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7-10 La sociologie de Claude Lévi-Strauss ou anthropologie structurale

mercredi 4 novembre 2009, par Robert Paris

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Claude Lévi-Strauss (1958)

Anthropologie structurale

LA NOTION DE STRUCTURE
EN ETHNOLOGIE

La notion de structure sociale évoque des problèmes trop vastes et trop vagues pour qu’on puisse les traiter dans les limites d’un article. Le programme de ce symposium l’admet implicitement : des thèmes voisins du nôtre ont été assignés à d’autres participants. Ainsi, des études telles que celles consacrées au style, aux catégories universelles de la culture, à la linguistique structurale, se rapportent de très près à notre sujet, et le lecteur du présent travail devra aussi s’y référer.

En outre, quand on parle de structure sociale, on s’attache surtout aux aspects formels des phénomènes sociaux ; on sort donc du domaine de la description pour considérer des notions et des catégories qui n’appartiennent pas en propre à l’ethnologie, mais qu’elle voudrait utiliser, à l’instar d’autres disciplines scientifiques qui, depuis longtemps, traitent certains de leurs problèmes comme nous souhaiterions faire des nôtres. Sans doute, ces problèmes diffèrent-ils quant au contenu, mais nous avons, à tort ou à raison, le sentiment que nos propres problèmes pourraient en être rapprochés, à condition d’adopter le même type de formalisation. L’intérêt des recherches structurales est, précisément, qu’elles nous donnent l’espérance que des sciences, plus avancées que nous sous ce rapport, peuvent nous fournir des modèles de méthodes et de solutions.

Que faut-il donc entendre par structure sociale ? En quoi les études qui s’y rapportent diffèrent-elles de toutes les descriptions, analyses et théories visant les relations sociales, comprises au sens large, et qui se confondent avec l’objet même de l’anthropologie ? Les auteurs ne sont guère d’accord sur le contenu de cette notion ; certains même, parmi ceux qui ont contribué à l’introduire, paraissent aujourd’hui le regretter. Ainsi Kroeber, dans la deuxième édition de son Anthropology :

« La notion de "structure" n’est probablement rien d’autre qu’une concession à la mode : un terme au sens bien défini exerce tout à coup un singulier attrait pendant une dizaine d’années — ainsi le mot "aérodynamique" —, on se met à l’employer à tort et à travers, parce qu’il sonne agréablement à l’oreille. Sans doute, une personnalité typique peut être considérée du point de vue de sa structure. Mais la même chose est vraie d’un agencement physiologique, d’un organisme, d’une société quelconque ou d’une culture, d’un cristal ou d’une machine. N’importe quoi — à la condition de n’être pas complètement amorphe — possède une structure. Ainsi semble-t-il que le terme "structure" n’ajoute absolument rien à ce que nous avons dans l’esprit quand nous l’employons, sinon un agréable piquant (Kroeber, 1948, p. 325). » (...)

Ce texte vise directement la prétendue « structure de la personnalité de base » ; mais il implique une critique plus radicale, qui met en cause l’usage même de la notion de structure en anthropologie.

Une définition n’est pas seulement indispensable en raison des incertitudes actuelles. D’un point de vue structuraliste qu’il faut bien adopter ici, ne fût-ce que pour que le problème existe, la notion de structure ne relève pas d’une définition inductive, fondée sur la comparaison et l’abstraction des éléments communs à toutes les acceptations du terme tel qu’il est généralement employé. Ou le terme de structure sociale n’a pas de sens, ou ce sens même a déjà une structure. C’est cette structure de la notion qu’il faut d’abord saisir, si on ne veut pas se laisser submerger par un fastidieux inventaire de tous les livres et articles portant sur les relations sociales : leur liste seule excéderait les limites de ce chapitre. Une seconde étape permettra de comparer notre définition provisoire avec celles que d’autres auteurs semblent admettre, de façon explicite ou implicite. Nous procéderons à cet examen dans la section consacrée à la parenté, puisque c’est le principal contexte dans lequel la notion de structure apparaît. En fait, les ethnologues se sont presque exclusivement occupés de structure à propos des problèmes de parenté.

I. Définition et problèmes de méthode.

Le principe fondamental est que la notion de structure sociale ne se rapporte pas à la réalité empirique, mais aux modèles construits d’après celle-ci. Ainsi apparaît la différence entre deux notions si voisines qu’on les a souvent confondues, je veux dire celle de structure sociale et celle de relations sociales Les relations sociales sont la matière première employée pour la construction des modèles qui rendent manifeste la structure sociale elle-même. En aucun cas celle-ci ne saurait donc être ramenée à l’ensemble des relations sociales, observables dans une société donnée. Les recherches de structure ne revendiquent pas un domaine propre, parmi les faits de société ; elles constituent plutôt une méthode susceptible d’être appliquée à divers problèmes ethnologiques, et elles s’apparentent à des formes d’analyse structurale en usage dans des domaines différents.

Il s’agit alors de savoir en quoi consistent ces modèles qui sont l’objet propre des analyses structurales. Le problème ne relève pas de l’ethnologie, mais de l’épistémologie, car les définitions suivantes n’empruntent rien à la matière première de nos travaux. Nous pensons en effet que pour mériter le nom de structure, des modèles doivent exclusivement satisfaire à quatre conditions.

En premier lieu, une structure offre un caractère de système. Elle consiste en éléments tels qu’une modification quelconque de l’un d’eux entraîne une modification de tous les autres.

En second lieu, tout modèle appartient à un groupe de transformations dont chacune correspond à un modèle de même famille, si bien que l’ensemble de ces transformations constitue un groupe de modèles.

Troisièmement, les propriétés indiquées ci-dessus permettent de prévoir de quelle façon réagira le modèle, en cas de modification d’un de ses éléments.

Enfin, le modèle doit être construit de telle façon que son fonctionnement puisse rendre compte de tous les faits observés. (...)

a) Observation et expérimentation.

Ces deux niveaux seront toujours distingués. L’observation des faits, et l’élaboration des méthodes permettant de les utiliser pour construire des modèles, ne se confondent jamais avec l’expérimentation au moyen des modèles eux-mêmes. Par « expérimentation sur les modèles », j’entends l’ensemble des procédés permettant de savoir comment un modèle donné réagit aux modifications, ou de comparer entre eux des modèles de même type ou de types différents. Cette distinction est indispensable pour dissiper certains malentendus. N’y a-t-il pas contradiction entre l’observation ethnographique, toujours concrète et individualisée, et les recherches structurales auxquelles on prête souvent un caractère abstrait et formel pour contester qu’on puisse passer de la première aux secondes ? La contradiction s’évanouit dès qu’on a compris que ces caractères antithétiques relèvent de deux niveaux différents ou, plus exactement, correspondent à deux étapes de la recherche. Au niveau de l’observation, la règle principale — on pourrait même dire la seule — est que tous les faits doivent être exactement observés et décrits, sans permettre aux préjugés théoriques d’altérer leur nature et leur importance. Cette règle en implique une autre, par voie de conséquence : les faits doivent être étudiés en eux-mêmes (quel processus concrets les ont amenés à l’existence ?) et aussi en relation avec l’ensemble (c’est-à-dire que tout changement observé en un point sera rapporté aux circonstances globales de son apparition).

Cette règle et ses corollaires ont été clairement formulés par K. Goldstein (1951, pp. 18-25) en termes de recherches psycho-physiologiques ; ils sont aussi appli­cables à d’autres formes d’analyse structurale. Du point de vue qui est le nôtre, ils permettent de comprendre qu’il n’y a pas contradiction, mais intime corrélation, entre le souci du détail concret propre à la description ethnographique, et la validité et la généralité que nous revendiquons pour le modèle construit d’après celle-ci. r On peut en effet concevoir beaucoup de modèles différents mais commodes, à divers titres, pour décrire et expliquer un groupe de phénomènes. Néanmoins, le meilleur sera toujours le modèle vrai, c’est-à-dire celui qui, tout en étant le plus simple, répondra à la double condition de n’utiliser d’autres faits que ceux considérés, et de rendre compte de tous. La première tâche est donc de savoir quels sont ces faits.

b) Conscience et inconscient.

Les modèles peuvent être conscients ou inconscients, selon le niveau où ils fonctionnent. Boas, à qui revient le mérite de cette distinction, a montré qu’un groupe de phénomènes se prête d’autant mieux à l’analyse structurale que la société ne dispose pas d’un modèle conscient pour l’interpréter ou le justifier (1911, p. 67). On sera peut-être surpris de voir citer Boas comme un des maîtres de la pensée structuraliste ; certains lui attribueraient plutôt un rôle opposé. J’ai essayé de montrer dans un autre travail (…) que l’échec de Boas, au point de vue structuraliste, ne s’explique pas par l’incompréhension ou l’hostilité. Dans l’histoire du structuralisme, Boas a plutôt été un précurseur. Mais il a prétendu imposer aux recherches structurales des conditions trop rigoureuses. Certaines ont pu être assimilées par ses successeurs, mais d’autres étaient si sévères et difficiles à satisfaire qu’elles eussent stérilisé le progrès scientifique dans quelque domaine que ce soit.

Un modèle quelconque peut être conscient ou inconscient, cette condition n’affecte pas sa nature. Il est seulement possible de dire qu’une structure superficiellement enfouie dans l’inconscient rend plus probable l’existence d’un modèle qui la masque, comme un écran, à la conscience collective. En effet, les modèles conscients — qu’on appelle communément des « normes » — comptent parmi les plus pauvres qui soient, en raison de leur fonction qui est de perpétuer les croyances et les usages, plutôt que d’en exposer les ressorts. Ainsi, l’analyse structurale se heurte à une situation paradoxale, bien connue du linguiste : plus nette est la structure apparente, plus difficile devient-il de saisir la structure profonde, à cause des modèles conscients et déformés qui s’interposent comme des obstacles entre l’observateur et son objet.

L’ethnologue devra donc toujours distinguer entre les deux situations où il risque de se trouver placé. Il peut avoir à construire un modèle correspondant à des phénomènes dont le caractère de système n’a pas été perçu par la société qu’il étudie. C’est la situation la plus simple, dont Boas a souligné qu’elle offrait aussi le terrain le plus favorable à la recherche ethnologique. Dans d’autres cas, cependant, l’ethnologue a affaire, non seulement à des matériaux bruts, mais aussi à des modèles déjà construits par la culture considérée, sous forme d’interprétations. J’ai déjà noté que de tels problèmes peuvent être très imparfaits, mais ce n’est pas toujours le cas. Beaucoup de cultures dites primitives ont élaboré des modèles — de leurs règles de mariage, par exemple — meilleurs que ceux des ethnologues professionnels (…). Il y a donc deux raisons pour respecter ces modèles « faits à la maison ». D’abord, ils peuvent être bons, ou, tout au moins, offrir une voie d’accès à la structure ; chaque culture a ses théoriciens, dont l’œuvre mérite autant d’attention que celle que l’ethnologue accorde à des collègues. Ensuite, même si les modèles sont tendancieux ou inexacts, la tendance et le genre d’erreurs qu’ils recèlent font partie intégrante des faits à étudier ; et peut-être comptent-ils parmi les plus significatifs. Mais, quand il donne toute son attention à ces modèles, produits de la culture indigène, l’ethnologue n’aura garde d’oublier que des normes culturelles ne sont pas automatiquement des structures. Ce sont plutôt d’importantes pièces à l’appui pour aider à découvrir celles-ci, tantôt documents bruts, tantôt contributions théoriques, comparables à celles apportées par l’ethnologue lui-même.

Durkheim et Mauss ont bien compris que les représentations conscientes des indigènes méritent toujours plus d’attention que les théories issues — comme représentations conscientes également — de la société de l’observateur. Même inadéquates, les premières offrent une meilleure voie d’accès aux catégories (inconscientes) de la pensée indigène, dans la mesure où elles leur sont structuralement liées. Sans sous-estimer l’importance et le caractère novateur de cette démarche, on doit pourtant reconnaître que Durkheim et Mauss ne l’ont pas poursuivie aussi loin qu’on l’eût souhaité. Car les représentations conscientes des indigènes, tout intéressantes qu’elles soient pour la raison qui vient d’être indiquée, peuvent rester objectivement aussi distantes de la réalité inconsciente que les autres. (...)

c) Structure et mesure.

On dit parfois que la notion de structure permet d’introduire la mesure en ethnologie. Cette idée a pu résulter de l’emploi de formules mathématiques — ou d’apparence telle — dans des ouvrages ethnologiques récents. Il est sans doute exact que, dans quelques cas, on soit parvenu à assigner des valeurs numériques à des constantes. Ainsi, les recherches de Kroeber sur l’évolution de la mode féminine, qui marquent une date dans l’histoire des études structuralistes (Richardson et Kroeber, 1940) ; et quelques autres, dont nous parlerons plus loin.

Pourtant, il n’existe aucune connexion nécessaire entre la notion de mesure et celle de structure. Les recherches structurales sont apparues dans les sciences sociales comme une conséquence indirecte de certains développements des mathématiques modernes, qui ont donné une importance croissante au point de vue qualitatif, s’écartant ainsi de la perspective quantitative des mathématiques traditionnelles. Dans divers domaines : logique mathématique, théorie des ensembles, théorie des groupes et topologie, on s’est aperçu que des problèmes qui ne comportaient pas de solution métrique pouvaient tout de même être soumis à un traitement rigoureux. (…)

d) Modèles mécaniques et modèles statistiques.

Une dernière distinction se rapporte à l’échelle du modèle comparée à celle des phénomènes. Un modèle dont les éléments constitutifs sont à l’échelle des phénomènes sera appelé « modèle mécanique », et « modèle statistique » celui dont les éléments sont à une échelle différente. Prenons comme exemple les lois du mariage. Dans les sociétés primitives, ces lois peuvent être représentées sous forme de modèles où figurent les individus, effectivement distribués en classes de parenté ou en clans ; de tels modèles sont mécaniques. Dans notre société, il est impossible de recourir à ce genre de modèle, car les divers types de mariage y dépendent de facteurs plus généraux : taille des groupes primaires et secondaires dont relèvent les conjoints possibles ; fluidité sociale, quantité d’information, etc. Pour parvenir à déterminer les constantes de notre système matrimonial (ce qui n’a pas encore été tenté), on devrait donc définir des moyennes et des seuils : le modèle approprié serait de nature statistique.

Entre les deux formes il existe sans doute des intermédiaires. Ainsi, certaines sociétés (dont la nôtre) utilisent un modèle mécanique pour définir les degrés prohibés, et s’en remettent à un modèle statistique en ce qui concerne les mariages possibles. D’ailleurs, les mêmes phénomènes peuvent relever des deux types de modèles, selon la manière dont on les groupe entre eux ou avec d’autres phénomènes. Un système qui favorise le mariage des cousins croisés, mais où cette formule idéale correspond à une certaine proportion seulement des unions recensées, demande, pour être expliqué de façon satisfaisante, à la fois un modèle mécanique et un modèle statistique.

Les recherches structurales n’offriraient guère d’intérêt si les structures n’étaient traduisibles en modèles dont les propriétés formelles sont comparables, indépendamment des éléments qui les composent. Le structuraliste a pour tâche d’identifier et d’isoler les niveaux de réalité qui ont une valeur stratégique du point de vue où il se place, autrement dit, qui peuvent être représentés sous forme de modèles, quelle que soi la nature de ces derniers.

Parfois aussi, on peut envisager simultanément les mêmes données en se plaçant à des points de vue différents qui ont tous une valeur stratégique, bien que les modèles correspondant à chacun soient tantôt mécaniques, tantôt statistiques. Les sciences exactes et naturelles connaissent des situations de ce type ; ainsi, la théorie de corps en mouvement relève de la mécanique si les corps physiques considérés sont peu nombreux. Mais, quand ce nombre s’accroît au-delà d’un certain ordre de grandeur, il faut recourir à la thermodynamique, c’est-à-dire substituer un modèle statistique au modèle mécanique antérieur ; et cela, bien que la nature des phénomènes soit demeurée la même dans les deux cas.

Des situations de même genre se présentent souvent dans les sciences humaines et sociales. Soit, par exemple, le suicide : on peut l’envisager dans deux perspectives différentes. L’analyse de cas individuels permet de construire ce qu’on pourrait appeler des modèles mécaniques de suicide, dont les éléments sont fournis par le type de personnalité de la victime, son histoire individuelle, les propriétés des groupes primaire et secondaire dont elle fut membre, et ainsi de suite ; mais on peut aussi construire des modèles statistiques, fondés sur la fréquence des suicides pendant une période donnée, dans une ou plusieurs sociétés, ou encore dans des groupes primaires et secondaires de types différents, etc. Quelle que soit la perspective choisie, on aura ainsi isolé des niveaux où l’étude structurale du suicide est significative, autrement dit, autorisant la construction de modèles dont la comparaison soit possible : 1° pour plusieurs formes de suicides ; 2° pour des sociétés différentes, et 3° pour divers types de phénomènes sociaux.

Le progrès scientifique ne consiste donc pas seulement dans la découverte de constantes caractéristiques pour chaque niveau, mais aussi dans l’isolement de niveaux non encore repérés, où l’étude de phénomènes donnés conserve une valeur stratégique. C’est ce qui s’est produit avec l’avènement de la psychanalyse qui a découvert le moyen d’établir des modèles correspondant à un nouveau champ d’investigation : la vie psychique du patient prise dans sa totalité.

Ces considérations aideront à mieux comprendre la dualité (on serait tenté de dire : la contradiction) qui caractérise les études structurales. On se propose d’abord d’isoler des niveaux significatifs, ce qui implique le découpage des phénomènes. De ce point de vue, chaque type d’études structurales prétend à l’autonomie, à l’indépendance par rapport à tous les autres et aussi par rapport à l’investigation des mêmes faits, mais fondée sur d’autres méthodes. Pourtant, nos recherches n’ont qu’un intérêt, qui est de construire des modèles dont les propriétés formelles sont, du point de vue de la comparaison et de l’explication, réductibles aux propriétés d’autres modèles relevant eux-mêmes de niveaux stratégiques différents. Ainsi pouvons-nous espérer abattre les cloisons entre les disciplines voisines et promouvoir entre elles une véritable collaboration.

Un exemple illustrera ce point. Le problème des rapports entre l’histoire et l’ethnologie a fait récemment l’objet de nombreuses discussions. En dépit des critiques qui m’ont été adressées (…), je maintiens que la notion de temps n’est pas au centre du débat. Mais, si ce n’est pas une perspective temporelle propre à l’histoire qui distingue les deux disciplines, en quoi consiste leur diffé­rence ? Pour répondre, il faut se reporter aux remarques présentées dans le précédent paragraphe et replacer l’histoire et l’ethnologie au sein des autres sciences sociales.

L’ethnographie et l’histoire diffèrent d’abord de l’ethnologie et de la sociologie, pour autant que les deux premières sont fondées sur la collecte et l’organisation des documents, tandis que les deux autres étudient plutôt les modèles construits à partir, et au moyen, de ces documents.

En second lieu, l’ethnographie et l’ethnologie correspondent respectivement à deux étapes d’une même recherche qui aboutit en fin de compte à des modèles mécaniques, tandis que l’histoire (et les autres disciplines généralement classées comme ses « auxiliaires ») aboutit à des modèles statistiques. Les relations entre nos quatre disciplines peuvent donc être ramenées à deux oppositions, l’une entre observation empirique et construction de modèles (comme caractérisant la démarche initiale), l’autre entre le caractère statistique ou mécanique des modèles, envisagés au point d’arrivée. Soit, en affectant arbitrairement le signe + au premier terme, et le signe — au second terme de chaque opposition :

Histoire

Sociologie

Ethnographie

Ethnologie

observation empirique / construction de modèles

+

 

+

 

modèles mécaniques / modèles statistiques

 

 

+

+

On comprend ainsi comment il se fait que les sciences sociales, qui toutes doivent nécessairement adopter une perspective temporelle, se distinguent par l’emploi de deux catégories de temps.

L’ethnologie fait appel à un temps « mécanique », c’est-à-dire réversible et non cumulatif : le modèle d’un système de parenté patrilinéaire ne contient rien qui indique s’il a toujours été patrilinéaire, ou s’il a été précédé par un système matrilinéaire, ou encore par toute une série d’oscillations entre les deux formes. Par contre, le temps de l’histoire est « statistique » : il n’est pas réversible et comporte une orientation déterminée. Une évolution qui ramènerait la société italienne contemporaine à la République romaine serait aussi inconcevable que la réversibilité des processus qui relèvent de la deuxième loi de la thermodynamique.

La discussion qui précède précise la distinction, proposée par Firth, entre la notion de structure sociale où le temps ne joue aucun rôle, et celle d’organisation sociale où il est appelé à intervenir (1951, p. 40). De même pour le débat prolongé entre les tenants de l’anti-évolutionnisme boasien et M. Leslie White (1949). Boas et son école se sont surtout occupés de modèles mécaniques où la notion d’évolution n’a pas de valeur heuristique. Cette notion prend un sens plein sur le terrain de l’histoire et de la sociologie, mais à la condition que les éléments auxquels elle se rapporte ne soient pas formulés en termes d’une typologie « culturaliste » qui utilise exclusivement des modèles mécaniques. Il faudrait, au contraire, saisir ces éléments à un niveau assez profond pour être sûr qu’ils resteront identiques, quel que soit le contexte culturel où ils interviennent (comme les gènes, qui sont des éléments identiques susceptibles d’apparaître en combinaisons différentes, desquelles résultent les types raciaux, c’est-à-dire des modèles statistiques). Il est enfin nécessaire qu’on puisse dresser de longues séries statistiques. Boas et son école ont donc raison de récuser la notion d’évolution : elle n’est pas signifiante au niveau des modèles mécaniques qu’ils utilisent exclusivement, et M. White a tort de prétendre réintégrer la notion d’évolution, puisqu’il persiste à utiliser des modèles du même type que ses adversaires. Les évolutionnistes rétabliraient plus aisément leur position s’ils consentaient à substituer aux modèles mécaniques des modèles statistiques, c’est-à-dire dont les éléments soient indépendants de leur combinaison et restent identiques à travers une période de temps suffisamment longue. (...)

La distinction entre modèle mécanique et modèle statistique offre un autre intérêt : elle permet d’éclairer le rôle de la méthode comparative dans les recherches structurales. Radcliffe-Brown et Lowie ont tenu l’un et l’autre à surestimer ce rôle. Ainsi, le premier écrit (1952, p. 14) :

« On tient généralement la sociologie théorique pour une science inductive. L’induction est, en effet, le procédé logique qui permet d’inférer des propositions générales de la considération d’exemples spéciaux. Le professeur Evans-Pritchard... paraît parfois penser que la méthode logique d’induction, employant la compa­raison, la classification et la généralisation, ne peut être appliquée aux phénomènes humains et à la vie sociale... Quant à moi, je tiens que l’ethnologie se fonde sur l’étude comparative et systématique d’un grand nombre de sociétés. »

Dans une étude antérieure, Radcliffe-Brown disait à propos de la religion (1945, p. 1) :

« La méthode expérimentale appliquée à la sociologie religieuse... enseigne que nous devons mettre nos hypothèses à l’épreuve d’un nombre suffisant de religions différentes ou de cultes religieux particuliers, confrontés chacun avec la société particulière où ils se manifestent. Une telle entreprise dépasse les capacités d’un chercheur unique, elle suppose la collaboration de plusieurs. »

Dans le même esprit, Lowie commence par souligner (1948 a, p. 38) que « la littérature ethnologique est remplie de prétendues corrélations qui n’ont aucune base expérimentale » ; et il insiste sur la nécessité « d’élargir la base inductive » de nos généralisations (1848 a, p. 68). Ainsi ces deux auteurs sont d’accord pour donner un fondement inductif à l’ethnologie ; en quoi ils se séparent non seulement de Durkheim : « Quand une loi a été prouvée par une expérience bien faite, cette preuve est valable universellement » (1912, p. 593), mais aussi de Goldstein. Comme on l’a déjà noté, celui-ci a formulé de la façon la plus lucide ce qu’on pourrait appeler « les règles de la méthode structuraliste » en se plaçant à un point de vue assez général pour les rendre valides, au-delà du domaine limité pour lequel il les avait d’abord conçues. Goldstein remarque que la nécessité de procéder à une étude détaillée de chaque cas entraîne, comme conséquence, la restriction du nombre des cas qu’on pourra considérer de cette façon. Ne risque-t-on pas alors de s’attacher à des cas trop spéciaux pour qu’on puisse formuler, sur une base aussi restreinte, des conclusions valables pour tous les autres ? Il répond (1951, p. 25) : « Cette objection méconnaît complètement la situation réelle : tout d’abord, l’accumulation de faits — même très nombreux — ne sert de rien s’ils ont été établis d’une manière imparfaite, elle ne conduit jamais à la connaissance des choses telles qu’elles se passent actuellement... Il faut choisir des cas tels qu’ils permettent de porter des jugements décisifs. Mais alors ce qu’on aura établi dans un cas vaudra aussi pour les autres. »

Peu d’ethnologues accepteraient d’endosser cette conclusion. Pourtant, la recherche structuraliste serait vaine si l’on n’était pleinement conscient du dilemme de Goldstein : soit étudier des cas nombreux, d’une façon toujours superficielle et sans grand résultat ; soit se limiter résolument à l’analyse approfondie d’un petit nombre de cas, et prouver ainsi qu’en fin de compte, une expérience bien faite vaut une démonstration.

Comment expliquer cet attachement de si nombreux ethnologues à la méthode comparative ? N’est-ce pas, ici encore, qu’ils confondent les techniques propres à construire et à étudier les modèles mécaniques et statistiques ? La position de Durkheim et de Goldstein est inexpugnable en ce qui concerne les premiers : par contre, il est évident qu’on ne peut fabriquer un modèle statistique sans statistiques, autrement dit, sans accumu­ler des faits très nombreux. Mais, même dans ce cas, la méthode ne peut être appelée comparative : les faits rassemblés n’auront de valeur que s’ils relèvent tous d’un même type. On revient toujours à la même option, qui consiste à étudier à fond un cas, et la seule différence tient au mode de découpage du « cas », dont les éléments constitutifs seront (selon le patron adopté) à l’échelle du modèle projeté, ou à une échelle différente.

Nous avons essayé jusqu’à présent d’élucider quelques questions de principe, qui concernent la nature même de la notion de structure sociale. Il devient ainsi plus facile de procéder à un inventaire des principaux types de recherche, et de discuter quelques résultats.

II. Morphologie sociale ou structures de groupe.

Dans cette deuxième section, le terme « groupe » ne désigne pas le groupe social, mais plus généralement, la manière dont les phénomènes sont groupés entre eux. D’autre part, il résulte de la première section de ce travail que les recherches structurales ont pour objet l’étude des relations sociales à l’aide de modèles.

Or, il est impossible de concevoir les relations sociales en dehors d’un milieu commun qui leur serve de système de référence. L’espace et le temps sont les deux systèmes de référence qui permettent de penser les relations sociales, ensemble ou isolément. Ces dimensions d’espace et de temps ne se confondent pas avec celles qu’utilisent les autres sciences. Elles consistent en un espace « social » et en un temps « social », ce qui signifie qu’elles n’ont d’autres propriétés que celles des phénomènes sociaux qui les peuplent. Selon leur structure particulière, les sociétés humaines ont conçu ces dimensions de façons très différentes. L’ethnologue ne doit donc pas s’inquiéter de l’obligation où il peut se trouver d’utiliser des types qui lui sont inhabituels, et même d’en inventer pour les besoins du moment.

On a déjà remarqué que le continuum temporel apparaît réversible ou orienté, selon le niveau offrant la plus grande valeur stratégique où on doit se placer du point de vue de la recherche en cours. D’autres éventualités peuvent aussi se présenter : temps indépendant de celui de l’observateur, et illimité ; temps, fonction du temps propre (biologique) de l’observateur, et limité ; temps analysable ou non en parties, qui sont elles-mêmes homologues entre elles, ou spécifiques, etc. Evans-Pritchard a montré qu’on peut ramener à des propriétés formelles de ce type l’hétérogénéité qualitative, superficiellement perçue par l’observateur, entre son temps propre et des temps qui relèvent d’autres catégories : histoire, légende ou mythe (1939, 1940). Cette analyse, inspirée par l’étude d’une société africaine, peut être étendue à notre propre société (Bernot et Blancard, 1953).

En ce qui concerne l’espace, Durkheim et Mauss ont été les premiers à décrire les propriétés variables qu’on doit lui reconnaître pour pouvoir interpréter la structure d’un grand nombre de sociétés dites primitives (1901-1902). Mais c’est de Cushing — qu’on affecte aujourd’hui de dédaigner — qu’ils se sont d’abord inspirés. L’œuvre de Frank Hamilton Cushing témoigne en effet d’une pénétration et d’une invention sociologiques, qui devraient valoir à son auteur une place à la droite de Morgan, parmi les grands précurseurs des recherches structurales. Les lacunes, les inexactitudes relevées dans ses descriptions, le grief même qu’on a pu lui faire d’avoir « surinterprété » ses observations, tout cela est ramené à de plus justes proportions quand on comprend que Cushing cherchait moins à décrire concrètement la société zuni qu’à élaborer un modèle (la célèbre division en sept parties) permettant d’expliquer sa structure et le mécanisme de son fonctionnement.

Le temps et l’espace sociaux doivent aussi être distingués selon l’échelle. L’ethnologue utilise un « macro-temps » et un « micro-temps ; » un « macro-espace » et un « micro-espace ». De façon parfaitement légitime, les études structurales empruntent leurs catégories aussi bien à la préhistoire, à l’archéologie, et à la théorie diffusionniste, qu’à la topologie psychologique fondée par Lewin, ou à la sociométrie de Moreno. Car des structures de même type peuvent être récurrentes à des niveaux très différents du temps et de l’espace, et rien n’exclut qu’un modèle statistique (par exemple, un de ceux élaborés en sociométrie) ne se révèle plus utile pour construire un modèle analogue, applicable à l’histoire générale des civilisations, qu’un autre directement inspiré des faits empruntés à ce seul domaine.

Loin de nous, par conséquent, l’idée que les considérations historiques et géographiques soient sans valeur pour les études structurales, comme le croient encore ceux qui se disent « fonctionnalistes ». Un fonctionnaliste peut être tout le contraire d’un structuraliste, l’exemple de Malinowski est là pour nous en convaincre.

Inversement, l’œuvre de G. Dumézil et l’exemple personnel de A. L. Kroeber (d’esprit si structuraliste, bien qu’il se soit longtemps consacré à des études de distribution spatiale) prouvent que la méthode historique n’est nullement incompatible avec une attitude structurale.

Les phénomènes synchroniques offrent pourtant une homogénéité relative qui les rend plus faciles à étudier que les phénomènes diachroniques. Il n’est donc pas surprenant que les recherches les plus accessibles, en fait de morphologie, soient celles qui touchent aux propriétés qualitatives, non mesurables, de l’espace social, c’est-à-dire la façon dont les phénomènes sociaux se distribuent sur la carte, et les constantes qui ressortent de cette distribution. A cet égard, l’école dite « de Chicago » et ses travaux d’écologie urbaine avaient suscité de grands espoirs, trop vite déçus. Les problèmes d’éco­logie sont discutés dans un autre chapitre de ce symposium, je me contenterai donc de préciser au passage les relations qui existent entre les notions d’écologie et de structure sociale. Dans les deux cas ; on s’occupe de la distribution des phénomènes sociaux dans l’espace, mais les recherches structuralistes portent exclusivement sur les cadres spatiaux dont les caractères sont sociologiques, c’est-à-dire ne dépendent pas de facteurs naturels tels ceux de la géologie, de la climatologie, de la physiographie, etc. Les recherches dites d’écologie urbaine offrent donc un intérêt exceptionnel pour l’ethnologue : l’espace urbain est suffisamment restreint, et assez homogène (à tous égards autres que le social) pour que ses propriétés qualitatives puissent être attribuées directement à des facteurs internes, d’origine à la fois formelle et sociale.

Au lieu de s’attaquer à des communautés complexes où il est difficile de faire la part respective des influences du dehors et du dedans, il eût été peut-être plus sage de se limiter — comme l’avait fait Marcel Mauss (1924-1925) — à ces communautés, petites et relative- ment isolées, qui sont les plus fréquentes dans l’expérience de l’ethnologue. On connaît quelques études de ce genre, mais elles dépassent rarement le niveau descriptif ; ou, quand elles le font, c’est avec une timidité singulière. Personne n’a sérieusement cherché quelles corrélations peuvent exister entre la configuration spatiale des groupes, et les propriétés formelles qui relèvent des autres aspects de leur vie sociale.

Pourtant, de nombreux documents attestent la réalité et l’importance de telles corrélations, principalement en ce qui concerne, d’une part la structure sociale, et de l’autre, la configuration spatiale des établissements humains : villages ou campements. Me limitant ici l’Amérique, je rappellerai que la forme des campements des Indiens des Plaines varie avec l’organisation sociale de chaque tribu. Il en est de même de la distribution circulaire des huttes, dans les villages Gé du Brésil central et oriental. Dans les deux cas, il s’agit de régions assez homogènes au point de vue linguistique et culturel, et où l’on dispose d’une bonne série de variations concomitantes. D’autres problèmes se posent, quand on compare des régions ou des types d’établissements différents, qui vont de pair avec des structures sociales différentes ; ainsi, la configuration circulaire des villages Gé d’une part, et celle, en rues parallèles, des cités des Pueblo. Dans ce dernier cas, on peut même procéder à une étude diachronique, grâce aux documents archéologiques, qui attestent d’intéressantes variations. Existe-t-il une relation entre le passage des structures semi-circulaires anciennes aux structures parallèles actuelles d’une part, et, de l’autre, le transfert des villages du fond des vallées aux plateaux ? Et comment s’est produit le changement dans la répartition des habitations entre les différents clans, que les mythes décrivent comme très systématique, alors qu’elle semble aujourd’hui être le fait du hasard ?

Je ne prétends pas que la configuration spatiale des villages reflète toujours l’organisation sociale comme un miroir, ni qu’elle la reflète tout entière. Ce serait une affirmation gratuite pour un grand nombre de sociétés. Mais, n’y a-t-il pas quelque chose de commun à toutes celles — si différentes par ailleurs — où l’on constate une relation (même obscure) entre configuration spatiale et structure sociale ? Et, plus encore, entre celles où la configuration spatiale « représente » la structure sociale, comme le ferait un diagramme tracé au tableau noir ? En réalité, les choses sont rarement aussi simples qu’il paraît. J’ai essayé de montrer ailleurs1 que le plan du village bororo n’exprime pas la véritable structure sociale, mais un modèle présent à la conscience indigène, bien qu’il soit de nature illusoire et qu’il contredise les faits.

On possède ainsi le moyen d’étudier les phénomènes sociaux et mentaux à partir de leurs manifestations objectives, sous une forme extériorisée et — pourrait-on dire — cristallisée. Or, l’occasion n’en est pas seulement offerte par des configurations spatiales stables, comme les plans de village. Des configurations instables, mais récurrentes, peuvent être analysées et critiquées de la même façon. Ainsi, celles qu’on observe dans la danse, dans le rituel, etc.

On se rapproche de l’expression mathématique en abordant les propriétés numériques des groupes, qui forment le domaine traditionnel de la démographie. Depuis quelques années, pourtant, des chercheurs venus d’horizons différents — démographes, sociologues, ethnologues — tendent à s’associer, pour jeter les bases d’une démographie nouvelle, qu’on pourrait appeler qualitative : moins préoccupée des variations continues au sein de groupes humains, arbitrairement isolés pour des raisons empiriques, que des discontinuités significatives entre des groupes considérés comme des touts, et délimités en raison de ces discontinuités. Cette « socio-démographie », comme dit Mlle de Lestrange, est déjà de plain-pied avec l’anthropologie sociale. Il se pourrait qu’un jour, elle devînt le point de départ obligatoire de toutes nos recherches.

Les ethnologues doivent donc s’intéresser, plus qu’ils n’ont fait jusqu’à présent, aux recherches démographiques d’inspiration structuraliste : celles de Livi sur les propriétés formelles de l’isolât minimum capable de se perpétuer ; ou celles, voisines, de Dahlberg. L’effectif des populations sur lesquelles nous travaillons peut être très proche du minimum de Livi, et parfois même inférieur. De plus, il existe une relation certaine entre le mode de fonctionnement et la durabilité d’une structure sociale, et l’effectif de la population. N’y aurait-il pas des propriétés formelles des groupes qui seraient directement et immédiatement fonction du chiffre absolu de la population, indépendamment de toute autre considération ? Dans l’affirmative, il faudrait commencer par déterminer ces propriétés et par leur faire une place, avant de chercher d’autres interprétations.

On envisagera ensuite les propriétés numériques qui n’appartiennent pas au groupe considéré comme un tout, mais aux sous-ensembles du groupe et à leurs relations, dans la mesure où les uns et les autres manifestent des discontinuités significatives. A cet égard, deux lignes de recherches offrent un grand intérêt pour l’ethnologue :

I. - Celles qui se rattachent à la fameuse loi de sociologie urbaine dite rank-size, permettant, pour un ensemble déterminé, d’établir une corrélation entre la taille absolue des villes (calculée d’après le chiffre de population) et la position de chacune dans un ensemble ordonné, et même, semble-t-il, de déduire un des éléments à partir de l’autre. (...)

II. — Les travaux de certains démographes français, fondés sur la démonstration de Dahlberg que les dimensions absolues d’un isolât peuvent être calculées d’après la fréquence des mariages consanguins (Dahlberg, 1948). Sutter et Tabah (1951) sont ainsi parvenus à calculer la taille moyenne des isolats pour tous nos départements, rendant du même coup accessible à l’ethnologue le système matrimonial complexe d’une société moderne. La « taille moyenne » de l’isolat français varierait de moins de 1 000 à un peu plus de 2 800 personnes. On s’aperçoit ainsi que le réseau d’individus défini par les relations d’intermariage est — même dans une société moderne — de taille très inférieure à ce qu’on aurait pu supposer : à peine dix fois plus grande que celle des plus petites sociétés dites primitives, c’est-à-dire du même ordre de grandeur. Faut-il en conclure que les réseaux d’intermariage sont à peu près constants, en taille absolue, dans toutes les sociétés humaines ? Dans l’affirmative, la nature complexe d’une société résulterait moins d’une dilatation de l’isolat primitif, que de l’intégration d’isolats relativement stables dans des ensembles de plus en plus vastes, mais caractérisés par d’autres types de liens sociaux (économiques, politiques, intellectuels), Sutter et Tabah ont aussi montré que les plus petits isolais ne se rencontrent pas exclusivement dans les régions reculées, telles que les zones montagneuses, mais aussi (et même davantage) dans les grands centres urbains ou à leur voisinage : les départements du Rhône (avec Lyon), de la Gironde (avec Bordeaux), et de la Seine (avec Paris) figurent en queue de liste avec des isolats de 740, 910 et 930 personnes, respectivement. Dans le département de la Seine, qui se confond pratiquement avec l’agglomération parisienne, la proportion des mariages consanguins est plus élevée que dans l’un quelconque des 15 départements ruraux qui l’entourent.

Tout cela est essentiel, parce que l’ethnologue peut espérer, grâce à ces travaux, retrouver dans une société moderne et complexe des unités plus petites, de même nature que celles qu’il étudie le plus souvent. Néanmoins, la méthode démographique doit être complétée d’un point de vue ethnologique. La taille absolue des isolats n’épuise pas le problème ; on devra aussi déterminer la longueur des cycles matrimoniaux. Toutes proportions gardées, un petit isolat peut consister en un réseau de cycles étendus (du même ordre de grandeur que l’isolât lui-même) ; et un grand isolat peut être fait (un peu à la façon d’une cotte de mailles) de cycles courts. Mais alors, il devient nécessaire de dresser des généalogies, c’est-à-dire que le démographe, même structuraliste, ne saurait se passer de l’ethnologue.

Cette collaboration peut aider à clarifier un autre problème, celui-là théorique. Il s’agit de la portée et de la validité de la notion de culture, qui a donné lieu à de vives discussions entre ethnologues anglais et américains au cours de ces dernières années. En s’attachant surtout à l’étude de la culture, les ethnologues d’outre-Atlantique n’ont-ils fait — comme l’a écrit Radcliffe-Brown -que « réifïer une abstraction » ? Pour le maître anglais, « l’idée de culture européenne est une abstraction, au même titre que celle de culture propre à telle ou telle tribu africaine ». Rien n’existe que des êtres humains, liés les uns aux autres par une série illimitée de relations sociales (Radcliffe-Brown, 1940 b). « Fausse querelle », répond Lowie (1942, pp. 520-521). Pas si fausse, cependant, puisque le débat renaît périodiquement.

De ce point de vue, on aurait tout intérêt à placer la notion de culture sur le même plan que la notion génétique et démographique d’isolat. Nous appelons culture tout ensemble ethnographique qui, du point de vue de l’enquête, présente, par rapport à d’autres, des écarts significatifs. Si l’on cherche à déterminer des écarts significatifs entre l’Amérique du Nord et l’Europe, on les traitera comme des cultures différentes ; mais, à suppo­ser que l’intérêt se porte sur des écarts significatifs entre — disons — Paris et Marseille, ces deux ensembles urbains pourront être provisoirement constitués comme deux unités culturelles. L’objet dernier des recherches structurales étant les constantes liées à de tels écarts, on voit que la notion de culture peut correspondre à une réalité objective, tout en restant fonction du type de recherche envisagé. Une même collection d’individus, pourvu qu’elle soit objectivement donnée dans le temps et dans l’espace, relève simultanément de plusieurs systèmes de culture universel, continental, national, provincial, local, etc. ; et familial, professionnel, confessionnel, politique, etc.

Dans la pratique, pourtant, ce nominalisme ne saurait être poussé jusqu’à son terme. En fait, le terme de culture est employé pour regrouper un ensemble d’écarts significatifs dont l’expérience prouve que les limites coïncident approximativement. Que cette coïncidence ne soit jamais absolue, et qu’elle ne se produise jamais à tous les niveaux à la fois, ne doit pas nous interdire d’utiliser la notion de culture ; elle est fondamentale en ethnologie et possède la même valeur heuristique que celle d’isolat en démographie. Logiquement, les deux notions sont du même type. D’ailleurs, ce sont les physiciens eux-mêmes qui nous encouragent à conserver la notion de culture, puisque N. Bohr écrit : « Les différences traditionnelles (des cultures humaines) ressemblent, à beaucoup d’égards, aux manières différentes, mais équivalentes, selon lesquelles l’expérience physique peut être décrite » (1939, p. 9)

III. Statique sociale,
ou structures de communication.

Une société est faite d’individus et de groupes qui communiquent entre eux. Cependant, la présence ou l’absence de communication ne saurait être définie de manière absolue. La communication ne cesse pas aux frontières de la société. Plutôt que de frontières rigides, il s’agit de seuils, marqués par un affaiblissement ou une déformation de la communication, et où, sans disparaître, celle-ci passe par un niveau minimum. Cette situation est suffisamment significative pour que la population (au-dehors comme au-dedans) en prenne conscience. La délimitation d’une société n’implique pourtant pas que cette conscience soit claire, condition réalisée seulement dans des cas de précision et de stabilité suffisantes.

Dans toute société, la communication s’opère moins à trois niveaux : communication des femmes ; communication des biens et des services ; communication des messages. Par conséquent, l’étude du système de parenté, celle du système économique et celle du système linguistique offrent certaines analogies. Toutes trois relèvent de la même méthode ; elles diffèrent seulement par le niveau stratégique où chacune choisit de se situer au sein d’un univers commun. On pourrait même ajouter que les règles de parenté et de mariage définissent un quatrième type de communication : celui des gènes entre les phénotypes. La culture ne consiste donc pas exclusivement en formes de communication qui lui appartiennent en propre (comme le langage), mais aussi — et peut-être surtout — en règles applicables à toutes sortes de « jeux de communication », que ceux-ci se déroulent sur le plan de la nature ou sur celui de la culture.

L’analogie qui vient d’être affirmée entre sociologie de la parenté, science économique et linguistique, laisse subsister une différence entre les trois modes de communication correspondants : ils ne sont pas à la même échelle. Envisagés sous le rapport des taux de communication pour une société donnée, les intermariages et l’échange des messages diffèrent entre eux, quant à l’ordre de grandeur, à peu près comme les mouvements des grosses molécules de deux liquides visqueux, traversant par osmose la paroi difficilement perméable qui les sépare, et ceux d’électrons émis par des tubes cathodiques. Quand on passe du mariage au langage, on va d’une communication à rythme lent à une autre, à rythme très rapide. Différence facilement explicable : dans le mariage, objet et sujet de communication sont presque de même nature (femmes et hommes, respectivement) ; tandis que, dans le langage, celui qui parle ne se confond jamais avec ses mots. Nous sommes donc en présence d’une double opposition : personne et symbole ; valeur et signe. On comprend mieux, ainsi, la position intermédiaire des échanges économiques par rapport aux deux autres formes : les biens et les services ne sont pas des personnes (comme les femmes) ; mais, à la différence des phonèmes, ce sont encore des valeurs. Et pourtant, bien qu’ils ne soient intégralement ni des symboles, ni des signes, on a besoin de symboles et de signes pour les échanger dès que le système économique atteint un certain degré de complexité.

Trois ordres de considérations découlent de notre manière de concevoir la communication sociale :

1° Les rapports entre science économique et études de structure sociale peuvent être mieux définis. Jusqu’à présent, les ethnologues ont manifesté beaucoup de défiance envers la science économique. Cela, en dépit des relations étroites qui sont apparues entre les deux disciplines chaque fois qu’un rapprochement s’est pro­duit. Depuis les travaux novateurs de Mauss (1904-1905, 1923-1924) jusqu’au livre de Malinowski consacré au kula(l922) — son chef-d’œuvre — toutes les recherches ont montré que la théorie ethnologique découvre, grâce à l’analyse des faits économiques, quelques-unes des plus belles régularités dont elle puisse faire état.

Mais l’atmosphère même où s’est développée la science économique devait rebuter l’ethnologue : pleine d’âpres conflits entre les doctrines, imbue de morgue et d’ésotérisme. D’où le sentiment que la science économique se payait surtout d’abstractions. Quel rapport pouvait-il y avoir entre l’existence concrète des groupements humains réellement observables, et des notions telles que la valeur, l’utilité et le profit ?

La nouvelle formulation des problèmes économiques proposée par von Neumann et Morgenstern (1944) devrait, au contraire, inciter les économistes et les ethnologues à la collaboration. D’abord, et bien que la science économique aspire chez ces auteurs à une expression rigoureuse, son objet ne consiste plus en notions abstraites, mais en individus ou groupes concrets, qui se manifestent dans des rapports empiriques de coopération ou de compétition. Aussi inattendu que le rapprochement puisse paraître, ce formalisme rejoint donc certains aspects de la pensée marxiste. (...)

En second lieu, et pour la même raison, nous y trouvons pour la première fois des modèles mécaniques du type de ceux qu’utilisent — sans doute dans des domaines très différents — l’ethnologie et la logique, et propres à servir d’intermédiaire entre les deux. Les modèles de von Neumann proviennent de la théorie des jeux, mais ressemblent à ceux que les ethnologues emploient en matière de parenté. Kroeber avait d’ailleurs déjà comparé certaines institutions sociales à des « jeux d’enfants appliqués » (1942, p. 215).

A vrai dire, il existe une grande différence entre les jeux de société et les règles du mariage : les premiers sont destinés à permettre à chaque joueur d’obtenir, pour son avantage, des écarts différentiels aussi grands que possible à partir d’une régularité statistique initialement donnée. Les règles du mariage agissent en sens inverse : rétablir une régularité statistique, en dépit des valeurs différentielles qui se manifestent entre les individus et les générations. On pourrait dire que les secondes constituent des « jeux à l’envers », ce qui ne les empêche pas d’être justiciables des mêmes méthodes.

D’ailleurs, dans les deux cas, une fois fixées les règles, chaque individu ou groupe essaye de jouer le jeu de la même façon, c’est-à-dire pour accroître ses propres avantages aux dépens d’autrui. Sur le plan du mariage, ce sera en obtenant plus de femmes, ou une épouse plus enviable, en fonction de critères esthétiques, sociaux ou économiques. Car la sociologie formelle ne s’arrête pas à la porte du romanesque ; elle y pénètre, sans crainte de se perdre dans le dédale des sentiments et des conduites. Von Neumann n’a-t-il pas proposé une théorie mathématique d’une conduite aussi subtile et, pourrait-on croire, aussi subjective que le bluff au poker (von Neumann et Morgenstern, 1944, pp. 186-219) ?

2° S’il est permis d’espérer que l’anthropologie sociale, la science économique et la linguistique s’associeront un jour, pour fonder une discipline commune qui sera la science de la communication, reconnaissons néanmoins que celle-ci consistera surtout en règles. Ces règles sont indépendantes de la nature des partenaires (individus ou groupes) dont elles commandent le jeu. Comme le dit von Neumann (op. cit., p. 49) : « Le jeu consiste dans l’ensemble des règles qui le décrivent. » On pourra aussi introduire d’autres notions : partie, coup, choix et stratégie. (…) De ce point de vue, la nature des joueurs est indifférente, ce qui compte étant seulement de savoir quand un joueur peut choisir, et quand il ne le peut pas.

3° On en vient ainsi à introduire, dans les études relatives à la parenté et au mariage, des conceptions dérivées de la théorie de la communication. L’« information » d’un système de mariage est fonction du nombre d’alternatives dont dispose l’observateur pour définir le statut matrimonial (c’est-à-dire celui de conjoint possible, prohibé, ou assigné) d’un individu quelconque, par rapport à un prétendant déterminé. Dans un système à moitiés exogamiques, cette information est égale à l’unité. Dans une typologie australienne, elle augmente avec le logarithme du nombre des classes matrimoniales. Un système théorique de panmixie (où chacun pourrait épouser n’importe qui) ne présenterait aucune « redondance », puisque chaque choix matrimonial serait indépendant de tous les autres. Inversement, les règles du mariage constituent la redondance du système considéré. On pourra aussi calculer le pourcentage des choix « libres » (non pas absolument, mais par rapport à certaines conditions postulées par hypothèse) qui se produisent dans une population matrimoniale donnée, et assigner une valeur numérique à son « entropie », rela­tive et absolue.

Dès lors, une autre possibilité s’ouvrira : la conversion des modèles statistiques en modèles mécaniques et inversement. Ce qui revient à dire que le fossé sera comblé entre démographie et ethnologie, et qu’on disposera d’une base théorique pour la prévision et l’action. Soit notre propre société comme exemple ; le libre choix d’un conjoint y est limité par trois facteurs : a) degrés prohibés ; b) dimension de l’isolat ; c) règles de conduite admises, qui restreignent la fréquence relative de certains choix au sein de l’isolat. Avec ces données, on peut calculer l’information du système, c’est-à-dire convertir un système matrimonial faiblement organisé et essentiellement fondé sur des moyennes, en un modèle mécanique, comparable à toute la série de modèles mécaniques des règles du mariage, dans les sociétés plus simples que la nôtre.

De même, et nous référant plus spécialement à ces dernières, l’étude statistique des choix matrimoniaux d’un nombre suffisamment grand d’individus permettrait de trancher des problèmes controversés, tels le nombre des classes matrimoniales de la tribu australienne faussement appelée Murngin, évalué, selon les auteurs, à 32,7, moins de 7,4 et 3, avant que des enquêtes récentes n’aient décidé en faveur du dernier chiffre.

Jusqu’ici, je me suis efforcé d’évaluer l’apport éventuel de quelques types de recherches mathématiques à l’ethnologie. Le principal bénéfice que nous pouvons en espérer consiste, nous l’avons vu, dans l’offre qui nous est faite d’un concept unificateur — la notion de communication — grâce auquel on pourra consolider en une seule discipline des recherches considérées comme très différentes, et acquérir certains outils théoriques et méthodologiques indispensables au progrès dans cette direction. J’aborde maintenant un autre problème : l’anthropologie sociale est-elle en mesure d’utiliser ces instruments, et comment ?

Au cours des dernières années, l’anthropologie sociale s’est principalement intéressée aux faits de parenté. Elle a ainsi reconnu le génie de Lewis Morgan dont les Systems of Consanguinity and Affinity of thé Human Family (1871) ont simultanément fondé l’anthropologie sociale et les études de parenté, tout en expliquant pourquoi la première doit attacher tant d’importance aux secondes. De tous les faits sociaux, ceux qui touchent à la parenté et au mariage manifestent au plus haut point ces caractères durables, systématiques et continus jusque dans le changement, qui donnent prise à l’analyse scientifique. A ces considérations de Morgan, ajoutons que le domaine de la parenté est celui qui revient en propre à l’ethnologue, au sein du grand royaume de la communication.

En dépit du développement des études de parenté, il ne faut pas se dissimuler que notre documentation est bien mince. Si l’on néglige l’histoire pour considérer exclusivement le présent, l’univers humain comptait sans doute, encore récemment, 3 à 4 000 sociétés distinctes ; mais Murdock estime que nous pouvons seulement raisonner sur 250, chiffre encore trop optimiste à mon sens. N’a-t-on donc pas assez travaillé ? Ou n’est-ce pas, au contraire, une conséquence de cette illusion inductive déjà dénoncée plus haut ? On s’est éparpillé sur trop de cultures, on a cherché à accumuler des informations nombreuses et superficielles, et l’on s’aperçoit finalement que beaucoup sont inutilisables. A cette situation, il ne faut pas s’étonner que les spécialistes réagissent chacun selon son tempérament. Certains préfèrent considérer des régions peu nombreuses, où l’information est suffisamment dense. D’autres élargissent l’éventail ; d’autres encore cherchent une solution intermédiaire.

Le cas des Pueblo est frappant : pour peu de régions du monde trouverait-on une si grande abondance de documents, et de qualité aussi douteuse. On se sent parfois désespéré devant l’énorme matériel accumulé par Voth, Fewkes, Dorsey, Parsons et — jusqu’à certain point — Stevenson : il est à peine utilisable, tant ces auteurs se sont fiévreusement employés à entasser les informations, sans se demander ce qu’elles signifiaient, et surtout, en s’interdisant les hypothèses qui pouvaient seules permettre de les contrôler. Avec Lowie et Kroeber, la situation a heureusement changé ; mais certaines lacunes sont irrémédiables. Ainsi, l’absence de données statistiques sur les mariages, qui auraient pu être recueillies depuis un demi-siècle. Pourtant, un ouvrage récent de Fred Eggan (1950) montre bien ce qu’on peut attendre d’études intensives et exhaustives, portant sur un domaine limité. Il analyse des formes voisines, dont chacune préserve une régularité structurale, quoiqu’elles offrent, les unes par rapport aux autres, des discontinuités qui deviennent significatives quand on les compare à des discontinuités homologues, mais relevant d’autres domaines tels que l’organisation clanique, les règles du mariage, le rituel, les croyances religieuses, etc.

Cette méthode vraiment « galiléenne [1] » permet d’espérer qu’un jour, nous atteindrons un niveau d’analyse où la structure sociale sera de plain-pied avec d’autres types de structure : mentale, et surtout linguistique. Pour nous borner à un exemple : le système de parenté hopi fait appel à trois modèles de temps différents : 1° une dimension « vide », statique et réversible, illustrée par les lignées de la mère du père et du père de la mère, où des termes identiques se répètent mécaniquement au long des générations ; 2° un temps progressif, non réversible, dans la lignée d’Ego (femelle) avec des séquences du type : grand-mère > mère > sœur > enfant > petit-enfant ; 3° un temps ondulatoire, cyclique, réversible, dans la lignée d’Ego (mâle) définie par une alternance continuelle entre deux termes : « sœur » et « enfant de sœur » respectivement.

Ces trois dimensions sont rectilignes. Toutes ensemble, elles s’opposent à la structure circulaire de la lignée d’Ego (femelle) chez les Zuni, où trois termes : mère de la mère (ou fille de la fille), -mère, fille, se trouvent disposés en anneau fermé. A cette « clôture » du système correspond, à Zuni, pour les autres lignées, une grande pauvreté de la terminologie, tant en ce qui concerne le cercle de famille que les distinctions opérées dans son sein. Comme l’étude des aspects du temps relève aussi de la linguistique, la question du rapport entre leurs formes linguistique et généalogique se trouve immédiatement posée. (...)

L’anthropologie serait plus avancée si ses tenants avaient réussi à se mettre d’accord sur le sens de la notion de structure, l’usage qu’on peut en faire, et la méthode qu’elle implique. Ce n’est, hélas, pas le cas, mais on peut trouver une consolation et un encouragement pour l’avenir à constater qu’il est au moins possible de comprendre les divergences et de préciser leur portée. Essayons donc d’esquisser rapidement les conceptions les plus répandues, en les comparant à celle qui a été proposée au début de ce chapitre. — Le terme de « structure sociale » évoque immédiatement le nom de A. R. Radcliffe-Brown1. Son œuvre ne se limite certes pas à l’étude des systèmes de parenté ; mais il a choisi ce terrain pour formuler ses conceptions méthodologiques dans des termes auxquels tout ethno­logue pourrait souscrire. Quand nous étudions les systèmes de parenté, note Radcliffe-Brown, nous nous assignons les buts suivants : 1° dresser une classification systématique ; 2° comprendre les traits propres à chaque système : à) soit en rattachant chaque trait à un ensemble organisé ; b) soit en y reconnaissant un exemple particulier d’une classe de phénomènes déjà identifiée ; 3° enfin, parvenir à des généralisations valables sur la nature des sociétés humaines. Et voici sa conclusion : « L’analyse cherche à ramener la diversité [de. 2 à 300 systèmes de parenté] à un ordre, quel qu’il puisse être. Derrière la diversité, on peut en effet discerner des principes généraux, en nombre limité, qui sont appliqués et combinés de façons diverses » (1941, p. 17).

Il n’y a rien à ajouter à ce programme lucide, sinon souligner que Radcliffe-Brown l’a exactement appliqué à son étude des systèmes australiens : assemblant une masse prodigieuse d’informations ; introduisant un ordre là où il n’y avait que chaos ; définissant des notions essentielles, telles que celles de cycle, de paire et de couple. Sa découverte du système Kariera, dans la région précise et avec toutes les caractéristiques postulées par lui avant même de se rendre en Australie, restera, dans l’histoire de la pensée structuraliste, comme une mémorable réussite déductive (1930-1931). L’Introduction de Radcliffe-Brown aux African Systems of Kinship and Marriage a d’autres mérites : ce véritable « traité de la parenté » en réduction entreprend d’intégrer les systèmes occidentaux (considérés dans leurs formes les plus anciennes) dans une théorie générale. D’autres idées de Radcliffe-Brown (notamment, celles relatives à l’homologie de la terminologie et des attitudes) seront évoquées plus loin.

Après avoir rappelé les titres de gloire de Radcliffe-Brown, je dois souligner qu’il se fait, des structures sociales, une conception différente de celle avancée dans le présent travail. La notion de structure lui apparaît comme un concept intermédiaire entre ceux de l’anthropologie sociale et de la biologie : « II existe une analogie véritable et significative entre structure organique et structure sociale » (1940 b, p. 6). Loin d’élever le niveau des études de parenté jusqu’à la théorie de la communication, comme j’ai proposé de le faire, Radcliffe-Brown le ramène à celui de la morphologie et de la physiologie descriptives (1940 b, p. 10). Il reste ainsi fidèle à l’inspiration naturaliste de l’école anglaise. Au moment où Kroeber et Lowie soulignaient déjà le caractère artificiel des règles de parenté et de mariage, Radcliffe-Brown persistait dans la conviction (qu’il partagea avec Malinowski) que les liens biologiques sont, tout à la fois, l’origine et le modèle de tous les types de liens familiaux.

De cette attitude de principe découlent deux conséquences. La position empiriste de Radcliffe-Brown explique sa répugnance à distinguer clairement structure sociale et relations sociales. En fait, toute son œuvre réduit la structure sociale à l’ensemble des relations sociales existantes dans une société donnée. Sans doute a-t-il parfois esquissé une distinction entre structure et forme structurale. Mais le rôle qu’il accorde à cette dernière notion est purement diachronique. Dans la pensée théorique de Radcliffe-Brown, son rendement est des plus faibles (1940 b, p. 4). La distinction elle-même a fait l’objet d’une critique de Fortes, qui a beaucoup contribué à introduire dans nos recherches une autre opposition, étrangère à la pensée de Radcliffe-Brown, et à laquelle on a vu que j’attache moi-même une grande importance : celle entre modèle et réalité : « La structure ne peut être directement appréhendée dans la "réalité concrète..." Quand on s’attache à définir une structure, on se place, pourrait-on dire, au niveau de la grammaire et de la syntaxe, et non à celui de la langue parlée » (Fortes, 1949, p. 56).

En second lieu, l’assimilation, proposée par Radcliffe-Brown, de la structure sociale aux relations sociales, l’incite à dissocier la première en éléments calqués sur la forme la plus simple de relation qu’on puisse concevoir, celle entre deux personnes : « La structure de parenté d’une société quelconque consiste en un nombre indéterminé de relations dyadiques... Dans une tribu australienne, toute la structure sociale se réduit à un réseau de relations de ce type, dont chacune unit une personne à une autre... » (1940 b, p. 3). Ces relations dyadiques constituent-elles vraiment la matière première de la structure sociale ? Ne sont-elles pas plutôt le résidu - obtenu par analyse idéale — d’une structure préexistante, dont la nature est plus complexe ?

Sur ce problème méthodologique, la linguistique structurale pourrait beaucoup nous apprendre. Bateson et Mead ont travaillé dans la direction indiquée par Radcliffe-Brown. Déjà pourtant, dans Naven (1936), Bateson dépassait le niveau des relations dyadiques pures, puisqu’il s’attachait à les classer en catégories, admettant ainsi qu’il y a autre chose et plus, dans la structure sociale, que les relations elles-mêmes : quoi donc, sinon la structure, posée préalablement aux relations ?

Enfin, les relations dyadiques, telles que les conçoit Radcliffe-Brown, forment une chaîne qui peut être allongée indéfiniment par adjonction de relations nouvelles. D’où la répugnance de notre auteur à traiter la structure sociale comme un système. Sur ce point majeur, il se sépare donc de Malinowski. Sa philosophie se fonde sur la notion du continu ; l’idée de discontinuité lui est toujours restée étrangère. On comprend mieux, ainsi, son hostilité envers la notion de culture, déjà notée, et son indifférence aux enseignements de la linguistique.

Observateur, analyste et classificateur incomparable, Radcliffe-Brown déçoit souvent quand il se veut théoricien. Il se contente de formules relâchées, recouvrant mal des pétitions de principe. A-t-on vraiment expliqué les prohibitions du mariage, en montrant qu’elles aident les systèmes de parenté correspondants à se perpétuer sans altération (Radcliffe-Brown, 1949 b) ? Les traits remarquables des systèmes dits crow-omaha peuvent-ils être entièrement interprétés en fonction de la notion de lignée (id., 1941) ? J’aurai l’occasion d’exprimer d’autres doutes. Mais déjà, ces interrogations expliquent pourquoi l’œuvre de Radcliffe-Brown, en dépit de son importance intrinsèque, a pu être si âprement critiquée.

Pour Murdock, les interprétations de Radcliffe-Brown se réduiraient à « des abstractions verbales, érigées en causes premières » (1949, p. 121). Lowie s’exprime à peu près de la même façon (1937, pp. 224-225). La controverse récente entre Radcliffe-Brown (1951) d’une part, Lawrence et Murdock de l’autre (1949), n’offre plus guère qu’un intérêt historique, mais elle éclaire encore les positions méthodologiques de ces auteurs. Aux environs de 1949, on disposait d’une bonne description, par Lloyd Warner (1930-1931,1937 a), du système de parenté australien encore appelé Murngin (…) ; quelques incertitudes subsistaient cependant, surtout en ce qui concerne la « clôture » du système, postulée par l’hypothèse (le système étant décrit comme intransitif), mais pratique­ment impossible à vérifier.

Il est frappant de constater que, pour Radcliffe-Brown, le problème n’existe pas. Si toute organisation sociale se réduit à un conglomérat de relations de personne à personne, le système est extensible indéfiniment : pour tout individu masculin il y a, au moins théoriquement, une femme qui sera avec lui dans la relation de fille du frère de la mère (type de conjoint prescrit dans la société en question). Et pourtant, le problème surgit sur un autre plan : car les indigènes ont choisi d’exprimer les relations interpersonnelles au moyen d’un système de classes, et la description de Warner (comme il l’a reconnu lui-même) ne permet pas de comprendre comment, dans certains cas au moins, un individu donné peut satisfaire, à la fois, aux exigences du système des classes et à celles du système des relations. Autrement dit, s’il présente le degré de parenté requis il ne tombera pas dans la classe correspondante, et inversement.

Pour surmonter cette difficulté, Lawrence et Murdock ont inventé un système qui coïncidait à la fois avec la règle préférentielle du mariage et — grâce à certaines transformations — avec le système de classes décrit par Warner. Mais il s’agit là d’un jeu gratuit, dont on constate vite qu’il soulève plus de difficultés nouvelles qu’il n’en résout d’anciennes. Déjà, le système restitué par Warner se heurtait à un gros obstacle : il impliquait que les indigènes perçussent clairement des relations de parenté si éloignées que l’hypothèse même en devenait psychologiquement invraisemblable. La solution de Lawrence et Murdock exigerait bien davantage. Dans ces conditions, on peut se demander si le système caché ou inconnu, propre à rendre compte du modèle conscient, mais maladroit, que les Murngin ont emprunté récemment à des voisins dotés de règles très différentes des leurs, ne doit pas être plus simple que ce dernier, et non pas plus compliqué.

L’attitude systématique et formaliste de Murdock s’oppose à celle, empiriste et naturaliste, de Radcliffe-Brown. Pourtant, Murdock reste, presque autant que son adversaire, imbu d’un esprit psychologique et même biologique, qui le pousse vers des disciplines périphériques, comme la psychanalyse et la psychologie du comportement. Réussit-il ainsi à se libérer de l’empirisme, qui pèse si lourdement sur les interprétations de Radcliffe-Brown ? On peut en douter, puisque ce recours extérieur l’oblige à laisser inachevées ses propres hypothèses, ou à les parfaire au moyen d’emprunts qui leur donnent un caractère hybride, et parfois même contredisent l’objectif initial formulé en termes ethnologiques. Au lieu de considérer les systèmes de parenté comme des moyens sociaux destinés à remplir une fonction sociale, Murdock en vient finalement à les traiter comme des conséquences sociales de prémisses exprimées en termes de biologie et de psychologie.

L’apport de Murdock aux études structurales peut être envisagé sous deux aspects. En premier lieu, il a voulu rajeunir la méthode statistique. Tylor l’avait déjà employée pour vérifier des corrélations supposées et en découvrir de nouvelles. L’emploi de techniques modernes a permis à Murdock d’accomplir des progrès certains dans cette direction.

On a souvent souligné les obstacles auxquels se heurte la méthode statistique en ethnologie (Lowie, 1948 a, chap. m). Comme Murdock en est aussi averti que quiconque, je me contenterai de rappeler le danger du cercle vicieux : la validité d’une corrélation, même fondée sur une fréquence statistique impressionnante, dépend, en fin de compte, de la validité du découpage auquel on s’est livré pour définir les phénomènes mis en corrélation. Par contre, la méthode reste toujours efficace pour dénoncer les corrélations acceptées à tort. De ce point de vue négatif et critique, certaines conclusions de Murdock peuvent être considérées comme acquises.

Murdock s’est également employé à reconstituer l’évolution historique des systèmes de parenté ou, tout au moins, à définir certaines lignes d’évolution possibles ou probables, à l’exclusion de quelques autres. Il aboutit ainsi à un surprenant résultat : plus souvent qu’on ne croit — depuis que Lowie (1920, chap. m) s’est attaqué à l’hypothèse similaire de Lewis Morgan — le système de parenté de type « hawaïen » représenterait une forme primitive. Prenons garde, pourtant, que Murdock ne raisonne pas sur des sociétés réelles, observées dans leur contexte historique et géographique, et considérées comme des ensembles organisés, mais sur des abstractions, et même — si l’on peut dire — des abstractions au second degré : il commence par isoler l’organisation sociale des autres aspects de la culture, et parfois, les systèmes de parenté de l’organisation sociale ; après quoi, il découpe arbitrairement l’organisation sociale (ou le système de parenté) en pièces et en morceaux, selon des principes inspirés par les catégories traditionnelles de la théorie ethnologique, plutôt que par une analyse réelle de chaque groupe. Dans ces conditions, sa reconstruction historique reste idéologique : elle consiste à abstraire les éléments communs à chaque stade pour définir le stade immédiatement antérieur, et ainsi de suite. Il est clair qu’une telle méthode ne peut aboutir qu’à un résultat : les formes les moins différenciées apparaîtront comme les plus anciennes, et les formes complexes se verront assigner des positions de plus en plus récentes, en proportion de leur complexité. Un peu comme si on faisait remonter le cheval moderne à l’ordre des vertébrés, plutôt qu’au genre Hipparion.

Les réserves qui précèdent ne cherchent pas à diminuer les mérites de Murdock : il a rassemblé des documents abondants et souvent négligés ; il a posé des problèmes. Mais précisément, sa technique semble plus propre à découvrir et identifier les problèmes qu’à les résoudre. Sa méthode reste encore imbue d’un esprit aristotélicien ; peut-être toute science doit-elle passer par là. Au moins fait-il œuvre de bon disciple d’Aristote en affirmant que « les formes culturelles témoignent, sur le plan de l’organisation sociale, d’un degré de régularité et d’une conformité aux exigences de la pensée scientifique, qui ne diffère pas, de façon significative, de celui auquel les sciences dites naturelles nous ont accoutumés » (1949, p. 259).

Le lecteur, qui se reportera aux distinctions proposées au début de cet article, voudra bien observer que Radcliffe-Brown tend à confondre observation et expérimentation, tandis que Murdock ne distingue pas suffisamment entre modèles statistiques et modèles mécaniques : il cherche à construire des modèles mécaniques à l’aide d’une méthode statistique, tâche impossible, au moins de la façon directe qui est la sienne.

Symétriquement, on pourrait caractériser l’œuvre de Lowie (…) comme un effort acharné pour répondre à une seule question : quels sont les faits ? Nous avons dit que, même pour le structuraliste, cette question est la première à laquelle il faille répondre, et qu’elle commande toutes les autres. Les recherches sur le terrain et la réflexion théorique de Lowie commencent à une époque où l’ethnologie est comme farcie de préjugés philosophiques, auréolée de mysticisme sociologique. On lui a parfois reproché d’avoir réagi à cette situation de façon purement négative (Kroeber, 1920) : il le fallait. A ce moment, la première tâche consistait à démontrer ce que les faits n’étaient pas. Lowie a donc courageusement entrepris de désintégrer les systèmes arbitraires et les prétendues corrélations. Il a ainsi libéré — si l’on peut dire — une énergie intellectuelle où nous n’avons pas fini de puiser. Peut-être est-il moins facile de déceler ses contributions positives, en raison de l’extrême discrétion qu’il met à formuler sa pensée, et de sa répugnance envers les constructions théoriques. Ne se définit-il pas quelque part lui-même comme un « sceptique actif » ? C’est lui pourtant qui, dès 1915, justifiait de la façon la plus moderne les études de parenté : « La substance même de la vie sociale peut être parfois analysée de façon rigoureuse en fonction du mode de classification des parents et alliés » (1915, 1929 c). Dans le même article, il renversait la perspective étroitement historique qui bornait l’horizon ethnologique, sans permettre d’apercevoir les facteurs structuraux universellement à l’œuvre ; il définissait déjà l’exogamie en termes génétiques, comme un schème institutionnel engendrant les mêmes effets partout où il est présent, sans qu’il soit nécessaire d’invoquer des considérations historico-géographiques, pour comprendre les analogies entre sociétés éloignées.

Quelques années plus tard, Lowie pulvérise le « complexe matrilinéaire » (1919) en utilisant une méthode qui devait le conduire à deux résultats essentiels pour le structuraliste. En niant que tout trait d’apparence matrilinéaire dût être interprété comme une survivance ou un vestige du « complexe », il permettait sa décomposition en variables. En second lieu, les éléments ainsi libérés devenaient disponibles pour dresser des tables de permutations entre les caractères différentiels des systèmes de parenté (Lowie, 1929 a). De deux façons également originales, il ouvrait ainsi la porte aux études structurales : quant au système des appellations, et quant au rapport entre celui-ci et le système des attitudes. Cette dernière orientation devait être suivie par d’autres (Radcliffe-Brown, 1924 ; Lévi-Strauss, 1945) (...).

Nous sommes encore redevables à Lowie d’autres découvertes. Le premier, sans doute, il a établi le caractère bilinéaire de plusieurs systèmes prétendus unilinéaires (1920, 1929 b) ; il a démontré l’influence exercée par le mode de résidence sur le type de filiation (1920) ; il a dissocié les conduites familiales de réserve ou de respect, et la prohibition de l’inceste (1920, pp. 104-105). Toujours soucieux d’envisager les organisations sociales d’un double point de vue : règles institutionnelles d’une part, mais aussi expressions moyennes de réactions psychologiques individuelles (dans un sens qui contredit parfois les règles, et qui les infléchit toujours), c’est ce même Lowie, si critiqué pour sa trop fameuse définition de la culture, faite « de pièces et de morceaux », qui nous a donné des monographies qui comptent parmi les plus pénétrantes, les mieux équilibrées de toute la littérature ethnologique (1935,1948 (…)). Enfin, on connaît le rôle joué par Lowie dans le développement des études sud-américaines. Directement ou indirectement, par ses conseils ou ses encouragements, il a contribué à ouvrir à l’ethnologie un domaine difficile et trop négligé.

IV. dynamique sociale : structures de subordination.

a) Ordre des éléments (individus et groupes) dans la structure sociale.

Notre position personnelle sur les problèmes qui précèdent n’a pas besoin d’être exposée ici. Malgré nos efforts vers l’objectivité, elle transparaît suffisamment au cours de ce chapitre. Pour l’auteur de ces lignes, les systèmes de parenté, les règles de mariage et de filiation, forment un ensemble coordonné dont la fonction est d’assurer la permanence du groupe social, en entrecroisant, à la façon d’un tissu, les relations consanguines et celles fondées sur l’alliance. Ainsi espérons-nous avoir contribué à élucider le fonctionnement de la machine sociale, extrayant perpétuellement les femmes de leurs familles consanguines pour les redistribuer dans autant de groupes domestiques, lesquels se transforment à leur tour en familles consanguines, et ainsi de suite. (...)

En l’absence d’influences externes, cette machine fonctionnerait indéfiniment, et la structure sociale conserverait un caractère statique. Tel n’est cependant pas le cas. On doit donc introduire dans le modèle théorique des éléments nouveaux, dont l’intervention puisse expliquer les transformations diachroniques de la structure, en même temps qu’elle rendrait compte des raisons pour lesquelles une structure sociale ne se réduit jamais à un système de parenté. Il y a trois façons différentes de répondre à cette double question.

Comme il est de règle, on se demandera d’abord quels sont les faits. Des années ont passé depuis que Lowie déplorait la carence des travaux anthropologiques en matière d’organisation politique. A cet égard, on enregistrera quelques progrès dont nous sommes redevables à Lowie lui-même, dans ses travaux les plus récents, au moins en ce qui concerne l’Amérique du Nord (1927, 1948 (…)) et au grand ouvrage sur l’Afrique, dirigé par Fortes et Evans-Pritchard (1940). Lowie a utilement précisé quelques catégories fondamentales : classes sociales, « sodalités », État.

La deuxième méthode consisterait à mettre en corrélation les phénomènes relevant du niveau déjà isolé, c’est-à-dire les phénomènes de parenté, et ceux du niveau immédiatement supérieur, dans la mesure où on peut les relier entre eux. Deux problèmes se posent alors : 1° les structures fondées sur la parenté peuvent-elles, d’elles-mêmes, manifester des propriétés dynamiques ; 2° de quelle façon les structures de communication et les structures de subordination réagissent-elles les unes sur les autres. Le premier problème est celui de l’éducation : à un moment déterminé, chaque génération se trouve en effet dans une relation de subordination ou de dominance avec celle qui la précède ou celle qui la suit. C’est ainsi que Margaret Mead et d’autres ont choisi de poser le problème.

Il existe aussi une manière plus théorique de procéder, qui consiste à rechercher les corrélations entre certaines positions (statiques) dans la structure de parenté (réduite à sa terminologie) et les conduites (dynamiques) correspondantes, telles qu’elles s’expriment dans les droits, devoirs et obligations d’une part, et de l’autre, dans les privilèges, prohibitions, etc.

Pour Radcliffe-Brown, une correspondance terme à terme est vérifiable entre ce qu’on pourrait appeler le système des attitudes et le système des appellations. Chaque terme de parenté correspondrait à une conduite prescrite, positive ou négative ; et chaque conduite différentielle serait connotée par un terme. D’autres ont soutenu qu’une telle correspondance était invérifiable dans la pratique, ou qu’elle ne dépassait jamais le niveau d’une approximation assez grossière.

J’ai proposé moi-même une interprétation différente, fondée sur une relation dialectique entre attitudes et appellations. Les conduites différentielles entre parents tendent à s’organiser sur le même modèle que la terminologie, mais elles constituent aussi un moyen de résoudre les difficultés, et de surmonter les contradictions inhérentes à cette terminologie même. Ainsi, les règles de conduite entre parents, dans une société quelconque, traduiraient une tentative pour résoudre les contradictions découlant du système terminologique et des règles d’alliance. Dans la mesure où les premières tendent à se constituer en système, de nouvelles contradictions apparaissent qui provoquent une réorganisation de la terminologie, laquelle retentit sur les attitudes et ainsi de suite, sauf pendant de rares périodes d’équilibre, vite menacées. (…) Un autre problème se pose quand on considère des sociétés où le système de parenté ne régit pas des alliances matrimoniales entre égaux. Que se passe-t-il, en effet, si les partenaires des échanges matrimoniaux sont des groupes hiérarchisés, en fait ou en droit, du point de vue politique ou économique ? Par ce biais, nous sommes conduits à examiner diverses institutions : d’abord la polygamie, dont j’ai montré qu’elle repose parfois sur l’intégration de deux formes de garanties : l’une collective et politique, l’autre individuelle et économique (…) ; ensuite l’hypergamie (ou l’hypogamie). Ce dernier problème, jusqu’à présent fort négligé, mériterait une étude attentive dont dépend une théorie cohérente du système des castes, et — indirectement — de toutes les structures sociales fondées sur des distinctions de statut.

La troisième et dernière méthode a un caractère plus formel que les précédentes. Elle consisterait dans une étude a priori de tous les types de structures concevables, résultant de relations de dépendance et de domination apparaissant au hasard. Le traitement mathématique, par Rapoport (1949), des phénomènes cycliques de domination chez les poules ouvre à cet égard d’intéressantes perspectives. Sans doute ces chaînes cycliques et intransitives semblent-elles offrir peu de rapport avec les structures sociales qu’on serait tenté de leur comparer. Ces dernières (ainsi le « cercle du kava » en Polynésie) sont toujours transitives et non cycliques : celui qui siège au bas bout est, par définition, exclu du haut bout. (...)

Par contre, l’étude des systèmes de parenté montre que, dans certaines conditions, la transformation d’un ordre transitif et non cyclique en un autre, intransitif et cyclique, n’est pas inconcevable. On peut l’observer dans une société hypergamique avec mariage préférentiel d’un homme avec la fille du frère de la mère. Un tel système consiste en une chaîne, terminée à une extrémité par une fille du plus haut rang, et donc incapable de trouver un mari qui ne lui soit pas inférieur, et à l’autre, par un garçon à jamais privé d’épouse (puisque toutes les filles du groupe, à l’exception de sa sœur, ont un rang supérieur au sien). Par conséquent, ou bien la société en question succombe à ses contradictions, ou bien son système transitif et non cyclique doit se transformer en système intransitif et cyclique, temporairement ou loca-lement. (...)

Ainsi s’introduisent dans nos études des notions telles que celles de transitivité, d’ordre et de cycle, qui se prêtent à un traitement formel et permettent l’analyse de types généralisés de structures sociales où les niveaux de communication et de subordination peuvent être intégrés. Ira-t-on plus loin encore, jusqu’à l’intégration des ordres, actuels et virtuels ? Dans la plupart des sociétés humaines, ce qu’on nomme « ordre social » relève d’un type transitif et non cyclique : si A est supérieur à B, et B supérieur à C, A doit être supérieur à C, et C ne peut pas être supérieur à A. Pourtant, les sociétés mêmes qui obéissent pratiquement à ces règles conçoivent d’autres types d’ordres qu’on pourrait appeler « virtuels » ou « idéaux », que ce soit sur le plan de la politique, du mythe ou de la religion, et ces ordres sont parfois intransitifs et cycliques. Ainsi, les contes de rois épousant des bergères, ou la critique de la démocratie américaine par Stendhal, comme un système où un gentleman est aux ordres de son épicier.

b) Ordres des ordres.

Pour l’ethnologue, la société enveloppe un ensemble de structures correspondant à divers types d’ordres. Le système de parenté offre un moyen d’ordonner les individus selon certaines règles ; l’organisation sociale en fournit un autre ; les stratifications sociales ou économiques, un troisième. Toutes ces structures d’ordre peuvent être elles-mêmes ordonnées, à la condition de déceler quelles relations les unissent, et de quelle façon elles réagissent les unes sur les autres du point de vue synchronique. Ainsi, Meyer Fortes (1949) a-t-il essayé, non sans succès, de construire des modèles généraux qui intègrent les propriétés de divers modèles spéciaux (parenté, organisation sociale, rapports économiques, etc.). Ces tentatives pour formuler un modèle total d’une société donnée, confrontent l’ethnologue à une difficulté déjà envisagée au début de ce chapitre : jusqu’à quel point la façon dont une société conçoit ses diverses structures d’ordre, et les relations qui les unissent, correspond-elle à la réalité ? J’ai déjà indiqué que plusieurs réponses étaient possibles, en fonction des documents considérés. Mais jusqu’à présent, nous n’avons envisagé que des ordres « vécus », c’est-à-dire des ordres qui sont eux-mêmes fonction d’une réalité objective et qu’on peut aborder de l’extérieur, indépendamment de la représentation que les hommes s’en font. On observera maintenant que de tels ordres « vécus » en supposent toujours d’autres, dont il est indispensable de tenir compte pour comprendre non seulement les précédents, mais la manière dont chaque société essaye de les intégrer tous dans une totalité ordonnée. Ces structures d’ordre, « conçues » et non plus « vécues », ne correspondent directement à aucune réalité objective ; à la différence des premières, elles ne sont pas susceptibles d’un contrôle expérimental, puisqu’elles vont jusqu’à se réclamer d’une expérience spécifique avec laquelle, d’ailleurs, elles se confondent parfois. Le seul contrôle auquel nous puissions les soumettre, pour les analyser, est donc celui des ordres du premier type, ou ordres « vécus ». Les ordres « conçus » correspondent au domaine du mythe et de la religion. On peut se demander si l’idéologie politique des sociétés contemporaines ne relève pas aussi de cette catégorie. (...)

A la suite de Durkheim, Radcliffe-Brown a bien montré que les faits religieux devaient être étudiés comme partie intégrante de la structure sociale. Pour lui, le rôle de l’ethnologue est d’établir des corrélations entre divers types de religions et divers types d’organisations sociales (1945). Si sa sociologie religieuse se solde finalement par un échec, c’est, semble-t-il, pour deux raisons. En premier lieu, il a rattaché directement les croyances et le rituel à des états affectifs. En second lieu, il a voulu atteindre d’emblée une expression générale du rapport entre la société et la religion, alors que nous avons surtout besoin d’études concrètes, permettant de construire des séries régulières de variations concomitantes. Il en est résulté une sorte de discrédit qui pèse lourdement sur l’ethnologie religieuse. Pourtant, les mythes, le rituel et les croyances religieuses forment un domaine plein de promesses pour les études structurales et, pour rares qu’elles soient, les recherches récentes semblent particulièrement fécondes.

Plusieurs auteurs ont récemment entrepris d’étudier des systèmes religieux comme des ensembles structurés. Des travaux monographiques comme The Road of Life and Death de P. Radin (1945), et Kunapipi, de R. M. Berndt (1951), s’inspirent de cette conception. La voie est ainsi ouverte aux recherches systématiques, dont Navaho Religion, de G. Reichard (1950) offre un bon exemple. Mais on ne négligera pas, pour autant, les analyses de détail, portant sur les éléments permanents et non permanents des représentations religieuses d’une population donnée, pendant un laps de temps relativement court, ainsi que Lowie les a conçues.

Peut-être parviendrons-nous alors à construire, en ethnologie religieuse, ces « modèles à petite échelle, destinés à l’analyse comparative de variations concomitantes tels qu’ils s’imposent dans toute recherche visant à l’explication des faits sociaux » (Nadel, 1952). Cette méthode ne permettra de progresser que lentement ; mais elle fournira des conclusions qui compteront parmi les mieux établies et les plus convaincantes, de celles que nous pouvons espérer en matière d’organisation sociale. Nadel a déjà démontré qu’il existe une corrélation entre l’institution du chamanisme et certaines attitudes psychologiques caractéristiques des sociétés correspondantes (1946). En comparant des documents indo-européens provenant de l’Islande, de l’Irlande et du Caucase, M. Dumézil est parvenu à interpréter un personnage mythologique jusqu’alors énigmatique, à mettre son rôle et ses manifestations en corrélation avec certains traits spécifiques de l’organisation sociale des populations étudiées (1948) ; Wittfogel et Goldfrank ont isolé des variations significatives de certains thèmes mythologiques chez les Indiens Pueblo, les rattachant à l’infrastructure socio-économique de chaque groupe (1943). Monica Hunter a prouvé que les croyances magiques étaient directement fonction de la structure du groupe social (Hunter-Wilson, 1951). Tous ces résultats — joints à d’autres qui ne peuvent être commentés ici, faute de place — donnent l’espoir que nous serons un jour en mesure de comprendre, sinon la fonction des croyances religieuses dans la vie sociale (c’est chose faite depuis Lucrèce) mais les mécanismes qui leur permettent de remplir cette fonction.

Quelques mots, en guise de conclusion. Notre étude a débuté par une analyse de la notion de modèle, et c’est elle encore qui réapparaît à la fin. L’anthropologie sociale est une jeune science ; il est naturel qu’elle cherche à construire ses modèles à l’imitation des plus simples, parmi ceux que lui présentent des sciences plus avancées. Ainsi s’explique l’attrait de la mécanique classique. Mais n’avons-nous pas, à cet égard, été victimes d’une illusion ? Comme l’a remarqué von Neumann (von Neumann et Morgenstern, 1944, p. 14) : « II est infiniment plus simple d’élaborer la théorie presque exacte d’un gaz contenant environ 1025 particules libres que celle du système solaire qui comprend seulement 9 grands corps. » Or, l’anthropologie en quête de modèles se trouve devant un cas intermédiaire : les objets dont nous nous occupons — rôles sociaux et individus intégrés dans une société déterminée — sont beaucoup plus nombreux que ceux de la mécanique newtonienne, tout en ne l’étant pas assez pour relever de la statistique et du calcul des probabilités. Nous sommes donc placés sur un terrain hybride et équivoque ; nos faits sont trop compliqués pour être abordés d’une façon, et pas assez pour qu’on puisse les aborder de l’autre.

Les nouvelles perspectives ouvertes par la théorie de la communication résultent, précisément, des méthodes originales qu’il a fallu élaborer pour traiter des objets — les signes — qu’on peut désormais soumettre à une analyse rigoureuse, bien que leur nombre soit trop élevé pour la mécanique classique, mais encore trop restreint pour que les principes de la thermodynamique leur soient applicables. La langue est faite de morphèmes — de l’ordre de quelques milliers — et des calculs limités suffisent pour dégager des régularités significatives dans la fréquence des phonèmes. Sur un tel terrain, le seuil d’application des lois statistiques s’abaisse, en même temps que s’élève celui à partir duquel il devient possible d’utiliser des modèles mécaniques. Et du même coup, l’ordre de grandeur des phénomènes se rapproche de celui auquel l’anthropologue est accoutumé.
L’état présent des recherches structurales en anthropologie est donc le suivant. On a réussi à isoler des phénomènes qui sont du même type que ceux dont les théories de la stratégie et de la communication permettent déjà l’étude rigoureuse. Les faits anthropologiques sont à une échelle suffisamment voisine de celle de ces autres phénomènes, pour offrir l’espoir d’un traitement analogue. N’est-il pas surprenant qu’au moment même où l’anthropologie se sent plus proche que jamais de devenir une science véritable, le terrain manque là où on le croyait solide ? Les faits eux-mêmes se dérobent : trop peu nombreux, ou rassemblés dans des conditions qui ne permettent pas de les comparer avec une sécurité suffisante. Sans qu’il en soit de notre faute, nous découvrons que nous nous sommes conduits en botanistes amateurs, cueillant au hasard des échantillons hétéroclites, les maltraitant et les mutilant pour les conserver dans nos herbiers. Et nous voici tout à coup appelés à mettre en ordre des séries complètes, à définir les nuances originelles, à mesurer des parties minuscules que nous retrouvons détériorées, si même elles n’ont pas été détruites. Quand l’anthropologue évoque les tâches qui attendent et tout ce qu’il devrait être en position d’accomplir, le découragement le gagne : comment y parvenir avec les documents dont il dispose ? C’est un peu comme si la physique cosmique était appelée à se construire au moyen des observations d’astronomes babyloniens. Et pourtant, les corps célestes sont toujours là, tandis que les cultures indigènes qui nous fournissent nos documents disparaissent à un rythme rapide, ou se transforment en objets d’un nouveau genre, où nous ne pouvons espérer trouver des informations du même type. Ajuster les techniques d’observations à un cadre théorique qui est fort en avance sur elles, voilà une situation paradoxale que l’histoire des sciences illustre rarement. Il incombe à l’anthropologie moderne de relever ce défi.

[1] C’est-à-dire cherchant à déterminer la loi des variations concomitantes au lieu de s’attacher, à la manière aristotélicienne, aux simples corrélations inductives.

chapitre II

Analyse structurale en linguistique et en anthropologie


LA LINGUISTIQUE occupe une place particulière parmi les sciences sociales, dont les rangs desquels elle se situe incontestablement. Ce n’est pas seulement une science sociale comme les autres, mais, plutôt, celle dans laquelle les plus grands progrès ont été réalisés et de loin. Elle est probablement la seule qui puisse véritablement prétendre être une science, et qui ait réalisé à la fois la formulation d’une méthode empirique et une compréhension de la nature des données soumises à son analyse. Cette position privilégiée comporte plusieurs obligations. Le linguiste est souvent contraint de trouver des sciences connexes dans différentes disciplines s’inspirant de son exemple ou essayant de suivre son exemple. Noblesse oblige. Une revue linguistique ne peut pas se limiter à l’illustration de théories strictement linguistique et les points de vue. Il doit également accueillir des psychologues, des sociologues, des anthropologues et désireux d’apprendre la linguistique moderne de la route qui mène à la connaissance empirique des phénomènes sociaux. Comme l’a écrit Marcel Mauss - déjà il ya quarante ans : "La sociologie aurait certainement progressé beaucoup plus si elle avait été partout ldirigée par des linguistes. "L’étroite méthodologique qui existe entre les deux disciplines leur impose une obligation particulière de collaboration.

Depuis les travaux de Schrader, il a été nécessaire de démontrer l’assistance que la linguistique peut rendre à l’anthropologue dans l’étude de la parenté. Il était un linguiste et un philologue (Schrader et Rose) qui a montré l’improbabilité de l’hypothèse de survies matrilinéaire dans la famille dans l’antiquité, à laquelle tant d’anthropologues s’accrochent encore à ce moment-là. Le linguiste prévoit l’anthropologue avec étymologies qui lui permettent d’établir certains liens de parenté entre les termes des relations qui ne sont pas immédiatement apparents. L’anthropologue, d’autre part, peuvent porter à l’attention du linguiste douane, prescriptions et interdictions qui aident à comprendre la persistance de certaines caractéristiques de la langue ou l’instabilité des termes ou des groupes de termes. Lors d’une réunion du Cercle linguistique de New York, Julien Bonfante une fois illustré ce point de vue en examinant l’étymologie du mot pour oncle dans plusieurs langues romanes. Le grec theios correspond en italien, en espagnol et en portugais vers zio et tio, et il a ajouté que dans certaines régions de l’Italie, l’oncle est appelé Barba. Le "barbe", la "divine" oncle - ce qu’est une richesse de suggestions pour l’anthropologue ! Les enquêtes de la fin AM Hocart dans le caractère religieux de la relation avuncular et "vol du sacrifice" par les parents maternels viennent immédiatement à l’esprit. Quelle que soit l’interprétation donnée aux données recueillies par Hocart (et de sa propre interprétation n’est pas entièrement satisfaisant), il ne fait aucun doute que le linguiste contribue à la solution du problème en révélant la survie tenace dans le vocabulaire contemporain des relations qui ont depuis longtemps disparu . Dans le même temps, l’anthropologue explique le linguiste à la base de l’étymologie et confirme sa validité. Paul K. Benoît, à examiner, comme un linguiste, les systèmes de parenté de l’Asie du Sud-Est, a été en mesure d’apporter une importante contribution à l’anthropologie de la famille dans ce domaine.

Mais les linguistes et les anthropologues suivre leur propre chemin de façon autonome. Ils mettre fin, sans doute, de temps en temps de communiquer à une autre certaines de leurs conclusions, ces conclusions, toutefois, proviennent de différentes opérations, et aucun effort n’est fait pour permettre à un groupe de bénéficier des techniques et méthodologiques des autres . Cette attitude aurait pu être justifiée à l’époque où la recherche linguistique s’est penché plus lourdement sur l’analyse historique. En ce qui concerne la recherche anthropologique menée au cours de la même période, la différence est une de degré plutôt que de nature. Les linguistes employés une méthode plus rigoureuse, et leurs conclusions ont été établis sur plus de bonnes raisons, les sociologues pourraient suivre leur exemple en renonçant à l’examen de la répartition spatiale des types contemporains comme base de leurs classifications. Mais, après tout, l’anthropologie et la sociologie étaient à la recherche à la linguistique que pour des idées, rien ne prédit une révélation.

L’avènement de la linguistique structurale complètement changé cette situation. Non seulement at-il renouveler linguistique perspectives, une transformation de cette ampleur ne se limite pas à une seule discipline. La linguistique structurale sera certainement jouer le même rôle rénovation en ce qui concerne les sciences sociales que la physique nucléaire, par exemple, a joué pour les sciences physiques. En ce qui ne consiste cette révolution, alors que nous essayons d’évaluer ses implications plus large ? N. Troubetzkoy, l’illustre fondateur de la linguistique structurale, lui-même fourni la réponse à cette question. Dans une déclaration programmatique, il a réduit la méthode structurelle à quatre opérations de base. Tout d’abord, la linguistique changements structurels de l’étude des phénomènes linguistiques conscients à l’étude de leur infrastructure inconsciente, d’autre part, il ne traite pas les termes comme des entités indépendantes, au lieu de prendre comme sa - base de l’analyse les relations entre les termes, en troisième lieu, elle introduit la notion de système - "phonème moderne ne se contente pas de proclamer que les phonèmes font toujours partie d’un système, il montre concrètes phonémique systèmes et met en lumière leur structure" enfin, la linguistique structurale vise à découvrir des lois générales, que ce soit par induction "ou ... par déduction logique, qui leur donnerait un caractère absolu. "

Ainsi, pour la première fois, un en sciences sociales est en mesure de formuler des relations nécessaires. C’est le sens de Troubetzkoy le dernier point, tandis que les règles précédentes montrent comment la linguistique doit procéder pour atteindre cette fin. La grande majorité des linguistes modernes semblent suffisamment d’accord sur ce point. Mais quand un événement de cette importance se déroule dans une des sciences de l’homme, il est non seulement permise, mais nécessaire, des représentants de disciplines connexes immédiatement à l’examen de ses conséquences et son éventuelle application à des phénomènes d’un autre ordre.

De nouvelles perspectives alors s’ouvrir. Nous ne sommes plus traiter avec une collaboration occasionnelle lorsque le linguiste et l’anthropologue, chaque groupe de travail par lui-même, à l’occasion de communiquer les conclusions qui pense chaque mai intérêt que les autres. Dans l’étude de la parenté des problèmes (et, sans doute, l’étude d’autres problèmes également), l’anthropologue se trouve dans une situation qui ressemble formellement que la structure de linguiste. À l’instar de phonèmes, les termes de parenté sont des éléments de sens, comme les phonèmes, ils acquièrent de sens que si elles sont intégrées dans des systèmes. " Eke "phonémique systèmes", sont construits par l’esprit sur le niveau inconscient de la pensée. Enfin, la répétition de parenté, de mariage règles, des attitudes similaires prescrit entre certains types de famille, et ainsi de suite, dispersés dans les régions du globe et fondamentalement différentes sociétés, nous conduit à penser que, dans le cas de parenté ainsi que la linguistique, les phénomènes observables résultat de l’action de lois qui sont d’ordre général, mais implicite. Le problème peut donc être formulée comme suit : Bien qu’ils appartiennent à un autre ordre de réalité, les liens de parenté sont des phénomènes du même type que les phénomènes linguistiques. Puis l’anthropologue, en utilisant une méthode analogue à la forme (si pas dans le contenu) à la méthode utilisée dans la linguistique structurale, de réaliser le même type de progrès dans sa propre science que celle qui a eu lieu en linguistique ?

Nous serons encore plus fortement enclin à suivre cette voie après une observation supplémentaire a été fait. L’étude de la parenté problèmes est abordé aujourd’hui dans les mêmes termes et semble être en voie de l’mêmes difficultés que la linguistique a été à la veille de la révolution structuraliste. Il ya une analogie frappante entre les tentatives de certains cours d’eau et l’ancien linguistique, qui vise l’exposé des principes tout d’abord dans l’histoire. Dans les deux cas, il est entièrement (ou presque uniquement) analyse diachronique qui doit rendre compte de phénomènes synchronique. Troubetzkoy, en comparant la linguistique structurale et la vieille linguistique, la linguistique structurale définit comme un "système de structuralisme et de l’universalisme," qu’il contraste avec l’individualisme et "atomism" de l’ancien écoles. Et quand il considère l’analyse diachronique, son point de vue est profondément modifié : "L’évolution d’un système phonémique à un moment donné est dirigé par la tendance vers un objectif. ... Cette évolution a donc un sens, une logique interne, qui phonemics historique est appelé à élucider. » L’interprétation « individualiste » et « atomistique », fondée exclusivement sur la contingence historique, qui est critiquée par Troubetzkoy et Jakobson, est en fait la même chose que ce qui est généralement appliquée aux problèmes de parenté. Chaque détail de la terminologie et chaque spéciale mariage règle est associée à une coutume que soit la conséquence ou sa survie. Nous avons donc rencontrer un chaos de la discontinuité. Personne ne demande comment les systèmes de parenté, considéré comme synchronique des ensembles, pourrait être l’arbitraire produit d’une convergence de plusieurs institutions hétérogènes (dont la plupart sont hypothétiques), mais néanmoins fonctionner avec une sorte de régularité et d’efficacité.

Cependant, une difficulté préliminaire obstacle à la transposition de la méthode phonétique à l’étude anthropologique des peuples primitifs. Le superficielle analogie phonétique entre les systèmes et les systèmes de parenté est tellement forte qu’elle nous met immédiatement sur la mauvaise voie. Il est inexact d’assimiler les termes de parenté linguistique et phonèmes du point de vue de leur traitement formel. Nous savons que pour obtenir un droit structurelles analyse le linguiste phonèmes dans des "caractéristiques", dont il peut ensuite dans un groupe ou plusieurs "couples d’oppositions." Suite à une méthode analogue, l’anthropologue pourrait être tenté de briser la parenté analytique termes de tout système donné en leurs composants. Dans notre propre système de parenté, par exemple, le terme père a des connotations positives en ce qui concerne le sexe, l’âge relatif, et la production, mais il a une valeur zéro sur la dimension de collaterality, et il ne peut pas exprimer une affinal relation. Ainsi, pour chaque système, on peut se demander quelles relations sont exprimées et, pour chaque terme du système, ce qui connotation - positifs ou négatifs - Il prend en charge en ce qui concerne chacune des relations suivantes : de génération, de relation collatérale, de sexe, d’âge, d’alliance, etc . C’est à ce "micro-sociologique" niveau que l’on peut espérer découvrir les plus structurelle générale des lois, tout comme le linguiste découvre sa infraphonemic au niveau ou le physicien à l’infra-moléculaire ou atomique. On pourrait interpréter la tentative intéressante de Davis et Warner en ces termes.

Mais une triple opposition se pose immédiatement. Une véritable analyse scientifique doit être réel, de simplifier et d’explication. Ainsi, les caractéristiques qui sont le produit d’analyse phonémique ont une existence objective à partir de trois points de vue : psychologique, physiologique et même physique, ils sont moins nombreux que les phonèmes qui résultent de leur combinaison et, enfin, ils permettent de comprendre et de reconstruire le système. Rien du genre se dégage de la précédente hypothèse. Le traitement de parenté termes que nous venons d’analyse est dessiné en apparence seulement, car, en fait, le résultat est plus abstrait que le principe, au lieu de s’orienter vers le concret, on s’éloigne de celui-ci, et le système définitif - Si le système existe est - est seulement théorique. Deuxièmement, Davis et Warner expérience prouve que le système atteint par la présente procédure est infiniment plus complexe et plus difficile à interpréter que les données empiriques. Enfin, l’hypothèse n’a aucune valeur explicative, ce qui est, elle ne conduit pas à une compréhension de la nature du système et encore moins à une reconstruction de ses origines.

Quelle est la raison de cet échec ? Une adhésion trop littérale de méthode linguistique trahit en fait son essence même. Termes de parenté, non seulement ont une existence sociologique, ils sont également des éléments d’expression. Dans notre empressement à appliquer les méthodes d’analyse linguistique, nous ne devons pas oublier que, dans le cadre de vocabulaire, les termes de parenté doit être traitée avec des méthodes linguistiques en direct et pas de mode analogue. La linguistique nous enseigne précisément que l’analyse structurelle ne peut être appliquée directement à des mots, mais seulement à des mots déjà décomposé en phonèmes. Cela s’applique à tous les éléments de vocabulaire, y compris les termes de parenté. Depuis cela s’applique à la linguistique, il convient d’appliquer ipso facto à la sociologie du langage. Une tentative comme une possibilité dont nous discutons maintenant serait ainsi composé d’étendre la méthode de la linguistique structurale tout en ignorant ses besoins de base. Kroeber prophétique prévu cette difficulté dans un article écrit il ya de nombreuses années. Et si, à ce moment-là, il a conclu que une analyse structurelle de parenté terminologie était impossible, nous ne devons pas oublier que la linguistique elle-même a ensuite été limitée à phonétique, psychologique, historique et analyse. S’il est vrai que les sciences sociales doivent partager les limites de la linguistique, ils peuvent également bénéficier de ses progrès.

Nous ne devrions pas non plus perdre de vue les différences profondes entre les phonémique graphique d’une langue et le tableau de parenté termes d’une société. Dans le premier cas il ne saurait être question de fonction, nous savons tous que la langue est un moyen de communication. D’autre part, ce que le linguiste ne savait pas et ce que la linguistique structurale seul lui a permis de découvrir, c’est la façon dont la langue atteint cette fin. La fonction est évident, le système est resté inconnu. À cet égard, l’anthropologue se trouve dans la situation inverse. Nous savons, depuis les travaux de Lewis H. Morgan, qui constituent les termes de parenté systèmes, d’autre part, nous ne savons toujours pas leur fonction. L’interprétation erronée de la situation de départ réduit la plupart des analyses structurelles de systèmes de parenté à la pure tautologies. Ils témoignent de la négligence évidente et l’inconnu.

Cela ne signifie pas que nous devons abandonner l’espoir d’introduire l’ordre et la découverte de sens dans la nomenclature de parenté. Mais, nous devrions au moins reconnaître les problèmes particuliers soulevés par la sociologie du vocabulaire et le caractère ambigu des relations entre ses méthodes et ceux de la linguistique. Pour cette raison, il serait préférable de limiter la discussion à une affaire où l’analogie peut être clairement établi. Heureusement, nous avons un tel cas.

Ce qui est généralement appelé un "système de parenté" se compose de deux ordres tout à fait différente de la réalité. Tout d’abord, sont des termes par lesquels différents types de relations familiales sont exprimés. Mais la parenté n’est pas exprimé uniquement par la nomenclature. Les personnes ou catégories de personnes qui emploient ces termes l’impression (ou ne se sentent pas, selon le cas mai être) lié par le comportement prescrit dans leurs relations les uns avec les autres, comme le respect ou la connaissance, les droits ou obligations, et d’affection ou d’hostilité. Ainsi, avec ce que nous proposons d’appeler le système de terminologie (qui, strictement parlant, constitue le vocabulaire du système), il existe un autre système, à la fois psychologique et sociale dans la nature, que nous appellerons le système d’attitudes. S’il est vrai (comme nous l’avons montré ci-dessus) que l’étude des systèmes de terminologie nous place dans une situation analogue, mais inverse, à la situation dans laquelle nous avons affaire à des systèmes phonémique, cette difficulté est "inversée", comme il ont été, lorsque nous examinons les systèmes d’attitudes. Nous pouvons deviner le rôle joué par les systèmes d’attitudes, c’est-à assurer la cohésion du groupe et de l’équilibre, mais nous ne comprenons pas la nature des interconnexions entre les différentes attitudes, et nous ne la perçoivent leur nécessité. En d’autres termes, comme dans le cas de la langue, nous savons leur fonction, mais le système est inconnue.

Ainsi, nous trouvons une profonde différence entre le système de la terminologie et le système d’attitudes, et nous avons d’être en désaccord avec AR Radcliffe-Brown s’il croit vraiment, comme cela a été dit de lui, que les attitudes ne sont que l’expression ou la transposition des termes sur l’affectif. Les dernières années ont fourni de nombreux exemples de groupes dont le tableau de parenté termes ne reflètent pas exactement les attitudes familiales, et vice versa. Il serait erroné de supposer que le système de parenté constitue le principal moyen de réglementer les relations interpersonnelles dans toutes les sociétés. Même dans les sociétés où le système de parenté ne fonctionner comme telle, elle ne remplit pas ce rôle partout dans la même mesure. En outre, il est toujours nécessaire d’établir une distinction entre deux types d’attitudes : d’abord, la diffusion, uncrystallised, et non institutionnalisée des attitudes, mai que nous considérons comme le reflet ou la transposition de la terminologie sur le plan psychologique et, deuxièmement, de même que, ou en plus, les précédentes, ces attitudes qui sont stylisés, prescrit, et sanctionnée par des tabous ou des privilèges et s’exprime à travers un rituel fixe. Ces attitudes, loin d’être automatiquement reflétant la nomenclature, apparaissent souvent comme des élaborations secondaires, qui servent à résoudre les contradictions et de surmonter les lacunes inhérentes à la terminologie. a. Ce caractère synthétique est très apparente entre les Wik Munkan de l’Australie. Dans ce groupe, plaisante privilèges sanction une contradiction entre les relations de parenté qui relient les deux hommes non mariés et la relation théorique qui doit être assumée à exister entre eux afin de tenir compte de leur mariage au plus tard deux femmes qui ne sont pas eux-mêmes dans la relation . Il ya une contradiction entre deux systèmes possibles de la nomenclature, et l’accent mis sur les attitudes représente une tentative d’intégrer ou de transcender cette contradiction. Nous pouvons facilement d’accord avec Radcliffe-Brown et affirmer l’existence réelle de relations d’interdépendance entre la terminologie et le reste du système. Certains de ses critiques fait l’erreur de déduire de l’absence d’un parallélisme rigoureux entre les attitudes et la nomenclature, que les deux systèmes sont mutuellement indépendants. Mais cette relation d’interdépendance ne signifie pas un one-to-une corrélation. Le système d’attitudes constitue plutôt une dynamique d’intégration du système de terminologie.

Attribuées l’hypothèse (à laquelle nous souscrivons sans réserve) d’une relation fonctionnelle entre les deux systèmes, nous sommes néanmoins en droit, pour des raisons méthodologiques, indépendamment de traiter les problèmes propres à chaque système. C’est ce que nous proposons de faire ici pour un problème qui est considéré à juste titre le point de départ de toute théorie des attitudes - celui de l’oncle maternel. Nous essaierons de montrer comment une transposition formelle de la méthode structurale de la linguistique nous permet d’apporter un nouvel éclairage sur ce problème. Parce que la relation entre neveu et oncle maternel semble avoir fait l’objet d’importantes élaboration dans un grand nombre de sociétés primitives, des anthropologues ont consacré une attention particulière à celui-ci. Il ne suffit pas de noter la fréquence de ce thème, nous devons également compte pour elle. ...

Chapitre XII

Structure et Dialectique de Lang à Malinowski,
par Durkheim, Lévy-Bruhl, et van der Leeuw, des sociologues et des anthropologues qui ont été intéressés par les relations entre mythe et rituel avoir considérés comme mutuellement redondant. Certains de ces penseurs voir dans chaque mythe idéologique la projection d’un rite, l’objet du mythe est de fournir un fondement pour le rite. Autres inverser la relation et ce qui est rituel comme une sorte de fiction illustration du mythe. Indépendamment du fait que le mythe ou le rituel est l’original, ils reproduire l’autre, le mythe existe sur le plan conceptuel et sur le rituel le niveau d’action. Dans les deux cas, on suppose une correspondance ordonnée entre les deux, en d’autres termes, une homologie. Curieusement, cette homologie est la preuve que dans un petit nombre de cas. Il reste à voir pourquoi tous les mythes ne correspondent pas aux rites et vice-versa, et le plus important, pourquoi il devrait être l’une de ces curieux réplication en premier lieu.

J’ai l’intention de montrer au moyen d’un exemple concret de ce que l’homologie de ne pas toujours exister, ou, plus précisément, que, lorsque nous faire trouver une telle homologie, il pourrait très bien constituer une illustration d’une relation plus générale entre mythe et rituel et entre les rites eux-mêmes. Une telle relation généralisées impliquerait un un-à-une correspondance entre les éléments de rites qui semblent différents, ou entre les éléments d’un rite et de tout un mythe. Cette correspondance n’a pas pu, toutefois, être considéré comme une homologie. Dans l’exemple qui seront examinées ici, la reconstruction de la correspondance nécessite une série d’opérations préalables. - qui est, les permutations ou les transformations qui mai fournir la clé de la correspondance. Si cette hypothèse est correcte, nous devrons renoncer à la causalité mécanique comme une explication et, au lieu, de concevoir la relation entre mythe et rituel comme dialectique, accessible uniquement si les deux ont d’abord été réduite à ses éléments structurels. ...

Chapter XV

Structure sociale

LE TERME "structure sociale" se réfère à un groupe de problèmes dont la portée paraît tellement large et la définition imprécise de sorte qu’il n’est guère possible pour un document strictement limité en taille à les satisfaire pleinement. Cela se reflète dans le programme de ce colloque, dans lequel des problèmes étroitement liés à la structure sociale ont été attribués à plusieurs documents, tels que ceux sur "Style", Celles-ci devraient être lus en relation avec le présent document.

D’autre part, des études de la structure sociale a à voir avec les aspects formels des phénomènes sociaux, ils sont donc difficile à définir, et encore plus difficile à discuter, sans se chevaucher d’autres domaines relatifs à l’sciences exactes et naturelles, où les problèmes sont de même fixés dans le plan formel, ou plutôt, où l’expression formelle des différents problèmes admet du même type de traitement. En fait, l’intérêt principal de la structure sociale, études semble être qu’elles donnent l’anthropologue espérons que, grâce à la formalisation de ses problèmes, il mai emprunter les méthodes et les types de solutions dans des disciplines qui ont été très en avance sur son propre dans cette direction.

Dans ces conditions, il est évident que le terme "structure sociale" doit d’abord être définies et que des explications devraient être donnés de la différence qui permet de distinguer les études de la structure sociale du champ illimité de descriptions, analyses et théories traitant avec les relations sociales au sens large, qui se fondent avec l’ensemble du champ de l’anthropologie sociale. Cela est d’autant plus nécessaire, étant donné que certains de ceux qui ont contribué à la mise en dehors de la structure sociale comme un domaine particulier des études anthropologiques conçu l’ancien dans de nombreuses manières différentes et parfois même, semble-t-il, est venu à nourrir des doutes sérieux quant à la validité de leur entreprise. Par exemple, Kroeber écrit dans la deuxième édition de son Anthropologie :

"Structure" semble être un juste rendement à un mot qui a parfaitement bon sens, mais devient soudain mode attrayant pour une dizaine d’années - comme « rationalisation » - et au cours de son mode tend à être appliquées sans discrimination en raison de la connotation de plaisir le son Bien sûr, un type de personnalité peut être considéré comme ayant une structure. Mais ce qui permet une physiologie, tout organisme, toutes les sociétés et toutes les cultures, des cristaux, des machines - en fait tout ce qui n’est pas totalement amorphe a une structure. Alors, que « la structure », ajoute le sens de notre expression semble être à rien, sauf à provoquer une certaine perplexité agréable ".

Bien que ce passage concerne plus particulièrement la notion de "structure de la personnalité de base", il a des implications en ce qui concerne l’utilisation généralisée de la notion de structure en anthropologie.

Une autre raison fait une définition de la structure sociale obligatoire : De la structuraliste point de vue que l’on doit adopter ne serait-ce que pour donner le problème de son sens, il serait sans espoir de tenter de trouver une définition valable de la structure sociale sur une base inductive, par abstraction des éléments communs de l’utilisation et les définitions actuelles entre tous les chercheurs qui affirment avoir fait "structure sociale" l’objet de leurs études. Si ces concepts ont un sens, il s’agit, en premier lieu, que la notion de l’ouvrage dispose d’une structure. C’est ce que nous allons essayer de définir dès le départ comme une précaution contre se laisser submergé par un fastidieux inventaire des livres et documents traitant des relations sociales, la simple énumération de ce qui échappement plus de l’espace limité dont nous disposons. Lors d’une autre étape, nous aurons à voir dans quelle mesure et dans quelles orientations le terme "structure sociale", tel qu’il est utilisé par les différents auteurs, s’écarte de notre définition. Cela sera fait dans la section consacrée à la parenté, car la notion de l’ouvrage a trouvé son chef de demande dans ce domaine et que les anthropologues ont généralement choisi d’exprimer leur point de vue théorique aussi à cet égard.

DÉFINITION DES PROBLÈMES ET PROCEDE passant maintenant à la tâche de définir « la structure sociale,« il est un point qui devrait être éclaircie immédiatement. Le terme "structure sociale" n’a rien à voir avec la réalité empirique mais avec des modèles qui sont mis en place après. Cela devrait aider à clarifier la différence entre deux concepts qui sont tellement proche de chacun, ils ont souvent été confondue, à savoir ceux de la structure sociale et des relations sociales. Il suffit d’indiquer à ce les relations sociales se composent des matières premières, dont les modèles qui composent la structure sociale sont construits, tandis que la structure sociale peuvent, en aucun cas, être réduit à l’ensemble des relations sociales à être décrits dans une société donnée. Par conséquent, la structure sociale ne peut prétendre à un domaine de sa propre entre autres dans les études sociales. Il s’agit plutôt d’une méthode à appliquer à tout type d’études sociales, similaire à l’analyse structurelle en cours dans d’autres disciplines.

La question devient alors celle de déterminer quel type de modèle mérite le nom de « la structure ». Ce n’est pas une question anthropologique, mais un qui appartient à la méthodologie de la science en général. Garder cela à l’esprit, nous pouvons dire qu’une structure se compose d’un modèle de réunion avec plusieurs exigences.

Tout d’abord, la structure présente les caractéristiques d’un système. Il est composé de plusieurs éléments, dont aucun ne peut subir un changement sans effectuer des changements dans tous les autres éléments.

Deuxièmement, quel que soit le modèle, il devrait être possible de commander une série de transformations résultant en un groupe de modèles du même type.

Troisièmement, ces propriétés permettent de prédire comment le modèle de réagir si un ou plusieurs de ses éléments sont soumis à certaines modifications.

Enfin, le modèle devrait être constitué afin de rendre immédiatement intelligibles tous les faits observés.

Ces exigences étant le modèle pour toute valeur structurelles, plusieurs conséquences. Celles-ci, toutefois, ne se rapporte pas à la définition de l’ouvrage, mais a à voir avec le chef biens exposés et des problèmes soulevés par l’analyse structurelle lorsqu’ils sont dans le domaine social et dans d’autres domaines.

D’observation et d’expérimentation.
Grande soins devraient être prises pour distinguer entre l’observation et l’expérimentation. Pour observer les faits et d’élaborer des dispositifs méthodologiques qui permettent la construction de modèles à partir de ces faits n’est pas du tout la même chose que d’expérimenter sur les modèles. Par "l’expérimentation sur des modèles », nous entendons l’ensemble des procédures visant à déterminer comment un modèle de réagir quand il est soumis au changement et à comparer les modèles du même type ou différentes. Cette distinction est d’autant plus nécessaire, depuis de nombreuses discussions sur la structure sociale s’articulent autour de l’apparente contradiction entre le concret et la spécificité des données ethnologiques et l’abstrait et formel caractère généralement manifestée par des études structurales. Cette contradiction, disparaît comme on vient de se rendre compte que ces éléments appartiennent à deux niveaux totalement différents, ou plutôt à deux étapes du même processus. Le niveau d’observation, pour l’essentiel, on pourrait presque dire que la seule règle est que tous les faits doivent être soigneusement observés et décrits, sans permettre à tout préjugé théorique de décider si certaines sont plus importantes que d’autres. Cette règle implique, à son tour, que les faits doivent être étudiés par rapport à eux-mêmes (par quel type de processus concrets ont-ils vu le jour ?) Et par rapport à l’ensemble (toujours en vue d’établir un lien entre chaque modification que l’on peut observer dans un secteur à la situation mondiale dans laquelle il apparu pour la première fois).

Cette règle, de même avec ses corollaires a été explicitement formulé par K. Goldstein par rapport à la psycho-physiologiques études, mai et il est considérée comme valable pour tout type d’analyse structurelle. Sa conséquence immédiate est que, loin d’être contradictoires, il ya une relation directe entre le détail et concret de la description ethnographique et la validité et de la généralité du modèle qui est construit après. Car, si de nombreux modèles mai être utilisés comme des dispositifs de décrire et d’expliquer les phénomènes, il est évident que le meilleur modèle sera toujours celui qui est le cas, c’est la plus simple possible modèle qui, tout en étant provenant exclusivement des faits en vertu de examen, il est également possible de représenter la totalité d’entre eux. Par conséquent, la première tâche consiste à déterminer ce que sont ces faits.

Conscience et inconscience
Une seconde distinction est à faire avec le conscient ou inconscient caractère des modèles. Dans l’histoire de la pensée structuraliste, Boas mai a le mérite d’avoir introduit cette distinction. Il a précisé qu’une catégorie de faits peuvent plus facilement céder à l’analyse structurale lorsque le groupe social dans lequel il se manifeste n’ait pas élaboré un modèle de conscience à interpréter ou justifier.

Texte en anglais à partir d’ici .....

Some readers may be surprised to find Boas’ name quoted in connection with structural theory, since he has often been described as one of the main obstacles in its path. But this writer has tried to demonstrate that Boas’ shortcomings in matters of structural studies did not lie in his failure to understand their importance and significance, which he did, as a matter of fact, in the most prophetic way. They rather resulted from the fact that he imposed on structural studies conditions of validity, some of which will remain forever part of their methodology, while some others are so exacting and impossible to meet that they would have withered scientific development in any field.

A structural model may be conscious or unconscious without this difference affecting its nature. It can only be said that when the structure of a certain type of phenomena does not lie at a great depth, it is more likely that some kind of model, standing as a screen to hide it, will exist in the collective consciousness. For conscious models, which are usually known as “norms,” are by definition very poor ones, since they are not intended to explain the phenomena but to perpetuate them. Therefore, structural analysis is confronted with a strange paradox well known to the linguist, that is : the more obvious structural organisation is, the more difficult it becomes to reach it because of the inaccurate conscious models lying across the path which leads to it.

From the point of view of the degree of consciousness, the anthropologist is confronted with two kinds of situations. He may have to construct a model from phenomena the systematic character of which has evoked no awareness on the part of the culture ; this is the kind of simpler situation referred to by Boas as providing the easiest ground for anthropological research. Or else the anthropologist will be dealing on the one hand with raw phenomena and on the other with the models already constructed by the culture to interpret the former. Though it is likely that, for the reasons stated above, these models will prove unsatisfactory, it is by no means necessary that this should always be the case. As a matter of fact, many “primitive” cultures have built models of their marriage regulations which are much more to the point than models built by professional anthropologists Thus one cannot dispense with studying a culture’s “home-made” models for two reasons. First, these models might prove to be accurate or, at least, to provide some insight into the structure of the phenomena ; after all, each culture has its own theoreticians whose contributions deserve the same attention as that which the anthropologist gives to colleagues. And, second, even if the models are biased or erroneous, the very bias and type of error are a part of the facts under study and probably rank among the most significant ones. But even when taking into consideration these culturally produced models, the anthropologist does not forget – as he has sometimes been accused of doing – that the cultural norms are not of themselves structures. Rather, they furnish an important contribution to an understanding of the structures, either as factual documents or as theoretical contributions similar to those of the anthropologist himself.

This point has been given great attention by the French sociological school. Durkheim and Mauss, for instance, have always taken care to substitute, as a starting point for the survey of native categories of thought, the conscious representations prevailing among the natives themselves for those stemming from the anthropologist’s own culture. This was undoubtedly an important step, which, nevertheless, fell short of its goal because these authors were not sufficiently aware that native conscious representations, important as they are, may be just as remote from the unconscious reality as any other.

Structure and Measure. It is often believed that one of the main interests of the notion of structure is to permit the introduction of measurement in social anthropology. This view has been favoured by the frequent appearance of mathematical or semi-mathematical aids in books or articles dealing with social structure. It is true that in some cases structural analysis has made it possible to attach numerical values to invariants. This was, for instance, the result of Kroeber’s study of women’s dress fashions, a landmark in structural research, as well as of a few other studies which will be discussed below.

However, one should keep in mind that there is no necessary connection between measure and structure. Structural studies are, in the social sciences, the indirect outcome of modern developments in mathematics which have given increasing importance to the qualitative point of view in contradistinction to the quantitative point of view of traditional mathematics. It has become possible, therefore, in fields such as mathematical logic, set theory, group theory, and topology, to develop a rigorous approach to problems which do not admit of a metrical solution. The outstanding achievements in this connection – which offer themselves as springboards not yet utilised by social scientist e to be found in J. von Neumann and O. Morgenstern, Theory of Games and Economic Behaviour ; N. Wiener, Cybernetics ; and C. Shannon and W. Weaver, The Mathematical Theory of Communication. ...

Chapter XVI ...

I do not postulate a kind of pre-existent harmony between different levels of structure. They may be – and often are – completely contradictory, but the modes of contradiction all belong the same type. Indeed, according to dialectic materialism it should always be possible to proceed, by transformation, from economic or social structure to the structure of law, art, or religion. But Marx never claimed that there was only one type of transformation - for example, that ideology was simply a “mirror image” of social relations. In his view, these transformations were dialectic, and in some cases he went to great lengths to discover the crucial transformation which at first sight seemed to defy analysis.

If we grant, following Marxian thought, that infrastructures and superstructures are made up of multiple levels and that there various types of transformations from one level to another, it becomes possible – in the final analysis, and on the condition that we disregard content – to characterise different types in terms of the types of transformations which occur within them. These types of transformations amount to formulas showing the number, magnitude, direction, and order of the convolutions that must be unravelled, so to speak, in order to uncover (logically, not normatively) an ideal homologous relationship between the different structural levels.

Now, this reduction to an ideal homologous relationship is at the same time a critique. By replacing a complex model with a simple model that has greater logical value, the anthropologist reveals the detours and manoeuvres, conscious and unconscious, that each society uses in an effort to resolve its inherent contradictions – or at any rate to conceal them.

This clarification, already furnished by my previous studies, which Gurvitch should have taken into consideration, may expose me to still another criticism. If every society has the same flaw, manifested by the two-fold problem – of logical disharmony and social inequality, why should its more thoughtful members endeavour to change it ? Change would mean only the replacement of one social form by another ; and if one is no better than the other, why bother ?

In support of this argument, Rodinson cites a passage from Tristes Tropiques : “No human society is fundamentally good, but neither is any of them fundamentally bad ; all offer their members certain advantages, though we must bear in mind a residue of iniquity, apparently more or less constant in its importance... .

But here Rodinson isolates, in biased fashion, one step in a reasoning process by which I tried to resolve the apparent conflict between thought and action. Actually :

(1) In the passage criticised by Rodinson, the relativistic argument serves only to oppose any attempt at classifying, in relation to one another, societies remote from that of the observer - for instance, from our point of view, a Melanesian group and a North American tribe. I hold that we have no conceptual framework available that can be legitimately applied to societies located opposite poles of the sociological world and considered in their mutual relationships.

(2) On the other hand, I carefully distinguished this first frame from a very different one, which would consist in comparing remote societies, but two historically related stages in the development of our own society – or, to generalise, of the observer’s society. When the frame of reference is thus “internalised,” everything changes. This second phase permits us, without retaining anything from any particular society,

... to make use of one and all of them in order to distinguish those principles of social life which may be applied to the reform of our own customs, and not of those of societies foreign to our own. That is to say, in relation to our own society we stand in a position of privilege which is exactly contrary to that which I have just described ; for our own society is the only one that we can transform and yet not destroy, since the changes we should introduce would come from within.

Far from being satisfied, then, with a static relativism – as are certain American anthropologists justly criticised by Rodinson (but with whom he wrongly identifies me) – I denounce it as a danger ever-present on the anthropologist’s path. My solution is constructive, since it derives from the same principles, two apparently contradictory attitudes, namely, respect for societies very different from ours, and active participation in the transformation of our own society.

Is there any reason here, as Rodinson claims, “to reduce Billancourt to desperation” ? Billancourt would deserve little consideration if cannibalism in its own way (and more seriously so than primitive man-eaters, for its cannibalism would be spiritual), should feel it necessary to its intellectual and moral security that the Papuans become nothing but proletarians. Fortunately, anthropological theory does not play such an important role in trade union demands. On the other hand, I am surprised that a scientist with advanced ideas should present an argument already formulated by thinkers of an entirely different orientation.

Neither in Race and History nor in Tristes Tropiques did I intend to disparage the idea of progress ; rather, I should like to see progress transferred from the rank of a universal category of human development to that of a particular mode of existence, characteristic of our own society – and perhaps of several others – whenever that society reaches the stage of self-awareness.

To say that this concept of progress – progress considered as an internal property of a given society and devoid of a transcendent meaning outside it – would lead men to discouragement, seems to me to be a transposition in the historical idiom and on the level of collective life, of the familiar argument that all morality would be jeopardised if the individual ceased to believe in the immortality of his soul. For centuries, this argument, so much like Rodinson’s, was raised to oppose atheism. Atheism would “reduce men to desperation” – most particularly the working classes, who, it was feared, would lose their motivation for work if there were no punishments or rewards promised in the hereafter.

Nevertheless, there are many men (especially in Billancourt) who accept the idea of a personal existence confined to the duration of their earthly life ; they have not for this reason abandoned their sense of morality or their willingness to work for the improvement of their lot and that of their descendants.

Is what is true of individuals less true of groups ? A society can live, act, and be transformed, and still avoid becoming intoxicated with the conviction that all the societies which preceded it during tens of millenniums did nothing more than prepare the ground for its advent, that all its contemporaries – even those at the antipodes – are diligently striving to overtake it, and that the societies which will succeed it until the end of time ought to be mainly concerned with following in its path. This attitude is as naive as maintaining that the earth occupies the center of the universe and that man is the summit of creation. When it is professed today in support of our particular society, it is odious.

What is more, Rodinson attacks me in the name of Marxism, whereas my conception is infinitely closer to Marx’s position than his. I wish to point out, first, that the distinctions developed in Race and History among stationary history, fluctuating history and cumulative history can be derived from Marx himself :

The simplicity of the organisation for production in those, self-sufficing communities that constantly reproduce themselves in the same form and, when accidentally destroyed, spring again on the spot and with the same name – this simplicity supplies the key to the secret of the unchangeableness of Asiatic Societies, an unchangeableness in such striking contrast with constant dissolution and refounding of Asiatic states, and never-ceasing changes of dynasty.

Actually, Marx and Engels frequently express the idea that primitive, or allegedly primitive, societies are governed by “blood ties” (which, today, we call kinship systems) and not by economic relationships. If these societies were not destroyed from without, they might endure indefinitely. The temporal category applicable to them has nothing to do with the one we employ to understand, the development of our own society.

Nor does this conception contradict in the least the famous dictum of the Communist Manifesto that “the history of all hitherto existing society is the history of class struggles.” In the light of Hegel’s philosophy of the State, this dictum does not mean that the class struggle is co-extensive with humanity, but that the ideas of history and society can be applied, in the full sense which Marx gives them, only from the time when the class struggle first appeared. The letter to Weydemeyer clearly supports this : “What I did that was new,” Marx wrote, “was prove ... that the existence of classes is only bound up with particular historical phases in the development of production... .”

Rodinson should, therefore, ponder the following comment by Marx in his posthumously published introduction to A Contribution to the Critique of Political Economy :

The so-called historical development amounts in the last analysis to this, that the last form considers its predecessors as stages leading up to itself and perceives them always one-sidedly, since it is very seldom and only under certain conditions that it is capable of self-criticism ...

This chapter had already been written when Jean-François Revel published his lively, provocative, but often unfair study.

Since part of his chapter VIII concerns my work, I shall briefly reply –

Revel criticises me, but not without misgivings. If he recognised me for what I am an anthropologist who has conducted field work and who, having presented his findings, has re-examined the theoretical principles of his discipline on the basis of these specific findings and the findings of his colleagues – Revel would, according to his own principles, refrain from discussing my work. But he begins by changing me into a sociologist, after which he insinuates that, because of my philosophical training, my sociology is nothing but disguised philosophy. From then on we are among colleagues, and Revel can freely tread on my reserves, without realising that he is behaving toward anthropology exactly as, throughout his book, he upbraids philosophers for behaving toward the other empirical sciences.

But I am not a sociologist, and my interest in our own society is only a secondary one. Those societies which I seek first to understand are the so-called primitive societies with which anthropologists are concerned. When, to Revel’s great displeasure, I interpret the exchange of wine in the restaurants of southern France in terms of social prestations, my primary aim is not to explain contemporary customs by means of archaic institutions but to help the reader, a member of a contemporary society, to rediscover, in his own experience and on the basis of either vestigial or embryonic practices, institutions that would otherwise remain unintelligible to him. The question, then, is not whether the exchange of wine is a survival of the potlatch, but whether, by means of this comparison we succeed better in grasping the feelings, intentions, and attitudes of the native involved in a cycle of prestations. The ethnographer who has lived among natives and has experienced such ceremonies as either a spectator or a participant, is entitled to an opinion on this question ; Revel is not.

Moreover, by a curious contradiction, Revel refuses to admit that the categories of primitive societies may be applied to our own society, although he insists upon applying our categories to primitive societies. “It is absolutely certain,” he says, that prestations “in which the goods of a society are finally used up ... correspond to the specific conditions of a mode of production and a social structure.” And he further declares that “it is even probable – an exception unique in history, which would then have to be explained – that prestations mask the economic exploitation of certain members of each society of this type by others.”

How can Revel be “absolutely certain” ? And how does he know that the exception would be “unique in history” ? Has he studied Melanesian and Amerindian institutions in the field ? Has, he so much as analysed the numerous works dealing with the kula and its evolution from 1910 to 1950, or with the potlatch from the beginning of the nineteenth century until the twentieth ? If he had, he would know, first of all, that it is absurd to think that all the goods of a society are used up in these exchanges. And he would have more precise ideas of the proportions and the kinds of goods involved in certain cases and in certain periods. Finally, and above all, he would be aware that, from the particular viewpoint that interests him – namely, the economic exploitation of man by man – the two culture areas to which he refers cannot be compared. In one of them, this exploitation presents characteristics which we might at best call pre-capitalistic. Even in Alaska and British Columbia, however, this exploitation is an external factor : It acts only to give greater scope to institutions which can exist without it, and whose general character must be defined in other terms.

Should Revel hasten to protest, let me add that I am only paraphrasing Engels, who by chance expressed his opinion on this problem, and with respect to the same societies which Revel has in mind. Engels wrote :

In order finally to get clear about the parallel between the Germans of Tacitus and the American Redskins I have made some gentle extractions from the first volume of your Bancroft [The Native Races of the Pacific States, etc.]. The similarity is indeed all the more surprising because the method of production is so fundamentally different – here hunters and fishers without cattle-raising or agriculture, there nomadic cattle-raising passing into agriculture. It just proves how at this stage the type of production is less decisive than the degree in which the old blood bonds and the old mutual community of the sexes within the tribe have been dissolved. Otherwise the Tlingit in the former Russian America could not be the exact counterpart of the Germanic tribes . ...

It remained for Marcel Mauss, in Essai sur le Don (which Revel criticises quite inappropriately) to justify and develop Engels’ hypothesis that there is a striking parallelism between certain Germanic and Celtic institutions and those of societies having the potlatch. He did this with no concern about uncovering the “specific conditions of a mode of production,” which, as Engels had already understood, would be useless. But then Marx and Engels knew incomparably more anthropology almost a hundred years ago than Revel knows today.

I am, on the other hand, in full agreement with Revel when he writes, “Perhaps the most serious defect which philosophy has transmitted to sociology is ... the obsession with creating in one stroke holistic explanations." He has here laid down his own indictment. He rebukes me because I have not proposed explanations and because I have acted as if I believed “that there is fundamentally no reason why one society adopts one set of institutions and another society other institutions.” He requires anthropologists to answer questions such as : “Why are societies structured along different lines ? Why does each structure evolve ? ... Why are there differences [Revel’s italics] between institutions and between societies, and what responses to what conditions do these differences imply ... ?” These questions are highly pertinent, and we should like to be able to answer them. In our present state of knowledge, however, we are in a position to provide answers only for specific and limited cases, and even here our interpretations remain fragmentary and isolated. Revel can believe that the task is easy, since for him “it is absolutely certain” that ever since the social evolution of man began, approximately 500,000 years ago, economic exploitation can explain everything.

As we noted, this was not the opinion of Marx and Engels. According to their view, in the non- or pre-capitalistic societies kinship ties played a more important role than class relations. I do not believe that I am being unfaithful to their teachings by trying, seventy years after Lewis H. Morgan, whom they admired so greatly, to resume Morgan’s endeavour – that is, to work out a new typology of kinship systems in the light of knowledge acquired in the field since then, by myself and others.”

I ask to be judged on the basis of this typology, and not on that of the psychological or sociological hypotheses which Revel seizes upon ; these hypotheses are only a kind of mental scaffolding, momentarily useful to the anthropologist as a means of organising his observations, building his classifications, and arranging his types in some sort of order. If one of my colleagues were to come to me and say that my theoretical analysis of Murngin or Gilyak kinship systems was inconsistent with his observations, or that while was in the field I misinterpreted chieftainship among the Nambicuara, the place of art in Caduveo society, the social structure of the Bororo, or the nature of clans among the Tupi-Cawahib, I should listen to him with deference and attention. But Revel, who could not care less about patrilineal descent, bilateral marriage, dual organisation, or dysharmonic systems, attacks me – without even understanding that I seek only to describe and analyse certain aspects of the objective world – for “flattening out social reality,” For him everything is flat that cannot be instantaneously expressed in a, language which he may perhaps use correctly in reference to Western civilisation, but to which its inventors explicitly denied any other application. Now it is my turn to exclaim : Indeed, “what is the use of philosophers ?”

Reasoning in the fashion of Revel and Rodinson would mean surrendering the social sciences to obscurantism. What would we think of building contractors and architects who condemned cosmic physics in the name of the law of gravity and under the argument that a geometry based on curved spaces would render obsolete the traditional techniques for demolishing or building houses ? The house-wrecker and the architect are right to believe only in Euclidean geometry, but they do not try to force it upon the astronomer. And if the help of the astronomer is required in remodelling his house, the categories he uses to understand the universe do not automatically prevent him from handling the pick-axe and plumb-line.

Claude Lévi-Strauss 1962

History and Dialectic


Source : final chapter of “The Savage Mind,” October 1961, translated by George Wiedenfeld and Nicholson Ltd 1966. Footnotes and references omitted


In the course of this work I have allowed myself, not without ulterior motive, to borrow a certain amount of Sartre’s vocabulary. I wanted to lead the reader to face a problem, the discussion of which will serve to introduce my conclusion. The problem is to what extent thought that can and will be both anecdotal and geometrical may yet be called dialectical. The savage mind totalizes. It claims indeed to go very much further in this direction than Sartre allows dialectical reason, for, on the one hand, the latter lets pure seriality escape (and we have just seen how classificatory systems succeed in incorporating it) and, on the other, it excludes schematization, in which these same systems reach their consummation. In my view, it is in this intransigent refusal on the part of the savage mind to allow anything human (or even living) to remain alien to it, that the real principle of dialectical reason is to be found. But my idea of the latter is very different from Sartre’s.

In reading the Critique it is difficult to avoid feeling that Sartre vacillates between two conceptions of dialectical reason. Sometimes he opposes dialectical and analytical reason as truth and error, if not as God and the devil, while at other times these two kinds of reason are apparently complementary, different routes to the same truths. The first conception not only discredits scientific knowledge and finally even leads to suggesting the impossibility of a science of biology, it also involves a curious paradox ; for the work entitled Critique de la raison dialectique is the result of the author’s exercise of his own analytical reason : he defines, distinguishes, classifies and opposes. This philosophical treatise is no different in kind from the works it examines and with which it engages in discussion, if only to condemn them. It is difficult to see how analytical reason could be applied to dialectical reason and claim to establish it, if the two are defined by mutually exclusive characteristics. The second conception is open to a different objection : if dialectical and analytical reason ultimately arrive at the same results, and if their respective truths merge into a single truth, then, one may ask in what way they are opposed and, in particular, on what grounds the former should be pronounced superior to the latter. Sartre’s endeavour seems contradictory in the one case and superfluous in the other.

How is the paradox to be explained, and avoided ? Sartre attributes a reality sui generis to dialectical reason in both the hypotheses between which he hesitates. It exists independently of analytical reason, as its antagonist or alternatively its complement. Although in both our cases Marx is the point of departure of our thought, it seems to me that the Marxist orientation leads to a different view, namely, that the opposition between the two sorts of reason is relative, not absolute. It corresponds to a tension within human thought which may persist indefinitely de facto, but which has no basis de jure. In my view dialectical reason is always constitutive : it is the bridge, forever extended and improved, which analytical reason throws out over an abyss ; it is unable to see the further shore but it knows that it is there, even should it be constantly receding. The term dialectical reason thus covers the perpetual efforts analytical reason must make to reform itself if it aspires to account for language, society and thought ; and the distinction between the two forms of reason in my view rests only on the temporary gap separating analytical reason from the understanding of life. Sartre calls analytical reason reason in repose ; I call the same reason dialectical when it is roused to action, tensed by its efforts to transcend itself.

In Sartre’s terminology I am therefore to be defined as a transcendental materialist and aesthete. I am a transcendental materialist because I do not regard dialectical reason as something other than analytical reason, upon which the absolute originality of a human order would be based, but as something additional in analytical reason : the necessary condition for it to venture to undertake the resolution of the human into the non-human. And I count as an aesthete since Sartre applies this term to anyone purporting to study men as if they were ants. But apart from the fact that this seems to me just the attitude of any scientist who is an agnostic, there is nothing very compromising about it, for ants with their artificial tunnels, their social life and their chemical messages, already present a sufficiently tough resistance to the enterprises of analytical reason ... So I accept the characterization of aesthete in so far as I believe the ultimate goal of the human sciences to be not to constitute, but to dissolve man. The pre-eminent value of anthropology is that it represents the first step in a procedure which involves others. Ethnographic analysis tries to arrive at invariants beyond the empirical diversity of human societies ; and, as the present work shows, these are sometimes to be found at the most unforeseen points. Rousseau foresaw this with his usual acumen : ‘One needs to look near at hand if one wants to study men ; but to study man one must learn to look from afar ; one must first observe differences in order to discover attributes’. However, it would not be enough to reabsorb particular humanities into a general one. This first enterprise opens the way for others which Rousseau would not have been so ready to accept and which are incumbent on the exact natural sciences : the reintegration of culture in nature and finally of life within the whole of its physico-chemical conditions.

However, in spite of the intentionally brutal turn given to my thesis, I am not blind to the fact that the verb ‘dissolve’ does not in any way imply (but even excludes) the destruction of the constituents of the body subjected to the action of another body. The solution of a solid into a liquid alters the disposition of its molecules. It also often provides an efficacious method of putting them by so that they can be recovered in case of need and their properties be better studied. The reductions I am envisaging are thus legitimate, or indeed possible, only if two conditions are satisfied. First, the phenomena subjected to reduction must not be impoverished ; one must be certain that everything contributing to their distinctive richness and originality has been collected around them. For it is pointless to pick up a hammer unless to hit the nail on the head.

Secondly, one must be ready to accept, as a consequence of each reduction, the total overturning of any preconceived idea concerning the level, whichever it may be, one is striving to attain. The idea of some general humanity to which ethnographic reduction leads, will bear no relation to any one may have formed in advance. And when we do finally succeed in understanding life as a function of inert matter, it will be to discover that the latter has properties very different from those previously attributed to it. Levels of reduction cannot therefore be classed as superior and inferior, for the level taken as superior must, through the reduction, be expected to communicate retroactively some of its richness to the inferior level to which it will have been assimilated. Scientific explanation consists not in moving from the complex to the simple but in the replacement of a less intelligible complexity by one which is more so.

Seen in this light, therefore, my self is no more opposed to others than man is opposed to the world : the truths learnt through man are ‘of the world’, and they are important for this reason. This explains why I regard anthropology as the principle of all research, while for Sartre it raises a problem in the shape of a constraint to overcome or a resistance to reduce. And indeed what can one make of peoples ‘without history’ when one has defined man in terms of dialectic and dialectic in terms of history ? Sometimes Sartre seems tempted to distinguish two dialectics : the ‘true’ one which is supposed to be that of historical societies, and a repetitive, short-term dialectic, which he grants so-called primitive societies whilst at the same time placing it very near biology. This imperils his whole system, for the bridge between man and nature which he has taken such pains to destroy would turn out to be surreptitiously re-established through ethnography, which is indisputably a human science and devotes itself to the study of these societies. Alternatively Sartre resigns himself to putting a ‘stunted and deformed’ humanity on man’s side, but not without implying that its place in humanity does not belong to it in its own right and is a function only of its adoption by historical humanity : either because it has begun to internalize the latter’s history in the colonial context, or because, thanks to anthropology itself, historical humanity has given the blessing of meaning to an original humanity which was without it. Either way the prodigious wealth and diversity of habits, beliefs and customs is allowed to escape ; and it is forgotten that each of the tens or hundreds of thousands of societies which have existed side by side in the world or succeeded one another since man’s first appearance, has claimed that it contains the essence of all the meaning and dignity of which human society is capable and, reduced though it may have been to a small nomad band or a hamlet lost in the depths of the forest, its claim has in its own eyes rested on a moral certainty comparable to that which we can invoke in our own case. But whether in their case or our own, a good deal of egocentricity and naivety is necessary to believe that man has taken refuge in a single one of the historical or geographical modes of his existence, when the truth about man resides in the system of their differences and common properties.

He who begins by steeping himself in the allegedly self-evident truths of introspection never emerges from them. Knowledge of men sometimes seems easier to those who allow themselves to be caught up in the snare of personal identity. But they thus shut the door on knowledge of man : written or unavowed ‘confessions’ form the basis of all ethnographic research. Sartre in fact becomes the prisoner of his Cogito : Descartes made it possible to attain universality, but conditionally on remaining psychological and individual ; by sociologizing the Cogito, Sartre merely exchanges one prison for another. Each subject’s group and period now take the place of timeless consciousness. Moreover, Sartre’s view of the world and man has the narrowness which has been traditionally credited to closed societies. His insistence on tracing a distinction between the primitive and the civilized with the aid of gratuitous contrasts reflects, in a scarcely more subtle form, the fundamental opposition he postulates between myself and others. Yet there is little difference between the way in which this opposition is formulated in Sartre’s work and the way it would have been formulated by a Melanesian savage, while the analysis of the practico-inert quite simply revives the language of animism.

Descartes, who wanted to found a physics, separated Man from Society. Sartre, who claims to found an anthropology, separates his own society from others. A Cogito – which strives to be ingenuous and raw – retreats into individualism and empiricism and is lost in the blind alleys of social psychology. For it is striking that the situations which Sartre uses as a starting point for extracting the formal conditions of social reality – strikes, boxing matches, football matches, bus-stop queues – are all secondary incidentals of life in society ; and they cannot therefore serve to disclose its foundations.

This axiomatic, so far removed from the anthropologist’s, is all the more disappointing when he feels himself very close to Sartre whenever the latter applies himself, with incomparable artistry, to grasping, in its dialectical movement, a present or past social experience within our own culture. Sartre then does what every anthropologist tries to do in the case of different cultures : to put himself in the place of the men living there, to understand the principle and pattern of their intentions, and to perceive a period or a culture as a significant set. In this respect we can often learn from him, but these are lessons of a practical, not a theoretical, nature. It is possible that the requirement of ‘totalization’ is a great novelty to some historians, sociologists and psychologists. It has been taken for granted by anthropologists ever since they learned it from Malinowski. But Malinowski’s deficiencies have also taught us that this is not where explanation ends. It only begins when we have succeeded in constituting our object. The role of dialectical reason is to put the human sciences in possession of a reality with which it alone can furnish them, but the properly scientific work consists in decomposing and then recomposing on a different plane. With all due respect to Sartrian phenomenology, we can hope to find in it only a point of departure, not one of arrival.

Furthermore, dialectical reason must not let itself be carried away by its own elan, nor must the procedure leading to the comprehension of an other reality attribute to it, in addition to its own dialectical features, those appertaining to the procedure rather than to the object : it does not follow from the fact that all knowledge of others is dialectical, that others are wholly dialectical in every respect. By making analytical reason an anti-comprehension, Sartre often comes to refuse it any reality as an integral part of the object of comprehension. This paralogism is already apparent in his manner of invoking history, for one is hard put to it to see whether it is meant to be the history men make unconsciously, history of men consciously made by historians, the philosopher’s interpretation of the history of men or his interpretation of the history of historians. The difficulty becomes even greater, however, when Sartre endeavours to explain the life and thought of the present or past members not of his own society but of exotic societies.

He thinks, rightly, that this attempted comprehension stands no chance of succeeding unless it is dialectical ; and he concludes, wrongly, that the relationship between native thought and his knowledge of it, is that of a constitutive to a constituted dialectic, and thus, by an unforeseen detour, he repeats all the illusions of theorists of primitive mentality on his own account. It seems even less tolerable to him than to Levy-Bruhl that the savage should possess ‘complex understanding’ and should be capable of analysis and demonstration. Of the Ambrym native, made famous by Deacon’s work, who was able to show the field-worker the functioning of his marriage rules and kinship system by a diagram in the sand (an aptitude in no way exceptional as plenty of similar cases are recorded in ethnographic literature) Sartre says : ‘It goes without saying that this construction is not a thought : it is a piece of manual work governed by unexpressed synthetical knowledge’. Granted : but then the same must be said of a professor at the Ecole Polytechnique demonstrating a proof on the blackboard, for every ethnographer capable of dialectical comprehension is intimately persuaded that the situation is exactly the same in both cases. So it would follow that all reason is dialectical, which for my part I am prepared to concede, since dialectical reason seems to me like analytical reason in action ; but then the distinction between the two forms of reason which is the basis of Sartre’s enterprise would become pointless.

I must now confess to having myself unintentionally and unwittingly lent support to these erroneous ideas, by having seemed all too often in Les structures élémentaires de la parenté as if I were seeking out an unconscious genesis of matrimonial exchange. I should have made more distinction between exchange as it is expressed spontaneously and forcefully in the praxis of groups and the conscious and deliberate rules by which these same groups – or their philosophers – spend their time in codifying and controlling it. If there is anything to be learnt from the ethnographic enquiries of the last twenty years, it is that this latter aspect is much more important than has generally been realized by observers, who labour under the same delusion as Sartre. Thus we must, as Sartre advocates, apply dialectical reason to the knowledge of our own and other societies. But we must not lose sight of the fact that analytical reason occupies a considerable place in all of them and that, as it is present, the approach we adopt must also allow us to rediscover it there.

But even were it not present, Sartre’s position would not be improved. For in this case exotic societies would merely confront us, in a more general manner than others, with an unconscious teleology, which, although historical, completely eludes human history : that of which certain aspects are revealed by linguistics and psycho-analysis and which rests on the interplay of biological mechanisms (structure of the brain, lesions, internal secretions) and psychological ones. There, it seems to me, is ‘the bone’ (to borrow a phrase from Sartre) which his critique does not manage to break, and moreover cares nothing about, which is the most serious charge one could level at it. For language does not consist in the analytical reason of the old-style grammarians nor in the dialectic constituted by structural linguistics nor in the constitutive dialectic of individual praxis facing the practico-inert, since all three presuppose it. Linguistics thus presents us with a dialectical and totalizing entity but one outside (or beneath) consciousness and will. Language, an unreflecting totalization, is human reason which has its reasons and of which man knows nothing. And if it is objected that it is so only for a subject who internalizes it on the basis of linguistic theory, my reply is that this way out must be refused, for this subject is one who speaks : for the same light which reveals the nature of language to him also reveals to him that it was so when he did not know it, for he already made himself understood, and that it will remain so tomorrow without his being aware of it, since his discourse never was and never will be the result of a conscious totalization of linguistic laws. But if, as speaking subject, man can find his apodictic experience in an other totalization, there seems no longer any reason why, as living subject, he should not have access to the same experience in other, not necessarily human, but living beings.

This method could also lay claim to the name ‘progressive-regressive’ ; in fact, what Sartre describes as such is the very method anthropologists have been practising for many years. But Sartre restricts it to its preliminary step. For our method is progressive-regressive not once but twice over. In the first stage, we observe the datum of experience, analyse it in the present, try to grasp its historical antecedents as far as we can delve into the past, and bring all these facts back to the light of day to incorporate them into a meaningful totality. The second stage, which repeats the first on a different plane and at a different level, then begins. This internalized human thing which we have sought to provide with all its wealth and originality, only fixes the distance analytical reason must cover, the leap it must make, to close the gap between the ever unforeseen complexity of this new object and the intellectual means at its disposal. It must therefore transform itself as dialectical reason, in the hope that once flexible, widened and strengthened, by its agency this unforeseen object will be assimilated to others, this novel totality will be merged into other totalities and that thus little by little clambering on to the mass of its conquests, dialectical reason will descry other horizons and other objects. No doubt the procedure would go astray if it were not, at every stage and, above all, when it seemed to have run its course, ready to retrace its steps and to double back on itself to preserve the contact with that experienced totality which serves both as its end and means. This return on itself is in my view a verification, rather than, as Sartre regards it, a demonstration, for, as I see it, a conscious being aware of itself as such poses a problem to which it provides no solution. The discovery of the dialectic subjects analytical reason to an imperative requirement : to account also for dialectical reason. This standing requirement relentlessly forces analytical reason to extend its programme and transform its axiomatic. But dialectical reason can account neither for itself nor for analytical reason.

It will be objected that this expansion is illusory since it is always accompanied by a contraction in meaning, and we should abandon the substance for the shadow, clarity for obscurity, the manifest for the conjectural, truth for science fiction. Again, Sartre would have to show that he himself avoids this dilemma, inherent in every attempt at explanation. The real question is not whether our endeavour to understand involves a gain or a loss of meaning, but whether the meaning we preserve is of more value than that we have been judicious enough to relinquish. In this respect Sartre seems to have remembered only half of Marx’s and Freud’s combined lesson. They have taught us that man has meaning only on the condition that he view himself as meaningful. So far I agree with Sartre. But it must be added that this meaning is never the right one : superstructures are faulty acts which have ‘made it’ socially. Hence it is vain to go to historical consciousness for the truest meaning. What Sartre calls dialectical reason is only a reconstruction, by what he calls analytical reason, of hypothetical moves about which it is impossible to know – unless one should perform them without thinking them – whether they bear any relation at all to what he tells us about them and which, if so, would be definable in terms of analytical reason alone. And so we end up in the paradox of a system which invokes the criterion of historical consciousness to distinguish the ‘primitive’ from the ‘civilized’ but – contrary to its claim – is itself ahistorical. It offers not a concrete image of history but an abstract schema of men making history of such a kind that it can manifest itself in the trend of their lives as a synchronic totality. Its position in relation to history is therefore the same as that of primitives to the eternal past : in Sartre’s system, history plays exactly the part of a myth.

Indeed, the problem raised by the Critique de la raison dialectique is reducible to the question : under what conditions is the myth of the French Revolution possible ? And I am prepared to grant that the contemporary Frenchman must believe in this myth in order fully to play the part of an historical agent and also that Sartre’s analysis admirably extracts the set of formal conditions necessary if this result is to be secured. But it does not follow that his meaning, just because it is the richest (and so most suited to inspire practical action), should be the truest. Here the dialectic turns against itself. This truth is a matter of context, and if we place ourselves outside it – as the man of science is bound to do – what appeared as an experienced truth first becomes confused and finally disappears altogether. The so-called men of the Left still cling to a period of contemporary history which bestowed the blessing of a congruence between practical imperatives and schemes of interpretation. Perhaps this golden age of historical consciousness has already passed ; and that this eventuality can at any rate be envisaged proves that what we have here is only a contingent context like the fortuitous ‘focusing’ of an optical instrument when its object-glass and eye-piece move in relation to each other. We are still ‘in focus’ so far as the French Revolution is concerned, but so we should have been in relation to the Fronde had we lived earlier. The former will rapidly cease to afford a coherent image on which our action can be modelled, just as the latter has already done. What we learn from reading Retz is that thought is powerless to extract a scheme of interpretation from events long past.

At first sight, there seems no doubt : on one side the privileged, on the other the humble and exploited ; how could we hesitate ? We are Frondeurs. However, the people of Paris were being manoeuvred by noble houses, whose sole aim was to arrange their own affairs with the existing powers, and by one half of the royal family which wanted to oust the other. And now we are already only half Frondeurs. As for the Court, which took refuge at Saint-Germain, it appears at first to have been a faction of good for nothings vegetating on their privileges and growing fat on exactions and usury at the expense of the collectivity. But no, it had a function all the same since it retained military power ; it conducted the struggle against foreigners, the Spaniards, whom the Frondeurs invited without hesitation to invade the country and impose their wills on this same Court which was defending the fatherland. The scales, however, tilt the other way again : the Frondeurs and Spaniards together formed the party of peace. The Prince de Conde and the Court only sought warlike adventures. We are pacifists and once again become Frondeurs. But nevertheless did not the military exploits of Mazarin and the Court extend France to its present frontiers, thus founding the state and the nation ? Without them we should not be what we are today. So here we are on the other side again.

It suffices therefore for history to move away from us in time or for us to move away from it in thought, for it to cease to be internalizable and to lose its intelligibility, a spurious intelligibility attaching to a temporary internality. I am not however suggesting that man can or should sever himself from this internality. It is not in his power to do so and wisdom consists for him in seeing himself live it, while at the same time knowing (but in a different register) that what he lives so completely and intensely is a myth – which will appear as such to men of a future century, and perhaps to himself a few years hence, and will no longer appear at all to men of a future millennium. All meaning is answerable to a lesser meaning, which gives it its highest meaning, and if this regression finally ends in recognizing ‘a contingent law of which one can say only : it is thus, and not otherwise’ (Sartre), this prospect is not alarming to those whose thought is not tormented by transcendence even in a latent form. For man will have gained all he can reasonably hope for if, on the sole condition of bowing to this contingent law, he succeeds in determining his form of conduct and in placing all else in the realm of the intelligible.

Sartre is certainly not the only contemporary philosopher to have valued history above the other human sciences and formed an almost mystical conception of it. The anthropologist respects history, but he does not accord it a special value. He conceives it as a study complementary to his own : one of them unfurls the range of human societies in time, the other in space. And the difference is even less great than it might seem, since the historian strives to reconstruct the picture of vanished societies as they were at the points which for them corresponded to the present, while the ethnographer does his best to reconstruct the historical stages which temporally preceded their existing form.

This symmetry between history and anthropology seems to be rejected by philosophers who implicitly or explicitly deny that distribution in space and succession in time afford equivalent perspectives. In their eyes some special prestige seems to attach to the temporal dimension, as if diachrony were to establish a kind of intelligibility not merely superior to that provided by synchrony, but above all more specifically human.

It is easy to explain, if not to justify, this preference. The diversity of social forms, which the anthropologist grasps as deployed in space, present the appearance of a discontinuous system. Now, thanks to the temporal dimension, history seems to restore to us, not separate states, but the passage from one state to another in a continuous form. And as we believe that we apprehend the trend of our personal history as a continuous change, historical knowledge appears to confirm the evidence of inner sense. History seems to do more than describe beings to us from the outside, or at best give us intermittent flashes of insight into internalities, each of which are so on their own account while remaining external to each other : it appears to re-establish our connection, outside ourselves, with the very essence of change.

There would be plenty to say about this supposed totalizing continuity of the self which seems to me to be an illusion sustained by the demands of social life – and consequently a reflection of the external on the internal – rather than the object of an apodictic experience. But there is no need to resolve this philosophical problem in order to perceive that the proposed conception of history corresponds to no kind of reality. As historical knowledge is claimed to be privileged, I feel entitled (as I would not otherwise feel) to make the point that there is a twofold antinomy in the very notion of an historical fact. For, ex hypothesi, a historical fact is what really took place, but where did anything take place ? Each episode in a revolution or a war resolves itself into a multitude of individual psychic movements. Each of these movements is the translation of unconscious development, and these resolve themselves into cerebral, hormonal or nervous phenomena, which themselves have reference to the physical or chemical order. Consequently, historical facts are no more given than any other. It is the historian, or the agent of history, who constitutes them by abstraction and as though under the threat of an infinite regress.

What is true of the constitution of historical facts is no less so of their selection. From this point of view, the historian and the agent of history choose, sever and carve them up, for a truly total history would confront them with chaos. Every corner of space conceals a multitude of individuals each of whom totalizes the trend of history in a manner which cannot be compared to the others ; for any one of these individuals, each moment of time is inexhaustibly rich in physical and psychical incidents which all play their part in his totalization. Even history which claims to be universal is still only a juxtaposition of a few local histories within which (and between which) very much more is left out than is put in. And it would be vain to hope that by increasing the number of collaborators and making research more intensive one would obtain a better result. In so far as history aspires to meaning, it is doomed to select regions, periods, groups of men and individuals in these groups and to make them stand out, as discontinuous figures, against a continuity barely good enough to be used as a backdrop. A truly total history would cancel itself out – its product would be nought. What makes history possible is that a sub-set of events is found, for a given period, to have approximately the same significance for a contingent of individuals who have not necessarily experienced the events and may even consider them at an interval of several centuries. History is therefore never history, but history-for. It is partial in the sense of being biased even when it claims not to be, for it inevitably remains partial – that is, incomplete – and this is itself a form of partiality. When one proposes to write a history of the French Revolution one knows (or ought to know) that it cannot, simultaneously and under the same heading, be that of the Jacobin and that of the aristocrat. Ex hypothesi, their respective totalizations (each of which is anti-symmetric to the other) are equally true. One must therefore choose between two alternatives. One must select as the principal either one or a third (for there are an infinite number of them) and give up the attempt to find in history a totalization of the set of partial totalizations ; or alternatively one must recognize them all as equally real : but only to discover that the French Revolution as commonly conceived never took place.

History does not therefore escape the common obligation of all knowledge, to employ a code to analyse its object, even (and especially) if a continuous reality is attributed to that object. The distinctive features of historical knowledge are due not to the absence of a code, which is illusory, but to its particular nature : the code consists in a chronology. There is no history without dates. To be convinced of this it is sufficient to consider how a pupil succeeds in learning history : he reduces it to an emaciated body, the skeleton of which is formed by dates. Not without reason, there has been a reaction against this dry method, but one which often runs to the opposite extreme. Dates may not be the whole of history, nor what is most interesting about it, but they are its sine qua non, for history’s entire originality and distinctive nature lie in apprehending the relation between before and after, which would perforce dissolve if its terms could not, at least in principle, be dated.

Now, this chronological coding conceals a very much more complex nature than one supposes when one thinks of historical dates as a simple linear series. In the first place, a date denotes a moment in a succession : d2 is after d1 and before d3. From this point of view dates only perform the function of ordinal numbers. But each date is also a cardinal number and, as such, expresses a distance in relation to the dates nearest to it. We use a large number of dates to code some periods of history ; and fewer for others. This variable quantity of dates applied to periods of equal duration are a gauge of what might be called the pressure of history : there are ‘hot’ chronologies which are those of periods where in the eyes of the historian numerous events appear as differential elements ; others, on the contrary, where for him (although not of course for the men who lived through them) very little or nothing took place. Thirdly and most important, a date is a member of a class. These classes of dates are definable by the meaningful character each date has within the class in relation to other dates which also belong to it, and by the absence of this meaningful character with respect to dates appertaining to a different class. Thus the date 1685 belongs to a class of which 1610, 1648 and 1715 are likewise members ; but it means nothing in relation to the class composed of the dates : 1st, 2nd, 3rd, 4th millennium, nor does it mean anything in relation to the class of dates : 23 January, 17 August, 30 September, etc.

On this basis, in what would the historian’s code consist ? Certainly not in dates, since these are not recurrent. Changes of temperature can be coded with the help of figures, because the reading of a figure on the thermometer evokes the return of an earlier situation : whenever I read 0°C, I know that it is freezing and put on my warmest coat. But a historical date, taken in itself, would have no meaning, for it has no reference outside itself : if I know nothing about modern history, the date 1643 makes me none the wiser. The code can therefore consist only of classes of dates, where each date has meaning in as much as it stands in complex relations of correlation and opposition with other dates. Each class is defined by a frequency, and derives from what might be called a corpus or a domain of history. Historical knowledge thus proceeds in the same way as a wireless with frequency modulation : like a nerve, it codes a continuous quantity – and as such an asymbolic one – by frequencies of impulses proportional to its variations. As for history itself, it cannot be represented as an aperiodic series with only a fragment of which we are acquainted. History is a discontinuous set composed of domains of history, each of which is defined by a characteristic frequency and by a differential coding of before and after. It is no more possible to pass between the dates which compose the different domains than it is to do so between natural and irrational numbers. Or more precisely : the dates appropriate to each class are irrational in relation to all those of other classes.

It is thus not only fallacious but contradictory to conceive of the historical process as a continuous development, beginning with prehistory coded in tens or hundreds of millennia, then adopting the scale of millennia when it gets to the 4th or 3rd millennium, and continuing as history in centuries interlarded, at the pleasure of each author, with slices of annual history within the century, day to day history within the year or even hourly history within a day. All these dates do not form a series : they are of different species. To give just one example, the coding we use in prehistory is not preliminary to that we employ for modern and contemporary history. Each code refers to a system of meaning which is, at least in theory, applicable to the virtual totality of human history. The events which are significant for one code are no longer so for another. Coded in the system of prehistory, the most famous episodes in modern and contemporary history cease to be pertinent ; except perhaps (and again we know nothing about it) certain massive aspects of demographic evolution viewed on a world-wide scale, the invention of the steam-engine, the discovery of electricity and of nuclear energy.

Given that the general code consists not in dates which can be ordered as a linear series but in classes of dates each furnishing an autonomous system of reference, the discontinuous and classificatory nature of historical knowledge emerges clearly. It operates by means of a rectangular matrix,

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

where each line represents classes of dates, which may be called hourly, daily, annual, secular, millennial for the purposes of schematization and which together make up a discontinuous set. In a system of this type, alleged historical continuity is secured only by dint of fraudulent outlines.

Furthermore, although the internal gaps in each class cannot be filled in by recourse to other classes, each class taken as a whole nevertheless always refers back to another class, which contains the principle of an intelligibility to which it could not itself aspire. The history of the 17th century is ‘annual’ but the 17th century, as a domain of history belongs to another class, which codes it in relation to earlier and later centuries ; and this domain of modern times in its turn becomes an element of a class where it appears correlated with and opposed to other ‘times’ : the middle ages, antiquity, the present day, etc. Now, these various domains correspond to histories of different power.

Biographical and anecdotal history, right at the bottom of the scale, is low-powered history, which is not intelligible in itself and only becomes so when it is transferred en bloc to a form of history of a higher power than itself ; and the latter stands in the same relation to a class above it. It would, however, be a mistake to think that we progressively reconstitute a total history by dint of these dovetailings. For any gain on one side is offset by a loss on the other. Biographical and anecdotal history is the least explanatory ; but it is the richest in point of information, for it considers individuals in their particularity and details for each of them the shades of character, the twists and turns of their motives, the phases of their deliberations. This information is schematized, put in the background and finally done away with as one passes to histories of progressively greater ‘power’. Consequently, depending on the level on which he places himself, the historian loses in information what he gains in comprehension or vice versa, as if the logic of the concrete wished to remind us of its logical nature by modelling a confused outline of Gödel’s theorem in the clay of ‘becoming’. The historian’s relative choice, with respect to each domain of history he gives up, is always confined to the choice between history which teaches us more and explains less, and history which explains more and teaches less. The only way he can avoid the dilemma is by getting outside history : either by the bottom, if the pursuit of information leads him from the consideration of groups to that of individuals and then to their motivations which depend on their personal history and temperament, that is to say to an infra-historical domain in the realms of psychology and physiology ; or by the top, if the need to understand incites him to put history back into prehistory and the latter into the general evolution of organized beings, which is itself explicable only in terms of biology, geology and finally cosmology.

There is, however, another way of avoiding the dilemma without thereby doing away with history. We need only recognize that history is a method with no distinct object corresponding to it to reject the equivalence between the notion of history and the notion of humanity which some have tried to foist on us with the unavowed aim of making historicity the last refuge of a transcendental humanism : as if men could regain the illusion of liberty on the plane of the ‘we’ merely by giving up the ‘I’s that are too obviously wanting in consistency.

In fact history is tied neither to man nor to any particular object. It consists wholly in its method, which experience proves to be indispensable for cataloguing the elements of any structure whatever, human or non-human, in their entirety. It is therefore far from being the case that the search for intelligibility comes to an end in history as though this were its terminus. Rather, it is history that serves as the point of departure in any quest for intelligibility. As we say of certain careers, history may lead to anything, provided you get out of it.

This further thing to which history leads for want of a sphere of reference of its own shows that whatever its value (which is indisputable) historical knowledge has no claim to be opposed to other forms of knowledge as a supremely privileged one. We noted above that it is already found rooted in the savage mind, and we can now see why it does not come to fruition there. The characteristic feature of the savage mind is its timelessness ; its object is to grasp the world as both a synchronic and a diachronic totality and the knowledge which it draws therefrom is like that afforded of a room by mirrors fixed on opposite walls, which reflect each other (as well as objects in the intervening space) although without being strictly parallel. A multitude of images forms simultaneously, none exactly like any other, so that no single one furnishes more than a partial knowledge of the decoration and furniture but the group is characterized by invariant properties expressing a truth. The savage mind deepens its knowledge with the help of imagines mundi. It builds mental structures which facilitate an understanding of the world in as much as they resemble it. In this sense savage thought can be defined as analogical thought.

But in this sense too it differs from domesticated thought, of which historical knowledge constitutes one aspect. The concern for continuity which inspires the latter is indeed a manifestation, in the temporal order, of knowledge which is interstitial and unifying rather than discontinuous and analogical : instead of multiplying objects by schemes promoted to the role of additional objects, it seems to transcend an original discontinuity by relating objects to one another. But it is this reason, wholly concerned with closing gaps and dissolving differences, which can properly be called ‘analytical’. By a paradox on which much stress has recently been laid, for modern thought ‘continuity, variability, relativity, determinism go together’.

This analytic, abstract continuity will doubtless be opposed to that of the praxis as concrete individuals live it. But this latter continuity seems no less derivative than the former, for it is only the conscious mode of apprehending psychological and physiological processes which are themselves discontinuous. I am not disputing that reason develops and transforms itself in the practical field : man’s mode of thought reflects his relations to the world and to men. But in order for praxis to be living thought, it is necessary first (in a logical and not a historical sense) for thought to exist : that is to say, its initial conditions must be given in the form of an objective structure of the psyche and brain without which there would be neither praxis nor thought.

When therefore I describe savage thought as a system of concepts embedded in images, I do not come anywhere near the robinsonnades of a constitutive constituent dialectic : all constitutive reason presupposes a constituted reason. But even if one allowed Sartre the circularity which he invokes to dispel the ‘suspect character’ attaching to the first stages of his synthesis, what he proposes really are ‘robinsonnades’, this time in the guise of descriptions of phenomena, when he claims to restore the sense of marriage exchange, the potlatch or the demonstration of his tribe’s marriage rules by a Melanesian savage. Sartre then refers to a comprehension which has its being in the praxis of their organizers, a bizarre expression to which no reality corresponds, except perhaps the capacity which any foreign society presents to anyone looking at it from the outside, and which leads him to project the lacunae in his own observation on to it in the form of positive attributes. Two examples will show what I mean.

No anthropologist can fail to be struck by the common manner of conceptualizing initiation rites employed by the most diverse societies throughout the world. Whether in Africa, America, Australia or Melanesia, the rites follow the same pattern : first, the novices, taken from their parents, are symbolically ‘killed’ and kept hidden in the forest or bush where they are put to the test by the Beyond ; after this they are ‘reborn’ as members of the society. When they are returned to their natural parents, the latter therefore simulate all the phases of a new delivery, and begin a re-education even in the elementary actions of feeding or dressing. It would be tempting to interpret this set of phenomena as a proof that at this stage thought is wholly embedded in praxis. But this would be seeing things back to front, for it is on the contrary scientific praxis which, among ourselves, has emptied the notions of death and birth of everything not corresponding to mere physiological processes and rendered them unsuitable to convey other meanings. In societies with initiation rites, birth and death provide the material for a rich and varied conceptualization, provided that these notions (like so many others) have not been stripped by any form of scientific knowledge oriented towards practical returns – which they lack – of the major part of a meaning which transcends the distinction between the real and the imaginary : a complete meaning of which we can now hardly do more than evoke the ghost in the reduced setting of figurative language. What looks to us like being embedded in praxis is the mark of thought which quite genuinely takes the words it uses seriously, whereas in comparable circumstances we only ‘play’ on words.

The taboos on parents-in-law furnish the matter for a cautionary tale leading to the same conclusion by a different route. Anthropologists have found the frequent prohibition of any physical or verbal contact between close affines so strange that they have exercised their ingenuity in multiplying explanatory hypotheses, without always making sure that the hypotheses are not rendered redundant by one another. Elkin for instance explains the rarity of marriage with the patrilateral cousin in Australia by the rule that as a man has to avoid any contact with his mother-in-law, he will be wise to choose the latter among women entirely outside his own local group (to which his father’s sisters belong). The aim of the rule itself is supposed to be to prevent a mother and daughter from being rivals for the affections of the same man ; finally, the taboo is supposed to be extended by contamination to the wife’s maternal grandmother and her husband. There are thus four concurrent interpretations of a single phenomenon : as a function of a type of marriage, as the result of a psychological calculation, as protection against instinctive tendencies and as the product of association by contiguity. This, however, still does not satisfy Elkin, for in his view the taboo on the father-in-law rests on a fifth explanation : the father-in-law is the creditor of the man to whom he has given his daughter, and the son-in-law feels himself to be in a position of inferiority in relation to him.

I shall content myself with the last explanation which perfectly covers all the cases considered and renders the others worthless by bringing out their naivety. But why is it so difficult to put these usages into their proper place ? The reason is, I think, that the usages of our own society which could be compared with them and might furnish a landmark to identify them by, are in a dissociated form among ourselves, while in these exotic societies they appear in an associated one which makes them unrecognizable to us.

We are acquainted with the taboo on parents-in-law or at least with its approximate equivalent. By the same token we are forbidden to address the great of this world and obliged to keep out of their way. All protocol asserts it : one does not speak first to the Queen of England or the President of the French Republic ; and we adopt the same reserve when unforeseen circumstances create conditions of closer proximity between a superior and ourselves than the social distance between us warrants. Now, in most societies the position of wife-giver is accompanied by social (and sometimes also economic) superiority, that of wife-taker by inferiority and dependence. This inequality between affines may be expressed objectively in institutions as a fluid or stable hierarchy, or it may be expressed subjectively in the system of interpersonal relations by means of privileges and prohibitions.

There is therefore nothing mysterious about these usages which our own experience enables us to see from the inside. We are disconcerted only by their constitutive conditions, different in each case. Among ourselves, they are sharply separated from other usages and tied to an unambiguous context. In exotic societies, the same usages and the same context are as it were embedded in other usages and a different context : that of family ties, with which they seem to us incompatible. We find it hard to imagine that, in private, the son-in-law of the President of the French Republic should regard him as the head of the state rather than as his father-in-law. And although the Queen of England’s husband may behave as the first of her subjects in public, there are good reasons for supposing that he is just a husband when they are alone together. It is either one or the other. The superficial strangeness of the taboo on parents-in-law arises from its being both at the same time.

Consequently, and as we have already found in the case of operations of understanding, the system of ideas and attitudes is here presented only as embodied. Considered in itself, this system has nothing about it to baffle the anthropologist. My relation to the President of the Republic is made up entirely of negative observances, since, in the absence of other ties, any relations we may have are wholly defined by the rule that I should not speak unless he invites me to do so and that I should remain a respectful distance from him. But this abstract relation need only be clothed in a concrete relation and the attitudes appropriate to each to accumulate, for me to find myself as embarrassed by my family as an Australian aborigine. What appears to us as greater social ease and greater intellectual mobility is thus due to the fact that we prefer to operate with detached pieces, if not indeed with ‘small change’, while the native is a logical hoarder : he is forever tying the threads, unceasingly turning over all the aspects of reality, whether physical, social or mental. We traffic in our ideas ; he hoards them up. The savage mind puts a philosophy of the finite into practice.

This is also the source of the renewed interest in it. This language with its limited vocabulary able to express any message by combinations of oppositions between its constitutive units, this logic of comprehension for which contents are indissociable from form, this systematic of finite classes, this universe made up of meanings, no longer appears to us as retrospective witnesses of a time when : ‘... le ciel sur la terre Marchait et respirait dans un peuple de dieux’ [when heaven walked and breathed on earth among a population of Gods], and which the poet only evokes for the purpose of asking whether or not it is to be regretted. This time is now restored to us, thanks to the discovery of a universe of information where the laws of savage thought reign once more : ‘heaven’ too, ‘walking on earth’ among a population of transmitters and receivers whose messages, while in transmission, constitute objects of the physical world and can be grasped both from without and from within.

The idea that the universe of primitives (or supposedly such) consists principally in messages is not new. But until recently a negative value was attributed to what was wrongly taken to be a distinctive characteristic, as though this difference between the universe of the primitives and our own contained the explanation of their mental and technological inferiority, when what it does is rather to put them on a par with modern theorists of documentation. Physical science had to discover that a semantic universe possesses all the characteristics of an object in its own right for it to be recognized that the manner in which primitive peoples conceptualize their world is not merely coherent but the very one demanded in the case of an object whose elementary structure presents the picture of a discontinuous complexity.

The false antinomy between logical and prelogical mentality was surmounted at the same time. The savage mind is logical in the same sense and the same fashion as ours, though as our own is only when it is applied to knowledge of a universe in which it recognizes physical and semantic properties simultaneously. This misunderstanding once dispelled, it remains no less true that, contrary to Levy-Bruhl’s opinion, its thought proceeds through understanding, not affectivity, with the aid of distinctions and oppositions, not by confusion and participation. Although the term had not yet come into use, numerous texts of Durkheim and Mauss show that they understood that so-called primitive thought is a quantified form of thought.

It will be objected that there remains a major difference between the thought of primitives and our own : Information Theory is concerned with genuine messages whereas primitives mistake mere manifestations of physical determinism for messages. Two considerations, however, deprive this argument of any weight. In the first place, Information Theory has been generalized, and it extends to phenomena not intrinsically possessing the character of messages, notably to those of biology ; the illusions of totemism have had at least the merit of illuminating the fundamental place belonging to phenomena of this order, in the internal economy of systems of classification. In treating the sensible properties of the animal and plant kingdoms as if they were the elements of a message, and in discovering ‘signatures’ – and so signs – in them, men have made mistakes of identification : the meaningful element was not always the one they supposed. But, without perfected instruments which would have permitted them to place it where it most often is namely, at the microscopic level – they already discerned ‘as through a glass darkly’ principles of interpretation whose heuristic value and accordance with reality have been revealed to us only through very recent inventions : telecommunications, computers and electron microscopes.

Above all, during the period of their transmission, when they have an objective existence outside the consciousness of transmitters and receivers, messages display properties which they have in common with the physical world. Hence, despite their mistakes with regard to physical phenomena (which were not absolute but relative to the level where they grasped them) and even though they interpreted them as if they were messages, men were nevertheless able to arrive at some of their properties. For a theory of information to be able to be evolved it was undoubtedly essential to have discovered that the universe of information is part of an aspect of the natural world. But the validity of the passage from the laws of nature to those of information once demonstrated, implies the validity of the reverse passage – that which for millennia has allowed men to approach the laws of nature by way of information.

Certainly the properties to which the savage mind has access are not the same as those which have commanded the attention of scientists. The physical world is approached from opposite ends in the two cases : one is supremely concrete, the other supremely abstract ; one proceeds from the angle of sensible qualities and the other from that of formal properties. But if, theoretically at least and on condition no abrupt changes in perspective occurred, these two courses might have been destined to meet, this explains that they should have both, independently of each other in time and space, led to two distinct though equally positive sciences : one which flowered in the neolithic period, whose theory of the sensible order provided the basis of the arts of civilization (agriculture, animal husbandry, pottery, weaving, conservation and preparation of food, etc.) and which continues to provide for our basic needs by these means ; and the other, which places itself from the start at the level of intelligibility, and of which contemporary science is the fruit.

We have had to wait until the middle of this century for the crossing of long separated paths : that which arrives at the physical world by the detour of communication, and that which as we have recently come to know, arrives at the world of communication by the detour of the physical. The entire process of human knowledge thus assumes the character of a closed system. And we therefore remain faithful to the inspiration of the savage mind when we recognize that the scientific spirit in its most modern form will, by an encounter it alone could have foreseen, have contributed to legitimize the principles of savage thought and to re-establish it in its rightful place.

Messages

  • l’adoption d’une loi pour l’homosexualité au mali est une av avancée considérable.
    car tout homme est libre de disposer de son corps que sa soi avec une femme ou un homme.
    pour moi, l’homosexualité n’a rien de déviant ou d’anormale car elle à toujours existé dans toutes les sociétéS ce qui prouve son universalité.
    je sais que le mythe de la ville de sodome et de gomore communement appéler chez nous loutus leur destruction par un phénomène géologique inconue à était longtemps mis en avant par la réligion chrétienne et musulmane pour disuader les esprits libre d’alors et de manitenant à ne pas sadonner a cette pratique ; car contre nature et que le dieu tout puissant pourait se facher et faire dispaitre toute la ville a cause de cette pratique.
    mais cela na pas suffit pour que les hommes et le femmes qui ont cette séxualité continuer à le pratiquer.
    démander vous pourquoi l’état, les religieux veullent toujours controler la sexualité des citoyn ?
    A VOUS DE REPONDRE.
    moi je pense que être hommophobe c’est ne rien conprendre dans la nature de l’homme , de son corps.
    car aucun homme n’est totalement mâle ou femêle car notre corps est composé des hormone mâle et femêle c’est la dominance des ses hormone qui détermineras notre sexe et notre sexualité aussi : c’est à dire si ta plus d’hormone mâle plus que d’hormone femêle tu dévient homme vis versa ton sexe est déterminer par sa quant à la sexualité c’est tout autre car tu peut être né dans un corp d’homme mais le désire et orienter vers les homme car tu as une part importante des homone phéminin dans ton corps et vis versa.
    il ya aussi des cas qui sont dût a la culture et la société.
    viola une ten tative des réponse que je peut te donner cher camarade mais
    sacher que, que sa soi avec un homme ou une femmme il faut toujours prendre son pied.
    ciao

  • Levi-Strauss :

    "Il faut trouver ce qu’il y a sous les apparences. Pour cela, j’ai trois maîtres : la géologie, Marx et Freud."

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