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Luttes de classe en Italie

mercredi 19 novembre 2014, par Robert Paris

Luttes de classe en Italie

Il s’agit du 13ème trimestre consécutif sans croissance pour l’Italie, dont le PIB se voit revenu à ses niveaux de l’année 2000, et qui fait en outre nettement moins bien que ses pairs de la zone euro, où la croissance moyenne au 3ème trimestre a atteint 0,2%.

Ces chiffres sont néanmoins conformes aux attentes des économistes. Ils ont été salués par une brève remontée de l’indice FTSE Mib de la Bourse de Milan, où les investisseurs craignaient visiblement un indicateur encore plus faible.

L’industrie, secteur-clé en Italie, et l’agriculture ont continué à piquer du nez. Seul le secteur des services a tiré son épingle du jeu, selon l’Istat. La variation acquise pour 2014 s’établit à -0,3%.

Tant Istat que le gouvernement italien ont déclaré ces dernières semaines s’attendre à un recul de 0,3% du PIB italien sur l’ensemble de l’année 2014, ce qui impliquerait une croissance zéro au quatrième trimestre.

Le PIB italien, qui a déjà reculé de 2,3% en 2012 et de 1,9% en 2013, ne devrait en tous cas pas repasser dans le vert avant au mieux le premier trimestre 2015, selon les économistes.

« Malheureusement il fallait s’y attendre, les prémices étaient déjà apparus ces derniers mois », a réagi le président du lobby patronal Confindustria Giorgio Squinzi.

« Nous sommes prêts psychologiquement à clore 2014 dans le rouge, espérons que la baisse soit limitée au maximum à -0,3 ou -0,4% et que cela n’aie pas d’impact sur le rebond de 2015 », a-t-il ajouté.

Les salariés en grève ont manifesté vendredi dans plusieurs villes d’Italie pour protester contre les coupes budgétaires dans les services publics et contre la réforme du marché du travail du président du Conseil italien, Matteo Renzi. Des manifestations plus importantes sont prévues samedi.

Les grèves ont principalement touché le secteur des transports, perturbant le trafic ferroviaire et les transports publics ainsi qu’EasyJet. La compagnie aérienne low cost a annoncé que des vols pourraient être annulés après l’appel du syndicat USB à une grève de 24 heures.

Des affiches avaient été placardées vendredi dans les rues de Rome. Elles montraient le chef du gouvernement italien aux côtés de Sergio Marchionne, l’administrateur délégué du groupe Fiat, et de Marianna Madia, ministre de la Fonction publique, avec le slogan : "Renvoyons-les chez eux pour motif légitime !". Ce slogan fait référence à l’un des motifs permettant à un employeur de procéder à un licenciement.

Des centaines de milliers de personnes ont manifesté samedi dans les rues de Rome pour dénoncer le projet de réforme du marché du travail de Matteo Renzi et rappeler au bouillonnant chef du gouvernement qu’il devait compter avec les syndicats.

Selon les organisateurs, la manifestation à l’appel de la CGIL, le principal syndicat du pays, a mobilisé un million de personnes. Les forces de l’ordre n’ont pour leur part fourni aucune estimation.
Pour encourager les embauches afin de lutter contre le chômage, le gouvernement Renzi prévoit de faciliter les licenciements et de réduire les droits et protections des salariés dans leurs premières années de contrat.

Le projet de loi de cette réforme centrale pour le gouvernement, appelé "Jobs Act", a été approuvé le 9 octobre par le Sénat — le gouvernement avait posé pour cela la question de confiance — et doit encore recevoir le feu vert de la Chambre des députés.
"Nous voulons du travail pour tout le monde, et du travail avec des droits. Nous manifestons pour ceux qui n’ont pas de travail, pas de droits, ceux qui souffrent, ceux qui n’ont aucune certitude pour l’avenir", a déclaré à la foule Susanna Camusso, secrétaire générale de la CGIL.

"Nous sommes ici et nous n’allons pas en partir. Nous allons faire grève, et nous allons mobiliser nos forces pour nous battre afin de changer les politiques du gouvernement", a-t-elle ajouté en annonçant une nouvelle manifestation le 8 novembre.

La dette publique atteint 135% du PIB et continue d’augmenter. L’ensemble des impôts sur les entreprises continue d’augmenter. Le chômage des jeunes atteint les 42%. Par ailleurs, la réforme de l’administration publique a été, en partie, enterrée. Enfin, les efforts qui sont consentis font l’objet d’une vive contestation. À Rome, le 25 octobre, des centaines de milliers de manifestants défilaient contre le projet de réforme du marché du travail. Même si le Premier ministre a affirmé qu’il ne se laisserait pas dicter sa conduite par des mouvements de rue, on voit mal comment il pourrait se sortir de cette situation où les gens qui défilent constituent une part non négligeable de son électorat. Par ailleurs, il n’est encore question que de projet et il faudra encore du temps avant que le texte ne fasse loi.
La Confédération générale italienne du travail (CGIL), principal syndicat d’Italie, a appelé mercredi à une grève générale de huit heures le 5 décembre pour protester contre la politique économique de Matteo Renzi, notamment sa réforme du marché du travail.

Les actions de protestation se multiplient en Italie contre le gouvernement Renzi

Les actions de protestation se sont multipliées ces dernières semaines contre le gouvernement PD (Parti démocrate) du président du Conseil Matteo Renzi et sa politique anti-ouvrière, révélant la profonde colère qui existe dans la classe ouvrière italienne. La réaction du gouvernement a été de déclencher une violente répression policière contre les manifestants.

Le 29 octobre, quelque 600 sidérurgistes de ThyssenKrupp ont protesté à Rome contre la décision de l’entreprise de supprimer 550 emplois sur le site de Terni. La police a chargé avec une grande brutalité les travailleurs qui se rendaient au ministère du Développement économique après s’être rassemblés devant l’ambassade d’Allemagne. Quatre ouvriers au moins et deux responsables syndicaux ont été blessés suite à cette agression policière.

Le ministère de l’Intérieur du vice-premier ministre Angelino Alfano a réagi à cet indicent en falsifiant les faits et en accusant les travailleurs de vouloir occuper la principale gare ferroviaire de Rome.
Le jour de la manifestation, le secrétaire général du Fiom, le syndicat des métallurgistes, Maurizio Landini, qui fut blessé lors de l’attaque, avait invité Renzi à « dire un mot » sur la répression, mais le premier ministre n’a rien dit sur l’incident.

Cependant, les dirigeants syndicaux, dont Landini et la secrétaire générale de la Confédération générale italienne du travail (CGIL) Susanna Camusso, ont rencontré Renzi le lendemain de l’assaut policier, démontrant en pratique le soutien continu apporté par les syndicats au gouvernement soi-disant de « centre-gauche. »
« Il doit présenter ses excuses aux travailleurs, » a dit Landini en ajoutant aussitôt, « Nous ne demandons à personne de démissionner. »

Camusso a fait savoir que son syndicat avait l’intention de « ne pas changer le gouvernement mais d’obtenir plutôt une politique pro-ouvrière. »

L’attaque policière du 29 octobre fut suivie samedi dernier d’une manifestation de masse à Rome contre la politique d’austérité de Renzi. Cette manifestation fut menée par les travailleurs du secteur public en opposition aux « réformes » pro-marché du gouvernement. Elle faisait suite à une manifestation tenue il y a deux semaines et qui avait rassemblé dans la capitale un million de travailleurs venus des quatre coins d’Italie.

Des responsables syndicaux ont dit que 100.000 personnes avaient défilé samedi de la Piazza della Republica vers la Piazza del Popolo pour revendiquer une importante augmentation de salaire et des effectifs supplémentaires pour le service public où les salaires sont gelés depuis six ans. Sur les 3 millions de travailleurs du secteur public, 300.000, c’est-à-dire 10 pour cent, ont été licenciés. Un manque de personnel et des cadences de travail infernales sont la norme dans chaque hôpital, chaque école et dans les bureaux.
Durant le rassemblement, la CGIL de Camusso a réitéré ses précédentes menaces de grève générale. Elle a dit que la confédération syndicale soutiendrait un référendum sur l’annulation de la « réforme » des retraites introduite en 2011 par le gouvernement de technocrates de Mario Monti. La soi-disant « Legge Fornero » (réforme Fornero) a considérablement reculé l’âge de départ à la retraite et entraîné une hausse de la pauvreté chez les personnes âgées.

La direction de la CGIL envisage de coopérer avec la Ligue du Nord (Lega Nord) pour un référendum contre la réforme des retraites. La Ligue du Nord avait en tant que parti d’opposition initié cette proposition. Le parti est connu pour son racisme et son chauvinisme anti-immigration.

Des activistes de gauche ont jeté des pierres et s’en sont pris samedi à Bologne à la voiture du dirigeant de la Ligue du Nord, Matteo Salvini, alors que le parti organisait une campagne raciste contre un campement de Roms.

Le premier ministre Renzi a réagi aux récentes actions de protestation en rendant la population responsable des problèmes du pays. Lors de l’inauguration d’un nouveau tunnel, il avait déclaré que l’Italie était « sortie du tunnel de l’inertie et de la résignation. » Il a encore une fois annoncé que les « réformes » de son gouvernement seraient rapidement mises en vigueur. Il a ajouté avoir l’intention de réformer la loi électorale avec le soutien de l’ancien premier ministre de droite, Silvio Berlusconi.

Renzi a déjà mis en oeuvre une soi-disant loi « Jobs Act » (une réforme du travail) qui supprime des protections de longue date pour les travailleurs licenciés. Elle fait partie d’un programme plus général exigé par les banques, l’Union européenne (UE) et le Fonds monétaire International (FMI) pour déréguler le marché du travail.

Le gouvernement envisage de poursuivre l’année prochaine le gel des salaires dans le secteur public et de réduire une fois de plus drastiquement les dépenses consacrées aux services publics. Le Jobs Act rend plus facile encore une élimination supplémentaire des emplois dans la fonction publique en permettant le recours aux contrats de travail intérimaire pour une durée de 35 mois. Ces mesures serviront à réduire davantage les salaires et à accélérer les cadences de travail.
Les responsables des trois principaux syndicats – Camusso de la CGIL, Annamariat Fulan de la Confédération italienne des syndicats de travailleurs (CISL) et Carmelo Barbagallo de l’Unione italiana del Lavoro (Union italienne du travail, UIL) – se sont adressés samedi à la foule rassemblée sur la Piazza del Popolo. Ils n’ont nullement l’intention d’organiser une opposition sérieuse visant la politique du gouvernement. Au contraire, ils cherchent à contenir et à désamorcer une opposition de masse en appelant des manifestations tout en faisant pression sur Renzi pour que celui-ci implique les syndicats plus directement dans l’élaboration de la politique gouvernementale.
Ces mêmes fonctionnaires avaient salué l’arrivée au pouvoir de Renzi il y a six mois. Un grand nombre de ses « réformes » furent conjointement préparées par les syndicats et l’organisation patronale Confindustria. La principale crainte des responsables syndicaux est que les attaques perpétrées par le gouvernement ne déclenchent une opposition sociale qu’ils ne seraient pas en mesure de contrôler et d’étouffer.

La crainte est justifiée. En raison de la profonde crise économique, le taux officiel du chômage des jeunes de 45 pour cent, l’accroissement de la pauvreté et les relations sociales ont atteint un point de rupture. Durant les premiers neuf mois de cette année, un million de travailleurs ont commencé un travail intérimaire, la majorité d’entre eux sur la base de contrats ne garantissant pas un nombre minimum d’heures de travail. Ils perçoivent leur revenu de la Cassa Integrazione (caisse d’allocations aux chômeurs) qui doit être supprimée dans le cadre du Jobs Act.

En raison d’une météo extrêmement mauvaise dans le Nord de l’Italie et qui a causé des inondations, des dégâts et la mort de quatre personnes, des manifestations spontanées ont éclaté contre des politiciens auxquels il fut reproché de négliger de façon inadmissible le bien-être de la population. A Carrare, la mairie fut occupée. Des centaines d’habitants qui avaient tout perdu dans les inondations et suite à la grêle ont exigé la démission du maire.

Lors de l’inauguration d’un nouveau site de production pour le constructeur aéronautique Piaggio Aero près de Gênes, le premier ministre Renzi fut confronté à des protestations imprévues de la part des travailleurs. Ceux-ci l’ont reçu avec des pancartes et des mots d’ordre. Ils protestaient contre la délocalisation de davantage de services et la suppression de 400 emplois.

Les salariés d’une filiale d’Alcatel à Vimercate étaient tellement en colère contre les licenciements que le premier ministre fut contraint de sortir par une porte dérobée pour éviter les insultes et les accusations des travailleurs.

Les indications sont nombreuses que les travailleurs sont en quête d’un autre moyen pour lutter indépendamment des partis politiques traditionnels et des syndicats officiels. La CGIL, la plus grande confédération syndicale, avait publié le 14 octobre une étude pour montrer que les travailleurs faisaient encore confiance aux syndicats. Mais l’étude indiquait en fait le contraire.

Il en est sorti que 45 pour cent des travailleurs non syndiqués et 23 pour cent des membres d’un syndicat pensaient que les syndicats ne servaient à rien. En cas d’un conflit de travail, seuls 36 pour cent des travailleurs non syndiqués ont dit vouloir s’adresser aux syndicats. Quarante-trois pour cent ont dit vouloir faire appel aux tribunaux. Seul 1 pour cent a dit vouloir se référer aux partis politiques.

Pas de marche arrière sur l’austérité en Italie

Il aura suffi de tout juste un jour et d’une visite à Berlin pour que les promesses faites par le premier ministre italien nouvellement en fonction, Enrico Letta, de passer de la politique d’austérité à celle de la croissance économique, soient démasquées comme étant de fausses promesses, des dérobades et carrément des mensonges.

Letta, du Parti démocrate (PD), dirige une grande coalition qui comprend le Peuple de la liberté (PdL) du magnat de la presse Silvio Berlusconi. Celle-ci a été formée à l’instigation du président Giorgio Napolitano, un stalinien vieillissant, dans le but de poursuivre les mesures d’austérité brutales imposées par le précédent gouvernement de technocrates de Mario Monti qui n’avait pas été élu.
Atteindre ce but n’est pas chose facile compte tenu de la crise extraordinaire à laquelle est confronté le capitalisme italien.
La dette nationale italienne est passée cette année à 130,4 pour cent du produit intérieur brut en dépit des mesures d’austérité imposées. Depuis 2008, le produit intérieur brut a diminué de 5 pour cent et la production industrielle a décliné d’un quart. Le dernier rapport sur la stabilité financière publié par la Banque d’Italie montre que 7,2 pour cent de tous les prêts aux entreprises sont actuellement en souffrance, à commencer par le secteur de la construction, et cette dégradation se poursuit.

Même si l’Italie continue d’emprunter à un taux d’intérêt de 5 pour cent, son économie aurait besoin croître de 5 pour cent pour que ses dettes cessent d’augmenter. Au lieu de cela, selon les propres évaluations du gouvernement, l’économie est en fait en train de se contracter de 1,3 pour cent cette année et les coûts d’emprunt continueront d’augmenter.

Mais, plus important encore, la classe dirigeante et l’élite politique doivent faite face à la colère massive de la classe ouvrière contre une pauvreté grandissante et un chômage en hausse qui se situe à 11,6 pour cent et affecte un tiers des jeunes. Cette colère a jusqu’ici à peine pu s’exprimer de manière organisée parce que les syndicats italiens répriment toute opposition aux programmes d’austérité du patronat et du gouvernement. Mais, cette situation ne peut subsister indéfiniment, notamment dans le contexte d’une forte dégradation de la situation économique du capitalisme européen.

Une expression très forte de la misère sociale qui est en train de se développer en Italie a été fournie par la fusillade de deux policiers, dont un gravement blessé, par Luigi Preiti, 49 ans, qui était motivé par la colère d’avoir perdu son emploi et la fin de son mariage.
Lundi, 29 avril, au parlement la porte-parole soi-disant de gauche de la chambre des députés (Chambre basse du parlement), Laura Boldrini, a averti, « Il y a une urgence sociale qui nécessite des réponses et nos politiciens doivent commencer à les donner. »
Mais Letta, dont le parti est déjà en pagaille, n’a pu que faire un discours rempli de promesses contradictoires – en s’engageant à honorer les promesses faites par l’Italie à l’Union européenne (UE) et au Fonds monétaire International (FMI) d’imposer les coupes tout en stimulant l’économie et en apportant de l’aide aux plus défavorisés.
« Nous mourrons de la seule consolidation budgétaire, une politique de croissance ne peut attendre plus longtemps, » a-t-il déclaré en ajoutant que la dette de l’Italie de 2.000 milliards d’euros « pèse lourdement » sur les Italiens ordinaires. Il a dit qu’en conséquence, l’Europe était en train de souffrir d’une « crise de légitimité. »
La classe politique doit réagir au sentiment anti-establishment qui se développe, a-t-il prévenu.

Letta a promis de baisser les impôts pour les travailleurs et les jeunes afin de stimuler la croissance économique, de travailler en collaboration avec les syndicats italiens afin de réduire le chômage et de prendre fait et cause pour un « système de couverture sociale plus universel, plus axé sur les jeunes et les femmes, en l’élargissant à ceux qui ne sont pas couverts, particulièrement les travailleurs intérimaires. »

Cependant, lorsqu’il a été question de prendre des mesures concrètes, Letta n’avait pas grand-chose à proposer. Au lieu d’abandonner la très impopulaire taxe sur la propriété, conformément à la promesse électorale de PdL, celle-ci sera suspendue en juin pour être réexaminée. Seuls des projets d’augmenter la TVA italienne de 1 pour cent pour la faire passer à 22 pour cent ont été abandonnés.
L’abandon de la taxe sur la propriété coûtera 8 milliards d’euros aux recettes de l’Etat et ne pas la prélever en juin représentera un manque à gagner de 2 milliards d’euros. Letta n’a pas essayé d’expliquer comment rendre ceci compatible avec la déclaration faite par sa ministre des Affaires étrangères, Emma Bonino, qui a dit que l’Italie ne pouvait pas modifier ses engagements budgétaires conclus avec l’UE et le FMI pour cette année.

« L’Italie ne peut pas renégocier les 2,9 pour cent, » a dit Emma Bonino aux journalistes au parlement. Ceci implique que Letta espérait une renégociation des termes du remboursement de la dette, comme l’exigeait Berlusconi lundi, exigence reprise aussi par le ministre de l’Industrie, Flavio Zanonato, du Parti démocrate.

De telles exigences n’offrent rien aux travailleurs. Selon Zanonato, elles se concentrent sur des suggestions que l’Italie « poursuive une politique économique crédible afin d’assurer sa réputation en Europe et de maintenir à un bas niveau l’écart entre les rendements des obligations italiennes et allemandes, » tout en excluant des dépenses d’investissement du Pacte de stabilité européen.

Pour sa part, le ministre de l’Economie et des Finances, Fabrizio Saccomanni, ancien gouverneur de la Banque d’Italie, a parlé de restructurer le budget de l’Etat et de réduire les dépenses publiques, en indiquant que le couperet tomberait tout simplement ailleurs.
Avant le départ de Letta pour Berlin en vue de discussions avec la chancelière allemande, Angela Merkel, l’agence de notation Standard & Poor’s a délivré un verdict négatif sur les promesses de Letta de restaurer la croissance. Reprenant la position de Moody’s, elle a maintenu la note de la dette souveraine de l’Italie à un taux « BBB+ », soit tout juste deux crans au-dessus de la catégorie « junk » et avec une perspective négative.

Plus tard dans la journée, les choses n’ont fait qu’empirer pour Letta. Lors d’une conférence de presse commune avec Merkel, Letta a parlé de manière énigmatique du besoin de parvenir à une synthèse entre mesures de réforme et mesures de croissance et que l’Europe fasse preuve de « la même détermination à promouvoir la croissance qu’elle le fait pour constituer des finances publiques saines. »

Mais, Merkel n’en a pas fait grand cas en disant ne pas voir de contradiction entre la discipline budgétaire et l’objectif de la croissance économique.

« Pour nous, en Allemagne, consolidation budgétaire et croissance sont deux éléments qui ne sont pas opposés mais qui doivent aller de concert pour créer davantage de compétitivité et donc davantage d’emplois, » a-t-elle dit. « Nous voulons que l’Europe sorte renforcée de la crise. Par ailleurs, chaque pays doit jouer son rôle. »
Sa mise en garde que « L’Italie a déjà fait de grand progrès, de ce point de vue » ne fait qu’indiquer qu’elle doit en faire plus encore.
« La croissance permet des finances solides, un financement solide crée les conditions préalables à la croissance, » a-t-elle ajouté. « Mais, il est plus important que nous ne considérions pas la croissance comme quelque chose où nous dépensons l’argent public, mais plutôt comme quelque chose permettant aux entreprises d’investir et de créer des emplois. C’est pour cela que nous avons besoin de réformes structurelles et de moins de bureaucratie. »

Letta a répondu en promettant d’honorer tous les engagements de réforme pris par le gouvernement précédent en promettant de combler le trou de 8 milliards d’euros provoqué par l’abandon de la taxe sur la propriété, autrement dit en promettant davantage de mesures d’austérité.

Letta a rencontré hier le président français, François Hollande, à Paris avant de se rendre à Bruxelles pour des pourparlers avec le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso. Mais, quel que soit la rhétorique supplémentaire qui émergera des pourparlers avec ce vis-à-vis apparemment plus compatissant, la classe ouvrière en Italie ou dans le reste de l’Europe ne peut rien attendre d’une quelconque section de la bourgeoisie pour alléger la terrible misère sociale à laquelle elle est confrontée.

Le gouvernement Letta, tout comme les gouvernements des autres pays durement touchés par la crise de la dette, telles la Grèce et l’Espagne, peuvent bien demander des marges au gouvernement allemand. Toutefois tous sont d’accord que c’est à la classe ouvrière de continuer à régler la facture de la crise. De plus, au nom de la « restructuration », ils proposent, comme alternative à une concentration exclusivement sur des mesures de coupes budgétaires, de rehausser le taux d’exploitation de la classe ouvrière au moyen de cadences de travail accélérées, de réduction des salaires, de rationalisation et de privatisation des biens publics.

De tels appels en faveur d’un changement de stratégie, qui n’équivaudrait en fait qu’à infliger des souffrances et de l’austérité par d’autres moyens, se sont plusieurs fois heurtés aux intérêts nationaux divergents des puissances européennes.

Un gouvernement de grande coalition pour l’austérité en Italie

En Italie, la formation d’une grande coalition rassemblée autour du Parti démocrate (PD) du premier ministre Enrico Letta et du Peuple de la liberté (PdL) de Silvio Berlusconi montre à quel point l’oligarchie financière mondiale domine la vie politique.

La description officielle de ce gouvernement comme étant une coalition de la « gauche » et de la « droite » ne fait que souligner le fait que ces termes employés pour décrire les partis traditionnels ont été dépouillés de tout sens sérieux. Le nouveau gouvernement est un régime d’austérité, mis en place au mépris des souhaits clairement exprimés par l’électorat et agissant uniquement dans l’intérêt d’une couche parasitaire d’ultra-riches.

C’est un gouvernement qui a été imposé à la classe ouvrière italienne tout comme l’avait été en novembre 2011, le gouvernement de technocrates de l’ancien commissaire de l’Union européenne, Mario Monti. Tous les partis d’Italie sont engagés à servir les mêmes intérêts sociaux.

La manière dont ce gouvernement a été installé, suite à des pourparlers secrets et des machinations sordides effectuées derrière le dos de la population, témoigne de l’amenuisement de toutes les normes démocratiques et de l’apparition de plus en plus claire de la dictature du capital financier, à peine dissimulée derrière les attributs éculés de la procédure parlementaire.

Letta, dont l’oncle Gianni est le principal adjoint politique de Berlusconi, a engagé le redresseur de tort de Berlusconi, Angelino Alfano, à la fois comme premier ministre adjoint et comme ministre de l’Intérieur – en grande partie pour garantir que le magnat de la presse continue d’échapper aux poursuites.

Le poste clé au ministère de l’Economie sera occupée par le directeur général de la Banque d’Italie, Fabrizio Saccomanni, non élu. Il est la promesse vivante faite aux banques et aux spéculateurs qu’il n’y aura pas de renoncement à la politique qui a ruiné la vie de millions de gens.
Le nouveau ministre des Affaires étrangères est l’ancienne commissaire européenne, Emma Bonino, issue des Radicaux italiens libertaires et fervente partisane du « libre marché », de la privatisation des actifs de l’Etat, dont les soins de santé, et de la faible taxation pour les riches.

Les alliés de Monti sont représentés en force. Mario Mauro du Choix citoyen de Monti prend la tête du ministère de la Défense. Anna Maria Candellieri, ancienne responsable de la police et qui occupait le poste de ministre de l’Intérieur sous Monti, est nommée garde des sceaux. Le ministère du Travail va à une autre figure non élue, Enrico Giovannini, directeur de l’Institut statistique italien (ISTAT).

La presse affirme que Letta a mis fin à deux mois de blocage. Ceci fait référence au marchandage dénué de tout principe pour la répartition des fauteuils ministériels depuis les élections législatives des 24-24 février qui ont vu 55 pour cent des électeurs voter pour des partis critiquant l’austérité et l’Union européenne. Lors des élections, la liste menée par Monti n’a recueilli que 10 pour cent des voix. Ce que Letta a en fait réussi à faire c’est de rassembler les principaux partis responsables, deux ans durant, de l’austérité brutale derrière un programme qui en assurera sa continuité.

Tous ceux qui recherchent une alternative à la politique d’austérité se sont retrouvés face à l’absence d’une telle alternative au sein de l’establishment politique. Les Démocrates sont le résultat de l’éclatement du Parti communiste d’Italie, jadis le plus vaste parti stalinien d’Europe de l’Ouest. Les staliniens et les ex-staliniens émergent à présent comme la cheville ouvrière du régime bourgeois en Italie et le principal parti de gouvernement. Ils président une organisation ouvertement droitière dominée par des figures issues des Chrétiens démocrates comme Letta, tandis que la faction stalinienne rivale, Refondation communiste, s’est quasiment effondrée du fait de sa propre histoire de manigances pourries.

Ceci fait que le Mouvement 5 Etoiles de Beppe Grillo, qui avait obtenu en février 25 pour cent des voix, est en mesure de dominer l’opposition à l’égard du nouveau gouvernement. Cependant, le conservatisme du programme politique et économique de Grillo est à peine dissimulé par les fanfaronnades de sa rhétorique.
Il parle du processus qui a abouti à ce dernier gouvernement en date, y compris le renouvellement extraordinaire du mandat présidentiel de sept ans du stalinien Giorgio Napolitano, âgé de 87 ans, comme équivalant à un « coup d’Etat. » Il décrit son mouvement comme étant l’équivalent de la Révolution française, la guillotine en moins. Toutefois, ses dénonciations de la corruption et du népotisme sont tout à fait compatibles avec les exigences formulées par certaines sections de l’aristocratie financière italienne et mondiale.

Grillo a dit plus qu’il n’en avait l’intention lorsqu’il a dit au quotidien allemand Bild, en plaisantant, « J’aimerais voir des gens honnêtes, compétents et professionnels aux bons postes. A cet égard, je me réjouirais d’une invasion allemande en Italie. »
Les coupes brutales exigées par l’UE et le Fonds monétaire International se sont révélées être tout aussi catastrophiques pour l’Italie que pour la Grèce, le Portugal, l’Espagne et l’Irlande. Le groupe de pression industriel Confindustria a décrit l’austérité comme ayant causé « des dégâts dévastateurs comparables à la guerre, » laissant l’Italie confrontée à une situation de « pleine urgence de crédit. »
Plus de 31.000 entreprises ont fermé leur porte au premier trimestre de cette année. L’économie de l’Italie s’est contractée de 6,9 pour cent depuis 2007 et de 2,4 pour cent l’année dernière. La dette publique a effectivement augmenté et est passée de 121 à 127 pour cent du produit intérieur brut (PIB) et elle devrait augmenter davantage car une récession italienne et européenne se profile.

L’impact social a été brutal. Le chômage se situe à 11,6 pour cent et à 37,8 pour cent pour les jeunes – grimpant à plus de 50 pour cent à Naples et dans d’autres régions plus défavorisées du Sud.
L’expérience de la classe ouvrière italienne est commune à celle de ses frères et sœurs en Europe et internationalement. Les travailleurs ont exprimé sans équivoque leur opposition à la politique qui a précipité des millions de gens dans une misère noire et le chômage, et ils se voient imposer des gouvernements de technocrates et droitiers afin de garantir que l’assaut perpétré contre leur niveau de vie se poursuive.

Personne ne met en avant un programme de réforme sociale progressiste, et encore moins de mesures économiques et sociales radicales pour contrer l’aggravation de la crise. La classe dirigeante dispose de toutes sortes d’organisations pour garantir que son programme est appliqué à la lettre – l’UE, le FMI, la Banque centrale européenne et les innombrables portraits robots de gouvernements qui, indépendamment de leur couleur politique officielle, font exactement ce que leur demandent les ultra-riches.

De quoi disposent les travailleurs ? De syndicats qui sabordent le moindre signe d’opposition et servent, de fait, de prolongement du patronat et de l’Etat. Et de vieux partis « travaillistes » et « sociaux-démocrates » dégénérés et qui sont indiscernables de la droite conservatrice.

Quant aux groupes pseudo-gauches comme Sinistra Critica en Italie, SYRIZA en Grèce, le Bloc de Gauche au Portugal, et les autres, ils organisent leurs protestations symboliques contre l’austérité tout en promettant leur soutien à l’UE et en canalisant les dissensions derrière les syndicats.
La défense des droits sociaux et démocratiques ne requiert rien de moins que la réorganisation de l’économie et de la société grâce à la formation d’un gouvernement ouvrier et des Etats socialistes unis d’Europe. Les principales entreprises et les banques doivent être reprises et soumises au contrôle démocratique. La production doit être organisée selon les besoins de la société et non pas l’accumulation du profit et de la richesse obscène de quelques-uns.

La tâche à accomplir maintenant est la construction d’une direction révolutionnaire, le Comité international de la Quatrième Internationale, afin de préparer politiquement une contre-offensive de la classe ouvrière en donnant une voix au mécontentement populaire grandissant contre l’establishment politique pourri et l’ordre social en faillite qu’il défend.

Par Chris Marsden – WSWS

Le gouvernement italien s’en prend aux lois de protection contre les licenciements

Juste avant Noël 2011, le parlement italien avait adopté un plan d’austérité totalisant 80 milliards de coupes touchant notamment les retraités, les travailleurs et les pauvres. Les lois de protection contre les licenciements sont à présent dans le collimateur du premier ministre « technocrate » Mario Monti : d’ici le 23 janvier, il projette de soumettre des réformes supprimant en grande partie les protections juridiques contre le licenciement, ainsi que d’autres droits sociaux.
Le plan d’austérité de Monti a été soutenu au parlement par le Parti Démocrate (Partito Democratico, PD, successeur du Parti communiste), par le parti Peuple de la Liberté (PDL) de Silvio Berlusconi et par le Troisième Pôle (Terzo Polo), formé par les Chrétiens démocrates et les « post-fascistes ».

Ont voté contre, le parti de l’Italie des Valeurs (Italia dei Valori), parti de l’ancien juge d’instruction Antonio di Pietro, et la Ligue du Nord, le précédent partenaire de la coalition de Berlusconi. Italie des Valeurs a critiqué les mesures d’austérité de Monti disant qu’elles ne comportent pas suffisamment de mesures contre la corruption alors que la Ligue du Nord de droite a tenté de tirer un certain capital politique de son opposition au plan d’austérité.

Le caractère de classe du plan d’austérité est tellement évident que pour la première fois depuis bien des années les trois principales fédérations syndicales de l’Italie se sont senties obligées de lancer un mot d’ordre de grève de trois heures pour la journée du 12 décembre. L’action a, toutefois, été purement symbolique et était censée être une soupape de sécurité inoffensive pour contenir le mécontentement populaire grandissant.

Les syndicats collaborent étroitement avec Monti et sont régulièrement invités pour consultation avant que celui-ci n’annonce ses décisions. Ils sont personnellement liés aux Démocrates et aux autres partis qui ont voté en faveur du plan d’austérité. Il est significatif de noter que d’éminents Démocrates sont également intervenus dans les rassemblements syndicaux du 12 décembre où ils ont pesté contre un plan de rigueur « injuste, déséquilibré, récessif », pour ensuite le soutenir quelques jours plus tard au parlement.
Un rôle semblable est joué par Nichi Vendola, président de la région des Pouilles, qui, après que le parti de la Refondation communiste (Rifondazione Comunista, RC) a quitté le parlement italien, est devenu le porte-parole de la pseudo-gauche. Il avait dûment dénoncé le « budget faux et socialement injuste » pour ensuite placer tous les espoirs dans le gouvernement Monti.

« Si le gouvernement a besoin d’une deuxième tentative pour prendre ces mesures de justice sociale, de durabilité de l’environnement et de croissance économique qui jusque-ici font défaut, nous l’apprécierons, » avait-il dit à la fin de l’année lors d’une conférence de presse.
Emma Marcegaglia, présidente de l’association patronale Confindustria, n’a pas caché son enthousiasme pour le plan d’austérité. Monti est considéré comme l’un des leurs par de nombreux entrepreneurs, « il est tout à fait sur notre ligne pour ce qui est des questions de politique économique, » a-t-elle jubilé. Maintenant, que le marché du travail doit être libéralisé, « il ne devrait pas y avoir de sujets tabous lors des discussions. »

L’idée maîtresse du plan de rigueur est une nouvelle réduction des retraites d’Etat. D’ici 2018, les hommes tout comme les femmes devront travailler jusqu’à l’âge de 66 ans. Jusque-là, certains travailleurs pouvaient prendre leur retraite après 35 ans de service – ce qui représentait un important acquis social. Dès le mois de décembre, près de 100.000 travailleurs de moins que prévu ont pu partir à la retraite.

Dans le même temps, la situation sur le marché du travail est catastrophique. Selon Confindustria, un million d’emplois ont été détruits depuis le début de la crise en 2008. Une étude de l’Institut national des Statistiques, Istat, a constaté qu’un Italien sur quatre était menacé de pauvreté. De plus, le pays est en train de glisser vers la récession qui est également exacerbée par le plan d’austérité. En 2012, le produit intérieur brut se contractera de 1,5 pour cent.
Le deuxième élément important du plan d’austérité – l’augmentation de la TVA (taxe sur la vente) de 21 à 23 pour cent, une augmentation des taxes sur l’énergie et l’immobilier – touchera tout particulièrement les personnes aux revenus plus faibles et moyens. Le coût de l’essence et du gaz a augmenté de cinq pour cent au 1er janvier, l’électricité et le péage autoroutier de trois pour cent. Les propriétaires hautement endettés (qui forment 80 pour cent de la population) doivent payer en moyenne 800 euros de taxes supplémentaires sur leur maison.

Les retraités sont tout particulièrement durement touchés par l’inflation étant donné que leurs retraites sont déjà gelées par le plan d’austérité. Les retraites s’élevant à 900 euros par mois ne seront plus revalorisées en raison de l’inflation ce qui représente une réduction substantielle du revenu réel.

Le déclin du pouvoir d’achat a affecté les ventes au détail qui ont chuté de 17 pour cent durant la période de Noël par rapport à l’année précédente. Par contre, la rue Montenapoleone à Milan qui héberge le commerce de luxe et qui regorge de boutiques chic a enregistré une augmentation de 25 pour cent de ses ventes.

Le plan d’austérité épargne en grande partie les riches. Il ne renferme pour ainsi dire aucune mesure contre la fraude fiscale et l’évasion fiscale qui sont répandus au sein de la classe dirigeante italienne. L’église catholique continue d’être épargnée en ne payant pas la taxe immobilière – faisant perdre trois milliards d’euros par an au Trésor public.

De plus, le gouvernement a renoncé à mettre aux enchères des fréquences utilisées pour la télévision, garantissant ainsi la survie de l’empire du groupe de TV Mediaset de Berlusconi.

A peine le parlement avait-il adopté le plan de rigueur que Monti lançait la prochaine offensive. Après que le plan « sauver l’Italie » a été passé, le plan « l’Italie croît » a été annoncé par le premier ministre lors d’une conférence de presse qui s’est tenue à la fin de l’année. A cet effet, le marché du travail et le secteur public doivent largement être libéralisés et le tissu social du pays « modernisé ».
L’assaut cible l’article 18 du code du travail qui confère aux employés et aux ouvriers dans les entreprises de plus de quinze salariés une protection contre les licenciements. En 2002, trois millions de personnes avaient manifesté à Rome, l’une des plus vastes manifestations de l’histoire de l’Italie, contre la tentative du gouvernement Berlusconi de supprimer la protection juridique contre les licenciements.

Avec le soutien des Démocrates et des syndicats, Monti veut à présent accomplir ce que Berlusconi n’avait pas réussi à faire en son temps. Il a déjà invité dans les jours à venir les « partenaires sociaux » pour discuter des réformes du marché du travail. « Nous voulons appliquer des mesures sur lesquelles les syndicats et les employeurs peuvent se mettre d’accord, » a-t-il annoncé.

Monti sait qu’il peut compter sur le soutien des syndicats. Eux aussi considèrent que les mesures de libéralisation sont inévitables. Un accord est déjà en vue. Les syndicats ont signalé leur volonté d’accepter l’assouplissement de la protection des travailleurs contre les licenciements en échange d’une promesse de salaires plus élevés. Face à une hausse rapide de l’inflation – faisant que de faibles augmentations de salaire se traduiront encore très probablement par une perte du pouvoir d’achat des travailleurs – le patronat n’aura pas trop de difficulté à accepter.

Certains représentants influents du parti des Démocrates, tel l’ancien président Walter Veltroni, et le Troisième Pôle ont déjà réclamé l’abolition de la protection contre les licenciements.

Monti projette de finaliser ses projets au cours des trois prochaines semaines au plus tard, afin de les présenter le 23 janvier aux ministres des Finances de la zone euro.

Révolution, journal marxiste écrit :

Italie : la lutte de classes reprend ses droits !

Le 25 octobre dernier, 1 million de jeunes et de travailleurs a manifesté à Rome contre le « Jobs act » – la contre-réforme du marché du travail, pierre angulaire de la politique du gouvernement Renzi pour sauver le capitalisme italien en déclin. Le même projet visant à faciliter les licenciements est réclamé par le Medef en France, le gouvernement Valls lui prêtant une oreille attentive.

Il s’agit d’une des plus grandes mobilisations de la classe ouvrière italienne de ces dernières années, après une période de démoralisation sous l’effet de la crise. L’apparente solidité du gouvernement de « centre gauche » de Matteo Renzi, véritable modèle pour les gouvernements européens au service du Capital, commence à se fissurer (comme nous l’annoncions dans un précédent article : Le gouvernement Renzi, en Italie : un « modèle » pour la gauche française – ou pour le patronat ?). La lutte des classes est désormais incarnée par une opposition aux contours plus distincts : d’un côté, le gouvernement Renzi et ses soutiens, l’ensemble du patronat italien, la quasi-totalité du Parlement, de la droite berlusconienne à la majorité du parti démocrate de Renzi, sans oublier les médias bourgeois et les institutions financières européennes et mondiales ; de l’autre coté, les jeunes et travailleurs organisés autour du principal syndicat italien, la CGIL. Il ne s’agit que du début d’un mouvement de résistance aux politiques d’austérité, qui pourrait déboucher à terme sur un conflit généralisé remettant en cause l’ensemble du système.

Nos camarades du journal marxiste FalceMartello sont intervenus avec succès lors de la manifestation à Rome. Ils ont organisé leur propre cortège, autour de leur mouvement « Gauche, Classe, Révolution », créé en 2013 suite à l’effacement des partis de gauche traditionnels en Italie, afin de défendre auprès des travailleurs italiens la nécessité d’organiser un parti représentant leurs seuls intérêts de classe et de se doter d’un programme proposant une alternative révolutionnaire au système capitaliste en crise. Nos camarades ont vendu plus de 600 copies de FalceMartello, récolté plusieurs milliers d’euros de fonds de lutte et également diffusé Radio Fabbrica — « Radio Usine » —, le bulletin de leurs camarades organisés dans le mouvement ouvrier. Nous vous proposons ci-dessous une traduction de l’éditorial du dernier numéro de Radio Fabbrica, qui explique les raisons du conflit autour du « Jobs act » et trace les perspectives d’une lutte victorieuse pour le mouvement ouvrier italien.

L’éditorial de Radio Fabbrica d’octobre 2014 :

« Renzi dévoile ses cartes contre les travailleurs »

Le gouvernement italien dirigé par Matteo Renzi a récemment dévoilé ses cartes et révélé sa nature profondément anti-ouvrière. Son projet de loi sur les nouvelles règles du marché du travail, le « Jobs Act », envisage entre autres choses la suppression de l’article 18 du Statut des travailleurs, c’est-à-dire l’abolition définitive du peu de protection qui restait aux salariés italiens [cet article 18 oblige les patrons à justifier tout licenciement ; il est donc l’objet depuis une dizaine d’années d’attaques constantes du patronat et des gouvernements italiens successifs et, en conséquence, à l’origine des plus grandes mobilisations de la classe ouvrière italienne ces dernières années – NDT]. L’attaque sur les droits élémentaires des salariés par le biais du Jobs Act se manifeste également par d’autres dispositions inadmissibles, comme le contrôle à distance des travailleurs dans l’entreprise ou le droit des patrons de dégrader, selon leur bon vouloir, les qualifications de leurs employés.

Précarité pour tous : dernier acte

Tout cela serait bien sûr mis en place au nom de la reprise économique, pour donner à chacun, jeune et moins jeune, un travail convenable. La thèse est la même depuis trente ans : il est impossible de relancer l’économie à cause des syndicats « conservateurs », qui défendent leurs appareils bureaucratiques et les privilèges d’une minorité de travailleurs seulement. Le système juridique du travail est cloisonné, les entreprises ne peuvent pas s’étendre, les multinationales ne veulent pas investir.

Accusé par la secrétaire de la CGIL [l’équivalent italien de la CGT, NDT] et le secrétaire de la FIOM [la puissante fédération de la métallurgie de la CGIL, NDT] de promouvoir les pires politiques anti-ouvrières depuis les années quatre-vingt, le chef du gouvernement, Renzi, s’est défendu en renouvelant ses attaques contre les dirigeants syndicaux. A cette fin, il a diffusé un spot publicitaire de deux minutes pour illustrer sa thèse. Dans ce spot, Renzi évoque une jeune mère précaire, contrainte de survivre à l’aide d’aides sociales, et un ouvrier de cinquante ans expulsé du cycle de production sous l’effet de la crise. Ainsi Renzi, par son Jobs Act, ne souhaiterait rien moins que mettre fin au scandale de la précarité en Italie !

La réalité est évidemment tout autre. Derrière l’énième attaque contre le statut des travailleurs, derrière le slogan des « droits progressifs », un objectif plus important se cache : il ne s’agit en aucun cas de donner à chacun les mêmes droits, mais au contraire d’étendre l’absence de toute loi à l’ensemble des travailleurs. Ainsi, tous doivent souffrir de la même exploitation, du chantage et de la peur.

Renzi se sent assez fort pour tenter de lancer une attaque contre le Statut des travailleurs, que Berlusconi lui-même n’avait pas réussi il y a dix ans. Plus récemment, en 2012, le gouvernement Monti avait réussi en grande partie à entamer ce Statut, mais pas de façon définitive. Renzi croit donc que les conditions lui sont assez favorables pour abolir définitivement le fameux article 18 du Statut des travailleurs, fort du soutien de tout le patronat ainsi que des institutions européennes et mondiales.

Les responsabilités des directions syndicales

Mais cela ne lui suffit pas. Renzi a également besoin du soutien – ou du moins de la passivité – de la majorité des travailleurs, des jeunes et des chômeurs dans le pays. Renzi mise tout sur le discrédit des syndicats, car ces dernières années leurs dirigeants n’ont tout simplement rien fait. Dans une certaine mesure, ceux-ci sont devenus en partie responsables de la situation actuelle. Ce jugement ne concerne pas seulement les syndicats « conciliants », comme la CISL [la CFDT italienne, NDT] et l’UIL, qui ont toujours dit oui à la direction de Fiat, à Berlusconi et à Monti. Les responsabilités en incombent au moins autant au principal syndicat italien, historiquement le plus combattif d’entre eux, la CGIL.

Cela fait 20 ans que la précarisation du travail avance inexorablement ; il existe désormais près de cinquante types de contrats temporaires disponibles pour les employeurs ; les patrons peuvent faire ce qu’ils veulent. Qu’a fait la CGIL dans les deux dernières décennies pour lutter réellement contre cette précarité ? Peu, voire rien, même lorsque les conditions étaient favorables.

Par exemple en 2003, lorsque la CGIL avait mobilisé des millions de personnes contre le projet du gouvernement Berlusconi qui s’attaquait déjà à l’article 18, il n’y avait pas seulement dans les manifestations des travailleurs « protégés », mais aussi des milliers de travailleurs précaires qui ont vu à travers cette lutte une lueur d’espoir pour obtenir enfin un contrat décent. Un espoir de courte durée : dès que Berlusconi a été contraint de retirer son projet, la CGIL a démobilisé. N’était-ce pas l’occasion pour étendre ce droit – et d’autres droits – à tous les travailleurs ?

Cette pusillanimité a caractérisé également des secteurs traditionnellement plus combattifs de la CGIL. Ce constat fut particulièrement vrai lors des grandes mobilisations de 2010, faisant suite au référendum au sein de l’usine Fiat de Pomigliano, près de Naples [un chantage exercé par la direction de Fiat sur ses ouvriers, qui devaient accepter une dégradation de leurs conditions de travail contre la promesse du maintien de l’emploi – NDT]. La FIOM, fédération métallurgique de la CGIL, avait réussi à capter le mécontentement général, autour du soutien aux travailleurs de Pomigliano, et avait fait descendre dans les rues de Rome des dizaines de milliers de jeunes et de travailleurs d’autres catégories, malgré l’obstruction du sommet de la CGIL [sur la grande mobilisation de 2010, lire ce précédent article : Les travailleurs italiens relèvent la tête ! ; et sur la lutte des travailleurs de Pomigliano : Solidarité avec les travailleurs de FIAT Pomigliano - Pour la défense de syndicats de classe, NDT]. Mais là encore, alors que des millions de personnes regardaient la FIOM avec espoir, sa direction finit par renvoyer tout le monde à la maison.
Enfin, la CGIL est restée spectatrice de la détérioration profonde de l’article 18, mise en œuvre par le gouvernement Monti en 2012. Il faut souligner, en outre, que ce gouvernement n’avait pas seulement aggravé le statut des travailleurs, mais qu’il avait aussi mis en œuvre la pire réforme des retraites de l’Histoire italienne – sans rencontrer de résistance sérieuse.

C’est grâce à la passivité des syndicats de ces dernières années que Renzi se sent capable de donner le coup fatal. Il est convaincu que les travailleurs ne le gêneront pas. C’est là le fond du problème.

Comment gagner ?

Après des mois d’hésitation, de débats inutiles et épuisants, la CGIL essaie finalement de reprendre l’initiative. Deux manifestations ont été organisées séparément, dans un premier temps : le samedi 18 octobre par la FIOM, le 8 novembre par les travailleurs de la Fonction publique et de l’Éducation, qui sont mobilisés pour le renouvellement de contrats bloqués depuis des années [entre temps, une grande manifestation de toute la CGIL a rassemblé, contre le Jobs Act, 1 million de personnes à Rome, le 25 octobre dernier – NDT]. Nous serons présents à ces manifestations et nous les soutiendrons toujours avec conviction, mais nous savons que ni les marches du samedi ni les menaces d’une grève générale ne convaincront Renzi de renoncer à son attaque. Le rôle du syndicat devrait être notamment de proposer et d’exiger du gouvernement l’abolition des contrats temporaires et l’extension du Statut des travailleurs à tout le monde.
Une vraie mobilisation nécessite une stratégie à la hauteur de la bataille à mener : une réelle implication des travailleurs dans l’organisation et une discussion sur des actions de lutte réellement efficaces à entreprendre. Les travailleurs doivent être convaincus que la bataille à venir est une bataille juste. Pour cela, il n’est pas suffisant de dire qu’on ne doit pas toucher à l’Article18.

C’est en répondant aux questions légitimes des travailleurs avec un programme à la hauteur des enjeux que l’on pourra gagner :

• Refus catégorique de la loi « Jobs act » et des contrats « aux droits tutélaires progressifs » ;

• Défense et extension du Statut des travailleurs à tous ;

• Suppression des réformes du gouvernement Monti sur les retraites et les prestations sociales ;

• Renouvellement du contrat de la Fonction publique et des contrats nationaux qui doivent défendre réellement les intérêts des travailleurs.
De nombreux responsables syndicaux nous accusent d’être « des rêveurs qui veulent l’impossible ». Mais quelle est l’alternative ? Nous sommes aujourd’hui dans cette situation désastreuse en raison de l’impasse où nous ont conduit les bureaucraties syndicales, celles-là mêmes qui nous reprochent de confondre les rêves avec la réalité.

Nous faisons donc appel à tous ceux qui veulent lutter pour promouvoir la nécessité d’une mobilisation efficace, à même d’imposer une véritable grève générale. La CGIL a ce potentiel, mais ce sont les travailleurs qui doivent l’imposer. Nous devons être conscients que la réussite de cette bataille, aujourd’hui comme par le passé, réside dans la mobilisation générale des travailleurs et dans leur capacité à organiser le conflit dans les lieux de travail.

Paolo Grassi (CGIL)

Messages

  • Nelle ultime settimane sono cresciute le proteste dei lavoratori, che riflettono la profonda rabbia contro il governo del Partito Democratico del primo ministro Matteo Renzi e la sua politica contro la classe lavoratrice. La risposta del governo è stata quella di scatenare la violenza della polizia contro i manifestanti.

    Il 29 ottobre, circa 600 lavoratori delle acciaierie Thyssen Krupp hanno protestato a Roma contro la decisione dell’azienda di eliminare 550 posti di lavoro nello stabilimento di Terni. La polizia ha caricato violentemente i lavoratori, che erano in cammino verso il Ministero dello Sviluppo Economico, dopo essersi radunati davanti all’ambasciata tedesca. Almeno quattro operai e due funzionari sindacali sono stati feriti durante l’assalto della polizia.

    Il Ministero dell’Interno, del Vice Primo Ministro Angelino Alfano, ha risposto all’incidente falsificando i fatti e accusando gli operai di cercare di occupare la stazione ferroviaria principale di Roma.

  • L’Italie s’apprête à faire face demain à une grève générale de huit heures convoquée par plusieurs grandes confédérations syndicales pour protester contre les politiques économiques et sociales du gouvernement de Matteo Renzi.

    Tous les secteurs d’activité devraient être touchés, même si l’autorité italienne compétente a interdit aux employés des transports ferroviaires de participer au mouvement car ces derniers ont également prévu des arrêts de travail samedi et dimanche.

  • Trois confédérations syndicales ont appelé à la cessation totale du travail dans tous les secteurs d’activité pendant huit heures pour protester contre une réforme du marché du travail initiée par le président du Conseil italien.

    Ce texte, adopté la semaine dernière, comporte deux volets. Un premier prévoit d’améliorer le statut des salariés les plus précaires, mais il s’attaque surtout à l’article 18 du code du travail qui protège les salariés contre les licenciements abusifs, de plus en plus considéré comme un frein à l’embauche selon les employeurs.

  • Pas moins de 54 défilés sont prévus dans le pays. Tous les secteurs d’activité sont touchés, public comme privé. Les manifestants sont très remontés contre le "Jobs Act", la réforme du marché du travail adoptée la semaine dernière, qui prévoit de faciliter les licenciements et de réduire les droits des salariés au début de leur travail.

    "Ca ne va pas comme ça !" , tel est le mot d’ordre de la grève générale qui a débuté ce matin en Italie. Des administrations à la santé, des écoles en passant par les transports, tous les secteurs d’activité, public comme privé, sont touchés, de 9h à 17h. Un service minimum est tout de même prévu, notamment dans les transports publics - le ministre a renoncé à réquisitionner des employés, après que les syndicats ont accepté de réduire leur grève de 9h à 16h.

    Cette grève générale est initiée par la principale confédération syndicale, la CGIL, de gauche, et soutenue par l’UIL, modérée. L’UGL, de droite, est venue se joindre à eux ; la CISL, catholique modérée, n’y est pas, en revanche.

  • Pour la première depuis 20 ans, les ouvriers de l’industrie textile italienne se sont mis en grève. Ils manifestent pour défendre leur convention collective nationale.

    Les entreprises italiennes du textile et de l’habillement étaient touchées vendredi par un mouvement de grève de huit heures, le premier depuis 20 ans, les salariés du secteur protestant pour la défense de leur convention collective nationale.

    Outre un arrêt de travail de huit heures, des manifestations étaient prévues tout au long de la journée devant les sièges régionaux des organisations patronales, comme à Milan ou à Ancône, ainsi que devant les grandes entreprises du secteur.

  • Piégés une fois encore dans des choix pourris par les classes dirigeantes, voilà ce qui vient d’arriver aux travailleurs et aux milieux populaires d’Italie !

    Choisir entre le troisième président non élu qui impose une constitution donnant les plein pouvoir au président et une extrême droite qui prend la tête d’opposition à cette constitution !!!

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