractère toté­mi­que est inhérent, non à tel animal particulier ou à tel autre objet particulier (plante ou force naturelle), mais à tous les. individus appartenant à l’espèce du totem. De temps à autre sont célébrées des fêtes au cours desquelles les associés du groupe totémique reproduisent ou imitent, par des danses cérémoniales, les mouvements et particularités de leur totem.

Le totem se transmet héréditairement, aussi bien en ligne paternelle que mater­nelle. Il est probable que le mode de transmission maternel a été partout le plus primi­tif et n’a été remplacé que plus tard par la transmission paternelle. La subordina­tion au totem forme la base de toutes les obligations sociales de l’Australien ; elle dépasse, d’un côté, la subordination à la tribu et refoule, d’un autre côté, à l’arrière-plan la parenté de sang 2.

Le totem n’est attaché ni au sol ni à telle ou telle localité ; les membres d’un même totem peuvent vivre séparés les uns des autres et en paix avec des individus ayant des totems différents 3.

Et, maintenant, nous devons relever enfin cette particularité du système totémique par laquelle il intéresse plus spécialement le psychanalyste. Presque partout où ce système est en vigueur, il comporte la loi d’après laquelle les membres d’un seul et même totem ne doivent pas avoir entre eux de relations sexuelles, par conséquent ne doivent pas se marier entre eux. C’est la loi de l’exogamie, inséparable du système totémique.

Cette interdiction, rigoureusement observée, est assez remarquable. Elle est sans aucun rapport logique avec ce que nous savons de la nature et des particularités du totem, et l’on ne comprend pas comment elle a pu se glisser dans le totémisme. Aussi ne sommes-nous pas étonnés de voir certains auteurs admettre que l’exogamie n’avait au début et logiquement rien à voir avec le totémisme, mais qu’elle y a été surajoutée à un moment donné, lorsqu’on a reconnu la nécessité d’édicter des restrictions matri­moniales. Quoiqu’il en soit, que le lien exis­tant entre l’exogamie et le totémisme soit profond ou non, le lien existe et apparaît comme très solide.

Essayons de comprendre la signification de cette prohibition à l’aide de quelques considérations.

a) La violation de cette prohibition n’est pas suivie d’un châtiment pour ainsi dire automatique du coupable, comme le sont les violations d’autres prohibitions totémi­ques (par exemple la prohibition de manger de la chair de l’animal-totem), mais est vengée par la tribu tout entière, comme s’il s’agissait de détourner un danger qui menace la collectivité ou une faute qui pèse sur elle. Voici une citation empruntée à Frazer et qui montre avec quelle sévérité les sauvages traitent ces violations, incontes­tablement immorales, même à notre point de vue :

« En Australie, les rapports sexuels avec une personne d’un clan prohibé sont régulièrement punis de mort. Peu importe que la femme fasse partie du même groupe local ou que, faisant partie d’une autre tribu, elle ait été capturée au cours d’une guer­re ; un homme du clan coupable, qui se sert d’elle comme de sa femme, est pourchassé et tué par les hommes de son clan, et la femme partage le même sort. Dans certains cas, cependant, lorsque l’un et l’autre ont réussi à se soustraire aux poursuites pendant quelque temps, l’offense peut être oubliée. Dans les rares cas où le fait dont nous nous occupons se produit chez la tribu Ta-ta-thi, dans la Nouvelle Galles du Sud, l’homme est tué, mais la femme est mordue et criblée de coups de lance, jusqu’à ce qu’elle expire, ou à peu près ; la raison pour laquelle elle n’est pas tuée sur le coup est qu’elle a subi une contrainte. Même en ce qui concerne les amours occasionnelles, les pro­hi­bitions du clan sont strictement observées, toute violation de ces prohibitions « étant considérée comme la chose la plus horrible et étant punie de mort » (Hawitt) 4 ».

b) Comme les mêmes châtiments frappent les aventures amoureuses anodines, c’est-à-dire non suivies de procréation, il est peu probable que les prohibitions soient dictées par des raisons d’ordre pratique.

c) Le totem étant héréditaire et ne subissant aucune modification du fait du maria­ge, il est facile de se rendre compte des conséquences de cette prohibition dans les cas d’hérédité maternelle. Si l’homme, par exemple, fait partie d’un clan ayant pour totem le kangourou et épouse une femme ayant pour totem l’émou, les enfants, garçons et filles, seront tous émou. Un fils issu de ce mariage sera donc dans l’impossibilité d’avoir des rap­ports incestueux avec sa mère et sa sœur, émou comme lui 5.

d) Mais il suffit d’un coup d’œil un peu attentif pour se rendre compte que l’exo­gamie qui fait partie du système totémique a d’autres conséquences et poursuit d’autres buts que la simple prohibition de l’inceste avec la mère et la sœur. Elle défend à l’homme l’union sexuelle avec n’importe quelle autre femme de son groupe, c’est-à-dire avec un certain nombre de femmes auxquelles ne le rattache aucun lien du sang, mais qui sont cependant considérées comme étant ses consanguines. La justification psychologique de cette formidable restriction, qui dépasse tout ce qui peut lui être comparé chez les peuples civilisés, n’est pas évidente au premier abord. On croit seu­le­ment comprendre que dans cette prohibition le rôle du totem (animal), en tant qu’an­cêtre, est pris très au sérieux. Tous ceux qui descendent du même totem sont con­san­guins, forment une famille, au sein de laquelle les degrés de parenté, même les plus éloignés, sont considérés comme un empêchement absolu à l’union sexuelle.

C’est ainsi que ces sauvages semblent obsédés par une crainte excessivement pro­non­cée de l’inceste et possèdent une très grande sensibilité pour les rapports inces­tueux, crainte et possibilité liées à une particularité que nous comprenons mal et qui fait que la parenté du sang est remplacée par la parenté totémique. Il ne faut cepen­dant pas exagérer cette opposition entre les deux genres de parenté et l’on doit tenir bien présent à l’esprit le fait que dans les prohibitions totémiques l’inceste réel ne constitue qu’un cas spécial.

Comment la famille réelle a-t-elle été remplacée par le groupe totémique ? C’est là une énigme dont nous n’aurons peut-être la solution que lorsque nous aurons bien compris la nature du totem. On pourrait certes supposer que la substitution du lien totémique au lien de famille était la seule base possible de la prohibition de l’inceste, puisqu’en accordant à l’individu une certaine liberté sexuelle, dépassant les limites des rapports conjugaux, on s’exposait à le voir violer les liens consanguins et ne pas s’ar­rê­­ter même devant l’inceste. A cela on peut objecter que les coutumes des Austra­liens impliquent des conditions sociales et des circonstances solennelles dans les­quel­les le droit exclusif d’un homme sur une femme, considérée comme son épouse légiti­me, est méconnu.

Le langage de ces tribus australiennes 6 présente une particularité qui est certaine­ment en rapport avec ce fait. Les désignations de parenté notamment dont elles se servent se rapportent aux relations, non entre deux individus, niais entre un individu et un groupe ; d’après l’expression de M. L. H. Morgan, ces désignations forment un système « classificateur ». Ceci signifie qu’un homme appelle père non seulement ce­lui qui l’a engendré, mais aussi tout homme qui, d’après les coutumes de la tribu, aurait pu épouser sa mère et devenir son père ; il appelle mère toute femme qui, sans enfreindre les coutumes de la tribu, aurait pu devenir réellement sa mère ; il appelle frères et sœurs non seulement les enfants de ses véritables parents, mais aussi les enfants de toutes les autres personnes qui auraient pu être ses parents, etc. Les noms de parenté que deux Australiens s’accordent réciproquement ne désignent donc pas nécessairement une parenté de sang, comme c’est le cas dans notre langage à nous ; ils désignent moins des rapports physiques que des rapports sociaux. Nous trouvons quel­­que chose qui se rapproche de ce système classificateur dans nos nursery où les en­fants saluent comme des « oncles » et des « tantes » tous les amis et toutes les amies de leurs parents, ou bien encore nous employons les mêmes désignations dans un sens figuré, lorsque nous parlons de « frères en Apollon », de « sœurs en Christ ».

L’explication de ces expressions qui nous paraissent si bizarres se dégage facile­ment, lorsqu’on les considère comme des survivances et des caractères de l’institution que le révérend L. Fison a appelée « mariage de groupe » et en vertu de laquelle un certain nombre d’hommes exercent des droits conjugaux sur un certain nombre de femmes. Les enfants issus de ce mariage de groupe doivent naturellement se considé­rer les uns les autres comme frères et sœurs, bien qu’ils puissent ne pas avoir tous la même mère, et considérer tous les hommes du groupe comme leurs pères.

Bien que certains auteurs, comme Westermarck, par exemple, dans son Histoire du mariage humain 7, refusent d’admettre les conséquences que d’autres ont tirées des noms désignant les parentés de groupe, les auteurs qui ont le plus étudié les sauvages australiens s’accordent à voir dans les noms de parenté classificateurs une survivance de l’époque où le mariage de groupe était en vigueur. Et d’après Spencer et Gillen 8, une certaine forme de mariage de groupe existerait encore aujourd’hui dans les tribus des Urabunna et des Dieri. Le mariage de groupe a donc précédé chez ces peuples le mariage individuel et n’a pas disparu sans laisser des traces dans le langage et dans les coutumes.

Mais si nous mettons à la place du mariage individuel le mariage de groupe, la rigueur en apparence excessive de la prohibition de l’inceste que nous constatons chez ces peuples devient concevable. L’exogamie totémique, la prohibition de rapports sexuels entre membres du même clan, apparaît comme le moyen le plus propre à em­pê­cher l’inceste de groupe, moyen qui a été établi et adopté à cette époque-là et a survé­cu pendant longtemps aux raisons qui l’ont fait naître.

Si nous croyons ainsi avoir compris les raisons des restrictions matrimoniales existant chez les sauvages de l’Australie, nous devons savoir aussi que les conditions réelles présentent une complexité beaucoup plus grande, à première vue inextricable. Il n’existe notamment que peu de tribus australiennes qui ne connaissent pas d’autre prohibition que celle déterminée par les limites totémiques. La plupart sont organisées de telle sorte qu’elles se subdivisent d’abord en deux sections qu’on appelle classes matri­mo­niales (les phratries des auteurs anglais). Chacune de ces classes est exoga­mi­que et se compose d’un certain nombre de groupes totémiques. Généralement, cha­que classe se subdivise encore en deux sous-classes (sous-phratries), toute la tribu se composant ainsi de quatre sous-classes ; il en résulte que les sous-classes occupent une place intermédiaire entre les phratries et les groupes totémiques.

Le schéma typique, très souvent réalisé, de l’organisation d’une tribu australienne peut donc être représenté ainsi :

Les douze groupes totémiques sont réunis en quatre sous-classes et deux classes. Toutes les subdivisions sont exogamiques 9. La sous-classe c forme une unité exoga­mi­que avec la sous-classe e, la sous-classe d avec la sous-classe f. Le résultat obtenu par ces institutions et, par conséquent, leur tendance ne sont donc pas douteux : elles servent à introduire une nouvelle limitation du choix matrimonial et de la liberté sexuelle. S’il n’y avait que les douze groupes totémiques, chaque membre d’un groupe (à supposer que chaque groupe se compose du même nombre d’individus) pourrait choisir entre les onze douzièmes des femmes de la tribu. L’existence des deux phra­tries limite le nombre des femmes, sur lesquelles peut porter le choix de chacun, à six douziè­mes, c’est-à-dire à la moitié. Un homme appartenant au totem a ne peut épou­ser qu’une femme faisant partie des groupes 1-6. L’introduction des deux sous-classes fait baisser le choix, en le limitant à trois douzièmes, c’est-à-dire au quart : un homme ayant le totem ne peut choisir sa femme que parmi celles ayant le totem 4, 5, 6.

Les rapports historiques existant entre les classes matrimoniales, dont certaines tribus comptent jusqu’à huit, et les groupes totémiques ne sont pas encore élucidés. On voit seulement que ces institutions poursuivent le même but que l’exogamie toté­mique et cherchent même à aller au-delà. Mais alors que l’exogamie totémique pré­sente toutes les apparences d’une institution sacrée, née on ne sait comment, donc d’une coutume, l’institution compliquée des classes matrimoniales, avec leurs subdivi­sions et les conditions qui s’y rattachent, semble être le produit d’une législation consciente et intentionnelle qui se serait proposé de renforcer la prohibition de l’inces­te, proba­ble­ment parce que l’influence totémique avait commencé à faiblir. Et alors que le sys­tè­me totémique forme, ainsi que nous le savons, la base de toutes les autres obliga­tions sociales et restrictions morales de la tribu, le rôle de la phratrie se borne, en géné­ral, à la seule réglementation du choix matrimonial.

Au cours du développement ultérieur du système des classes matrimoniales, appa­raît la tendance à étendre la prohibition qui frappe l’inceste naturel et l’inceste de groupe aux mariages entre parents de groupe plus éloignés ; c’est ainsi d’ailleurs qu’a procédé l’église catholique, lorsqu’elle a étendu la prohibition qui frappait les maria­ges entre frères et sœurs aux mariages entre cousins et, pour justifier sa mesure, a inventé des degrés de parenté spirituels 10.

Nous n’avons aucun intérêt à chercher à nous orienter dans les discussions com­pli­quées et dépourvues de clarté qui se sont poursuivies concernant l’origine et la signification des classes matrimoniales, ainsi que leurs rapports avec le totem. Il nous suffit de relever avec quel grand soin les Australiens et d’autres peuples sauvages veillent à la prohibition de l’inceste 11. Nous pouvons même dire que ces sauvages sont plus scrupuleux sous ce rapport que nous-mêmes. Il est possible qu’étant davantage sujets aux tentations ils aient besoin d’une protection plus efficace contre celles-ci.

Mais la phobie de l’inceste, qui caractérise ces peuples ne s’est pas contentée de créer les institutions que nous venons de décrire et qui nous paraissent dirigées prin­ci­pa­lement contre l’inceste de groupe. Nous devons ajouter toute une série de « coutu­mes » qui, destinées à empêcher les rapports sexuels individuels entre proches parents, à l’instar de ce qui se passe chez nous, sont observées avec une rigueur reli­gieuse. Le but que poursuivent ces coutumes n’est guère douteux. Les auteurs an­glais les désignent sous le nom d’avoidances (ce qui doit être évité). Elles sont répan­dues bien au delà des peuples totémiques australiens. Je prierai seulement ici le lecteur de se contenter de quelques extraits fragmentaires des abondants documents que nous possédons sur ce sujet.

En Mélanésie, ces prohibitions restrictives visent les rapports du fils avec la mère et les sœurs. C’est ainsi qu’à Lepers Island, une des îles des Nouvelles-Hébrides, le garçon, lorsqu’il a atteint un certain âge, quitte le toit maternel et s’en va demeurer dans la maison commune (club) où il couche et prend ses repas. Il peut encore visiter sa maison, pour venir y réclamer sa nourriture ; mais lorsque sa sœur y est présente, il doit s’en aller, sans avoir mangé ; lorsqu’aucune de ses sœurs n’est présente, il doit prendre son repas, assis près de la porte. Si, hors de la maison, frère et sœur se ren­con­trent par hasard, celle-ci doit se sauver ou se cacher. Lorsque le garçon recon­naît sur le sable les traces des pas de l’une de ses sœurs, il ne doit pas les suivre. La même prohibition s’applique à la sœur. Le garçon ne doit même pas prononcer le nom de sa sœur et à doit se garder de prononcer un mot du langage courant, lorsque ce mot fait partie du nom de sa sœur.

Cette prohibition, qui entre en vigueur lors de la cérémonie de la puberté, doit être observée toute la vie durant. L’éloignement entre une mère et son fils augmente avec les années, la réserve observée par la mère étant toutefois plus grande que celle imposée au fils. Lorsqu’elle lui apporte quelque chose à manger, elle ne lui remet pas les aliments directement, mais les dépose devant lui ; elle ne lui parle jamais fami­lièrement, mais lui dit « vous », en s’adressant à lui, au lieu de « tu » (il s’agit, bien entendu, de mots correspondant à notre « vous » et à notre « tu »). Les mêmes cou­tu­mes sont en vigueur en Nouvelle-Calédonie. Lorsqu’un frère et une sœur se rencon­trent, celle-ci se cache dans les buissons, et lui passe, sans se retourner vers elle 12.

Dans la presqu’île des Gazelles, en Nouvelle-Bretagne, une sœur, une fois mariée, ne doit plus adresser la parole à son frère ; au lieu de prononcer son nom, elle doit le désigner par une périphrase 13.

Dans le Nouveau-Mecklembourg, la même prohibition s’applique, non seulement à frère et sœur, mais aussi à cousin et cousine. Ils ne doivent ni se rapprocher l’un de l’autre, ni se donner la main, ni se faire des cadeaux ; lorsqu’ils veulent se parler, ils doivent le faire à la distance de quelques pas. L’inceste avec la sœur est puni parla pendaison 14.

Aux îles Fidji ces prohibitions sont particulièrement rigoureuses ; elles s’appli­quent non seulement aux parents par le sang, mais aussi aux frères et sœurs de grou­pe. Nous sommes d’autant plus étonnés d’apprendre que ces sauvages connaissent des orgies sacrées, au cours desquelles s’accomplissent précisément les unions sexuelles les plus frappées de prohibition. Mais nous pouvons aussi, au lieu de trouver cette contradic­tion étonnante, l’utiliser pour l’explication même de la prohibition 15.

Chez les Battas, de Sumatra, les prohibitions s’étendent à tous les degrés de paren­té un peu proches. Ce serait, par exemple, une très grande inconvenance, si un Batta accompagnait sa sœur dans une réunion. Un frère Batta se sent mal à l’aise dans la société de sa sœur, même en présence d’autres personnes. Lorsqu’un frère entre dans la maison, la sœur ou les sœurs préfèrent s’en retirer. De même un père ne reste­ra jamais en tête-à-tête avec sa fille, ou une mère avec son fils. Le missionnaire hollan­dais, qui relate ces mœurs, ajoute qu’il doit malheureusement les trouver justifiées. Il est admis chez ce peuple qu’un tête-à-tête entre un homme et une femme doit fatale­ment aboutir à une intimité indue, et comme ces gens doivent s’attendre aux pires châ­ti­ments et aux plus graves conséquences, lorsqu’ils se rendent coupables de relations sexuelles avec de proches parents, il est naturel qu’ils songent à se préserver par des prohibitions de ce genre de toute tentation possible 16.

Chez les Barongo de la baie de Delagoa, en Afrique, les précautions les plus sévères sont imposées à l’homme à l’égard de sa belle-sœur, c’est-à-dire de la femme du frère de sa propre femme. Lorsqu’un homme rencontre quelque part cette person­ne, dangereuse pour lui, il l’évite soigneusement. Il n’ose pas manger du même plat qu’elle, il ne lui parle qu’en tremblant, il ne se décide pas à s’approcher de sa cabane et la salue d’une voix à peine perceptible 17.

Chez les Akamba (oit Wakamba) de l’Est africain anglais, il existe une prohibition qu’on s’attendrait à trouver plus fréquemment. Pendant la période comprise entre la puberté et le mariage, une jeune fille doit obstinément éviter son père. Elle se cache, lorsqu’elle le rencontre dans la rue, ne cherche jamais à s’asseoir à côté de lui et se comporte ainsi jusqu’aux fiançailles. À partir du jour où elle est mariée, les rapports entre elle et le père deviennent libres 18.

La prohibition la plus répandue, la plus sévère et la plus intéressante, même pour les peuples civilisés, est celle qui porte sur les relations entre le gendre et la belle-mère. Elle existe chez tous les peuples australiens, mais on la constate aussi chez les peuples mélanésiens, polynésiens et chez les nègres de l’Afrique, partout où l’on re­trou­ve les traces du totémisme et de la parenté de groupe, et peut-être même ailleurs. Chez quelques-uns de ces peuples on trouve des prohibitions analogues concernant les relations anodines entre une femme et son beau-père, mais ces prohibitions sont moins constantes et sérieuses que celles citées plus haut. Dans certains cas isolés, il est recommandé d’éviter les deux beaux-parents.

Comme, en ce qui concerne la prohibition touchant les relations entre belle-mère et gendre, le détail des faits nous intéresse moins que le sens de la prohibition, je vais me borner ici encore à ne citer que quelques exemples.

Aux îles Banko, ces prohibitions sont très sévères et d’une cruelle rigueur. Un gendre et une belle-mère doivent éviter de se trouver à proximité l’un de l’autre. Lors­que, par hasard, ils se rencontrent sur un chemin, la belle-mère doit s’écarter et tour­ner le dos jusqu’à ce que le gendre l’ait dépassée, ou inversement.

À Vanna Lava (Port Patterson), un gendre ne mettra pas les pieds sur la, plage, après le passage de sa, belle-mère, avant que la marée n’ait fait disparaître dans le sable la trace des pas de celle-ci. Ils ne doivent se parler qu’à distance, et il est bien entendu qu’il ne doivent pas prononcer le nom l’un de l’autre 19.

Aux îles Salomon, l’homme une fois marié, ne doit plus voir sa belle-mère ni lui parler. Lorsqu’il la rencontre, il feint de ne pas la connaître et se met à courir aussi vite que possible, pour se cacher 20.

Chez les Zoulous, la coutume exige que l’homme ait honte de sa belle-mère et qu’il fasse tout son possible pour fuir sa société. Il n’entre pas dans la cabane lors­qu’elle s’y trouve et, lorsqu’il la rencontre, l’un l’autre se cache derrière un buisson, l’homme son bouclier devant son visage. Lorsqu’ils ne peuvent s’éviter, la femme, pour se conformer au cérémonial, noue autour de sa tête une touffe d’herbes. Les relations entre eux sont assurées par une tierce personne, ou bien ils se parlent à haute voix lorsqu’ils sont séparés par un obstacle naturel. Aucun d’eux ne doit prononcer le nom de l’autre 21.

Chez les Basoga, tribu nègre habitant dans la région des sources du Nil, un hom­me ne peut parler à sa belle-mère que lorsqu’elle se trouve dans une autre pièce de la maison et qu’il ne la voit pas. Ce peuple a d’ailleurs l’inceste tellement en horreur qu’il le punit même chez les animaux domestiques 22.

Alors que l’intention et la significations des autres prohibitions concernant les rapports entre parents ne soulèvent pas le moindre doute, ces prohibitions étant con­çues par tous les observateurs comme des mesures de Préservation contre l’inceste, il n’en est pas de même des interdictions ayant pour objet les relations avec la belle-mère, certains auteurs ayant donné de cette interdiction une interprétation toute différente. On a, et avec raison, trouvé inconcevable que tous ces peuples mani­festent une si grande crainte devant la tentation personnifiée par une femme âgée qui, sans être la mère de l’homme en question, pourrait cependant le traiter comme son fils 23.

La même objection a été adressée à la conception de Fison qui a attiré l’attention sur les lacunes existant dans certains systèmes de classes matrimoniales et consistant en ce que ces systèmes ne rendent pas théoriquement impossibles les mariages entre gendres et belles-mères, de sorte qu’il a fallu édicter une mesure d’assurance spéciale contre cette possibilité.

Sir John Lubbock (dans son ouvrage : Origin of Civilisation) fait remonter au « rapt » primitif (mariage by capture) cette attitude de la belle-mère à l’égard du gen­dre. « Tant que le rapt de femmes existait réellement, l’exaspération des parents devait être sérieuse. Mais lorsque de cette forme de mariage ne sont plus restés que les sym­bo­les, l’exaspération des parents a été symbolisée à son tour, et la coutume dont nous nous occupons a persisté, après même que son origine eût été oubliée. » Il a été facile à Crawley de montrer que cet essai d’explication ne tient pas compte de l’obser­vation des faits eux-mêmes.

E. B. Tylor pense que l’attitude de la belle-mère à l’égard du gendre n’est qu’une forme de la « non-reconnaissance » (cutting) de ce dernier par la famille de sa femme. L’homme est considéré comme un étranger, jusqu’à la naissance du premier enfant. Même si l’on fait abstraction des cas où la réalisation de cette dernière condition ne fait pas lever la prohibition, l’interprétation de Tylor présente encore un autre défaut : elle n’explique pas qu’on ait eu besoin de fixer d’une manière précise la nature des rela­tions entre gendre et belle-mère ; elle laisse, par conséquent, de côté le facteur sexuel et ne tient pas compte de l’élément sacré de la crainte qui s’exprime dans la prohibi­tion des rapports en question 24.

Une femme zoulou, questionnée sur les raisons de cette interdiction, a donné cette réponse, dictée par un sentiment de délicatesse : « Il ne faut pas qu’il voie les seins qui ont nourri sa femme » 25.

On sait que même chez les peuples civilisés les ports entre gendre et belle-mère constituent un des côtés scabreux de l’organisation familiale. Certes, il n’existe, chez les peuples blancs de l’Europe et l’Amérique, aucune prohibition concernant ces rap­ports, mais beaucoup de conflits et d’ennuis seraient évités si des prohibitions de ce genre existaient encore dans les mœurs, sans que tel ou tel individu se trouve obligé de les édicter pour son usage personnel. Plus d’un Européen sera porté à voir un acte de haute sagesse dans le fait que les peuples sauvages ont, par leurs prohibitions, ren­du d’avance impossible une entente entre ces deux personnes si étroitement appa­rentées. Il est à peu près certain qu’il existe, dans situation psychologique du gendre et de la belle-mère, quelque chose qui favorise l’hostilité entre eux et rend difficile leur vie en commun. Le fait que chez les peuples civilisés les rapports entre gendre et belle-mère constituent généralement l’objet préféré de plaisanteries et de railleries serait une preuve qu’il entre, dans leurs relations affectives, des éléments d’opposition tranchée. A mon avis, il s’agit là de relations « ambivalentes », se composant à la fois d’éléments affectueux et d’éléments hostiles.

Certains de ces sentiments sont faciles à expliquer de la part de la belle-mère, il y a le regret de se séparer de sa fille, la méfiance à l’égard de l’étranger auquel celle-ci est livrée, la tendance à imposer, malgré tout, son autorité, comme elle le l’ait dans sa propre maison. De la part du gendre, il y a la décision de ne plus se soumettre à aucu­ne volonté étrangère, la jalousie à l’égard des personnes qui, avant lui, avaient joui de la tendresse de sa femme et, last not least, le désir de ne pas se laisser troubler dans son illusion qui lui fait accorder une valeur exagérée aux qualités de sa jeune femme. Dans la plupart des cas, c’est la belle-mère qui vient dissiper cette illusion, car tout en lui rappelant sa femme par de nombreux traits qu’elle a en commun avec elle, elle manque de cette beauté, de cette jeunesse et de cette fraîcheur d’âme qui lui font tant apprécier la fille.

La connaissance de sentiments cachés (lue nous devons à l’examen psychanaly­tique des hommes nous permet d’ajouter d’autres motifs à ceux que nous venons d’énumérer. Si les besoins psycho-sexuels de la femme trouvent leur satisfaction dans le mariage et dans la vie de famille, elle n’en est pas moins constamment menacée du danger d’insatisfaction provenant (le l’arrêt prématuré des relations conjugales et du vide affectif qui peut en résulter. La mère qui vieillit se préserve de ce danger par l’identification avec ses enfants, par la part active qu’elle prend à leur vie affective. On dit que les parents rajeunissent auprès de leurs enfants ; c’est là en effet un des avantages les plus précieux que ceux-là doivent à Ceux-ci. La femme stérile se trouve ainsi privée de l’une des meilleures consolations et compensations pour les privations auxquelles elle doit se résigner dans sa vie conjugale. Cette identification affective avec la fille va chez certaines mères jusqu’à partager avec celle-ci l’amour qu’elle éprou­ve pour son mari, ce qui, dans les cas les plus aigus, aboutit, à la suite de la violente résistance psychique que la mère oppose à ce sentiment, à des formes de névrose graves. Toutefois, on observe fréquemment chez la belle-mère l’existence d’un sentiment amoureux à l’égard du gendre, sentiment qui, soit sous sa forme réelle, soit sous la forme d’une tendance oppo­sée, participe à la lutte que se livrent les diffé­rentes forces psychiques de cette femme. Il arrive fréquemment que c’est précisément l’élément haineux, sadique qu’elle manifeste à l’égard du gendre, afin de réprimer d’autant plus sûrement ce qu’elle éprouve pour lui de tendresse condamnable.

Chez l’homme, l’attitude à l’égard de la belle-mère se complique de sentiments ana­lo­gues, mais provenant d’autres sources. Le chemin du choix de l’objet l’a conduit, de l’image de sa mère et, peut-être, aussi de celle de sa sœur, à son objet actuel ; fuyant toute pensée et intention incestueuses, il transfère son amour, ses préférences, si l’on veut, des deux personnes chères à son enfance, à une personne étrangère, faite à leur image. C’est la belle-mère qui vient prendre la place de sa propre mère et de la mère de sa sœur ; il sent naître et grandir en lui la tendance à se replonger dans l’époque de ses premiers choix amoureux ; mais tout en lui s’oppose à cette tendance. L’horreur qu’il a de l’inceste exige qu’il ne se souvienne pas de la généalogie de son choix amou­reux ; l’existence réelle et actuelle de la belle-mère, qu’il n’a pas connue depuis son enfance et dont il n’a par conséquent pas gardé l’image dans son inconscient, lui rend la résistance facile. Une certaine nuance d’irritation et de haine que nous discer­nons dans la complexité de ses sentiments nous permet de supposer que la belle-mère représente réellement pour le gendre une tentation incestueuse ; et, d’autre part, il arrive fréquemment qu’un homme tombe amoureux de sa future belle-mère, avant de transférer son inclination à la fille.

Rien, à mon avis, ne nous empêche d’admettre que c’est ce l’acteur incestueux qui a motivé chez les sauvages les prohibitions portant sur les relations entre gendre et belle-mère. C’est ainsi qu’en ce qui concerne ces prohibitions, si rigoureusement obser­vées par ces peuples primitifs, nous préférerions l’opinion exprimée en premier lieu par Fison, opinion qui ne voit dans les prescriptions dont il s’agit qu’une protec­tion contre l’inceste possible. On pourrait en dire autant de toutes les autres prohibi­tions portant sur les relations entre parents de sang ou par alliance. Il n’y aurait que cette seule différence que, dans le premier cas, l’inceste étant direct, l’intention préser­vatrice pourrait être consciente, tandis que dans le deuxième, qui comprend égale­ment les relations de gendre à belle-mère, l’inceste ne serait qu’une tentation imaginai­re, aux phases intermédiaires inconscientes.

Dans ce qui précède nous n’avons guère eu l’occasion de montrer en quoi l’appli­ca­tion de la méthode psychanalytique modifie notre manière d’envisager les faits de la psychologie des peuples : c’est que la phobie de l’inceste, qui existe chez les sauvages, est depuis longtemps connue comme telle et n’a pas besoin d’interprétation ultérieure. Tout ce que nous pouvons ajouter à la conception régnante, c’est que la crainte de l’inceste constitue un trait essentiellement infantile et s’accorde d’une façon étonnante avec ce que nous savons de la vie psychique des névrosés. La psychanalyse nous a montré que le premier objet sur lequel se porte le choix sexuel du jeune garçon est de nature incestueuse, condamnable, puisque cet objet est représenté par la mère ou par la sœur, et elle nous a montré aussi la voie que le garçon suit, à mesure qu’il grandit, pour se soustraire a l’attrait de l’inceste. Or, chez le névrosé nous trouvons régulière­ment des restes considérables d’infantilisme psychique, soit parce qu’il n’a pas été capable de s’affranchir des conditions infantiles de la psycho-sexualité, soit parce qu’il y est retourné (arrêt de développement ou régression). C’est pourquoi les fixations incestueuses de la libido jouent de nouveau ou jouent encore le rôle princi­pal dans sa vie psychique inconsciente. Nous sommes ainsi amenés à voir dans l’atti­tu­de incestu­euse à l’égard des parents le complexe central de la névrose. Cette con­cep­tion du rôle de l’inceste dans la névrose se heurte naturellement à l’incrédulité géné­rale des hom­mes adultes et normaux ; la même fin de non-recevoir sera, par exem­­ple, opposée aux travaux de Otto Rank qui ont montré sur une vaste échelle le rôle que l’inceste joue dans les créations poétiques et quelle richesse de matériaux ses innombrables varia­tions, et déformations offrent à la poésie. Nous sommes obligés d’admettre que cette résistance découle surtout de la profonde aversion que l’homme éprouve pour ses dé­sirs incestueux d’autrefois, aujourd’hui complètement et profondé­ment refoulés. Aussi n’est-il pas sans importance de pouvoir montrer que les peuples sauvages éprouvent encore d’une façon dangereuse, au point de se voir obligés de se défendre contre eux par des mesures excessivement rigoureuses, les désirs incestueux destinés à se perdre un jour dans l’inconscient.

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