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Editorial 21-10-2010 - Où mène la stratégie d’usure ... de l’énergie des salariés et des jeunes en colère ? A la défaite !

jeudi 21 octobre 2010, par Robert Paris

Où mène la stratégie d’usure ... de l’énergie des salariés et des jeunes en colère ? A la défaite !

Les centrales syndicales, grands stratèges de la défaite
Les centrales syndicales et partis de gauche (même extrême) tiennent tous le même discours, voulant nous faire croire qu’en continuant la même stratégie, il suffit d’être nombreux, il suffit de tenir, il suffit de bloquer plus et plus longtemps : les terminaux pétroliers ou les aéroports ou les routes. Mais c’est faux !

Et d’abord la détermination des centrales est factice. Elles ont ensemble montré à nos adversaires qu’elles ne comptaient pas du tout les mettre en cause sur le fond. Par exemple, en tenant aux salariés le discours selon lequel il fallait se mobiliser sans trop en payer les conséquences : pas d’appel à la grève générale dans le secteur privé. Au contraire, elles ont affirmé qu’il suffisait de se manifester nombreux et de mener la lutte des chiffres du nombre de manifestants. Mais elles n’ont pas fait que cela pour dégonfler la lutte. On a pu entendre Le Reste, dirigeant de la CGT cheminots, se répandant sur les ondes pour dire qu’il comprenait que les cheminots soient fatigués par la grève et qu’il fallait recourir à la grève de 59 minutes qui ne coûte que une heure sur la paie.

On a entendu les leaders syndicaux expliquer que les travailleurs devaient ménager leurs forces et seulement tenir pour des journées d’action et que cela devait suffire pour contraindre Sarkozy à négocier. Mais que veut dire cette demande de négocier ? Pour des centrales qui prétendent en même temps que les soixante ans ne sont pas négociables et un gouvernement qui affirme que 62 ans ne sont pas négociables ? Eh bien cet appel à négocier, propre à toutes les centrales de l’intersyndicale, est un message clair pour les classes dirigeantes : elles ne veulent nullement mener la lutte à une attaque contre nos vrais adversaires.

Les centrales syndicales ont accompagné le mouvement pour ne pas se laisser déborder mais elles n’ont fait qu’user l’énergie et la colère des travailleurs au lieu de développer une perspective permettant de gagner.

L’adversaire, c’est la classe capitaliste !

Et le premier point sur lequel elles ont pesé sans que les travailleurs mobilisés ne relèvent la tromperie, c’est en donnant comme seul adversaire Sarkozy alors que le donneur d’ordre est directement le grand patronat. C’est pourtant ce dernier qu’il fallait attaquer et dénoncer. C’est lui qui va bénéficier de l’argent économisé sur notre dos. C’est lui qui profitera des retraites privées par capitalisation. C’est lui qui a besoin que la classe ouvrière soit découragée de lutter afin de mener de nouvelles attaques comme le font actuellement les gouvernants européens, grecs comme anglais ou espagnols. Sarkozy n’est pas le seul à attaquer les travailleurs. L’attaque est générale et liée à la crise du capitalisme et pas aux lubies d’un seul président. L’attaque ne va pas s’arrêter aux retraites. Si nous perdons, le gouvernement des capitalistes continuera dans d’autres domaines à attaquer les emplois, publics et privés, les salaires, les contrats de travail, la sécu, la santé, les services publics,… Et ces attaques n’auront pas d’autre fin que celle que nous, travailleurs, sauront y mettre. C’est cela l’enjeu réel de la situation : c’est ou nous ou les grands capitalistes. Sarkozy n’est qu’un pion dans ce jeu, un pion qui peut sauter sans que cela change grand-chose. Présenter Sarkozy comme le seul bouchon de la situation, à faire sauter en priorité, ne sert que des politiciens intéressés par le poste mais qui ne visent qu’à le remplacer à la tête d’un Etat au service du grand capital. Et qui le reste que ce soient l’UMP ou le PS qui gouverne.

Une attaque qui en prépare d’autres...

L’attaque contre les retraites et les autres acquis des salariés a lieu au niveau de toute l’Europe et même du monde. Elle est liée à l’effondrement du système mondial. Notre lutte, pour être efficace, se doit aussi de répondre à cette échelle. Il fallait que la mobilisation en France fasse peur aux classes dirigeantes du monde. Et, pour cela, que les travailleurs français s’adressent publiquement aux travailleurs espagnols, anglais, islandais ou américains. Nous sommes une seule et même classe, la plus grande force sociale sur cette planète. Mettons cette force en ordre de bataille en construisant partout nos organisations de lutte : comités, collectifs, coordinations, assemblées nationales du peuple travailleur. L’action n’a de prix que si elle découle de l’organisation des travailleurs et du développement d’une conscience des perspectives de la société. Là, et là seulement, les classes dirigeantes peuvent craindre la situation sociale. Pour le moment, ces classes dirigeantes ont beaucoup plus à perdre si Sarkozy recule que si les aéroports ou les terminaux pétroliers, ou les transports sont bloqués.

S’organiser en tant que classe pour s’en prendre au pouvoir du capital sur toute la société

S’en tenir au seul problème des retraites est aussi un piège. On voit bien, par exemple, que les jeunes sont dans la rue sur la question de l’emploi. Nous aussi nous avons besoin de lutter pour l’emploi, pour les salaires, pour les services publics. Il s’agit d’une seule et même lutte contre le capital.

Préparer l’avenir, c’est nous réunir dans nos entreprises et nos quartiers pour débattre de l’état de la société et des moyens d’y faire face. Et cela sans attendre les nouvelles attaques de la crise. C’est débattre aussi de nos revendications, de nos objectifs et de nos moyens d’action. C’est non seulement nous lier entre travailleurs du public et du privé mais également chercher les moyens de nous lier, par un programme s’adressant à eux, aux paysans pauvres, aux petits pêcheurs, aux petits épargnants, aux retraités, aux jeunes, à tous ceux qui, dans les milieux populaires, sont ou vont être frappés par la crise. Pour leur dire, bien entendu, que nous sommes de leur côté dans la crise et qu’ils n’ont pas besoin de se tourner, pour se défendre, du côté des gros paysans, des grandes exploitations et des capitalistes qui ne craindront jamais de les couler. Et surtout pour leur montrer qu’ils n’ont aucune raison de se détourner de la classe ouvrière qui leur est présentée comme égoïste et corporatiste. Le gouvernement n’a eu de cesse de tenir ce discours à propos des cheminots ou des enseignants-chercheurs et des fonctionnaires en général. Cela a été le cas sur la question des retraites où il présente ses attaques comme une égalisation entre privé et public pour mieux diviser… Les salariés sont souvent présentés comme des privilégiés aux classes moyennes et, si la crise s’aggrave, celles-ci vont être gravement ponctionnées et les travailleurs présentés comme la cause de ces sacrifices. Non, ceux qui sont privilégiés, ce sont les capitalistes qui gagnent des millions par mois, les banques qui jouent des milliards par jour, sans parler des hauts fonctionnaires du gouvernement qui se servent au passage…

Si ces partis et ces syndicats sont en train, par leur stratégie, de gagner du crédit en faisant croire qu’ils mènent la lutte comme elle le devrait, les travailleurs peuvent perdre le leur en tant que force sociale. Et, en période de crise du système capitaliste, cela peut avoir des conséquences catastrophiques ! les classes moyennes qui vont être paupérisées pourront se jeter dans les bras de nouveaux "sauveurs"...

L’enjeu c’est la vie sociale tout entière. C’est Capital contre Travail. Et pas gauche contre droite. Pas non plus ceux qui veulent réformer et négocier contre ceux qui veulent imposer sans discuter… Discuter, c’est assembler les poules autour du renard qui veut les manger ! C’est l’avenir de la société humaine qui est en cause… C’est socialisme contre barbarie. Les classes dirigeantes ne s’arrêteront pas à un ou deux sacrifices pour les salariés. La crise mondiale de 1929 a montré qu’elles sont prêtes à jeter les peuples dans la barbarie guerrière et fasciste, parce que, si elles ne le faisaient pas, leur pouvoir sur toute la société serait menacé. Certes, aujourd’hui, les travailleurs ne se voient pas renverser le grand capital. Eh bien, c’est seulement si les travailleurs commençaient à en menacer qu’ils pourraient se faire respecter et faire reculer leurs adversaires.

Ce qu’il faut frapper, ce n’est pas l’approvisionnement en pétrole, mais le droit au pouvoir du grand capital !

NE PAS SÉPARER LA LUTTE DES RETRAITES DE CELLE DES ENTREPRISES QUI LICENCIENT

NE PLUS LAISSER LES CENTRALES SYNDICALES PARTICIPER A DES NÉGOCIATIONS DE TROMPERIE

NE PAS DIVISER SALARIES FRANÇAIS ET ÉTRANGERS, AVEC OU SANS PAPIERS

S’EN PRENDRE A NOTRE VRAI ENNEMI : LE GRAND CAPITAL

UNISSONS-NOUS AUX TRAVAILLEURS DU MONDE...

ET, SURTOUT, ORGANISONS NOUS NOUS-MÊMES !!!

Grèves à la SNCF : des votes à bulletin secret, l’arme anti-radicalisation ?

Pour éviter une radicalisation du mouvement contre la réforme des retraites, la CGT-Cheminots a donné des consignes pour favoriser le vote à bulletin secret en AG, selon Les Echos.

"Une rupture forte avec les habitudes de la CGT-cheminots, qui préfère généralement le vote à main levée dont l’effet d’entraînement est bien connu", explique le quotidien.

Objectif : éviter que la mobilisation débouche sur des grèves reconductibles et du coup, mette à mal l’unité syndicale. Car les syndicats ne sont pas tous pour un durcissement du mouvement. C’est notamment le cas de la CFDT.

Autre motif de cette prudence : la CGT-Cheminots souhaite trouver une sortie honorable au bras de fer avec le gouvernement en négociant au maximum.

Prétexte : ne pas trop pénaliser les salariés, qui ont vu leur salaire baisser avec les précédentes journées de manifs.

« Le gouvernement se montre intransigeant et beaucoup d’agents estiment que le vrai rendez-vous réside dans les élections présidentielles de 2012 », juge un syndicaliste de la RATP.
Jean-Claude Mailly, secrétaire général de Force Ouvrière, n’a pas exclu mardi le recours à des votes à bulletin secret pour consulter les salariés sur le choix de reconduire ou pas la grève contre la réforme des retraites.

"Cela ne me choque pas du tout que ce soit un vote à bulletin secret", a-t-il répondu sur Europe 1 à une question sur le fait que, selon des informations de presse, la CGT envisagerait de privilégier le vote à bulletin secret.

"Aucune organisation syndicale n’a appelé à la grève générale, parce que cela ne se décrète pas, on n’est pas dans un scénario", a-t-il enchaîné.

Les Echos affirment mardi que la CGT a donné des consignes pour "favoriser le vote à bulletins secret en assemblée générale, afin d’éviter une trop grande radicalisation".

Selon M. Mailly, "les préavis reconductibles, cela veut dire que tous les jours, dans les différents endroits, les salariés, avec leurs syndicats, dans l’unité d’action, vont poser la question : est ce qu’on reconduit ou pas ?"

Ouest France écrit :

¯ CFDT, CGC, Unsa ¯ estiment qu’au terme du vote au Sénat, force doit rester à la loi, au politique. Le hic, c’est que la CGT, qui donne le « la » de la musique protestataire, entretient une ambiguïté troublante. Depuis le début de la mobilisation, elle a plutôt assumé son rôle de leader avec esprit de modération et de responsabilité, ne refusant pas, a priori, l’idée d’une réforme, rejetant la grève générale. Renoue-t-elle avec ses vieux démons de syndicat radical ou cherche-t-elle, de façon plus opportuniste, à jouer double jeu ? À être à la fois modérée ¯ pour marquer la CFDT ¯ et radicale pour contrer Sud et ses alliés ?
Le jeu est dangereux mais, d’expérience, Bernard Thibault le sait et les résultats aux élections professionnelles le prouvent : il peut être gagnant.

Pour Sud-Rail, le vote à mains levées est aussi démocratique que le vote à bulletins secrets. Cette dernière modalité « est souvent utilisée quand il y a des tensions, des indécisions, par exemple quand on en est à des décisions de reprise du travail », selon Alain Cambi, secrétaire fédéral.

Toute idée d’éviter la radicalisation du mouvement est écartée. Au contraire, c’est surtout pour empêcher qu’elle soit l’oeuvre d’une « minorité de blocage », se justifie auprès de 20minutes.fr Jean Grosset, secrétaire général adjoint de l’Unsa. « Les bulletins secrets, cela peut permettre d’éviter la manipulation par des éléments extrémistes, le basculement des AG par une minorité », confirme Marc Baucher, secrétaire général de l’Unsa-cheminots. « Si les salariés votent la reconduction des grèves en majorité, ce n’est que plus efficace », renchérit Jean Grosset.

Un nouveau virage pris par les syndicats

En général, le vote à bulletins secrets est « vilipendé à l’intérieur des syndicats », estime pourtant l’historien Stéphane Sirot, contacté par 20minutes.fr. « Quand on l’utilise, c’est qu’on vise l’apaisement, la modération, qu’on veut contourner la difficulté », précise-t-il. D’après ce spécialiste des mouvements sociaux, cette décision démontre un nouveau virage pris pas les syndicats : « Ils agissent en fonction de l’image qu’ils peuvent donner et craignent de prêter le flanc à la critique, au discours de la manipulation que l’on entend notamment à l’égard des jeunes. »

Les as de la négociation

Bernard Thibault : "il faut négocier avec les syndicats" sur les retraites, écrit TF1 News.
Bernard Thibault a appelé à nouveau le chef de l’Etat à négocier, en lui reprochant d’être "dans une démarche électoraliste" en vue de la présidentielle de 2012.

"Soyez raisonnable, acceptez les discussions avec les syndicats, ne vous enfermez pas de ce choix unilatéral", a-t-il lancé à l’adresse de Nicolas Sarkozy.

François Chérèque, secrétaire général de la CFDT, a lancé pour sa part un appel au calme et à "ne pas céder aux provocations".
François Chérèque, secrétaire général de la CFDT, a accusé le gouvernement d’avoir "radicalisé le pays" ;

Selon le leader de la CFDT, "il faut que le gouvernement ait la responsabilité au dernier moment de suspendre le débat parlementaire et de nous permettre d’ouvrir le dialogue".
Le PS appelle à négocier - Jérôme Cahuzac, président de la Commission des Finances à l’Assemblée, demande au gouvernement de négocier écrit l’AFP. Interrogé sur France Inter, Manuel Valls a jugé "inévitable" l’allongement de la durée de cotisation "quand nous [le PS] remettrons sur la table la réforme" en 2012, estimant que "raconter le contraire [était] une faute politique". "Dans ce moment de doute et de rejet politique qui peut aussi gagner en France (...), le langage de vérité, la crédibilité sont indispensables", a-t-il ajouté. Il s’est dit favorable à "une nouvelle négociation mais pas uniquement sur l’allongement de la durée de cotisation ou l’âge légal de la retraite", visant à une réforme "profonde", une retraite "à la carte".

Le premier syndicat de la SNCF, la CGT a "livré aux assemblées générales des éléments sur des modalités de grève qui permettent de tenir et d’élargir le mouvement, comme des arrêts de travail de 59 minutes par jour", a indiqué à l’AFP le responsable du syndicat Bernard Guidou.

Et lors des "temps forts", c’est-à-dire les journées d’action interprofessionnelles, "les cheminots peuvent à nouveau faire grève 24 heures", a-t-il ajouté. Une nouvelle journée nationale d’action pourrait être décidée jeudi après-midi par les centrales syndicales.
Par un vote du 3 septembre 2010, les députés ont rejeté à la
quasi-unanimité l’amendement n°249 Rect. proposant d’aligner leur régime spécifique de retraite (dont bénéficient également les membres du
gouvernement) sur le régime général des salariés.
Alors qu’ils n’ont de cesse d’expliquer l’importance de réformer
rapidement un régime de retraite en déficit, les parlementaires refusent
donc d’être soumis au régime de retraite de la majorité des Français.
C’est ce qu’ils appellent une réforme "juste" paraît-il !

Messages

  • L’intersyndicale claironne : "Les journées d’action n’ont rien donné et donc nous allons vous redonner des journées d’action." !!!!!!

    • Voilà ce que pense la fraction du mouvement en cours. Il s’agit d’une prise de position publiée dans le dernier numéro de convergences.

      Les directions syndicales iront-elles jusqu’au bout ?

      Mis en ligne le 18 octobre 2010

      Après le 24 juin 2010, lorsque l’intersyndicale avait annoncé une nouvelle journée d’action pour le 7 septembre, nombreux furent les militants – et pas seulement d’extrême-gauche – à se dire : « c’est fini » ! Il faut dire que la date choisie était tout à la fois éloignée de celle du 24 juin et très proche de la rentrée de septembre, ne laissant guère de temps pour préparer la mobilisation. Il faut dire encore que l’intersyndicale avait montré l’année précédente sa capacité à user un mouvement puissant en se réunissant… des jours après chaque manifestation pour appeler à une nouvelle journée des semaines plus tard – le comble ayant été atteint le 19 mars 2009 pour un appel à prolonger l’action… le premier mai !

      Le 7 septembre dernier, la mobilisation a été au rendez-vous. L’intersyndicale se réunissait le lendemain et décidait d’une nouvelle journée de grève et manifestation pour le 23. Le 24, elle appelait à deux nouvelles journées : l’une le samedi 2 octobre, l’autre le mardi 12 octobre. Et, avant même cette journée, l’intersyndicale se réunissait le 8 octobre et annonçait une nouvelle journée de manifestations le samedi 16 et une nouvelle rencontre de l’intersyndicale le 14 qui a annoncé une nouvelle journée trois jours plus tard, le mardi 19.

      Au succès de chaque journée, l’intersyndicale a répondu rapidement ; chaque appel a été mis en perspective avec les suites. De fait, la mobilisation n’a cessé de s’élargir, de gagner dans l’opinion, et même de s’élargir avec des grèves reconductibles à la SNCF, l’entrée des lycéens dans la rue ou le blocage des raffineries. Même les querelles sur le nombre des manifestants sont significatives de la volonté des syndicats de présenter un mouvement qui va s’amplifiant. Rappelons tout de même que ce n’est pas toujours le cas : tous les participants à la grande manifestation nationale du 25 mai 2003 contre la loi Fillon sur les retraites se souviennent que le nombre de manifestants était passé, dans les déclarations de la CGT, en une demi-journée, de 1 300 000 manifestants à 300 000… Minorer annonçait l’intention d’arrêter, ce que Thibault a fait quelques jours plus tard dans un meeting à Marseille.

      Alors, pour qui n’a pas la foi du charbonnier et ne croit pas à une brusque rédemption des confédérations syndicales, il importe de se demander jusqu’où les syndicats sont prêts à aller et sur quoi ils sont susceptibles de se défausser par rapport aux aspirations qui s’expriment dans le monde du travail.

      Les raisons des directions syndicales et des partis de gauche
      Après avoir, un temps, laissé entendre qu’elle acceptait le passage à 62 ans de l’âge légal de départ à la retraite, Martine Aubry est revenue en arrière et a réaffirmé l’attachement du Parti Socialiste au maintien à 60 ans. Sans cependant revenir sur les mesures Balladur de 1993 et Fillon de 2003 allongeant la durée de cotisation d’une façon telle qu’il est impossible à un salarié de partir avec une retraite à taux plein à 60 ans !

      Puis, à l’approche et au lendemain du 7 septembre, tous les dirigeants du PS ont affirmé que la gauche victorieuse en 2012 annulerait la réforme en cours… ce qui, en passant, était sous-entendre que la mobilisation qui commençait avait peu de chance de mettre le gouvernement en échec. Pourtant la gauche du PS – Benoît Hamon, Henri Emmanuelli – insistait sur la possibilité de faire reculer le gouvernement tout de suite. Même son de cloche au Parti Communiste. Et, surtout, les dirigeants syndicaux décidaient de poursuivre et tenter d’élargir la mobilisation.

      Un échec du gouvernement sur la question des retraites nuirait plus au gouvernement qu’à la bourgeoisie. Sarkozy en sortirait affaibli et serait donc en mauvaise posture pour les élections de 2012. Et le maintien et la poursuite de l’allongement de la durée de cotisation suffisent largement à faire payer les salariés. Sans compter que le retour du PS ne garantit nullement contre le recul de l’âge de la retraite à 62 ans. Celui-ci n’est-il pas soutenu par le FMI… dirigé par un des principaux responsables du PS, Strauss-Kahn ? Les prises de positions du PS ne sont donc pas forcément dictées par les seules préoccupations des travailleurs.

      À ces raisons s’en ajoutent d’autres, propres aux appareils syndicaux. Ayant accompagné tous les reculs qu’ont connu les travailleurs ces dernières décennies, la position des syndicats face au gouvernement et au patronat s’est affaiblie, ces derniers refusant de compenser leur perte d’influence par des avantages institutionnels donnés aux appareils. Le gouvernement ne cherche même pas à maintenir l’illusion de négociations. D’autre part, un ancien dirigeant du CNPF (l’ancêtre du Medef), Yvon Gattaz, est allé jusqu’à remettre en cause l’existence des syndicats : « De façon sociétale, les syndicats ont été nécessaires au XIXe siècle, utiles puis abusifs au XXe. Inutiles et nuisibles au XXIe, ils doivent disparaître », a-t-il écrit dans la revue Commentaire. La citation a fait un tabac à la récente université du Medef. Les appareils syndicaux ont donc tout intérêt à tenter d’utiliser la mobilisation sur les retraites pour rappeler qu’il faut toujours compter avec eux.

      Jusqu’où peuvent-elles aller ?
      Rien ne s’oppose à ce qu’elles aillent jusqu’au retrait du projet de loi. Y compris s’il faut multiplier les grèves pour cela. Ce ne serait pas la première fois qu’elles déclencheraient un bras de fer. Cela étant, les directions confédérales envoient des signaux nuancés, quant ce n’est pas contradictoires.

      Après avoir fait un appel du pied à la majorité du Sénat sur la question du report de l’âge de la retraite à taux plein, de 65 à 67 ans, Chérèque, le dirigeant de la CFDT, s’est directement adressé au gouvernement, lui demandant de reporter le vote de cette partie du projet à 2013. Le gouvernement lui a opposé une fin de non-recevoir… préservant ainsi le « front » syndical en ne permettant pas à la CFDT d’en sortir.

      La CGT, elle, s’est jusqu’ici montrée plus ferme. Thibault n’a cessé de répéter que sa confédération est prête à « aller jusqu’au bout ». Dans une lettre aux militants CGT, il affirmait : « Nous appelons à généraliser la tenue d’assemblées générales, de consultations sur les lieux de travail pour définir ensemble et démocratiquement les re¬ven¬di¬ca¬tions, le rythme, les formes et les modalités de la reconduction de l’action après le 12 octobre. La CGT l’a affirmé depuis le début, nous irons jusqu’au bout dans ce combat. (…) Cette démarche démocratique est déjà engagée dans certaines branches professionnelles, certaines entreprises où la grève est déjà une réalité depuis plusieurs jours à propos de l’avenir des retraites et des revendications salariales et d’emploi. »

      Et effectivement à l’approche du 12 octobre la CGT martelait que le mouvement devait entrer dans une nouvelle phase, laissait planer les mots de grèves reconductibles ou illimitée tout en répétant que les décisions devaient être prises localement. La presse relevait les préavis déposés par la CGT de la RATP et de la SNCF, concluant un peu hâtivement que les syndicats concernés appelaient à la grève illimitée. Le site de la CGT RATP précisait très vite : « Contrairement à ce qui a été trop rapidement affirmé, la CGT/RATP n’appelle pas à une « grève illimitée », mais expliquait aussi que le syndicat n’avait simplement pas spécifié de date de fin de grève pour assurer toutes les possibilités légales. Et d’autres appels étaient plus précis, comme celui de l’Union départementale CGT des Bouches-du-Rhône : « Le 12 octobre, à l’appel de l’ensemble des Organisations Syndicales, soyons massivement en grève et dans la rue pour faire reculer le gouvernement et le Medef. Et dès le 13, si le gouvernement s’obstine à passer en force, il nous obligera à reconduire la grève pour le contraindre à reculer. »

      « La CGT veut miser sur l’accélération des manifestations intersyndicales. Elle exclut un appel national à des grèves reconductibles, mais laisse le soin à ses troupes de se lancer localement. », expliquait un journaliste des Échos. C’était assez bien résumer l’attitude des confédérations syndicales, en tout cas de la CGT. Elles peuvent parfaitement laisser se développer des grèves dans différents secteurs, tant qu’elles contrôlent la situation. Une vitesse mesurée et même une certaine accélération, mais le pied prêt à peser sur la pédale du frein. Les formes de mobilisation proposées depuis un mois et demi par les dirigeants syndicaux ayant jusqu’ici parfaitement répondu aux attentes des salariés, ils sont solidement installés aux commandes, renforcés même encore ces derniers jours. Ils devraient se sentir en position de pouvoir clamer : « On a gagné ! ». Le problème est : gagné quoi ?

      Des objectifs flous, qui diffèrent d’un syndicat à l’autre
      Entre la CFDT qui a fait comprendre qu’elle se contenterait de la renonciation au passage de 65 à 67 ans pour une retraite à taux plein et FO qui réclame un retrait pur et simple du projet, voire Sud-Solidaires dont les équipes les plus militantes sont en pointe dans le mouvement et réclament le retour aux 37,5 années de cotisations, la CGT occupe une position médiane, dénonçant absolument tous les aspects de la réforme du gouvernement – ce qui devrait l’amener à se prononcer pour un retrait pur et simple. Elle ne le fait pourtant pas, s’abritant derrière le fait que la CFDT ne voudrait pas et qu’il faut préserver l’unité syndicale. Car finalement ce qu’elle met en avant c’est, comme les autres, l’ouverture de négociation pour « une réforme juste ».

      Certes, la CGT insiste trop sur le maintien à 60 ans de l’âge légal de la retraite pour pouvoir, demain, claironner « on a gagné » si le gouvernement maintient le passage à 62 ans. Mais même si, comme le réclame FO, le gouvernement se voyait contraint de retirer piteusement l’ensemble de sa réforme, comme de Villepin l’avait fait du CPE, que négocieraient les syndicats ?

      En réalité, les dirigeants syndicaux ne disent pas un mot de ce sur quoi ils veulent faire porter les négociations. Cela permettra peut-être à chacun de proclamer « on a gagné » même si cela diffère d’un syndicat à l’autre. Mais c’est là que le bât blesse. Car, si la mobilisation, le mouvement gréviste prenaient une telle ampleur qu’ils contraignaient le gouvernement à manger son chapeau, ne serait-ce pas le moment de réclamer l’abrogation des réformes Balladur de 1993 – sur le mode de calcul des pensions et le nombre d’annuités nécessaire pour une retraite à taux plein pour les travailleurs du secteur privé – et Fillon de 2003 – sur la généralisation à tous les salariés de l’augmentation du nombre d’annuités ? De réclamer le retour à l’indexation des pensions sur les salaires et non sur l’indice des prix ? Et, au-delà, de mettre sur le tapis l’ensemble des problèmes qui pourrissent la vie des travailleurs : bas niveau des salaires, généralisation du travail précaire, chômage massif ?

      En guise de conclusion provisoire
      Pour l’instant en tout cas, les confédérations syndicales, particulièrement la CGT, ont fait ce qu’il fallait. En veillant sans doute à tenir la situation bien en main et en évitant de donner l’objectif d’une grève générale avec l’excuse que celle-ci ne se déclenche pas sur un simple appel des confédérations, ce qui est vrai, même si elles étaient plus respectées et considérées par les travailleurs. Et, pour l’instant toujours, les travailleurs ont suivi. Elles peuvent demain maintenir le feu vert à la multiplication des grèves, y compris reconductibles, dans les entreprises ou les secteurs les plus déterminés, surtout si elles restent minoritaires, comme elles le sont au moment où nous écrivons, et surtout si ces entreprises et ces secteurs ne cherchent pas à faire la jonction entre eux, puis en entraîner d’autres, pour au final établir une organisation de la mobilisation qui émanerait de la base et davantage contrôlée par elle.

      Établir ces liaisons, ce réseau, cette organisation à travers les mobilisations telles qu’elles sont programmées et impulsés par les appareils serait d’ailleurs la première tâche de l’heure, plutôt que dénoncer on se sait quels retards pris par les confédérations dans cette mobilisation, alors que, à juste titre, ce n’est pas le sentiment des travailleurs contrairement à 2009 ou 2003.

      Par contre, il importe de clarifier les objectifs, de permettre aux travailleurs de s’exprimer non seulement sur les modalités d’action – comme les y invite toute l’intersyndicale – mais aussi sur le contenu des revendications, sur ce qui sera mis en avant dans les éventuelles négociations. Ce n’est que si chacun sait exactement pour quoi il se bat que personne ne pourra faire prendre pour une victoire de nouveaux sacrifices demandés au nom de la nécessité de la réforme.

      16 octobre 2010

      Jean-Jacques FRANQUIER

  • Certains lecteurs nous disent : il faut être favorables aux manifestations, aux grèves, aux blocages, à la perspective de la grève générale.

    Ce n’est pas si simple. Aucun moyen d’action n’est bon en soi. Quand l’heure est à la révolution, la grève est un atermoiement. Quand l’heure est à la prise du pouvoir, le contrôle est en retard sur les événements. Et quand l’heure est à la grève, la pétition est hors de propos.

    Ce n’est pas tout. Il faut d’abord poser la question des intentions des classes dirigeantes et leurs objectifs dans la situation.

    Il faut aussi dire aux travailleurs ce que nous semblent permettre le rapport des forces.

    Une fois cela établi, il faut se poser la question si les organisations qui dirigent la lutte renforcent la classe ouvrière ou l’affaiblissent, accroissent en somme sa conscience et son organisation ou la diluent.

    Du coup, toute forme de lutte, si elle est dirigée par les ennemis du prolétariat, peut ne servir à rien, ou servir contre les travailleurs en lutte, les discréditer aux yeux des classes dirigeantes à faire reculer et à battre, des classes moyennes à impressionner et à attirer, et aux yeux des travailleurs eux-mêmes.

    Même une révolution n’a aucun rôle positif si elle est dirigée par les ennemis de la révolution.

    Il n’y a pas d’astuce, de manoeuvre possible dans ce domaine. Ce n’est pas les minorités d’extrême gauche qui manipulent les directions syndicales. Si elles croient pousser celles-ci, cela ne mènera non plus à rien de positif car ces directions discréditent tout : la grève, la grève générale, les assemblées générales et la classe elle-même.

    Pousser les directions syndicales, c’est aussi efficace que de compter sur des politiciens bourgeois, c’est comme traire un bouc...

  • SOLIDARITÉ INTERNATIONALE AVEC LES GRÈVES EN FRANCE

    Tout notre appui à la lutte des travailleurs et de la jeunesse française

    Retrait immédiat du projet contre les retraites !

    Le dernier mois, à 6 reprises, des millions de travailleurs français sont descendus dans les rues dans des manifestations contre le projet de remise en cause des retraites du gouvernement Sarkozy. Dans les manifestations de la dernière semaine, la jeunesse avec les organisations étudiantes s’est jointe aux mobilisations et grèves dans toute la France ; comme plusieurs secteurs de la classe des travailleurs , comme ceux des raffineries, ils cherchent à aider par leur exemple le comment garantir la défaite de Sarkozy et de son projet en paralysant tout le pays.

    L’attaque de Sarkozy contre les travailleurs français est l’expression de la politique des gouvernements capitalistes du monde entier qui consiste à faire retomber sur le dos des travailleurs et de la jeunesse les coûts de la crise économique impérialiste.

    La crise qui surgit en 2008, ayant comme centre les États-Unis, s’exprime maintenant de manière brutale dans tout le continent européen. Dans tous les pays d’Europe, la politique dictée par l’ Union Européenne représente une attaque contre les travailleurs et leurs droits sociaux et du travail conquis au cours de décades de lutte. La Grèce, l’ Espagne, le Portugal, la France, l’ Angleterre, l’ Italie , les pays de l’ Est européens ont déjà annoncé des mesures avec leurs particularités, mais qui vont toutes dans le même sens : des milliards d’euros dégagés par les gouvernements en faveur des banques et les grandes entreprises seront payés avec les emplois , les salaires et les droits des travailleurs.

    Les travailleurs ont démontré leur disposition à la lutte : le premier semestre les grèves générales du peuple grec montrèrent le chemin de la lutte, de la résistance. Des manifestations et grèves ont eu lieu dans plusieurs pays. En ce moment le centre de la résistance est en France avec les mobilisations de millions et des grèves qui pointent vers la nécessité d’arrêter tout le pays jusqu’à la défaite du Gouvernement Sarkozy. Notre tâche est d’ entourer de solidarité les mobilisations des travailleurs et de la jeunesse françaises ; et de chercher à construire l’ unité entre tout le processus des luttes et des mobilisations qui se déroulent en ce moment en Europe.

    Les manifestations et grèves ont eu lieu dans plusieurs pays, la Grèce, l’Espagne, le Portugal, la République Tchèque et tant d’autres. L’unité des mobilisations et la solidarité sont le chemin pour renforcer la lutte et en même temps pour combattre la xénophobie et le racisme. Les responsables de la crise ne sont pas les immigrés ou n’importe quel autre secteur de notre classe. Mais au contraire, les grands capitalistes et leurs gouvernements.

    Les attaques contre les salariés, les emplois, les droits sociaux et du travail ont lieu dans le monde entier. La victoire des travailleurs français et européens renforce la lutte et la résistance que nous mènerons dans tous les pays pour que le prix de la crise économique impérialiste soit payée par les banquiers et le grands patronat et non par la jeunesse et les travailleurs.

    Vive le lutte des travailleurs et de la jeunesse française.

    Construire l’ unité et la solidarité internationale des luttes et de la résistance.

    Que les riches payent pour la crise.

    Coordenação Nacional da CSP Conlutas – Brasil

    Sarzedo – Minas Gerais

    17 de outubro de 2010

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