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L’assassinat de Léon Trotsky, un des crimes de Staline

mercredi 12 juin 2013, par Robert Paris

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  • Il y a 75 ans jeudi, le 20 août 1940, Léon Trotsky, le codirigeant de la révolution russe et le fondateur de la Quatrième Internationale, subissait un attentat mené par un agent stalinien armé d’un pic à glace, Ramón Mercader. C’était à la villa de Trotsky à Coyoacán, au Mexique, son dernier lieu d’exil. Le grand révolutionnaire est mort le lendemain de ses blessures, à l’âge de 60 ans.

    Le meurtre de Trotsky était la crête d’une vague de réaction politique internationale, avec la victoire du fascisme en Allemagne en 1933, la défaite de la Révolution espagnole de 1936-39, les Procès de Moscou et la Grande Terreur de 1936-38 en URSS, et le début de la Deuxième Guerre mondiale en septembre 1939. Cet assassinat était la réponse de la bureaucratie stalinienne, qui servait d’agence politique à l’impérialisme, comme Trotsky l’avait expliqué, au danger posé par les principes marxistes pour lesquels il luttait. Tant que Trotsky vivrait, Staline aurait à craindre un ennemi redoutable.

    Malgré tout, Trotsky avait pu former la Quatrième Internationale, qui a survécu à ses assassins. Soixante-quinze ans plus tard, il jouit indiscutablement d’une position unique dans l’histoire du socialisme international. C’est une figure de l’histoire mondiale qui a non seulement influencé le cours du 20e siècle, mais dont les écrits et les idées sont toujours un guide essentiel pour orienter la classe ouvrière, alors qu’elle entre dans une nouvelle période de lutte révolutionnaire.

  • Un journal parisien rapportait une conversation entre Hitler et l’ambassadeur français Coulondre à l’automne 1939 :

    « Hitler vantait les avantages du traité avec Staline qui lui laissait les mains libres.

    Coulondre lui répondit : « Mais le véritable vainqueur en cas de guerre sera Tortsky ! Y avez-vous pensé ? »

    Hitler, affirme Coulondre, a répondu qu’il avait raison mais qu’il avait été forcé de conclure ce traité. »

    Il n’a pas répondu que cela ne posait pas de problème : il allait éliminer aussi Trotsky comme il avait éliminé toute une génération de révolutionnaires bolcheviks !!!

  • On remarquera que, dans aucune phase de leur histoire, ni la bureaucratie ni la bourgeoisie n’ont réhabilité Trotsky. Quel meilleur éloge existe-t-il ?!!!

  • David North :

    « Trois ans avant sa mort, lors d’un entretien avec un journaliste américain sceptique et hostile, Trotsky expliqua qu’il voyait sa vie non pas comme une série d’épisodes déroutants et en dernière analyse tragiques, mais bien comme un reflet des différentes étapes de la trajectoire historique du mouvement révolutionnaire. Son arrivée au pouvoir en 1917 était le produit d’un soulèvement sans précédent de la classe ouvrière. Pendant six ans, son pouvoir découlait des relations sociales et politiques créées par ce soulèvement. Le déclin de son sort politique personnel résulte inexorablement du recul de la vague révolutionnaire. Trotsky a été chassé du pouvoir non pas parce qu’il était un politicien moins adroit que Staline, mais bien parce que la force sociale sur laquelle son pouvoir était basé la classe ouvrière russe et internationale battait politiquement en retraite. L’épuisement de la classe ouvrière russe au lendemain de la guerre civile, le pouvoir politique croissant de la bureaucratie soviétique, et les défaites subies par la classe ouvrière européenne notamment en Allemagne furent, en dernière analyse les facteurs décisifs responsables de la chute du pouvoir de Trotsky.

    Toutes les défaites subséquentes subies par la classe ouvrière internationale se retrouvent dans le sort personnel de Trotsky : la démoralisation politique provoquée par la défaite de la révolution chinoise en 1927 fournit à Staline l’opportunité d’expulser l’Opposition de gauche de l’Internationale communiste et d’envoyer Trotsky en exil, d’abord à Alma Ata, puis peu de temps après, hors de l’URSS. La victoire de Hitler en 1933 rendue possible par les politiques criminelles et irresponsables du Parti communiste allemand dirigé par les staliniens mit en branle toute une chaîne d’événements horrifiants qui aboutit aux procès de Moscou, aux catastrophes politiques des fronts populaires staliniens et à l’expulsion finale de Trotsky du continent européen vers le lointain Mexique.

    C’est dans ce pays, à Coyoacan, en banlieue de Mexico, que Trotsky fut assassiné par un agent stalinien. La mort de Trotsky survint au même moment où l’orgie sanglante de la contre-révolution fasciste et stalinienne battait son plein. À cette époque, pratiquement tous les anciens camarades de Trotsky en Union Soviétique avaient été liquidés. Ses quatre enfants étaient morts, les deux filles les plus âgées étant mortes prématurément du fait des privations imposées par la persécution de leur père, alors que les deux fils, Sergei et Lev, avaient été assassinés par le régime stalinien. Lev Sedov mourût à Paris en février 1938. Il était à cette époque le cadre politique le plus important après son père dans la Quatrième Internationale. D’autres membres exceptionnels du secrétariat de la Quatrième Internationale Erwin Wolf et Rudolf Klement furent assassinés respectivement en 1937 et en 1938.

    En 1940, Trotsky voyait son assassinat comme inévitable. Mais il ne se résigna pas en un état de quelconque pessimisme à propos de son sort. Il fit tout en son pouvoir pour parer et retarder le coup préparé par Staline et ses agents du GPU/NKVD. Il comprenait que les conspirations de Staline étaient nourries par la contre-révolution. « Je vis non pas selon la règle mais bien en exception qui la confirme ». Il prédit que Staline profiterait de la reprise de la guerre en Europe occidentale au printemps de 1940 pour frapper. Sa prévision allait s’avérer juste.

    La première tentative sérieuse d ’assassinat survint dans la soirée du 24 mai 1940 alors que l’attention mondiale était tournée vers la déroute des armées françaises devant les troupes de Hitler. La seconde tentative réussit et survint en pleine bataille d’Angleterre, à la fin de l’été de la même année.

    Pourquoi Trotsky exilé et apparemment isolé était-il toujours aussi craint ? Pourquoi sa mort était-elle voulue par certains ? Trotsky offrit une explication politique à cela. À l’automne 1939, quelques semaines après la signature du pacte Hitler-Staline (qu’il avait d’ailleurs prédit) qui aboutit au déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, Trotsky signala une conversation, rapportée dans un journal parisien, entre Hitler et l’ambassadeur français Coulondre. Alors que Hitler vantait son traité conclu avec Staline qui lui libérait les mains pour s’occuper des ennemis de l’Allemagne à l’Ouest, Coulondre l’interrompit en l’avertissant : « mais le véritable vainqueur (en cas de guerre) sera Trotsky. Y avez-vous pensé ? » Hitler reconnut la justesse de l’évaluation de l’ambassadeur français, mais blâma ses adversaires de lui forcer la main. Citant cet inqualifiable entretien, Trotsky écrivit : « Ces gentlemen aiment bien mettre un nom sur le spectre de la révolution... tant Coulondre que Hitler sont des représentants de la barbarie qui s’étend en Europe. Mais aucun des deux ne doute cependant que leur barbarie sera défaite par la révolution socialiste ».

    Trotsky était certes craint par les camps fasciste et démocratique, mais encore plus par la bureaucratie soviétique. Staline n’avait pas oublié comment les défaites subies par les armées russes pendant la Première Guerre mondiale avaient discrédité le régime et mobilisé les masses. Le même danger n’était-il pas toujours présent si une nouvelle guerre éclatait, indépendamment de l’entente avec Hitler ? Aussi longtemps qu’il vivrait, Trotsky resterait la plus grande alternative révolutionnaire à la dictature bureaucratique, la personnification même du programme, des idéaux et de l’esprit d’Octobre 1917. C’est pourquoi Trotsky ne pouvait vivre.

    Mais même après sa mort, la peur suscitée par le nom de Trotsky ne disparut pas. Il est difficile de penser à un autre personnage qui, non seulement de son vivant, mais même plusieurs décennies après sa mort, continue de faire frémir le pouvoir en place. L’héritage historique de Trotsky résiste à toute forme d’assimilation et de cooptation. Dix ans seulement après la mort de Marx, les théoriciens de la social-démocratie allemande avaient trouvé le moyen de rendre ses écrits acceptables pour la perspective du réformisme social. Le sort de Lénine fut encore plus terrible ses restes furent embaumés et son héritage théorique falsifié et refaçonné par la bureaucratie en une religion d’État sanctifiée. Une telle distorsion fut impossible avec Trotsky. Ses écrits et ses gestes étaient trop précis et concrets dans leurs implications révolutionnaires pour cela. De plus, les problèmes politiques analysés par Trotsky, les rapports sociopolitiques qu’il a définis, de même que les caractérisations de partis qu’il a effectué avec tant de précision, de justesse et de mordant, ont gardés toute leur pertinence pendant la majeure partie du restant du siècle. »

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