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La CGT en France en 1910

samedi 6 juin 2015, par Robert Paris

L’objectif dominant de l’organisation syndicale : la lutte de classe. Et c’est justement parce qu’ils ont ce caractère nettement combatif que les syndicats n’ont pas encore englobé dans leur sein les foules ouvrières dont s’enorgueillissent les organisations d’autres pays. Seulement, ce qu’il faut souligner, c’est que ces foules vont à ces syndicats attirées surtout par le mirage de la mutualité, tandis qu’en France ces préoccupations sont très secondaires et les travailleurs se syndiquent parce qu’ils sentent — plus ou moins vaguement ou nettement —la nécessité de la résistance au patronat.

Ce caractère des syndicats français, les statuts types édités par la Confédération générale du Travail le formulent en la suivante déclaration préalable :

« Considérant que par sa seule puissance le travailleur ne peut espérer réduire l’exploitation dont il est victime ;

Que, d’autre part, ce serait s’illusionner que d’attendre notre émancipation des gouvernants, car — à les supposer animés des meilleures intentions à notre égard — ils ne peuvent rien de définitif, attendu que l’amélioration de notre sort est en raison directe de la décroissance de la puissance gouvernementale ;

Considérant que, de par les effets de l’industrie moderne et de l’appui « logique » que procure le pouvoir aux détenteurs de la propriété et des instruments de production, il y a antagonisme permanent entre le Capital et le Travail ;

Que, de ce fait, deux classes bien distinctes et irréconciliables sont en présence : d’un côté, ceux qui détiennent le Capital, de l’autre les Producteurs qui sont les créateurs de toutes les richesses, puisque le Capital ne se constitue que par un prélèvement effectué au détriment du Travail ;

Pour ces raisons, les prolétaires doivent donc se faire un devoir de mettre en application l’axiome de l’Internationale : « L’ÉMANCIPATION DES TRAVAILLEURS NE PEUT ÊTRE QUE L’ŒUVRE DES TRAVAILLEURS EUX-MEMES » ;

Considérant que, pour atteindre ce but, de toutes les formes de groupement le syndicat est la meilleure, attendu qu’il est un groupement d’intérêts coalisant les exploités devant l’ennemi commun : le capitaliste ; que par cela même il rallie dans son sein tous les producteurs de quelque opinion ou conception philosophique, politique ou religieuse qu’ils se réclament ;

Considérant également que si le syndicat se cantonnait dans un isolement regrettable, il commettrait fatalement (toutes proportions gardées) la même erreur que le travailleur isolé et qu’il manquerait ainsi à la pratique de la solidarité ; il y a donc nécessité que tous les producteurs s’unissent d’abord dans le syndicat et, ce premier acte réalisé, complètent l’œuvre syndicale en faisant adhérer leur syndicat à leur Fédération locale ou Bourse du travail, et par le canal de leur union nationale à la Confédération générale du Travail ;

À cette condition seulement, les travailleurs pourront lutter efficacement contre les oppresseurs jusqu’à la complète disparition du salariat et du patronat. »

Cette déclaration, qui précise l’orientation syndicale, est, en termes plus ou moins explicites, celle dont se réclament la grande majorité des syndicats. En effet, sur les 5 500 syndicats, les plus actifs, les plus vivants — ceux qu’on qualifie de « syndicats rouges »— sont adhérents à la Confédération du Travail. Celle-ci groupe, en fait, dans sa section des fédérations, 2 600 syndicats et, si l’on tient compte qu’à sa section des Bourses du travail sont groupés nombre de syndicats qui ne sont pas affiliés à une Fédération corporative, on constate que plus des deux tiers des syndicats sont confédérés. Outre les syndicats adhérant seulement à leur Fédération corporative et à leur Bourse du travail, le nombre de ceux adhérant seulement à leur Bourse s’élève à la section des Bourses du travail à environ 900. Ces syndicats, ajoutés aux 2 600 affilés aux Fédérations corporatives, donnent un total de 3 500 syndicats confédérés.

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