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Thèses sur la dialectique

samedi 11 août 2012, par Robert Paris

Thèses sur la dialectique

Hegel réfléchissait sur la pensée suivante de Kant : « Les contradictions ne sont pas des artifices sophistiques, mais des contradictions sur lesquelles la raison doit nécessairement buter. La raison, lorsqu’elle pénètre le fondement de l’apparence naturelle des antinomies, n’est certes plus tournable par elle, mais encore trompée. »

Il écrit dans « Science de la logique » :

« En tant que chacun des deux côtés opposés contient en lui-même son autre et qu’aucun ne peut être pensé sans l’autre, il suit de là qu’aucune de ces déterminations, prise seule, n’a de vérité, mais que c’est seulement leur unité qui en a. C’est cela leur véritable considération dialectique. »

Cette pensée curieuse (fonder une logique sur des contradictions, baser une affirmation sur deux négations) le mène-t-elle à éclairer des questions ?

Hegel invente (ou devine) notamment l’indéterminisme et la dualité onde/corpuscule dans « Science de la logique » : « Le quantum apparaît par conséquent, dans son être-déterminé-en-soi, non pas comme grandeur continue mais comme grandeur discrète. Le quantum, comme grandeur limitée continue, est une limite indéterminée. » Il devine également que le vide n’est pas si vide, que la matière en est issue et que les deux sont contradictoires au sens dialectique, se transformant sans cesse l’un dans l’autre et tant interpénétrés à l’extrême... Il pressent que la vie et la mort ne sont pas diamétralement opposés mais indispensables profondément l’un à l’autre.

Extraits de Hegel tiré de sa "Science de la logique" :

"Si les premières déterminations réflexives : l’identité, la différence et l’opposition, sont établies comme principes, alors on devrait à plus forte raison concevoir et établir comme principe... la contradiction, dont le principe doit être énoncé ainsi : toutes les choses sont contradictoires en soi. (...) C’est pourtant un des principaux préjugés de la logique traditionnelle et de la représentation ordinaire que la contradiction ne serait pas une détermination aussi essentielle et immanente que l’identité. Mais s’il était question de hiérarchie et s’il était possible de considérer ces deux déterminations comme isolées l’une de l’autre, c’est plutôt la contradiction qu’il faudrait tenir pour la détermination la plus profonde et la plus essentielle. Vis-à-vis d’elle l’identité n’est que la détermination du simple immédiat, de l’être mort, tandis que la contradiction est la racine de tout mouvement et de toute vitalité ; c’est seulement dans la mesure où elle renferme une contradiction qu’une chose est capable de mouvement, d’élan, d’activité.

La contradiction est ordinairement ce qu’on écarte en premier lieu des choses, de l’être et du vrai en général ; on dit notamment qu’"il n’y a rien de contradictoire". D’autre part, on relègue la contradiction dans la réflexion subjective, en disant que c’est elle qui la pose dans ses rapports et comparaisons.... Qu’il s’agisse de la réalité ou de la réflexion pensante, la contradiction est considérée comme un simple accident, pour ne pas dire comme une anomalie ou un paroxysme morbide et passager.

(...) Mais c’est un fait d’expérience courante qu’il y a une foule de choses contradictoires, d’institutions contradictoires, etc, dont la contradiction n’existe pas seulement dans la réflexion extérieure, mais réside dans les choses mêmes. Elle ne doit pas non plus être considérée comme une simple anomalie qui apparaît ça ou là, mais elle est le négatif dans sa détermination essentielle, le principe de tout mouvement spontané, lequel n’est pas autre chose que la manifestation de la contradiction. Le mouvement sensible extérieur lui-même est son existence immédiate. Une chose se meut non seulement en tant qu’elle se trouve à un moment donné ici et au moment suivant ailleurs, mais aussi en tant qu’elle est et en même temps n’est pas dans la même place. On doit reconnaître avec les anciens dialecticiens les contradictions qu’ils ont montrées dans le mouvement ; cependant il ne s’ensuit pas que le mouvement n’existe pas, mais plutôt que le mouvement est la contradiction même existant empiriquement. (...)

Une chose n’est donc vivante que pour autant qu’elle renferme une contradiction et possède la force de la saisir et de la soutenir. Mais, lorsqu’un existant est incapable, dans sa détermination positive, de passer à la détermination négative et de les conserver l’une dans l’autre, autrement dit lorsqu’il est incapable de supporter à l’intérieur de lui-même la contradiction, il n’est pas une unité vivante, ... mais s’effondre et succombe à la contradiction. (...)

Il résulte de l’examen de la nature de la contradiction que lorsqu’on dit d’une chose qu’elle renferme une contradiction, on ne signifie pas par là qu’elle est endommagée, défectueuse ou fautive. Toute détermination, tout concret, tout concept constituent essentiellement une unité des moments différents et différenciables, qui deviennent contradictoires par la différence déterminée essentielle qui les sépare."

suite sur les idées philosophiques de Hegel

citations de Hegel


Les lois dialectiques qui suivent ne dominent pas la science de manière métaphysique au sens où la nature devrait les suivre en partant de leur forme abstraite ainsi exposée mais au sens où l’on constate cent fois que leur forme concrète s’y conforme quel que soit le domaine étudié. Elles sont indispensables à l’étude réelle concrète non pas parce que la connaissance de ces lois éviterait d’étudier concrètement la question posée mais parce que l’étude du réel peut pêcher d’autres conceptions philosophiques fausses qui induiraient en erreur ces études concrètes. Celui qui ne les connaît pas ne peut que se fourvoyer en confondant contradiction et erreur, unité et somme des parties, négation et suppression de l’affirmation, et en ignorant que l’action est blocage de l’inhibition. Elles sont d’autant plus indispensables qu’elles sont contre-intuitives et opposées à la philosophe sociale que la société tend à imposer. Elles sont indispensables tout particulièrement au révolutionnaire car la dialectique est l’alpha et l’omega de tout changement révolutionnaire, qu’il s’agisse d’un changement au niveau matériel, vivant, humain ou social.

Ainsi l’ordre et le désordre sont interpénétrés à l’infini, sont inséparables et indispensables l’un à l’autre, se construisent mutuellement l’un l’autre sans cesse. Le désordre des explosions nucléaires dans les étoiles engendre l’équilibre de ces soleils. Le désordre de l’agitation brownienne des molécules produit l’équilibre de pression et de température au sein d’un gaz au repos. Cette agitation sous-jacente ne cesse jamais, même lorsque le gaz a atteint un équilibre thermodynamique. Le désordre du message neuronal envoyé dans diverses directions redondantes permet d’ordonner les réseaux de neurones, en sélectionnant ceux qui agissent en phase. Le désordre, c’est la vie. Le désordre est la base de l’ordre dans la matière à toutes les échelles. C’est le non-équilibre qui produit l’ordre, dit la thermodynamique de Prigogine. C’est la lutte spontanée des prolétaires de Paris en 1871 qui invente la nouvelle forme de domination des exploités, l’Etat-Commune ou Etat des soviets. C’est le désordre des luttes de classe qui produit l’Etat, dit la conception révolutionnaire de l’Etat de Lénine.

L’auto-organisation n’est possible que parce que l’ordre et le désordre, loin d’exister de manière séparées et diamétralement opposées, sont contradictoires tout en étant entremêlés à l’extrême. L’ordre est aussi indispensable au désordre que le désordre l’est à l’ordre.

Or, sans l’auto-organisation, point d’apparition de la matière au sein du vide, point d’apparition de la vie au sein de la matière inerte, point d’apparition des galaxies et des étoiles ou des planètes, point d’apparition des espèces nouvelles, point d’hominisation, point de construction de sociétés et de systèmes sociaux nouveaux, etc... Et donc aucune chance pour le socialisme...

Le révolutionnaire qui refuserait de s’emparer de la philosophie dialectique s’expose à tous les contresens et à toutes les erreurs possibles. Il verra dans le prolétariat un opposé diamétral de la classe capitaliste, alors que le prolétaire est lié par l’argent au mode de domination capitaliste beaucoup plus sûrement qu’aucune chaîne n’a jamais lié aucun esclave. Mais, en même temps, et du fait même de ce qui précède, le prolétaire ne peut se libérer qu’en supprimant fondamentalement le fond même de l’exploitation capitaliste et pas seulement en diminuant le poids des chaînes. Car la chaîne de l’esclave d’aujourd’hui est l’abstraction même du lien à l’argent. Présenter l’opposition Travail contre Capital comme source du monde moderne est juste et indispensable, mais la présenter de manière diamétrale est trop élémentaire et trop abstrait. Ainsi, cela devient faux, moralisateur et rend impuissant face à la lutte des classes concrète, quotidienne. C’est oublier qu’au sein du monde du Travail on trouve aussi la contradiction de classe avec une fraction de la classe travailleuse qui le défend, que le prolétariat n’est révolutionnaire historiquement que parce qu’il ne l’est pas dans la vie de tous les jours. La classe exploitée, loin de se voir comme une classe d’avenir, constate surtout que son propre avenir journalier dépend du maintien de la classe capitaliste. Cette situation contradictoire amène le prolétaire à défendre « son » entreprise, « son » pays, « son » emploi, « son » salaire. Nier cela serait se voiler la face. Le premier à ne pas se croire capable de diriger la société est justement le prolétaire. Il est aussi le premier à ne pas souhaiter que son monde actuel s’effondre, à ne pas voir avec plaisir les capitalistes s’enferrer dans leur crise.

Celui qui raisonne de manière diamétrale ne peut comprendre le fonctionnement réel de la société. Cela l’amènerait aussi à oublier ou à négliger, au nom du fait qu’il n’y a que deux classes déterminantes historiquement, que, depuis belle lurette cette opposition s’est enrichie de l’existence d’un troisième groupe intermédiaire qui stabilise souvent l’ensemble, une classe petite-bourgeoise, qui est propriétaire tout en restant elle-même enchaînée, et qui embue les vues et les visées des exploités par son aspiration à la démocratie, à la réforme, à la conciliation et à la tranquillité du maintien de la société de classe. La classe travailleuse, si elle s’avère incapable de prendre la tête des révoltes de la petite bourgeoisie se voit opposée aux violences petites bourgeoises et est alors défaite comme le démontre le fascisme. La complexification qui découle du mode d’organisation du monde, l’interpénétration des contraires, est aussi incluse dans l’intégration des syndicats au fonctionnement capitaliste. Se contenter de raisonner par oppositions diamétrales donne le plaisir de rester moralement clair et a l’inconvénient de ne pas pénétrer la réalité, pas plus celle des rapports sociaux réels que des rapports matériels réels.

L’intérêt de raisonner philosophiquement consiste justement à tirer de l’étude de tous les domaines de la connaissance une manière d’étudier les combats, les oppositions entre contraires, d’une façon beaucoup plus perfectionnée que l’ancienne opposition diamétrale. Certes l’obscurité s’oppose à la lumière mais l’optique est contrainte de constater que lumière plus lumière peut donner l’obscurité ! C’est ce que la physique appelle l’interférence. Certes, il y a une opposition entre la matière et la lumière, mais, dans certaines circonstances la rencontre de deux matières donne de la lumière et, dans d’autres circonstances, la lumière se change en matière. Ce ne sont nullement des miracles ni des erreurs de la science. L’erreur provient de notre bon sens qui contredit nos connaissances scientifiques. La vie ne s’oppose pas diamétralement à la mort, parce que la mort est le mécanisme fondamental de la vie, comme le rapporte si bien l’immunologue Ameisen. La matière ne s’oppose pas diamétralement au vide, car il se nourrit sans cesse des particules et énergies dites virtuelles du vide quantique et que la matière n’est autre qu’une forme d’organisation de ce vide. L’homme ne s’oppose pas diamétralement à l’animal, car il en est issu et qu’il en fait toujours partie. Le prolétaire est amené par le processus historique à s’opposer au système d’exploitation capitaliste, mais il n’est pas abstraitement un ennemi du système. C’est au travers des histoires concrètes qu’il est amené à accéder à la conscience de son rôle et non de manière immédiate.

1- Est dialectique une propriété qui contient son propre contraire et intègre les deux dans une unité tout en ne supprimant pas l’opposition entre eux. Le propre des contraires dialectiques est qu’ils ne se détruisent pas mutuellement mais changent seulement la forme et la structure de leur opposition au cours de leurs diverses confrontations. Sans la dialectique pas de changement et pas de mouvement possibles. Si la matière était ce qu’elle est au moment donné et exclusivement telle, aucun changement ni aucun mouvement ne serait possible. C’est parce que chaque structure est à la fois telle qu’elle se manifeste à un moment donné et aussi sous bien d’autres états possibles que la dynamique est possible. L’actualité n’est pas la seule réalité. La structure n’est pas seulement ce qu’elle est en un moment donné. Elle contient bien d’autres potentialités que celles qui s’expriment actuellement. L’immédiateté n’est pas la seule réalité. La notion de dynamique signifie qu’un système existe comme tel de manière durable, car il contient en lui-même son propre changement comme moyen de conservation de sa structure globale.

2- Isoler les deux éléments de la contradiction dialectique, au lieu de les concevoir comme une unité, est la plus grande erreur philosophique que l’on puisse faire sur un sujet comme opposer diamétralement, au lieu de dialectiquement, la matière inerte et la matière vivante, la matière et la lumière, le vide et la matière, l’onde et le corpuscule, l’homme et l’animal ou les classes sociales qui s’opposent mais se composent aussi. L’humanité, par exemple, est sans cesse en contradiction interne avec l’animalité. Il ne sert à rien de spécifier de manière métaphysique toute propriété particulière à l’homme en l’opposant diamétralement aux propriétés de l’animalité. Si l’homme existe, c’est que ses propriétés caractéristiques existaient potentiellement au sein de l’animalité et non à l’extérieur. Si la vie existe, c’est qu’elle était en potentiel au sein de la matière inerte. Si l’étoile existe, c’est que ses explosions nucléaires étaient en potentialité au sein de la grosse planète.... etc, etc...

3- Le processus dialectique élémentaire est celui par lequel une chose se change en son contraire, ou processus de négation. Une action qui est dialectique est identique à sa négation de la négation. La négation est à la base de l’activation. Pas de mouvement, pas de changement sans négation de l’ancien état puis négation de la négation. Par exemple, dans le processus génétique de l’ADN, l’activation d’un gène pour produire des protéines est l’inhibition de l’inhibition par une protéine du deuxième gène qui inhibait le premier.

4- Toute apparition de propriété émergente (nouveauté dont les éléments ne sont pas contenus au sein du matériel préexistant) provient de la rupture de la symétrie dialectique entre une propriété et son contraire. L’émergence produit des niveaux d’organisation et définit la qualité. Un seul des deux contraires contenus dans cette unité est alors nié. C’est ce que l’on appelle la rupture de symétrie qui a produit la matière, la lumière, la vie, l’homme et la société. La lutte des classes qui détruit la vieille société et en produit une nouvelle est aussi rupture de la symétrie qui existait précédemment entre les classes.

5- L’origine d’un phénomène ou d’une propriété est la rupture émergente d’une unité entre deux propriétés contradictoires liées dialectiquement l’une à l’autre. Le vide est l’unité dialectique de la matière et de l’antimatière. La matière est une rupture de cette symétrie dialectique du vide. Toute la physique de la matière repose sur les séparations recombinaisons de la matière et de l’antimatière qui transposent des particules en d’autres particules. La mesure physique est la rupture de l’unité onde/corpuscule. La vie est unité dialectique de l’inerte et du vivant. La génétique est unité du soi et du non-soi. L’immunologie est une rupture de la symétrie dialectique qui inhibe et détruit le non-soi.

6- Qualité et quantité sont des contraires. La qualité change les propriétés structurelles, pas la quantité. La quantité est fondée sur l’identité des quanta. La qualité est fondée sur la modification des états correspondants à des niveaux d’organisation différents. Des quantités différentes s’additionnent au contraire des qualités. La qualité admet un seuil de son état d’existence, seuil qui est une quantité. La quantité admet une limite qui est le passage à une qualité différente. Bien que contraires, qualité et quantité se changent aussi l’un dans l’autre et se recomposent sans cesse.

7- Toute continuité n’est qu’une apparence produite par le couplage de la réalité discontinue (quantique) et des disparitions/réapparitions des structures qui fondent la matière, la vie, l’homme, la société...

8- Conservation et transformation sont liées dans une même unité dialectique au sein de chaque situation, de même que détermination et indétermination, hasard et nécessité, immobilité et mouvement, matière et antimatière …

9- L’auto-organisation et l’auto-mouvement sont des produits de la contradiction dialectique : la stabilité n’étant pas absence de mouvement mais confrontation permanente de l’action et de la réaction, de l’attraction et de la répulsion, du positif et du négatif (par exemple électrique), de la matière et de la lumière (par exemple, l’étoile), et, d’une manière générale, de la conservation et de la transformation (par exemple l’évolution génétique des espèces produit de la contradiction entre deux tendances opposées dialectiquement inséparables : la tendance à la diversité et la tendance à la destruction du non-soi).

10- L’idée scientifique est l’unité dialectique de la réalité objective et de la pensée subjective. Les deux se confrontent, s’opposent et se mêlent en même temps. Le concept est la reconstitution par la pensée de l’unité dialectique des contraires au sein d’une description.

11- La nouveauté est issue de l’ancien car il la contenait à titre potentiel. Elle provient d’un couple dialectique déconstruction/reconstruction à partir de l’ancien. La création n’a rien de miraculeux : elle provient de la capacité spontanée de destruction/reconstruction de l’auto-organisation.

12- D’une manière générale, le devenir est l’unité dialectique de l’être et du non-être. Il n’y a de dynamique que parce que le réel contient aussi son contraire, qu’il s’y oppose sans cesse et se recombine sans cesse avec lui.

13- Le tout n’est pas la somme des parties, car cela exclurait les interactions entre ces parties et le fait que ces parties s’expriment inséparablement du tout. Sinon, on exclue à la fois leurs potentialités, leurs interactions et leur dépendance de la structure globale. Les parties n’ont pas la même signification au sein du tout qu’indépendamment.

14- Un autre point indispensable à celui qui veut réfléchir dans un domaine limité : celui-ci existe à un niveau hiérarchique donné du temps et de l’organisation, mais il dépend aussi des autres niveaux, inférieurs et supérieurs. La réalité n’existe pas à une seule échelle. Il arrive que l’on puisse raisonner partiellement sur une partie de cette hiérarchie de niveaux sans trop d’erreur, mais il ne faut jamais oublier que l’on a opéré une coupure du réel, coupure qui, elle, n’existe pas dans la réalité. Le monde est un et tout est interpénétré.

15- Le temps et l’espace, tels que nous les connaissons à notre échelle sont des produits de la rupture de symétrie du vide qui produit la matière durable. Le vide quantique est constitué de l’unité contradictoire de la matière et de l’antimatière non durable, dite virtuelle. La rupture de symétrie due à la séparation de la matière provoque la transformation d’espace-temps du vide et l’espace et le temps sont les deux antinomies de cette unité dialectique. C’est cette contradiction entre espace et temps dans la zone où existe la matière durable qui produit la contradiction dialectique irréductible que constate la physique quantique entre quantités correspondantes qui ne peuvent pas, du coup, être en même temps connues de manière aussi précises qu’on le souhaite (inégalités d’Heisenberg).

Encore une citation sur la dialectique de Hegel :

"Le vrai et le faux appartiennent à ces idées déterminées qui sont considérées statiquement comme des essences séparées, isolées et fixées, sans aucun élément commun. Contre cette conception du vrai et du faux, il faut affirmer que la vérité n’est pas une monnaie qui porte une emprunte toute faite et qu’on n’a plus qu’à empocher. Il n’y a pas un faux tout fait pas plus qu’un mal. (...) La substance est essentiellement le négatif, en partie parce qu’elle implique une distinction et détermination du contenu, en partie parce qu’elle est un processus de différenciation simple (...) Pour le sens commun, l’opposition du vrai et du faux est quelque chose de fixe ; d’habitude, il attend que l’on approuve ou bien que l’on rejette en bloc un système philosophique existant ; et dans une explication sur un tel système il n’admet que l’une ou l’autre des deux attitudes. Il ne conçoit pas la différence des systèmes philosophiques comme le développement progressif de la vérité ; pour lui diversité veut dire uniquement contradiction. Le bourgeon disparaît dans l’éclosion de la fleur et l’on pourrait dire que celui-là est réfuté par celle-ci ; de même le fruit déclare que la fleur est une fausse existence de la plante, il se substitue à la fleur en tant que vérité de la plante. Non seulement ces formes se distinguent, mais encore elles se supplantent comme incompatibles. Cependant leur nature mouvante fait d’elles des moments de l’unité organique, en qui non seulement elles ne sont pas en conflit, mais où l’une est aussi nécessaire que l’autre ; et cette égale nécessité fait la vie de l’ensemble. (...) L’esprit doit reconnaitre dans la forme de ce qui semble se combattre et se contredire des moments mutuellement nécessaires. (...) le fond de la chose n’est pas épuisé dans sa fin, mais dans tout son accomplissement. le "résultat" n’est pas le tout concret ; il ne l’est qu’avec le processus dont il est le terme. La fin prise indépendamment du reste est l’universel mort, tout comme la tendance n’est qu’un simple effort, encore privé de réalisation ; et le résultat nu est le cadavre que la tendance a laissé derrière elle. (...) Le phénomène est un processus d’avènement et de disparition, qui lui-même n’advient ni ne disparaît, mais est en soi et constitue l’actualité et le mouvement de la vérité vivante. (...) Je nomme dialectique le principe moteur du concept (...) Considérer quelque chose rationnellement veut dire non pas apporter du dehors une raison à l’objet et l’élaborer. L’objet par lui-même est rationnel."

La suite

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Messages

  • « D’après la conception matérialiste de l’histoire, le facteur déterminant dans l’histoire est, en dernière instance, la production et la reproduction de la vie réelle. Ni Marx, ni moi n’avons jamais affirmé davantage. Si, ensuite, quelqu’un torture cette proposition pour lui faire dire que le facteur économique est le seul déterminant, il la transforme en une phrase vide, abstraite, absurde. La situation économique est la base, mais les divers éléments de la superstructure – les formes politiques de la lutte de classes et ses résultats, – les Constitutions établies une fois la bataille gagnée par la classe victorieuse, etc., – les formes juridiques, et même les reflets de toutes ces luttes réelles dans le cerveau des participants, théories politiques, juridiques, philosophiques, conceptions religieuses et leur développement ultérieur en systèmes dogmatiques, exercent également leur action sur le cours des luttes historiques et, dans beaucoup de cas, en déterminent de façon prépondérante la forme. Il y a action et réaction de tous ces facteurs au sein desquels le mouvement économique finit par se frayer son chemin comme une nécessité à travers la foule infinie de hasards (c’est-à-dire de choses et d’événements dont la liaison intime entre eux est si lointaine ou si difficile à démontrer que nous pouvons la considérer comme inexistante et la négliger). Sinon, l’application de la théorie à n’importe quelle période historique serait, ma foi, plus facile que la résolution d’une simple équation du premier degré.

    Nous faisons notre histoire nous-mêmes, mais, tout d’abord, avec des prémisses et dans des conditions très déterminées. Entre toutes, ce sont les conditions économiques qui sont finalement déterminantes. Mais les conditions politiques, etc., voire même la tradition qui hante les cerveaux des hommes, jouent également un rôle, bien que non décisif. Ce sont des causes historiques et, en dernière instance, économiques, qui ont formé également l’Etat prussien et qui ont continué à le développer. Mais on pourra difficilement prétendre sans pédanterie que, parmi les nombreux petits Etats de l’Allemagne du Nord, c’était précisément le Brandebourg qui était destiné par la nécessité économique et non par d’autres facteurs encore (avant tout par cette circonstance que, grâce à la possession de la Prusse, le Brandebourg était entraîné dans les affaires polonaises et par elles impliqué dans les relations politiques internationales qui sont décisives également dans la formation de la puissance de la Maison d’Autriche) à devenir la grande puissance où s’est incarnée la différence dans l’économie, dans la langue et aussi, depuis la Réforme, dans la religion entre le Nord et le Sud. On parviendra difficilement à expliquer économiquement, sans se rendre ridicule, l’existence de chaque petit Etat allemand du passé et du présent ou encore l’origine de la mutation consonnantique du haut allemand qui a élargi la ligne de partage géographique constituée par les chaînes de montagnes des Sudètes jusqu’au Taunus, jusqu’à en faire une véritable faille traversant toute l’Allemagne.

    Mais, deuxièmement, l’histoire se fait de telle façon que le résultat final se dégage toujours des conflits d’un grand nombre de volontés individuelles, dont chacune à son tour est faite telle qu’elle est par une foule de conditions particulières d’existence ; il y a donc là d’innombrables forces qui se contrecarrent mutuellement, un groupe infini de parallélogrammes de forces, d’où ressort une résultante – l’événement historique – qui peut être regardée elle-même, à son tour, comme le produit d’une force agissant comme un tout, de façon inconsciente et aveugle. Car, ce que veut chaque individu est empêché par chaque autre et ce qui s’en dégage est quelque chose que personne n’a voulu. C’est ainsi que l’histoire jusqu’à nos jours se déroule à la façon d’un processus de la nature et est soumise aussi, en substance, aux mêmes lois de mouvement qu’elle. Mais de ce que les diverses volontés – dont chacune veut ce à quoi la poussent sa constitution physique et les circonstances extérieures, économiques en dernière instance (ou ses propres circonstances personnelles ou les circonstances sociales générales) – n’arrivent pas à ce qu’elles veulent, mais se fondent en une moyenne générale, en une résultante commune, on n’a pas le droit de conclure qu’elles sont égales à zéro. Au contraire, chacune contribue à la résultante et, à ce titre, est incluse en elle. Je voudrais, en outre, vous prier d’étudier cette théorie aux sources originales et non point de seconde main, c’est vraiment beaucoup plus facile. Marx a rarement écrit quelque chose où elle ne joue son rôle. Mais, en particulier, Le 18 Brumaire de Louis Bonaparte est un exemple tout à fait excellent de son application. Dans Le Capital, on y renvoie souvent. Ensuite, je me permets de vous renvoyer également à mes ouvrages Monsieur E. Dühring bouleverse la science et Ludwig Feuerbach et la fin de la philosophie classique allemande, où j’ai donné l’exposé le plus détaillé du matérialisme historique qui existe à ma connaissance. C’est Marx et moi-même, partiellement, qui devons porter la responsabilité du fait que, parfois, les jeunes donnent plus de poids qu’il ne lui est dû au côté économique. Face à nos adversaires, il nous fallait souligner le principe essentiel nié par eux, et alors nous ne trouvions pas toujours le temps, le lieu, ni l’occasion de donner leur place aux autres facteurs qui participent à l’action réciproque. Mais dès qu’il s’agissait de présenter une tranche d’histoire, c’est-à-dire de passer à l’application pratique, la chose changeait et il n’y avait pas d’erreur possible. Mais, malheureusement, il n’arrive que trop fréquemment que l’on croie avoir parfaitement compris une nouvelle théorie et pouvoir la manier sans difficulté, dès qu’on s’en est approprié les principes essentiels, et cela n’est pas toujours exact. Je ne puis tenir quitte de ce reproche plus d’un de nos récents “ marxistes ”, et il faut dire aussi qu’on a fait des choses singulières. »

    Lettre de F. Engels à Joseph Bloch, 21-22 septembre 1890

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